1.3. Rôle constitutionnel des partis politiques
Partie prenante au dialogue inter congolais et ayant
signé l'accord global et inclusif, qui a engendré la constitution
de la transition, les partis politiques se sont vus attribuer un rôle
important pendant la période de transition.
Ce rôle est clairement énoncé par les
dispositions pertinentes de l'article 11 de la loi fondamentale de la
transition ainsi libellé :
"Le pluralisme politique est reconnu en RDC. Tout congolais a
le droit de créer un parti politique ou de s'affilier à un parti
politique de son choix. Les partis politiques conçurent à
l'expression civique. Ils se forment et exercent librement leurs
activités dans le respect de la loi ; de l'ordre public et de bonnes
moeurs.
89 DAYAN D., "Les pouvoirs de la réception"
in débat n°71, p.145
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Les partis politiques sont tenus au respect des principes de
démocratie pluraliste, d'unité et de souveraineté
nationale.
Nul ne peut instituer, sous quelque forme que ce soit de parti
unique sur tout ou partie du territoire national. L'institution d'un parti
unique constitue un crime de haute trahison puni par la loi".90
A la lecture de cet article, nous nous rendons certainement
compte de l'étendue du rôle que doivent jouer les partis
politiques pendant la transition. Ce rôle est éminemment
déterminant étant donné le degré très
prononcé à l'inversion des valeurs dans notre pays où les
antivaleurs ont pris le dessus sur les valeurs.
Mais pour bien jouer ce rôle l'éducation civique
de la population et de formation de la conscience nationale, les partis
politiques eux-mêmes doivent être affranchis des antivaleurs que
sont surtout :
- La corruption ; le mensonge ou la démagogie, la
tricherie, le népotisme, tribalo-régionalisme, le
clientélisme, qui sont la négation de l'éthique et de la
morale.91 Ce qui s'est passé lors de la mise en place des
institutions de la transition ainsi que la désignation de leurs
animateurs est une preuve éloquente qu'à ce jour, beaucoup de
politiciens doivent fournir un effort considérable pour être
à la hauteur de ce rôle constitutionnel leur dévolu.
Pour bien assumer ce rôle constitutionnel, la
constitution de la transition entrevoit déjà la
possibilité de financement des partis politiques par l'Etat.
Cela est clairement codifié dans l'article 32 de la
Constitution qui stipule que :
"Les partis politiques peuvent recevoir de l'Etat des fonds
publics destinés à financer leurs compagnes électorales ou
leurs activités dans les conditions définies par la
loi".92
Nous retiendrons que pour jouer ce rôle constitutionnel
comme il se doit, les partis politiques doivent avoir intégré au
départ dans leurs projets de société, l'éducation
civique de la population ainsi que de la conscience nationale.
La question que nous pouvons logiquement nous poser est celle
de savoir quel est l'objectif visé par la constitution en
conférant ce rôle aux partis politiques ?
Nous répondrons sans crainte d'être contredit que
l'objectif visé est d'amener le peuple à voter avec
responsabilité.
90 BOUKU MBONGO, La fin du régime de Mobutu
sous l'oeil économique et politique de 1990 à 1997,
Mémoire de licence en HGP, ISP-MBKA, 2017-2018, p.47.
91 MUKUNA P., et ali, op.cit., p.98.
92 Journal officiel de la RDC, constitution...,
op.cit.
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Pour ce faire, il faut clairement éduquer le peuple,
lui montrer les raisons pour lesquelles il doit voter et qui il doit voter.
Attirer son attention sur les tentatives de tricherie.
C'est avec raison que la LINELIT attire notre attention sur
les quatorze tricheries électorales, comment les décourager et
les contourner.
Ces quatorze tricheries sont :
1. Tricherie par une mauvaise loi électorale : c'est la
législation de la tricherie ;
2. Tricherie par une mauvaise commission électorale
indépendante : cela conduit à l'inféodation et noyautage
de celle-ci ;
3. Tricherie par une mauvaise organisation du scrutin :
certains bureaux de vote peuvent se passer des instructions de la loi
électorale et organiser les scrutins à leur manière. Toute
mauvaise organisation d'un bureau de vote est une façon organisée
de tricher aux élections ;
4. Manipulation des bulletins de vote : dans certaines
circonscriptions électorales, surtout dans les milieux ruraux, des
agents corrompus des bureaux de vote peuvent manipuler les bulletins de vote
s'ils ne se voient pas surveiller ;
5. Exploitation de l'ignorance des électeurs :
certains agents électoraux exploitent les faiblesses des
électeurs, surtout les analphabètes pour favoriser un parti ou
des partis corrupteurs ;
6. Tricherie par l'encre indélébile :
manipulation de la fabrication de l'encre indélébile pour
diminuer la teneur d'incessibilité de sorte que quelques munîtes
après le vote, les électeurs impliqués dans le
schéma de la tricherie peuvent se laver les traces de l'encre et se
représenter dans un autre bureau pour voter de nouveau ;
7. Manipulation des urnes pendant leur déplacement
c'est lorsque le dépouillement ne se fait pas dans le bureau de vote
immédiatement après les scrutins ;
8. Tricherie pendant le dépouillement : il faut une
surveillance sérieuse pour éviter que les voix d'un candidat x
soient attribué à un autre candidat y ;
9. Tripotage des chiffres à la publication des
résultats ; lors de la publication des résultats des
élections, l'homme chargé de cette responsabilité
(Ministère de l'intérieur ou le président de la centrale
électorale) peut publier des résultats différents de ceux
issus des urnes ;
10. Complicité de la justice électorale lors
des contentieux : si la justice est complice dans la tricherie ; le candidat
lésé et plaignant ne pourra pas obtenir gain de cause ;
11. Tricherie par le recensement des électeurs : on
peut procéder aux extrapolations au lieu d'un recensement
véritable ;
12. Découpage des circonscriptions électorales
; on peut procéder à un découpage électoral injuste
pour favoriser tel ou tel autre parti politique ou candidat ;
13. Tricherie par ordinateur : on peut donner à
l'ordinateur un programme truqué d'avance. Cela peut-être l'oeuvre
des politiciens non sûrs d'eux-mêmes.
14. Tricherie par épuration ethnique : c'est obtenir
l'échec aux élections d'un adversaire redoutable.93
93 MUKUNA P. et ali, op.cit., p.101.
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Un contrepoids à cette pratique serait la vigilance du
souverain primaire, son implication active au processus électoral comme
nous le démontre l'expérience de Madagascar,
Sénégal, Géorgie et de l'Espagne, où le les
souverains primaires ont rejeté les résultats électoraux
rendus publics par le pouvoir organisateur, et cela publiquement.
Pour clore ce point en rapport avec le rôle
constitutionnel dévolu aux partis politiques, nous retiendrons que
jusqu'au 10 mars 2004, les partis politiques enregistrés au
Ministère de l'Intérieur étaient au nombre de 299 et
peuvent être répartis en trois catégories :
- Partis politiques ayant été au DIC et
présents aux institutions de la transition ;
- Partis politiques ayant été au DIC et absents des
institutions de la transition ;
- Partis politiques n'ayant pas été au DIC et
absents des institutions de la transition. Alors qu'aujourd'hui on en compte
599 partis politiques enregistrés au Ministère de
l'Intérieur.
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