II. Les étapes de la Gestion du
Crédit
Les institutions de crédit comme toutes les
entreprises, sont soumises à des risques. Mais ces risques sont beaucoup
plus importants pour les institutions de crédit et il devient donc
primordiale pour ces dernières de maîtriser ces risques. La liste
des risques pouvant affecter un SFD est longue ; risque institutionnel, risque
de fraude, risque de crédit, risque de sécurité, risque de
gestion financière, risque externe (réglementation, concurrence,
démographique). Le risque qui nous intéressera ici est le risque
de crédit aussi appelé risque de contrepartie ; s'il existe
plusieurs type de risque celui de non-remboursement est un risque majeur.
Manchon (2001) définit le risque de contrepartie pour les prêteur
comme : « le risque de voir son client ne pas respecter son engagement
financier, à savoir, dans la plupart des cas, un remboursement de
prêt ». Dans un sens plus large, ce risque de contrepartie
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désigne aussi le risque de dégradation de la
santé financière de l'emprunteur qui réduit les
probabilités de remboursement. Le risque de crédit constitue le
plus grave des vulnérabilités d'une institution de microfinance.
C'est la détérioration de la qualité du portefeuille
crédit qui cause les pertes et créé des charges
énormes en gestion de la défaillance. Ce risque aussi connu comme
le risque de défaillance, est lié à l'incapacité du
client de respecter les termes du contrat de prêt. Un seul
microcrédit ne pose pas un risque énorme parce que le pourcentage
sur le portefeuille total est insignifiant. Mais puisque la plupart des
microcrédits ne sont pas garantis, la défaillance peut facilement
s'étendre d'un petit nombre de crédits à une portion
important du portefeuille. Cet effet de contamination peut être
aggravé par le fait que les portefeuilles de microfinance se limitent
souvent à certains secteurs d'affaire.
La gestion du risque de crédit se présente
généralement sous deux aspects : les mesures préventives
que les prêteurs prennent avant l'octroi du crédit et celles
qu'ils prennent après le déboursement. La gestion du
crédit dans une institution de microfinance doit respecter les
étapes suivantes :
V' Le montage et l'analyse du dossier de
crédit
V' Le suivi des prêts accordés
V' Le recouvrement des crédits en
souffrances.
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Le processus de crédit suit le cheminement
décrit par le schéma ci-dessous
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Demande de crédit
Montage du dossier de crédit
Vérification de la garantie
Analyse du dossier par le comité de
crédit
Rejet de la demande Acceptation
Informer le client du rejet de son dossier Suivi du
crédit
Remboursement Contentieux
Lors de la demande de crédit, le chargé de
prêt collecte des informations auprès du client et d'autres
sources externes afin de monter le dossier de crédit et les
complète par des informations internes lorsque le demandeur est
déjà client. Ce dossier va servir de support à l'analyse
du risque de crédit qui va conduire le chargé de prêt,
généralement assisté par un comité, à
décider de l'opportunité d'accorder ou non le crédit, en
fonction de la politique de risque et de rentabilité ainsi que de la
volonté stratégique du SFD. Si le crédit est
octroyé, le chargé de prêt doit procéder en
permanence au suivi sur le terrain de l'utilisation du crédit
reçu. En fonction du déroulement du crédit, celui-ci peut
prendre fin sans incident avec le remboursement ou finir de façon
contentieuse.
1. L'analyse du risque de défaillance
La gestion du risque de crédit se présente
généralement sous deux aspects : les mesures préventives
que les prêteurs prennent avant l'octroi du crédit portent sur
l'analyse du risque de défaillance du client. La défaillance du
client implique que le prêteur recouvre difficilement ses ressources voir
ne les récupère pas. L'analyse du risque de défaillance
implique que le prêteur recherche des informations sur son client. Les
sources d'informations dont dispose le prêteur sont nombreuses. D'une
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manière générale, l'analyse du risque
effectuée par le prêteur avant tout crédit devrait prendre
en compte les qualités intrinsèques d'information passé
par l'instruction d'un dossier de crédit. Le premier acteur à
répondre à la demande de crédit d'un SFD est le personnel
à travers les actions ci-après :
i' Accueil et mise en confiance du membre demandeur. Il faut
donc mettre le membre à l'aise afin de lui permettre d'exprimer
correctement son besoin. Cette phase est importante et doit être
menée par le conseiller en crédit appuyé par son
gérant. Le discours doit porter sur les principes mutualistes de
l'institution, l'importance du crédit pour les membres (satisfaction des
besoins individuels et collectifs) et pour l'institution
(pérennité) ;
i' Le montage du dossier de demande de crédit est
effectué par le chargé de prêt sur la base d'un dossier
technique préétabli. Il permet de collecter le maximum
d'informations sur le membre demandeur afin de vérifier l'objet du
crédit, le montant sollicité, la capacité et la
volonté de rembourser ainsi que l'intégrité du membre et
les garanties.
Cinq composantes sont pertinentes pour toute sorte
d'institution de crédit à savoir: capacité,
caractère, capital, condition et cautionnement pour analyser
l'historique du client. Le prêt accordé à chaque
élément peut varier selon la méthodologie, la taille du
crédit et selon le fait que le client soit nouveau ou ancien. Mais ici
nous nous intéresserons à la capacité de l'emprunteur
à rembourser. Pour évaluer la capacité de remboursement
d'un demandeur, le chargé de prêt procède à
l'évaluation de son activité et de son ménage. Il est
compliqué d'évaluer la capacité de remboursement d'un
demandeur à revenu bas. Les estimations de revenus et dépenses ne
pourront pas être fiables et souvent les demandeurs manquent de preuves
ou documents financiers. Cependant, des variations importantes entre
l'estimation et la trésorerie réelle du commerce peuvent
subsister, même si le demandeur n'a pas l'intention de tromper le
chargé de prêt. Pour surmonter ce problème les SFD
octroient initialement des petits crédits et appliquent une
procédure continue et recueillent des informations sur le client pour
surmonter les défis d'évaluation de sa capacité de
remboursement. Les crédits initiaux ont tendance à être
plus petits que le besoin du demandeur parce que le chargé de prêt
manque d'informations fiables pour évaluer sa capacité de
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remboursement. On demande aux clients de maintenir des
informations de base de leurs activités concernant les revenus et les
dépenses qui vont au retour aider le chargé de prêt
à prendre des décisions de crédit fondées sur ces
informations et tailler les crédits ultérieurs en tenant compte
de la trésorerie de l'activité. Quant aux petits prêts, il
est approprié que le caractère du demandeur soit un
élément historique clé. Au fur et à mesure que la
taille du crédit augmente, il faut passer des informations « douces
» comme le caractère aux informations plus difficiles comme la
capacité. Pour prendre des décisions de crédit juste, il
est donc nécessaire que les chargés de crédit recueillent
des informations à temps pour leur permettre de déterminer la
capacité commerciale de leur client.
La procédure d'évaluation commerciale des
clients et surtout leurs ménages doit atteindre cinq buts principaux.
Premièrement, l'évaluation indique si le demandeur est solvable
après avoir recueillir les données nécessaires sur son
commerce, et le flux financier de son ménage. Deuxièmement, elle
fournit l'information pour s'assurer que le produit est conçu en
adéquation avec le besoin de crédit du demandeur et de sa
capacité. Troisièmement, l'évaluation permet au
chargé de crédit de collecter des informations subjectives sur le
caractère du demandeur de crédit en vue de déterminer de
façon intuitive la crédibilité de ce dernier.
Quatrièmement, cette procédure joue un rôle
d'éducation du client sur les aspirations et les mécanismes du
prêteur. Cinquièmement, l'évaluation aide à forger
une relation de travail positive entre le client et le chargé de
prêt. Après le montage de dossier, le chargé de prêt
doit faire une descente sur le terrain pour vérifier l'existence et la
légalité du bien déclaré en garantie ainsi que
l'exactitude des informations fournies. Pour faciliter le choix des emprunteurs
les institutions de microfinance doivent favoriser la proximité. Cette
proximité doit être une priorité non seulement
géographique mais aussi culturelle et doit permettre de rapprocher
autant que possible l'analyse et la décision de l'octroi de
crédit du micro-entrepreneur lui-même. C'est possible grâce
à deux mécanisme: l'implantation d'agence au sein de quartiers
à forte concentration de micro-entrepreneurs potentiellement clients du
SFD et la mise sur pieds d'un service « à domicile » au
travers des agents de crédits. Si le premier mécanisme permet
avant tout une proximité géographique, le second va bien
au-delà; en se rendant régulièrement
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sur le lieu de travail du micro-entrepreneur, l'agent de
crédit prend conscience des réalités du terrain et peut
ainsi progressivement mieux comprendre. Ceci est très important à
la fois pour le diagnostic posé avant l'octroi du crédit et pour
le suivi qui en sera fait. En travaillant en agence, on ne peut fonder un
jugement que sur des affirmations du micro-entrepreneur. Or, celui-ci a sa
propre perception des choses et il est peu probable qu'elle corresponde aux
exigences d'information de la plupart des procédures formalisées
d'évaluation d'un crédit. En outre, l'évaluation de
l'entreprise financée ne pourra être faite qu'à partir
d'une approche de terrain qui n'aura de sens que si elle est menée de
manière continu. Le lien de proximité qui permettra d'assurer une
parfaite relation entre le client et l'institution de crédit repose donc
avant tout sur le lien de confiance unissant l'emprunteur et l'agent de
crédit perçu comme un intermédiaire avec lequel on peut
discuter. Pour parvenir à établir cette relation de
proximité, il faut bien entendu former le personnel de terrain afin
qu'il comprenne bien son rôle et dispose de l'ensemble des
compétences requises. Il faut également lui donner les moyens
pratiques d'établir cette relation. Pour se faire, il faut que les
agents de crédit soient adoptés par la zone qui leur est
attribuée. Ceci suppose qu'ils y restent suffisamment de temps et la
rotation du personnel par zone soit relativement limitée ou, mieux
encore, qu'ils en soient directement issus (Rhyne, Rotblatt 1995 :115).
Deuxièmement, il faut que la qualité de leur travail soit
évaluée sur la base des résultats de cette
proximité (par exemple en évaluant le travail sur la base d'un
indicateur de retard de paiement) et non pas seulement sur la base d'un volume
de travail fourni. Certains SFD l'ont d'ailleurs bien compris puisqu'ils
combinent divers critère lorsqu'ils évaluent les agents de
crédits (Stearns 1993 : 85). Le rôle des agents de crédit
est donc essentiel et il y'a lieu d'accorder beaucoup d'attention. La confiance
que ceux-ci auront dans le système et dans les procédures
à respecter est un facteur clé de la réussite globale
(Kreps 1996 : 50), surtout lorsqu'il s'agit d'une institution en phase de
croissance ou de consolidation (Edgcomb, Cawley1994 : 101). Certains auteurs
estiment même que, bien avant d'autres facteurs, c'est l'application de
politique adéquate en matière de gestion et motivation du
personnel qui permet d'expliquer le succès rencontrés par
certaines institutions actives en microfinance (Jaine 1996 : 84). Quoi qu'il en
soit, de nombreux efforts ont été faits au sein de
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certaines institutions de microfinance afin d'encadrer au
mieux les personnes appelées à travailler sur le terrain et de
leur offrir de vraies perspectives en terme de carrière et de
développement personnel. Par ailleurs, des systèmes de motivation
ont parfois été mise en place sur la base de primes ou de
possibilités d'obtention de financement personnels à taux
réduits. Globalement, c'est clairement en jouant sur l'objectif louable
du SFD et sur l'autonomie dans le travail, que l'essentiel de la motivation du
personnel a généralement été obtenue, le sens de la
mission combiné avec un cadre de travail amicale, des structures de
gestion participatives, et l'utilisation de renforcements positifs compensant
ainsi souvent des salaires relativement bas.
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