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Les relations politiques Iran-USA 1979-2002.


par Doumbia ALI
Université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan - Master d'histoire contemporaine 2017
  

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2- Les enjeux iraniens de la prise des otages

En Iran, l'enthousiasme révolutionnaire qui était retombé semble ravivé par cette prise d'otage. En effet, certains dirigeants de la révolution n'étaient pas pour cette prise des otages. C'est d'ailleurs ce qui explique le professeur d'histoire américaine moderne, David Farber. Pour lui, pendant cette période postrévolutionnaire, l'Iran se trouve dans

124Josette ALIA et Pierre BLANCHET « Pourquoi Khomeiny défie Carter » Le Nouvel Observateur, 12 novembre 1979, p. 56.

« un état de chaos révolutionnaire ou le pouvoir n'était pas encore sécurisé125. C'est donc autour de l'affaire des otages que s'organise la lutte entre radicaux et modérés, religieux et laïcs, donc entre le conseil de la Révolution126et le gouvernement. Alors que les modérés, tels que le Premier ministre Medhi Bazargan et le ministre des Affaires étrangères Ibrahim Yazdi, étaient opposés à la prise d'otage, ils se résignent face à la pression des radicaux. Ainsi, le radical Ayatollah Behesti, membre du conseil de la Révolution, met en évidence la nécessité d'épurer l'administration des modérés.

L'un des arguments principaux de la prise étant les documents découverts à l'Ambassade américaine justifiant des liens entre des iraniens modérés et les Etats-Unis d'Amérique. La lutte feutrée entre le gouvernement modéré de Téhéran et le conseil de la révolution à Qom prend fin avec la résolution de la crise. Le pouvoir du clergé radical, dorénavant sans partage, débute le 21 juin 1981 avec la destitution du président modéré de la République islamique, BaniSadr.

En effet, la prise d'otage permet de mettre en évidence que le pouvoir iranien provient de Dieu et non du gouvernement américain. La forte critique de l'impérialisme occidental sert de pilier unificateur et s'accentue lorsqu'un plan américain visant à la déstabilisation de l'Iran est découvert dans les documents trouvés dans l'Ambassade.

Le guide est sans détour sur la question de la prise des otages, pour l'Ayatollah Khomeiny: « le grand Satan, c'est l'Amérique... Le centre que nos jeunes ont pris était un centre d'espionnage et de complots127 ». En effet, selon Bheza Nabavi, responsable Iranien lors des négociations qui mettent fin à la crise, « la prise d'otages du nid d'espions avait comme signification symbolique de démontrer la faiblesse des Etats-Unis et de dévoiler au monde entier leur vulnérabilité en envoyant des espions à la place des

125Iran was in a state of revolutionary chaos in which power was a prize not yet secured by anyone » in David Farber, The Iran hostage crisis and America's first encounter with radical Islam : taken Hostage, p141

126Le conseil de la Révolution ou conseil des gardiens de la Révolution se trouve sous la direction du guide suprême. Il détermine la direction politique du pays en consacrant la prédominance du religieux sur le politique.

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127Journal iranien Kayhan, 6 novembre 1979

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diplomates128». Cette crise permet ainsi à l'Iran de faire plier les Etats-Unis d'Amérique et de leur « faire payer » leur soutien au régime du Shah. Elle a également pour conséquence d'isoler diplomatiquement le pays.

Cette prise d'otages des Américains dans leur « nid d'espions », comme disaient les khomeynistes ; une Ambassade protégée telle une véritable forteresse dans un pays ennemi, apparut comme un défi spectaculaire. La crise, qui se prolongea pendant l'année 1980, vit des grandes manifestations anti-américaines à travers l'Iran. Par conséquent les groupes démocratiques, progressistes, de gauche, refirent acte d'allégeance à Khomeiny, sous le prétexte que la crise était l'expression de l'anti-impérialisme.

Pour leur part, les Etats-Unis d'Amérique comprennent tout d'abord difficilement l'insistance iranienne à mettre en évidence des actions passées et selon eux dénuées de pertinence. De plus, le président Carter ne souhaitait pas que la crise mette en lumière le soutien de la Maison blanche au régime du Shah d'Iran. C'est ainsi que « l'incompréhension est totale entre le peuple américain agressé et le peuple iranien persuadé de la justesse de sa cause 129» analyse Nouchine Yavari-d'Hellencourt. Ce conflit politique est en outre vécu comme une humiliation, les Américains ayant dût se soumettre aux conditions iraniennes. La crise a également pour conséquence la rupture des relations diplomatiques et la fermeture de l'Ambassade américaine en Iran. Enfin, sur le plan énergétique, les importations de pétrole en provenance d'Iran vers les Etats unis d'Amérique cessent.

128Pierre SALINGER, Otages, les négociations secrètes de Téhéran, Paris, Buchet/Chastel, 1981, p125.

129Nouchine YAVARI-D'HELLENCOURT, Les otages américains à Téhéran, Paris, La Documentation Française, 1992, p.24.

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