Chapitre II- L'AVENEMENT DE LA REPUBLIQUE ISLAMIQUE
D'IRAN (1979- 1981)
Le Shah prétendit restaurer la grandeur de l'Empire
Perse en s'appuyant sur trente mille conseillers américains dont la
présence constituait pour la masse iranienne une insulte aux sentiments
nationaux. La chute du pouvoir impérial du Shah d'Iran donna
automatiquement naissance à un bouleversement très important et
de tous ordres. Ici nous allons apprécier la marque du nationalisme
iranien et les institutions politiques et religieuses de la nouvelle
République.
I- LA MONTEE DU NATIONALISME ANTI AMERICAIN
Les origines du nationalisme iranien et ses manifestions, la
révolution culturelle à partir de 1980 et l'arrivée de
l'Union soviétique dans l'arène politique et économique de
la République Islamique vont nous permettre d'élucider cette
partie.
1- Les origines du nationalisme iranien et ses
manifestations
Le nationalisme iranien est une révolte contre
l'Occident et en particulier les Etats Unis d'Amérique. La haine pour
les Américains est née depuis que ceux-ci et les Anglais ont
opéré le coup d'Etat contre Mossadegh en 1953. Il fut le premier
chef de gouvernement élu démocratiquement en Iran et occupe le
poste jusqu'en 1953, date du renversement de son gouvernement par un coup
d'État.
Son gouvernement introduit un ensemble de réformes
sociales et politiques progressistes telles que la mise en place d'une
sécurité sociale, le contrôle des loyers ou l'initiation de
réformes agraires significatives. La décision la plus notable
prise sous son administration reste toutefois la nationalisation de l'industrie
pétrolière iranienne, alors sous contrôle britannique
depuis 1913.
Il tente d'instaurer une démocratie laïque et de
conserver une relative indépendance du pays face aux puissances
étrangères. Chassé du pouvoir par le coup d'État du
19 août 1953 car portant atteinte aux intérêts occidentaux
en Iran, il est
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remplacé par le général Fazlollah
Zahedi103 et est placé en résidence forcée pour
le restant de ses jours. Par son opposition farouche à l'intervention
des puissances occidentales dans les affaires intérieures iraniennes,
Mossadegh est généralement considéré comme l'une
des figures du nationalisme au XXe siècle.
Après ce coup d'Etat le Shah se proclame roi des rois,
ainsi il organise le développement économique du pays, suscitant
un choc culturel qui est perçu comme une occidentalisation. En effet, il
interdit le port du voile, donne le droit de vote aux femmes, ce qui va
susciter le mécontentement des autorités religieuses,
orchestré par les hauts dignitaires chiites y compris l'Ayatollah
Khomeiny qui est en exil. La "révolution blanche"104 du Shah
engendre aussi une modernisation pseudo-européenne qui aboutit à
la destruction d'une partie du patrimoine culturel iranien. Ce sentiment
anti-américain sera plus accentué après la création
de la République Islamique d'Iran avec à sa tête
Khomeiny.
Le Guide de la révolution mettait dans l'esprit de ses
concitoyens que les Américains étaient la cause de leur ruine et
qu'ils profanaient les moeurs avec notamment l'alcool, les tenues
vestimentaires, la musique pop, les boîtes de nuit, les cinémas
dancings, bains mixtes et les vidéos et productions pornographiques. Il
reproche tous ces maux aux Américains en ajoutant qu'ils ont
installé la corruption et l'égoïsme. Ils ont
substitué la vie communautaire fondamentale de la société
iranienne à la vie privée.
Le premier novembre 1979, l'Ayatollah Khomeiny qualifie les
Etats-Unis d'Amérique de "grand Satan" par décret qui interdit
toute négociation directe avec ce pays. Il les considère comme,
le pays à la base de tous les malheurs du temps. Cette grande haine
contre ce pays va faire naitre des crises diplomatiques entre ces deux pays.
Le nationalisme iranien reste aussi fondé sur le
sentiment obsidional d'être une île encerclée de forces
hostiles, mais une dynamique nouvelle est également nourrie par le
103Mohammad Fazlollah ZAHEDI (1897-1963) est un
général et homme politique iranien. Il a occupé le poste
de Premier ministre d'Iran entre 1953 et 1955, après la chute de
Mohammad Mossadegh.
104La Révolution Blanche est une série
de réformes à grande portée lancée en 1963 par le
dernier Shah d'Iran, Mohammad Reza Pahlavi.
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sentiment que ce pays a d'immenses potentialités et
qu'il est en mesure de jouer un rôle international de premier plan. Cette
conviction nationaliste nouvelle est alimentée par la différence
croissante entre le niveau d'éducation et d'information de la
population, notamment des nouvelles générations et la
médiocrité économique et l'isolement culturel de la grande
majorité des habitants, dans les provinces. Les revendications sont
dirigées contre un système gouvernemental contesté, mais
aussi contre une communauté internationale qui semble ne pas voir les
changements et ne regarde que les élites au pouvoir.
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