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La problématique du statut de réfugiés ressortissants des pays membres de la CEPGL.


par AgnàƒÂ¨s Clémentine MUSABIYINEMA
Université de Nantes - Master 2 droit international et européen des droits fondamentaux 2012
  

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SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE 1

PARTIE I : SITUATION EMBARRASSANTE DE LA PROTECTION INTERNATIONALE,

REGIONALE ET NATIONALE DES REFUGIES DE LA CEPGL 8

Chapitre introductif : La conceptualisation et la mise en contexte du problème des réfugiés de

la région des grands lacs. 8

A. Les causes de l'exil des réfugiés Rwandais, Burundais et Congolais. 8

B. La complexité des enjeux des guerres qui ravagent la région 15

Chapitre I : La détermination du statut de réfugiés et du mandat du HCR 19

Section I. Opérationnalisation de la notion de réfugié 19

Section 2. Effets de la détermination du statut de réfugiés 23

Section 3. Dispositions d'exclusion de la qualité et de la cessation du statut de réfugiés 25

Chapitre II : Effectivité de la protection internationale et régionale des réfugiés 27

Section I. La souveraineté de l'Etat et l'application du droit international aux réfugiés 27

Section 2. Les mécanismes étatiques de protection des droits de réfugiés 29

Section 3. Le HCR, organisme important mais non efficace pour la protection internationale

des réfugiés 38

PARTIE II : LES DEFIS ET LES PERSPECTIVES D'AVENIR DE PROTECTION

EFFECTIVE DES REFUGIES DE LA REGION DE LA CEPGL 41

Chapitre I: Les défis de la protection des réfugiés 41

Section 1. L'absence d'Etat de droit et de démocratie 41

Section 2. L'absence de contrôle des décisions des élites hégémoniques au pouvoir 45

Section 3. L'absence et /ou inadéquation des sanctions de violation du droit international 47

Chapitre II: Vers une meilleure garantie de protection internationale des réfugiés 51

Section 1. Une adaptation de mécanismes de protection internationale des réfugiés et des

demandeurs d'asile 51

Section 2. Un droit de non refoulement 56

Section 3. Un renforcement de garantie juridique et institutionnelle dans la région 58

CONCLUSION GENERALE 62

1

INTRODUCTION GENERALE

Le problème des réfugiés demeure un sujet sensible dans la région des grands lacs. Leur calvaire ne peut laisser insensible à toute personne humaine ou à toute organisation internationale respectueuse des droits de l'homme. Après avoir observé ou vécu ce qui se passe aujourd'hui dans cette région, la question qui se pose est de savoir si les communautés de coopération régionale ou la communauté internationale trouvera un jour une solution à la question des droits de l'homme pour ce groupe particulier, à savoir les réfugiés des pays des grands lacs.

Plusieurs auteurs ont écrit sur le problème à propos des droits de l'homme et des droits de réfugiés. Après avoir parcouru plusieurs définitions concernant les droits de l'homme, nous ne saurions pas exhaustifs. Du point de vue de Kéba MBAYE les droits de l'homme se présentent comme « un ensemble cohérent de principes juridiques qui s'appliquent partout dans le monde tant aux individus qu'aux peuples et qui ont pour but de protéger les prérogatives inhérentes à tout homme et à tous les hommes pris collectivement en raison de l'existence d'une dignité attachée à leur personne et justifiée par leur condition humaine ».2

Pour être plus explicite la déclaration française des droits de l'homme du 22 août 1795 est spécifique quant à l'importance qu'elle attache au positivisme des droits de l'homme, renvoyant ainsi au « légicentrisme », cette confiance excessive à la loi pour garantir les droits et les libertés fondamentaux3. Les constituants modérés ont cette volonté ferme de soumettre les droits individuels à des limites précises que le législateur aura à fixer.

Dans le même contexte la Constitution américaine de 1787 telle que stipulé aux dix premiers amendements de Déclaration des droits ou « the Bill of Rights » du 25 septembre 1789 établit des limites qui visent à protéger les droits naturels de liberté et de propriété. Ils garantissent des libertés individuelles, limite le pouvoir exécutif à s'immiscer dans le pouvoir judiciaire et accorde certains pouvoirs aux Etats fédérés et au peuple4.

Dans le monde entier tous les peuples ont essayé de suivre l'exemple des Français et des Américains qui ont inspiré les différentes Conventions sur le plan de coopération internationale et régionale. S'agissant des problèmes des réfugiés, sujet de notre préoccupation, par la création de l'Organisation des Nations Unies (ONU) en 1945 au lendemain des deux guerres meurtrières qu'a connu l'humanité, elle a permis l'évolution du droit international qui aboutit à l'attribution aux individus des droits directement définis par ce droit international dont ils sont directement

2 MBAYE (K), Les droits de l'homme en Afrique, « Commission internationale des juristes », Edition A, Pédone, paris, 1992, p. 25.

3 Dans son article « la raison d'Etat et les droits fondamentaux » publié dans le journal du Barreau, vol 32, n° 18 du 1er novembre 2000, consulté le 15 novembre 2012, Alain-Robert Nadeau, avocat donne la conception véritable de cette tendance de

légicentrisme, in http://www.barreau.qc.ca/journal/frameset.asp?article=/

4 The first ten amendments to the Constitution of the United States Articles, I through X are known as the Bill of Rights, ratification was completed on December 15, 1791, ( 1er amendement de la Constitution des Etats Unis, article I à X des droits de l'homme).

2

titulaires. Son évolution cadre bien l'ampleur et la spécificité de la protection juridique accordée aux individus. C'est une foi proclamée dans des droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine ainsi que dans l'égalité des droits des hommes et femmes, des nations grandes et petites5. De ce fait, les individus peuvent faire valoir directement la violation éventuelle de ces droits devant un organe international des droits de l'homme indépendant. Leur qualité de sujet de droit des gens s'avère fondée, sans doute que la connaissance d'une telle capacité reste fonctionnelle.

Aujourd'hui nous sommes en présence d'une protection des droits de l'homme sur le plan international qui se veut concrète mais en réalité reste embryonnaire dans le cadre de l'ONU et des pactes de 1966, il est beaucoup plus réel sur le plan européen. L'exemple est la Convention européenne des droits de l'homme suivi par la Convention relative aux droits de l'homme, puis tentée par la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de Nairobi, sont une illustration6.

Dans le souci de renforcement du respect des droits de l'homme, l'Assemblée Générale des Nations Unies, en application de la résolution 428 (V) a adopté le 27 juillet 1951 une Convention relative au statut des réfugiés. Sa préoccupation est d'assurer à ceux-ci l'exercice le plus large possible des droits de l'homme et des libertés fondamentales en dehors de la reconnaissance de protection de leurs Etats respectifs. Elle veut également étendre l'application de ces instruments internationaux antérieurs et la protection qu'ils constituent pour les réfugiés au moyen d'un nouvel accord7 mais cette Convention de 1951 n'arrange pas pleinement les réfugiés des pays des grands lacs.

De même, en date du 18 novembre 1966, dans sa résolution 1186 (XLI), le Conseil économique et social a pris acte du Protocole relatif au statut de réfugiés, ainsi que l'Assemblée Générale dans sa résolution 2198 (XXI) du 16 décembre 1966, a adopté la protection de nouveaux réfugiés sans date limite du 1er janvier 1951. Dans ce concept de protection des réfugiés, il y a lieu de noter également que l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) a adopté le 10 septembre 1969 une Convention régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique.

L'affirmation des droits de l'homme, d'un réfugié défini comme « personne de nationalité étrangère victime de persécutions dans son Etat d'origine, qui trouve protection dans un Etat d'accueil 8 » est marquée dans bon nombre d'instruments internationaux. Elle témoigne de la bonne volonté de l'organisation internationale de décider sur son sort9, c'est une chose idéale, mais la garantie du respect pour assurer l'effectivité, est tout autre, c'est une autre réalité.

5 Préambule de la Charte des Nations Unies.

6 BREILLAT (D), Libertés publiques et droit de la personne humaine, Mémentos, LGDJ-Montchrestien, Gualino éditeur, EJA-Paris, 2003. p. 29 et dans sa présentation du livre.

7 Préambule de la Convention relative aux statuts des réfugiés.

8 CABRILLAC (R de), Dictionnaire du vocabulaire juridique, Litec, programme P.L.U.S, « Juris Classeur », objectif Droit, p. 322.

9 Convention de Genève relative aux statuts des réfugiés du 28 juillet 1951 en application de la résolution 429 (V) de l'Assemblée Générale du 14 décembre 1950 instituant le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés.

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Tous les Etats dits « Etats de droit » sont dotés des codes de droits humains bien élaborés codifiés dans leur système juridique national dans lesquels figurent des normes impératives auxquelles nul ne peut impunément déroger, un système juridique réaliste par excellence. Par ailleurs, au dessus de ce système juridique national, un ordre juridique supranational est là, constitué par des Conventions internationales auxquelles des Etats ont souscrit afin de garantir le respect universel des droits de l'être humain réfugié sur leur territoire. Et alors, que dire des propos de Michel AGIER à l'heure actuelle dans les pays des grands lacs ? [Plongés dans le trouble de l'exil et les risques de l'anonymat, les réfugiés disent une complainte qui reste inaudible] : « Personne ne sait qui je suis10».

En embrassant cette formation dispensée dans le domaine du droit international et européen des droits fondamentaux, nous avons souhaité porter notre analyse sur la situation de ce migrant forcé, ressortissant de la CEPGL [Rwanda-Burundi- République Démocratique du Congo (RDC)]. Notre recherche couvre la période 1990 à nos jours, quoique la question des réfugiés dans ces pays soit un problème politico-social couvrant la période d'avant et après indépendances de 1959-1962, période à laquelle nous ferons souvent référence surtout en ce qui concerne le Rwanda, époque qui marque le début de la question des réfugiés de la région.

Ce n'est pas par hasard que nous avons choisi cette région des grands lacs et avons intitulé notre sujet de recherche académique « La problématique du statut de réfugiés des personnes ressortissants de ces pays », le Rwanda, le Burundi, la RDC sont des pays qui partagent le même passé socio-économique, politique et juridique dont ils ont hérité des faits migratoires de leurs peuples, de la colonisation belge et leur appartenance à la Communauté Economique des Pays des Grands Lacs (CEPGL) qu'ils ont créée en 1976. Tout le long de notre travail, ces trois pays seront considérés les uns comme les autres pays d'origine ou pays d'accueil pour les réfugiés sujet d'étude.

La période d'avant et après indépendance des pays membres de la CEPGL principalement le Rwanda et le Burundi a été marquée par des crises nationales, des guerres civiles, bref un spectacle d'horreur et de désolation. Cette situation s'est transplantée en RDC par la question dite des « Banyamulenge » (tutsi rwando-phones) et la crise couvre actuellement toute la région des grands lacs. Une haine gangrène ces pays, la lutte pour l'avoir et le savoir, piliers du pouvoir, son reflet y est l'ethnicisation du pouvoir d'où les conflits entre hutu et tutsi. L'on croirait comme le disent certains chercheurs « qu'à leur indépendance politique on est passé de la monarchie féodale à la monarchie républicaine, de la gestion dynastique du pouvoir à la gestion républicaine » qui réfute toute idée de modernisation11. Le fait historique est que les tutsi ont réussi, souvent par ruse, parfois par la violence, à assujettir la population hutu, installée avant eux dans le pays et à en faire des esclaves, astreints aux tâches serviles de les nourrir et de les servir dans tous les travaux manuels.

10 AGIER (M), Protéger les sans-Etat ou contrôler les indésirables : où en est le HCR ? In http://terra.rezo.net.article 348 html , consulté le 7 novembre 2012.

11 RWABAHUNGU (M), Au coeur des crises nationales au Rwanda et au Burundi, la lutte pour les ressources, Paris, Harmattan, 2004.

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Du fait de cette domination d'une race sur l'autre, domination souvent cruelle, le Rwanda comme le Burundi a été le pays de la peur et du silence et l'intention initiale des Belges était bien de respecter et même de renforcer le pouvoir autochtone12. Les régimes politiques tels qu'ils se sont succédé de la monarchie à la république ont été marqués par une exclusion qui résulte de l'égoïsme et du snobisme des élites du pouvoir qui permettent à un petit cercle d'individus de garder la mainmise sur les ressources et de procéder à leur redistribution sur une base clientélisme13. Les élites au pouvoir du parti-Etat au pouvoir font tout leur moyen possible pour la sauvegarde à tout prix de leurs intérêts politiques et économiques, s'opposant ainsi à toute idée d'instauration d'Etat de droit14.

La question des réfugiés est due à ces violences qui résultent de l'exclusion du plus grand nombre de citoyens quant à la gestion des ressources nationales et l'injustice qui accorde l'impunité aux responsables de la violence étatique15, favorisant ainsi la récidive chez les auteurs des crimes. Il est normal que cette question ne puisse être résolue dans un Etat de régime dictatorial, non respectueux des droits de la personne. Sous les manifestations occultes, l'équipe au pouvoir dans ces pays monopolise les instruments légaux de la violence en ethnicisant et en régionalisant l'armée, la police, le service de renseignement.

Aux yeux de l'observateur externe, les planificateurs de la violence étatique recourent au mensonge et à la désinformation pour cacher leurs forfaits ; de peur que la communauté internationale ne prenne des sanctions économiques ou ne suspende les coopérations bilatérale ou multilatérale si elle connaît la vérité sur la violation des droits de l'homme qui y a conquis le droit de Cité16. L'équipe instrumentalise la diplomatie pour sa cause en excluant ceux qui appartiennent à l'ethnie et aux régions ciblées comme ennemis du régime et en recourant à un lobbying tous azimuts à l'extérieur17.

Cet amalgame de situations conflictuelles régionales, l'insécurité économique et sociale, les catastrophes naturelles, l'instabilité des régimes politiques, la persécution politique, les

12 LOGIEST (G), Mission au Rwanda, un Blanc dans la bagarre tutsi-hutu, Bruxelles, 1988, p. 84-87.

13 HEREMANS (R), Introduction à l'histoire du Rwanda, 3e édition, Kigali, 1988, p. 93, HEREMANS montre l'opinion des grands « Bagaragu de l'Ibwami » (grands chefs du terroir du roi) devant la montée de l'intelligentsia des Bahutus de 1956, les milieux de la cour restaient très réactionnaires et totalement hostiles à tout changement car toute transformation leur semblait une atteinte à des privilèges séculaires et inébranlables.

14 RWABAHUNGU, (M), op.cit., p.18.

15En pleine négociation à Arusha/Tanzanie, sur les questions des réfugiés, le 1er octobre 1990, sous le commandement de grands officiers dans l'armée Ougandaise, la guerre est menée par les réfugiés rwandais nostalgiques du pouvoir contre leur pays d'origine, laquelle s'est soldée d'un génocide des tutsi en 1994 dans cent jours. Cette attaque qui viole délibérément l'article 23 alinéa 2a. de la Charte Africaine des droits de l'homme qui interdit au réfugié une activité subversive dirigée contre son pays d'origine n'a pas été condamnée et la communauté internationale brille par son absence à ce conflit.

16L'exemple frappant, après le rapport de l'ONU sur les violations graves des droits de l'homme par le M23 soutenu par le Rwanda, celui-ci dément farouchement toute implication.

17 - Au Rwanda après 1994, le nouveau pouvoir des tutsi crée les juridictions populaires dites « Gacaca », juridictions « suit generis » (en son propre genre) pour juger uniquement les hutus qui auraient participé au génocide des tutsi que ceux-ci ont déclenché en 1990 dans le but de reprendre le pouvoir des mains des hutus.

-GODDING (JP), dans son livre, montre comment les réfugiés rwandais hutu au Zaïre sont diabolisés et qualifiés collectivement d'infréquentables.

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violations des droits de l'homme et les conflits armés18 a entretenu un cycle de violences, a mis sur le chemin de l'exil un nombre illimité de leurs populations à telle enseigne qu' en 1990 se compte entre 600.000 et 700.000 réfugiés rwandais, plus de 1.200.000 réfugiés rwandais ont fui vers le Congo en 1994 et 200.000 réfugiés burundais ont fui les violences au Congo en 199619.

Vu le nombre exorbitant des exilés des événements malheureux au Burundi en 1972 et ceux qui s'en suivent jusqu'en 1993, à la prise du pouvoir au Rwanda par l'Armée Patriotique Rwandaise et les deux guerres dites de libération du Congo de 1996 et 1998, plus la guérilla menée en 2012 par le mouvement guerrier dite M23, l'on ne se tromperait pas si on disait que la situation du réfugié des grands lacs résulte d'une véritable crise de droits de l'homme qui l'a placé dans une perpétuelle impasse, situation sans espoir20.

Que dire des victimes des atrocités infligées aux réfugiés rwandais au Zaïre la semaine du 14 au 24 août, en octobre 1996 dans les camps de l'Est du pays et dans les forêts environnantes ? Que dire des réfugiés survivants de ces massacres qui errent encore dans les forêts congolaises, ceux qualifiés de population passive, otage d'extrémistes, qualifiée collectivement de génocidaires et diabolisée par une grande partie de la communauté internationale, celle ramenée comme un troupeau de moutons au Rwanda lors du gigantesque rapatriement forcé de fin 1996?

Que pensez des réfugiés après le retour ? La réponse n'est autre que l'insécurité totale caractérisée par la souffrance, la peur, la panique, la perte de confiance, la suspicion, le mensonge, l'esprit de vengeance, les injustices de tout genre et le constat de traumatisme21dans leur pays d'origine dans lequel les circonstances d'accueil ne sont pas rassurantes22. Que dire des expulsions des réfugiés pour l'intérêt politique de leurs pays d'origine, à la passivité de la communauté internationale remémorant son absence d'intervention pendant la commission du génocide au Rwanda et des massacres ainsi que l'unique action du HCR et les ONG de remplir les bouches des réfugiés ?

La problématique en est, pour ce réfugié, ce calvaire d'être pris entre l'enclume et le marteau en terre d'accueil là où il espérait retrouver sa dignité humaine et être soulagé, à ne pas revivre les cauchemars et les inquiétudes de vie dans le pays qu'il a quitté et rentrer aux bercails une fois les circonstances qui l'ont fait fuir ont cessé d'exister23. Mais ce qui l'attend là-bas, c'est

18 MBAYE (K), les droits de l'homme en Afrique, édition A, Pedone, Paris, 1992. KEBA MBAYE énumère ces causes de déplacement des populations comme éléments statutaires de la protection des réfugiés.

19PRUNIER, (G), 1997, Rwanda, 1959-1996, Histoire d'un génocide, cité par RWABAHUNGU, op.cit., p. 98-99

20 REYNTJENS (F), au Préface du livre de GODDING (J.P), Réfugiés rwandais au Zaïre, sommes-nous encore des hommes? L'Harmattan, collection Afrique des grands lacs, Paris, 1997.

21GODDING (J.P), mentionne les témoignages des réfugiés rwandais ayant participé aux différents groupes de réflexion sur la paix et la non-violence après leur retour au Rwanda, p. 223.

22 Le chef du HCR Antonio GUTERRES, reconnaissant les difficultés auxquelles sont confrontés les réfugiés dans la région des grands lacs même une fois rentrés chez eux appelle les pays riches à investir dans la région afin que les rentrants puissent bénéficier d'une vie meilleure, in www.unhcr.org , articles d'actualité, 16 juin 2006, consulté le 16 novembre 2012. 23EC/SCP/1992, /CRP.1, Document de travail sur l'application des clauses de cessation [« changement des circonstances »] dans la Convention de 1951, sous Comité protection, 20 décembre 1991, p.1.

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le cycle de violences qui reprend, car les arrangements politiques ou diplomatiques priment sur sa situation.

En terre d'asile, dès qu'il se montre comme un visiteur indésirable car il a seulement le droit de quitter son pays et que le pays tiers n'a pas de devoir corollaire de l'admettre; même si dans les situations les plus difficiles qualifiées de contraignantes pour lui dans lesquelles il se trouve, il ne perd pas ses capacités de réfléchir aux meilleurs options qui se présentent devant lui24, mais il n'est pas consulté.

Quelques fois les camps des réfugiés sont violés, les réfugiés sont fusillés, traités inhumainement, battus, torturés, femmes et filles violées, dépouillés de leurs biens25et embarqués comme les moutons que l'on amène à la tonte. Les gens sont forcés à monter dans des véhicules les amenant aux pays d'origine sans aucun système d'accueil aménagé26 et croupissent dans leur vulnérabilité de misère27, pourtant le HCR leur organisme de protection ne se contente qu'au service d'enregistrement des rentrants. NOIRIEL(G) montre que « sur les terrains africains le HCR affaibli a dérapé de son rôle de bouclier en terre d'asile, il est devenu seulement un grand ordonnateur du gouvernement humanitaire, dispositif de contrôle des réfugiés par leur mise en camp et par l'organisation des flux, ce qui confirme ce qu'ils savaient depuis les mesures d'accueil des étrangers, car toute politique d'assistance est simultanément un instrument de contrôle des ayants-droits28».

Leurs pays d'origine, dans leur souveraineté cherchent comment les rapatrier bon ou malgré tout pour couvrir leur situation sécuritaire et politique29. Ils préparent des dossiers et preuves à leurs charges, ils embellissent la situation d'accueil. Ils concluent des accords bilatéraux ou multilatéraux tronqués et opportunistes dans l'objectif unique de les rapatrier. Malheureusement, le réfugié ne peut ni être concerté ni décider sur son sort car le dialogue est uniquement pour le trio : pays d'origine, pays d'accueil et le HCR comme pour la bénédiction.

Ce sujet de droit dans son incertitude du lendemain demande à la communauté internationale de lui prêter oreille quant à sa protection. Ainsi de par notre sujet de recherche académique, nous permettra de dégager les lacunes de protection du régime conventionnel dont il est assujetti, de lancer les défis de l'effectivité du statut de réfugiés dans la région des pays

24NAKASHE (D), les mouvements de population, droits des réfugiés, des personnes déplacées, cous audio, M2DIEDF, année académique 2012-2013.

25 LDGL, Les Burundais rapatriés forcés de Tanzanie : une violation de la Convention du 28 juillet 1951 relative aux réfugiés, in www.ldgl.org./IMG/doc/A-EV-Tanzanie-2-doc

26 -Les camps de réfugiés rwandais de l'ex- zaïre à l'Est du pays de Mugunga, Kibumba, Katale sont violés en 1996 et les réfugiés sont contraints à rentrer bon gré malgré.

-A.SP, le 6 octobre 2012, une vingtaine de familles de Bourundais rapatriés du camp de Mutabira en Tanzanie ont élu domicile au chef lieu de la commune Giharo, consulté le 10 novembre 2012.

27 La commune de Giharo au Burundi enregistre des centaines de rapatriés forcés de la Tanzanie qui fait partie de la population vulnérable d'aujourd'hui, in www.ldgl.org./IMG/doc/A-EV-Tanzanie-2-doc; in http://www.burundi-gov-bi/Rutana-Rapatriement/

28 NOIRIEL(G), sur http://terra.rezo.net/article 348 html, consulté le 7 novembre 2012.

29 En Août 2009, 103 réfugiés rwandais sont expulsés du Burundi à la demande du gouvernement rwandais pour la raison politique, Rwanda tribune Ibukabose-Burundi du 2 décembre 2009, consulté le 7 décembre 2012.

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membres de la CEPGL, problématique qui risque d'être un enjeu cyclique de terreur et de dégradation de l'être humain. Notre dessein d'une manière générale est d'essayer de conceptualiser la question des réfugiés de la CEPGL, comprendre pourquoi dans les pays des grands lacs la question des réfugiés ne se résout pas alors qu'ailleurs comme dans les pays développés et respectueux des droits de l'homme la situation n'est pas cuisante, pourquoi la communauté internationale en l'occurrence le HCR traîne les pieds lorsque les droits du réfugiés des grands lacs sont violés.

Le non respect des droits de l'homme, l'absence d'Etat de droit, de démocratie et même l'absence de contrôle des décisions des élites hégémoniques dans ces pays seraient-ils à l'origine de la situation d'impasse des réfugiés? La souveraineté de l'Etat d'origine et d'asile aurait-il un impact négatif à l'applicabilité du droit de réfugié par le HCR? Emettre une telle hypothèse suppose néanmoins une corrélation entre l'Etat de droit et les droits de l'homme, la souveraineté de l'Etat et l'application de la norme internationale. Dans le cas qui nous concerne c'est la protection internationale du réfugié.

Répondre à ces questions nécessite la prise en compte de l'analyse des mécanismes de protection de droits des réfugiés dans la pays d'asile contre les éventuels abus des pouvoirs des gouvernants. Cette préoccupation concerne leurs droits en terre d'asile d'où ceux-ci risquent d'être expulsés violant délibérément leur statut de réfugiés et les clauses d'exclusion.

Le pas sera lancé vers l'analyse de corrélation existante entre l'Etat de droit et la démocratie dans les pays d'origine et/ou d'exil comme processus renvoyant à la fin du statut de réfugiés. Devient-il une réalité que la question des réfugiés n'est résolvable sans Etat de droit ni sans démocratie ?

Au cours de ce travail sur les réfugiés des pays des grands lacs, la question sera analysée dans l'angle de logique internationaliste dualiste de rapport de médiateté de la norme dans le pays d'asile, cela nous permettra de nous rendre compte de l'effectivité de protection de ses droits en droit interne par l'application de la norme internationale.

Nous pensons subdiviser notre travail en deux parties :

Premièrement nous présenterons cette situation embarrassante de protection internationale, régionale et nationale des réfugiés de la CEPGL, en essayant de conceptualiser ce problème. Nous montrerons les causes et la complexité des enjeux des guerres civiles qui sont à l'origine du mouvement balancier des réfugiés dans la région, qui les poursuivent en terre d'asile d'où la question de détermination du statut et d'intégration et ses contours conséquents.

La deuxième partie sillonnera les perspectives d'avenir de la protection effective des réfugiés, à conclusions satisfaisantes puissent alléger la crise des réfugiés, s'ils sont complétés par une adaptation des instruments juridiques qui sont à l'heure actuelle inadéquats.

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"Il faudrait pour le bonheur des états que les philosophes fussent roi ou que les rois fussent philosophes"   Platon