4- Les universités modernes et l'enseignement
religieux.
Le roi héritier Mohammad Reza Shah a tenté
d'élargir l'accès à l'instruction et encourage notamment
le développement de l'enseignement supérieur. Il entreprend la
création de nombreuses universités à partir des
années 1950 et crée le ministère des Sciences et de
l'Enseignement Supérieur en 1968, si bien que l'Iran compte dix-neuf
universités nationales en 1978. L'enseignement est aussi
encouragé, à un autre niveau, par la mise en place d'efficaces
politiques d'alphabétisation et d'accès à l'instruction
pour les femmes
Au lendemain de la Révolution islamique de 1979, le
système éducatif iranien est ouvertement critiqué par le
nouveau gouvernement et de nombreux conseils d'experts sont créés
pour agir sur ce terrain prioritaire. Khomeiny initie une « islamisation
» de l'éducation, mais il n'aspire pas pour autant à un
retour vers les établissements religieux traditionnels. Il a l'ambition
d'une école à la fois moderne et religieuse, non pervertie par la
culture « occidentale » et « coloniale »122.
Face à une école dite inspirée des modèles
étrangers, il fait de l'islam la source originelle et légitime de
la réflexion sur l'éducation. L'islam est présenté
comme la voie de la résistance à la « colonisation »
des esprits causée par la politique des rois pahlavis. Les premiers
changements passent par la révision des manuels, l'épuration du
personnel scolaire, l'abolition de la mixité, la mise en place de
nouveaux codes vestimentaires selon les préceptes islamiques (port du
voile pour les filles), ou encore l'imposition de pratiques religieuses telles
que les prières à midi ou les chants révolutionnaires et
religieux dans la journée.
Le pouvoir lance ensuite une « révolution
culturelle » placée sous la responsabilité du Quartier
Général (QG) de la révolution culturelle
créé par Khomeiny en juin 1980. Celle-ci touche en particulier
les universités, qui sont fermées. Huit mille professeurs,
122 Discours de Khomeiny en 1983, vol. 12, p.177 in PAIVANDI, S.,
Islam et éducation en Iran. Echec de l'islamisation de
l'école en Iran. Paris : L'Harmattan, 2006, p. 72.
75
soit la moitié des effectifs du personnel universitaire
en activité à l'époque, sont démis de leurs
fonctions et de nouveaux centres de formation sont créés pour
former les nouveaux professeurs d'université aux ordres du nouveau
système. De nouveaux responsables sont nommés à la
tête des universités qui sont rouvertes à la rentrée
1981.
Les orientations majeures du système éducatif de
la République islamique sont énoncées dans la loi de 1987
qui décrit le projet de la formation du nouvel homme musulman. «
Elle explicite la place de l'homme dans ce monde, le sens de son existence et
de son action [...] le rôle de l'école dans la formation
religieuse et la socialisation des élèves ».123
Dans son premier article, cette loi revendique une instruction qui repose
ouvertement sur le Coran et les textes sacrés de l'islam. Dans l'article
suivant, elle envisage aussi le rôle politique et de socialisation de
l'école. Puis dans l'article 4, elle affirme la primauté de la
purification sur l'enseignement dans les écoles de la République
islamique.
Image 5 :LES INSTITUTIONS ELUES ET NON ELUES DE
LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE D'IRAN
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Source : Schéma_gvt_iran.pn
123 PAIVANDI S.: Islam et éducation en Iran. Echec de
l'islamisation de l'école en Iran. Paris, Le Harmattan, 2006.
76
En guise de conclusion partielle à cette
première partie on retiendra qu'en Avril 1979 le pouvoir du Shah prend
fin au profil de celui d'Ayatollah Khomeiny, symbole de l'opposition au
régime du Shah. Il représente la puissante caste des religieux
chiistes mais il n'est pas l'unique meneur du peuple qui défile dans les
rues du Téhéran. Le puissant parti communiste Tudeh et la
mouvance de la gauche iranienne sont des forces avec lesquelles il va devoir
compter.
Le long règne du Shah largement conteste par la
population iranienne parte avec toute ces accointances, avec les Etats Unie
d'Amérique et laisse place à une république Islamique. Le
nouveau chef d'Iran se donne tous les moyens institutionnels et
organisationnels pour tourner la page d'Iran occidental.
Les hommes et les femmes, les jeunes et les enfants sont tous
formés à cet effet. La politique intérieur
étrangère de la nouvelle république porte les emprunts de
cette volonté nouvelle des autorités. C'est donc l'amorce d'une
longue série d'incompréhension de belligérance entre
l'Iran et son ancien partenaire d'une part et d'autre part entre la
république Islamique et ces voisins du Golfe. La rupture est donc
consommée, la deuxième partie de notre travail de recherche nous
permettra d'élucider les étapes de cette rupture.
PARTIE II
LES ETAPES DE LA RUPTURE : LA
PRISE DES OTAGES AMERICAINS A LA
CRISE SUR LE NUCLEAIRE IRANIEN
(1980-2002)
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78
Dans cette partie il sera question de la mise en
évidence des grandes manifestations de la rupture entre les Etats Unis
d'Amérique et la République Islamique d'Iran. En effet,
après la chute du Shah d'Iran et l'installation des institutions du
pouvoir révolutionnaire de l'Ayatollah Khomeiny, nous allons aborder
deux faits, qui pour notre part constituent des éléments
essentiels ayant créé une distance considérable entre
partenaires d'hier.
La crise des otages américains à
Téhéran est la première manifestation de la rupture. En
effet le 4 novembre 1979, des militants révolutionnaires iraniens,
essentiellement des étudiants envahissent l'Ambassade des
États-Unis d'Amérique à Téhéran avec le
soutien des autorités de la révolution. Cinquante-deux (52)
Américains sont alors retenus en otage pendant 444 jours, ce qui
révolta terriblement Washington. Le 7 avril 1980 les États-Unis
d'Amérique rompent toute relation diplomatique avec l'Iran. Et s'en ai
suivi diverses crises diplomatiques directes ou indirectes avec Washington.
Ainsi depuis la découverte en 2002, du site
d'enrichissement nucléaire de Natanz et Arak avec la complicité
d'un groupe d'opposants en exil, le Conseil national de la résistance
iranienne qui dénonçait l'existence de sites nucléaires
clandestins d'enrichissement de l'uranium.
La crise diplomatique entre Téhéran et
Washington prend ainsi une toute autre dimension. La possession par l'Iran
d'une telle infrastructure militaire serait aux yeux de l'Occident un revers
total. Pourtant, les iraniens rassurent de leur bonne intention d'enrichir leur
uranium qu'à des fins purement civiles.
Comportant trois (3) chapitres, cette partie met en relief
dans un premier temps la crise des otages américains à
Téhéran (Chapitre I), il s'agit d'évoquer
les origines et manifestations de cette crise ainsi que les
conséquences. Ensuite la menace des intérêts
américains dans le Golfe (Chapitre II). Nous y verrons
comment Khomeiny compte « sauver » le monde musulman. La guerre entre
Iran et l'Irak, une guerre de positionnement avec une mobilisation des
Américains et des pays Sunnites au côté
79
Saddam Hussein. Et enfin dans un dernier chapitre
évoquer la question épineuse du nucléaire
(Chapitre III), et faire ressortir les grands enjeux
géostratégie du nucléaire iranien.
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