III-3 Le nationalisme des ressources
Selon Louis (2013), le concept de « nationalisme des
ressources » décrit la tendance d'un gouvernement à
renforcer le contrôle exercé sur les ressources naturelles
situées sur son territoire. En effet, le plus souvent de nature fiscale,
les mesures correspondantes peuvent conduire l'État à prendre une
participation élargie dans son industrie extractive nationale et
à renégocier les conventions d'exploitation. Cela s'apparente
à une politique de contrôle économique, qui n'est pas sans
rappeler la notion de patriotisme économique. Le but étant de
chercher à capter une part plus importante de la valeur ajoutée
en transformant leurs matières premières. Selon la
littérature, le « nationalisme des ressources » s'est
manifesté en même temps que s'imposait le concept d'État
« développementiste ». Ce dernier,
élaboré à partir de l'analyse de la trajectoire de
développement des pays industrialisés asiatiques, repose sur
l'idée que celle-ci a été rendue possible par des
politiques d'industrialisation mises en oeuvre en coopération entre le
pouvoir politique, le monde économique privé et l'appareil
administratif31. Dans la même logique, le huitième
forum pour le
31 CNUCED Le développement économique en
Afrique : retrouver une marge d'action. La mobilisation des ressources
intérieures et l'État développementiste
36
développement en Afrique tenu en octobre 2012 et
consacré au thème des ressources minérales, avait un
double objectif : celui de permettre le passage d'une économie de rente
à une économie industrielle plus axée sur la captation de
la valeur ajoutée et la création de liens entre les secteurs
extractifs et le tissu économique local et d'augmenter la part de la
rente extractive revenant à l'État, dans un souci d'optimisation
de la mobilisation des ressources nationales.
IV. Contenu local : enjeux et perspectives
Grossman (1981) souligne que le contenu local est une mesure
protectionniste assez ancienne ayant deux attraits principaux : créer
des emplois localement et produire localement. Trois arguments sont
généralement énoncés pour justifier l'utilisation
de ces mesures de protectionnisme (Dernis, 2019). Le premier est de voir dans
le contenu local un moyen de créer des liens avec d'autres industries.
Ici, le contenu local est vu comme un facteur de diversification de
l'économie locale. De plus, l'établissement de ces liens
crée des externalités positives. Les liens avec les
multinationales peuvent aider les entreprises locales à renforcer leur
expertise sans pour autant consentir à un coût de recherche
(Veloso, 2001).
Dernis (2019) révèle que l'autre argument de
taille réside dans le fait que les entrepreneurs locaux ont
l'opportunité de prendre part à la fourniture de biens et
services, ce qui permet de surmonter l'inconvénient de devoir lutter
face à de grandes entreprises lors d'appels d'offres. Dans le même
ordre d'idée, il convoque l'argument de « l'industrie naissante
» qui est la justification de protéger une industrie de
manière temporaire afin de rendre celle-ci compétitive (Krugman
et Obstfeld 2012). Cet argument vient du fait qu'un pays non doté des
facteurs de production et du savoir-faire technologique, mais possédant
un potentiel avantage comparatif dans cette industrie ne pourra pas faire face
à la concurrence d'autres entreprises déjà existantes et
bénéficiant déjà d'économies
d'échelle. Ainsi, un pays protégeant son industrie de la
concurrence d'industries étrangères peut permettre à
celle-ci de se développer jusqu'à ce qu'elle devienne
compétitive. Un dernier argument est à vision plus sociale.
Le contenu local favorisant l'achat de produits locaux, il
permet de compenser les impacts négatifs que subissent parfois des
parties prenantes vulnérables en périphérie de projets,
par la création d'activités et d'emplois (Hansen et al. 2014,
Tordo et al. 2013).
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Beaucoup d'auteurs ayant travaillé sur les apports de
valeurs du contenu local préconisent la prudence alors que d'autres
à l'image de Corden (1971) comparait déjà ses effets
à celui d'une taxe.
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