WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Les relations politiques Iran-USA 1979-2002.


par Doumbia ALI
Université Félix Houphouet Boigny d'Abidjan - Master d'histoire contemporaine 2017
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

2- La révolution culturelle

Le nationalisme, la recherche d'une identité après cette longue période de pouvoir impérial aux couleurs culturelles occidentales, va occasionner d'importants bouleversements en Iran. En 1979, la question du statut de la culture et de l'art en Iran a participé de manière prépondérante à la dynamique révolutionnaire, avec notamment les mots d'ordre d'une « culture indépendante » et d'une « islamisation de la culture »105. Le 21 mars 1980, l'Ayatollah Khomeiny avait déclaré :

« Il faut briser les idoles intellectuelles qui viennent d'ailleurs. Quand un pays veut envahir un autre pays, il commence par la culture. [...] L'université islamique signifie qu'elle doit être indépendante, dissociée de l'Ouest et de l'Est. Il nous faut une nation,

une université et une culture indépendantes. Nous n'avons pas peur d'une invasion militaire ni d'un blocus économique, mais nous redoutons la dépendance culturelle ».106

Le mois suivant, le 18 avril 1980, la Révolution culturelle était proclamée. L'État-major de la Révolution culturelle (Setad-e enqelab-e farhangi) a alors entamé une refonte des programmes et une purge des universités, fermées de 1980 à 1983. Etant donné la difficulté à se prononcer sur le contenu des nouveaux programmes d'enseignement

105 Agnès DEVICTOR, Politique du cinéma iranien, CNRS Editions, Paris, 2004, p.8. 106Ruhollah KHOMEINY, Jomhuri-e eslami, Tehran, 2 ordibehesht 1359/22 avril 1980, p.12.

62

artistique, la dernière faculté à reprendre une activité a été celle des Beaux-arts, au bout de deux ans et demi.

De nouveaux codes vestimentaires et moraux ont été imposés mais les matières sont restées dans l'ensemble les mêmes sauf le dessin sur la nudité. Centrée sur l'université dans un premier temps, la révolution culturelle a gagné dès 1982 une part importante du secteur culturel et social, de sorte que l'Ayatollah Khomeiny a pérennisé l'État-major de la Révolution culturelle en créant en 1984 le Haut Conseil de la Révolution Culturelle (Shora-ye `ali-eenqelab-e farhangi). Ce nouvel organe institutionnel est devenu le chef d'orchestre de la politique culturelle au sein du régime islamique (un texte de loi fondamental intitulé « Base de la politique culturelle du pays » a été publié par ce Haut Conseil en 1992)107 qui a joué un rôle important ces dix dernières années jusqu'à entrer en concurrence avec le Musée d'Art Contemporain de Téhéran, lieu-phare de la vie culturelle officielle iranienne depuis 1977.

Le changement le plus important concerne cependant la population féminine. L'abolition du Code de la famille en 1979 et l'obligation faite aux femmes d'adopter les principes islamistes, en particulier le port du voile, ont justement attiré l'attention sur la contradiction qui existe entre ces règles imposées. On observe aussi la forte dynamique de socialisation marquée par la scolarisation massive et la chute généralisée de la fécondité même en zone rurale.

L'ordre nouveau et la « révolution culturelle » : l'instauration de l'ordre et de la morale islamique a entraîné une série de mesures restrictives et répressives: fermeture de salles de spectacles, de cinémas, de musées ; renvoi dans les réserves des musées des collections et installations d'art moderne et contemporain (La République islamique s'est retrouvée détenir une des plus importantes collections d'art contemporain du Moyen-Orient, réunie à l'initiative de banou Farah Dibah au Musée d'art contemporain de Téhéran, construit entre 1970 et 1977) ; interdiction des concerts de musique profane ;

107 Agnès DEVICTOR, Politique du cinéma iranien, CNRS Editions, Paris, 2004, p 15-16 et 40.

63

interdiction du théâtre, à l'exception des pièces classiques du tazieh 108 rappelant annuellement le martyre d'Ali et de Hussein109 lors du mois de muharram110; interdiction du chant féminin ; interdiction des dessins et peinture; dans les films, interdiction de toute apparition de femmes non voilées, et de tout contact physique entre hommes et femmes; censure de toutes les créations artistiques et diffusions et publications d'oeuvres littéraires, etc.

Dans la même perspective de « révolution culturelle islamique », les universités ont été fermées pour presque deux ans, le temps d'épurer le corps enseignant, la communauté étudiante (très politisée), et de réviser les programmes pour y introduire les principes islamiques dans toutes les disciplines. Le changement fut radical et effectif.

La promotion d'un art islamique national, dans lequel le martyre révolutionnaire, en particulier sur le front contre l'Irak, occupe une place centrale, donne naissance, par exemple, à de gigantesques portraits muraux de martyrs entourés de colombes et des tulipes de la résurrection; ou à des peintures sur pignons stigmatisant les ennemis réels ou supposés de la révolution et de la République islamique. Mais l'iconographie et les thématiques du nouveau régime sont également lisibles sur des supports de plus petite taille: timbres-poste ou billets de banque, par exemple.

Dans ce contexte de censure, de limitation, d'oppression et de répression, nombreux sont les artistes, les universitaires et étudiants qui ont été contraints et forcés vers les chemins de l'exil, pour mieux se promouvoir.

108 Le Ta'zieh désigne en Iran un genre théâtral particulier, commémorant le martyre de l'imam Husayn, qui est joué uniquement pendant le mois de muharram et lors de l'Achoura.

109 La Passion d'al-Husayn est le récit du martyre en 680 à Kerbala d'Al-Hussein ibn Ali, second fils d'Ali ibn Abi Talib et de Fatima, fille de Mahomet. Husayn fut décapité le 10 octobre 680 lors de la bataille de Kerbala, et sa tête fut rapportée au calife omeyyade Yazîd Ier. La théologie chiite a développé un martyrologe à partir de cet événement qui est commémoré annuellement par une fête le 10 mouharram. Cette fête est l'occasion de manifestations de mortification, en particulier l'autoflagellation avec les mains, parfois avec des chaînes ou des lames de rasoir.

110 Le mois de mouharram est le premier mois du calendrier musulman et un des plus importants, notamment pour les chiites. C'est l'un des quatre mois sacrés de l'islam avec rajab, dhou al qi`da et dhou al-hijja et il n'est pas rare de lire que c'est le plus sacré (haram voulant dire illicite).

64

Certains films d'acteurs iraniens, parfois récompensés dans les principaux festivals internationaux, n'ont pourtant jamais été reconnus et distribués en Iran, ou ont été sévèrement censurés. D'autres films peuvent pratiquement être qualifiés d'oeuvres de commande du régime : là encore parfois non distribués en Iran même, ils tendent à montrer une réalité édulcorée, en particulier en ce qui concerne le statut et le sort des iraniennes.

La politique culturelle, particulièrement contraignante jusqu'en 1989, a été mise en oeuvre par le ministère de la Culture et de l'Orientation islamique, dont le titulaire a été le futur président réformateur Mohammad Khatami (de 1980-1986, puis de 19891992).

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo