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L’indépendance et l’impartialité du juge constitutionnel congolais.


par Jean-Dieudonné Divin BOSAGA SUMAILI
Université Protestante au Congo - Graduat en droit 2018
  

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Chapitre I : La justice constitutionnelle en Droit Congolais

Il est impérieux, avant d'entrer dans le vif du sujet, de planter le décor sur la matière en examen qui est la justice constitutionnelle en droit Congolais bien entendu. Nul n'est besoin de rappeler les notions susrévélées. De ce fait, tout au long de ce chapitre, il sera question tout d'abord de présenter la justice constitutionnelle en général (Section 1), et d'aborder enfin la question du juge constitutionnel au regard de la constitution congolaise actuellement en vigueur (Section 2).

Section 1 : Présentation de la justice Constitutionnelle en Droit Congolais

Institution pourtant prévue déjà à partir de la Loi Fondamentale du 19 Mai 1960 relative aux structures du Congo en son article 226, la cour constitutionnelle a tardé a finalement s'installer. Plusieurs raisons, notamment la mauvaise foi des acteurs politiques motivée par leur crainte de voir s'instaurer une cour ·surpuissante· qui, de surcroit, aurait la possibilité et la mission de contrôler leurs actes et de juridiciser la vie politique, ont occasionnés ce retard dans l'installation de cette haute cour.

L'étude de la justice constitutionnelle passe inéluctablement par une bonne présentation de celle-ci. C'est à cet effet que nous nous proposons de l'aborder en deux paragraphes afin de mieux cerner cette notion. Nous parlerons de prime abord de son origine et de son évolution (Paragraphe1) ; enfin, nous aborderons les notions sur les principes d'indépendance et d'impartialité du juge (constitutionnel) en droit Congolais (Paragraphe 2).

§1. Origines et évolution de la Cour

1. Création et installation manquée de la Cour constitutionnelle par la Loi fondamentale du 19 mai 1960

Tel que révélé ci-haut, la Cour constitutionnelle fut créée par l'article 226 de la Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo.21(*)

Déjà à l'époque, ses décisions et arrêts ne devaient pas être susceptibles de recours. La Cour était composée de trois chambres : une chambre de constitutionnalité, une chambre des conflits et une chambre d'administration.

De trois, ce sont lachambre de constitutionnalité et celle des conflits que nous allons aborder.

La chambre de constitutionnalité était compétente pour se prononcerpar arrêt sur la conformité des mesures législatives (tant centrales que provinciales) aux dispositions de la Loi fondamentale relative aux structures du Congo ainsi que de la loi fondamentale relative aux libertés publiques qui formèrent les deux, rappelons-le, en vertu des articles 3,5 et 230 de la Loi fondamentale du 19 mai 1960 la Constitution provisoire de l'Etat du Congo.22(*)

Ici, le contrôle par voie d'arrêt se fait à posteriori, c'est-à-dire après la promulgation des actes législatifs centraux (loi provenant du Parlement et ordonnance-loi émanant du Chef de l'Etat) et provinciaux (édit émanant de l'assemblée provinciale).

Il faut cependant affirmer que le contrôle des actes législatifs centraux et provinciaux pouvait se faire aussi a priori par voie d'arrêts motivés. En effet, la chambre de constitutionnalité devait être obligatoirement saisie avant la promulgation des lois et, sauf urgence spéciale dûment constatée, avant la signature des ordonnances-lois par le Chef de l'Etat.

Soulignons que ce mécanisme de contrôle était principalement organisé au niveau du pouvoir central. Toutefois, la chambre de constitutionnalité pouvait être saisie avant la promulgation des édits.23(*) Cependant, les lois et édits budgétaires étaient exclus de tout contrôle de constitutionnalité.24(*)

Il est utile de noter qu'en ce qui concerne les effets ou sanctions du contrôle de constitutionnalité de la Cour constitutionnelle à travers sa chambre deconstitutionnalité, toute loi ou ordonnance-loi déclarée non conforme à la Constitution provisoire est abrogée de plein droit ; il en est de même du sort de l'édit provincial au regard de la Constitution provinciale. Il s'agit naturellement d'un contrôle a posteriori.

Cependant, s'agissant du contrôle a priori par voie d'arrêts motivés, les lois et édits déclarés non-conformes ne peuvent être promulgués ; il en est de même des ordonnances-lois qui ne peuvent, dans ces conditions, être signées.

Par ailleurs, en tant que juridiction constitutionnelle, la chambre de constitutionnalité était aussi reconnue compétente pour connaître du contentieux de la division verticale des pouvoirs.

En effet, la chambre de constitutionnalité devait se prononcer sur chaque Constitution provinciale dès son adoption par l'Assemblée provinciale. Une Constitution provinciale ou certaines de ses dispositions déclarées non-conformes ne pouvaient être promulguées.25(*) Et de manière subsidiaire, du fait que la chambre des conflits était chargée de trancher les conflits de compétence entre le pouvoir central et le pouvoir provincial26(*), la chambre de constitutionnalité pouvait également vérifier si les édits ne sont pas contraires aux lois, aux ordonnances-lois, règlements et ordonnances dans les matières relevant à la fois des pouvoir central et provincial.27(*) La chambre des conflits, en revanche, était compétente pour régler les conflits pouvant survenir entre le pouvoir central et les provinces.

Soulignons que la matière constitutionnelle devait être traitée par la chambre de conflits et la chambre de constitutionnalité qui, toutes les deux, formaient le juge constitutionnel congolais de transition.

Faute d'installation de la Cour constitutionnelle, le pays ne disposa pas, jusqu'à l'adoption de la Constitution du 1er août 1964, d'une juridiction constitutionnelle.28(*)

* 21 Art. 226 de la Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo disposait que : «  La Cour Constitutionnelle est constituée d'une chambre constitutionnalité, d'une chambre des conflits et d'une chambre d'administration ».

* 22 L'art. 230 de la Loi Fondamentale du 19 mai 1960 relative aux structures du Congo disposait : « La chambre de constitutionnalité émet des avis motivés ou se prononce par arrêt sur la conformité des mesures législatives centrales ou provinciales aux dispositions de la présente la loi et la loi fondamentale relative aux libertés publiques ».

* 23 En ce qui concerne les édits, la saisine de la chambre de constitutionnalité n'était pas obligatoire. Le Président du gouvernement provincial et le Commissaire d'Etat représentant le pouvoir central en province disposaient, tous les deux, d'une faculté de saisine, au cas par cas.

* 24 Voir article 230, §1 in fine, de la Loi fondamentale du 19 mai 1960.

* 25 Voir article 231, §2, de la Loi fondamentale du 19 mai 1960.

* 26 Voir article 232 de la loi fondamentale du 19 mai 1960.

* 27 Voir article 231, §3, de la Loi fondamentale du 19 mai 1960.

* 28 Lire KALUBA DIBWA (D.), Du contentieux constitutionnel en République Démocratique du Congo. Contribution à l'étude des fondements et des modalités d'exercice de la justice constitutionnelle, Thèse de doctorat en droit public, Université de Kinshasa, Kinshasa, 2010, p. 180.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault