L'économie informelle dans un contexte de satisfaction des besoins primaires.par Joel KAPOYA BAHATI Université de Lubumbashi - Licence en Economie de développement 2020 |
SECTION 3. CONSIDERATIONS SUR L'ECONOMIE INFORMELLE DANS LE MONDEL'économie informelle est une réalité massive à l'échelle mondiale. Certaines recherches ont montré que la contribution des activités informelles au produit intérieur brut des nations s'élève à plus de 40 % dans les pays en développement, 38 % dans les pays en transition et 17 % dans les pays de l'OCDE. Malgré les difficultés à la mesurer, elle emploie 60 à 70% de la population active en Afrique, 50% en Asie, autour de 35% en Amérique latine, 20 à 30% en Europe de l'Est et 5 à 10% en Europe occidentale et en Amérique du Nord.93(*) Il est vraisemblable que l'appréhension de l'expansion de l'informalité est relative et subjective ; variant d'un pays à un autre, d'une région à une autre et même d'un continent à un autre par rapport aux contextes socio-économiques. Et donc, la considération de l'économie informelle, dans les pays de l'OCDE par exemple, ne peut pas être pareille que dans les pays de l'Afrique subsaharienne. Dans cette section, nous nous proposons de parcourir et survoler de façon concise les considérations de l'informalité dans les pays développés, dans les pays en transition, dans les pays en développement et en République Démocratique du Congo. Puis nous aborderons à la fin de cette section les tentatives de formalisation ou d'intégration des économies informelles. 3.1. L'informel dans les pays développésEn effet, plusieurs études empiriques dans les économies développées ont montré l'existence d'un secteur d'activité de petite échelle évoluant hors du cadre institutionnel. Lautier, cité par Odile Castel, montre que le secteur informel emploie autour de 5 à 10% de la population active en Europe occidentale et en Amérique du nord. Il est donc évident que les motifs liés à l'existence de l'informel sont particuliers et relatifs aux contextes socio-économiques de ces régions. Dans l'UE (Union Européenne) par exemple, depuis les années 1990, plusieurs études ont été menées autour de la question de ces activités entreprises hors du cadre institutionnel. Certes la convergence des politiques macroéconomiques a progressé dans ces pays, mais les caractéristiques structurelles des marchés, les politiques fiscales et sociales et les gouvernances institutionnelles restent différentes. Ainsi, les coûts élevés du travail et les inégalités croissantes des revenus dans plusieurs pays de la région sont autant d'incitations aux activités échappant à la réglementation fiscale et sociale ainsi qu'à l'enregistrement statistique et aux économies informelles ; ce que P. Adair qualifie d' « économie non observée ».94(*) Williams et Nadin, cités par J.P Berrou dans son article intitulé « Entrepreneurs du secteur informel »publié en 2014 ;montrent que dans les pays occidentaux, les entrepreneurs informels, dans leur majorité, sont issus du formel et non des populations marginalisées ou exclues du marché du travail formel. Cependant, ils distinguent les entrepreneurs opérant de manière totale ou partielle dans l'informel ; et constatent que les premiers se retrouvent plus significativement que les seconds.95(*) Dès lors, les enjeux sont donc d'ordre intellectuel, s'agissant d'analyser les comportements économiques des agents et de la quantification des données ; d'ordre fiscal, s'agissant des matières de prélèvements fiscaux étant donné que ces activités constituent des manques à gagner pour l'Etat. Aux États-Unis, l'émergence et l'ampleur que prend l'informalité, comme nous le fait voir Richard D. Vogel dans un article publié au magazine MonthlyReview, introduit des éléments nouveaux dans les comportements habituels d'exploitation. Même si l'économie des Etats-Unis a traditionnellement été nourrie du travail des immigrés, les tendances à la dépendance de la main d'oeuvre immigrées (sans-papiers) sont grandissantes.96(*) A Los Angeles par exemple, l'ONG EconomicRoundableune étude sur le secteur informel ; au bout de cette étude l'ONG propose un regard en profondeur sur l'économie informelle aux Etats-Unis en démontrant que l'informel dans le comté de Los Angeles aurait produit en 2004 8.1 milliards de USD de masse salariale et donc plus de 2 milliard de USD de recettes fiscales et parafiscales97(*). Cette étude a bien démontré que les enjeux de l'informalité dans le comté de Los Angeles aux Etats-Unis devraient faire l'objet d'un regard particulier. Tout compte fait, la question de l'économie informelle est donc tout aussi encombrant qu'embêtant dans les pays développés. * 93Lautier, cité par Odile Castel, Op.cit., p.01. * 94 Adair P. « Économie non observée et emploi informel dans les pays de l'Union européenne. Une comparaison des estimations et des déterminants », Revue économique, vol.60, no. 5, 2009, pp. 1117-1153, p.03. * 95Jean-Philippe Berrou, Entrepreneuriat du secteur informel, in Presses des Sciences Politiques, 2014, pp.227-243, p.07. * 96 R.D. Vogel, Magazine Monthly Review. Vol. 58, num. 3, juillet-août 2006, en ligne www.monthlyreview.org/0706vogel.htm. (Consultée le 18 mars 2020, à 23h50') * 97 Ibidem. |
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