Couplage microfinance et micro assurance pour l’optimisation de la gestion du risque des crédits à Bukavu.par Audace Ntwali Université Libre des Pays des Grands Lacs de Bukavu (ULPGL) - Licence en Sciences économiques et de Gestion - Option : Gestion Financière 2016 |
I.2.5 Micro assurance : une stratégie formelle de gestion du risque en microfinance52(*)Une logique de développement séduisante sous-tend l'offre de produits d'assurance aux ménages à faibles revenus. Il est facile de présenter un produit irrésistible qui permettrait aux pauvres de se prémunir contre des pertes dévastatrices et de réduire la volatilité de leurs revenus, tout en générant des revenus supplémentaires pour les entreprises de microfinance. Actuellement, le secteur de la microfinance abonde en histoires de ce genre, et beaucoup d'EMF se précipitent vers la micro assurance pour satisfaire à la fois leurs besoins institutionnels et ceux des clients. S'il ne fait aucun doute que les ménages pauvres sont fortement vulnérables au risque, et que les EMF ont besoin d'accroître leurs bénéfices, la micro assurance ne représente qu'une solution partielle. C'est également une solution que la plupart des EMF auront du mal à mettre en oeuvre, parce qu'ils n'ont pas encore eu l'occasion de développer les compétences spécialisées et les structures institutionnelles que les assureurs commerciaux ont mises au point pendant des décennies, afin de gérer prudemment les risques. A. Typologie des risques en microfinanceParmi les causes les plus communes d'une chute de leur niveau de vie, les ménages à faibles revenus citent le décès ou l'accident touchant une personne active au sein de la famille, les catastrophes naturelles et le vol. L'exposition à ces risques affecte les ménages de deux manières. Premièrement, les ménages soumis à un tel événement subissent une perte monétaire potentiellement importante, comme le coût de reconstruire un étalage de marché détruit dans un incendie. Deuxièmement, les ménages exposés à un risque souffrent d'une inquiétude permanente en se demandant s'ils vont subir des pertes. Par exemple, si des incendies se produisent souvent sur son marché, un marchand peut ne pas souhaiter agrandir son étalage par crainte de tout perdre dans un incendie avant d'avoir tiré avantage des modifications portées. Avant d'élaborer des solutions de gestion du risque adaptées, il est utile de caractériser les six risques les plus communs selon leur degré d'incertitude (c'est-à-dire, si, quand et avec quelle fréquence le sinistre peut se produire), et l'importance des pertes occasionnées par cet événement. La figure 3.1 représente graphiquement cette première typologie : risques liés aux évènements cycliques, aux biens, à la santé, risques de décès ou d'invalidité et risques généraux/covariants. Chaque type de risque est brièvement défini ci-dessous : @ Les risques liés aux évènements cycliques comprennent les besoins potentiels de payer une dot, des frais scolaires ou d'épargner pour la retraite. Si ces risques ne concernent pas toutes les familles, ils sont cependant fréquents. En outre, tout en étant lourd, leur coût est en général gérable par rapport à la capacité d'une famille à générer des revenus au cours de son existence. L'incertitude associée à ce type de risques est principalement de savoir si les flux de revenus et l'accumulation d'épargne d'une famille donnée coïncident avec le moment où ces dépenses nécessaires surviennent ; @ les risques de décès sont inévitables, mais la date du décès a un niveau d'incertitude plus élevé que pour des évènements cycliques. Les coûts associés peuvent être simultanément ponctuels et faibles (coût des funérailles), permanents et importants (remplacement des revenus) ; @ les risques liés aux biens comprennent les risques de vol, de dommages ou de pertes d'actifs familiaux ou commerciaux. Ce type de risque est bien plus incertain que dans le cas des évènements cycliques ou de décès, parce que le moment et la probabilité de réalisation de l'événement sont tous deux inconnus. Le coût des risques liés aux biens varie en fonction de la valeur des actifs assurés ; @ les risques liés à la santé en raison d'un accident, de maladies ou de blessures dont est victime un membre du ménage varient au niveau du coût, en fonction de la nature de l'évènement. Ces risques peuvent être fréquents, mais le moment de réalisation est difficile à prévoir. Ils sont considérés par les ménages à faible revenu comme générant un degré d'incertitude plus élevé que la plupart des autres risques ; @ les risques d'invalidité, contrairement à l'occurrence sporadique ou ponctuelle des risques liés à la santé, posent un problème continu. Les coûts générés par ce type de risques sont permanents et peuvent impliquer des frais de traitement ainsi qu'une perte de revenu. Si le coût est plus élevé que dans le cas des risques liés à la santé, leur probabilité est plus incertaine ; @ les risques covariants incluent les catastrophes naturelles, les épidémies et d'autres évènements majeurs causant des pertes substantielles et simultanées dans une large part de la population. Si leurs effets sur chaque famille peuvent être placés dans les cinq catégories que nous venons de définir, les risques covariants ont un statut à part en raison de leur caractère fortement imprévisible, du nombre élevé de personnes touchées en même temps, et des pertes souvent multiples occasionnées au sein d'un même ménage. Ce type de risque est rare et en général impossible à prévoir avec précision. Les risques covariants ne sont généralement pas assurables (sauf accès à un système de réassurance ou dans le cas d'un groupe d'assurés géographiquement dispersés). La possibilité d'exposition simultanée à une perte de toute une population d'assurés élimine largement les avantages de la mutualisation du risque. La viabilité financière du plan d'assurance requiert que le total des primes soit égal à la somme des montants consacrés à l'auto-assurance par chaque individu. Si l'on se réfère au tableau 3.1, l'assurance apparaît comme une stratégie de gestion du risque appropriée seulement si le degré d'incertitude et le coût relatif associé au risque ne sont pas extrêmes, dans un sens ou dans l'autre. L'assurance ne permet pas réduire facilement les risques liés aux évènements cycliques à fort degré de certitude et faible coût, ni les risques covariants à faible degré de certitude et coût élevé. Le tableau 3.1 compare les caractéristiques et utilisations potentielles des produits d'assurance, de crédit et d'épargne en tant que stratégies de gestion du risque. * 52L. LHERIAU, Op. cit, pp.260-261 |
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