WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Lean et digitalisation au cœur de la transformation des entreprises.


par Christophe Duru
ESC Clermont Ferrand - Master en management 2020
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

III) L'inévitable association de ces deux concepts

« Le Lean et l'Entreprise 2.0 se rejoignent exactement ici : ils sont tous deux des formes de réponse à la complexité en préconisant de passer d'un système Command & Control à un système de réactivité intelligente et apprenante » (Yves Caseau, 2011).

Au travers des transformations induites par la révolution numérique et l'évolution profonde de nos sociétés économiques, le Lean et la Digitalisation se sont affirmés peu à peu dans l'ensemble des entreprises souhaitant prendre le pas du changement de leurs business et de leurs organisations. Et à lumière de nos analyses précédentes, il convient de constater que l'on retrouve l'ombre du Lean derrière la Digitalisation (A) pouvant nous aider à expliquer ainsi la Digitalisation de Michelin par le Lean (B).

A. L'ombre du Lean derrière la digitalisation

Lean et Digitalisation sont donc principalement des méthodes organisationnelles visant à promouvoir et définir le cadre d'une transformation d'une entreprise soucieuse de saisir de nouvelles opportunités mais aussi d'accroître la performance de ses processus afin de garantir sa pérennité. Et au travers de ces différentes démarches, il est aisé de constater que les objectifs et enjeux sont globalement les mêmes.

Tel que nous l'avons vu au cours de la première partie de notre étude, le Lean suppose au-delà des outils managériaux qu'il propose, une approche et une compréhension d'un certain nombre d'enjeux (clients, salariés, performances) par l'ensemble des membres de l'entreprise, qu'ils soient directeurs ou simple collaborateur.

Ce trio d'enjeux récurrents issus de l'histoire de l'évolution des sciences de l'organisation de l'entreprise et de ses processus trouve son origine dans un environnement socio-économique qui n'a cessé d'évoluer ce dernier siècle jusque dans le rapport des individus à leur mode de consommation. Ainsi, le Lean qui s'affirme aujourd'hui comme l'aboutissement de ces réflexions et expérimentations les présente sous 3 axes :

- Le salarié en veillant à l'impliquer dans le processus décisionnel pour l'amélioration

des processus, donner du sens à ses fonctions et s'assurer de son bien-être qui résulte en l'augmentation de la qualité des processus où il se retrouve engagé, tout en accroissant

35

sa position et son acquisition de nouvelles compétences. Il y a ici une véritable prise de conscience du capital humain et la nécessité développer le potentiel de chacun des employés pour délivrer de bons produits et services.

- Le capital ou la performance de l'entreprise comme vecteur essentiel de sa pérennité. En effet, la « chasse au gaspillage » comme principe du Lean suppose une volonté de renforcer le fonctionnement des processus pour réduire les coûts d'une part, mais surtout se concentrer sur les tâches à valeur ajoutée d'autre part. S'il existe une multitude d'outils à disposition des organisations, lesquels issus du Lean et de ses applications dans divers secteurs d'activités, l'enjeu majeur tourne autour d'une volonté d'amélioration continue des processus existants via une remise en question permanente de l'entreprise, ce qui est tout autant pertinent dans une logique d'adaptation des organisations à leurs environnements eux-mêmes en perpétuel évolution.

- Le client comme élément au coeur des processus décisionnel et des actions d'améliorations. S'il est évident que le client est un élément clé nécessaire au fonctionnement de l'entreprise, le fait qu'il existe au sein de chacun des processus de cette dernière est une réalité qui peut être ignorée. Cette orientation client constante tend à s'inscrire dans une tendance de tension des marchés où la croissance économique relativement lente fait face à des moyens de communication de plus en plus puissant, résultant en une concurrence acharnée.

D'une certaine manière, le Lean est un état d'esprit qui a su s'imposer dans l'environnement de ces dernières années à la faveur de bouleversements socio-économiques importants (choc pétrolier, ralentissement de la croissance économique, population de plus en plus éduquée...), répondant à un vide laissé par des évolutions ébranlant sans cesse les fondations des entreprises. Cet état d'esprit a conduit les organisations à ne penser leurs existences et leurs évolutions non plus seulement autour de leurs appareils productivistes, mais au travers des hommes qui les composent et de ceux qu'elles servent : les clients.

Ce revirement est particulièrement palpable dans la manière dont l'offre client a évolué au cours de ces dernières années, avec par exemple des concepts clés comme la « création de valeur pour le client » dans les sciences du marketing, « l'orientation client » dans le management de la qualité ou encore « l'user experience » dans le domaine du digital, lui-même relativement récent.

En effet, le digital tend en parallèle à s'imposer avec ses codes comme une nouvelle science de l'organisation dans la mesure où l'on associe aisément aujourd'hui la transformation du digital

36

à un concept plus général : la digitalisation qui apparaît alors comme « une opération de transformation totale de l'entreprise » visant à « réinventer intégralement son modèle (celui de l'entreprise) et toute la chaîne interne de fonctionnement : stratégie, organisation managériale, environnement collaboratif. » via une numérisation de « l'offre et toute la chaîne de création de valeur » (Guibert, 2011).

Fruit d'une révolution numérique toujours plus rapide et globale, la digitalisation a pour origine un fait commun pour les entreprises, à savoir leur adaptation à un environnement économique en perpétuel changement, mais dont l'originalité ici repose sur des bouleversements importants dans une période réduite, que ce soit au niveau de l'évolution des métiers (« 60% des métiers en 2030 n'existent pas encore ») que des technologies numériques (la 5G, smartphones...) qui ne cessent d'offrir toujours plus d'opportunités business et organisationnelles pour les entreprises.

Comme pour le Lean, cette transformation au coeur des entreprises poursuit des objectifs clairs traduits par les décisionnaires de nombre d'entre elles et pouvant en définitif se décliner en trois points :

- Améliorer la satisfaction du client, à la fois en profitant de tous les avantages des technologies du numérique pour mieux comprendre son besoin mais aussi pour finir des services et produits toujours plus facilement accessible. Aussi, cette notion de satisfaction client se retrouve dans le concept de « user experience » qui suppose de fournir à un client, parfois partenaire interne des entreprises, la solution la plus adaptée à son besoin. Plus encore, l'exemple des NATU nous a aussi démontré que le succès de ces entreprises « data-driven » reposait avant tout sur leur capacité à s'appuyer sur les opportunités de la digitalisation et des technologies associées pour proposer une offre de produit et services toujours au plus près des attentes de leurs clients.

- S'appuyer sur les compétences et l'engagement des employés composant l'entreprise comme vecteur de succès de la transformation digitale de l'entreprise. En effet, l'un des éléments généralement évoqué est la « culture digitale » qui ne peut exister qu'au travers des salariés la partageant par l'acquisition de compétences et l'implication dans ces projets de transformation. Par ailleurs, cet élément est d'autant plus crucial que son absence de prise en compte suffisante se trouve parmi les causes majeures des échecs de projets de transformation digitale.

- La performance de l'entreprise vu ici comme le fait de saisir les opportunités offertes par les technologies numériques pour accroître la performance des processus de

37

l'entreprise, notamment en réduisant le temps d'exécution de tâches à faible valeur ajoutée, voir en les supprimant, mais aussi en offrant de nouvelles perspectives aux entreprises qui trouvent là l'opportunité d'améliorer le contrôle de leurs activités opérationnelles.

Partant de ce constat, la proximité entre le Lean et la digitalisation semble apparaître comme une évidence dans la mesure où ils suivent les mêmes trois objectifs : la satisfaction du client, la performance de l'entreprise et la montée en puissance des salariés, à tel point que la vraie problématique pourrait être de savoir ce qui les différencie, mais la réalité semble plus complexe.

En effet, la digitalisation plus contemporaine que le Lean semble moins être une solution à des problématiques que la déclinaison de nouvelles opportunités d'un environnement socio-économique pris dans une transformation rapide, là où le Lean historiquement repose sur une volonté d'organiser au mieux l'entreprise après des décennies d'expérimentation au travers des courant de pensée qu'ont été le taylorisme, le fordisme et le toyotisme, afin d'assurer sa pérennité. La vérité pourrait être ailleurs.

En ce sens Yves Caseau dans sa vision de ces deux disciplines, bien qu'il préfère parler d'entreprise 2.0 plutôt que de digitalisation, nous explique que ces dernières « s'attaquent frontalement au problème de la complexité » dans la mesure où le Lean met en perspective « de façon simple et claire la contribution de l'employé sur la création de valeur » et la digitalisation en « favorisant la collaboration qui est impérative pour résoudre des problèmes complexes ».

Il apparaît donc une dualité certaine entre ces deux disciplines dans la mesure où leur efficacité, que ce soit au travers de projets d'ampleur ou d'actions plus localisées, repose généralement sur leur capacité à embarquer les hommes qui composent les organisations qu'elles modifient. C'est à ce titre que le Lean a pu devenir la discipline que l'on connaît aujourd'hui, et que la transformation digitale le deviendra au regard des causes majeures des échecs qu'elle peut rencontrer dans certaines entreprises, à savoir principalement le manque d'implication et de compétences des hommes qui prennent part et sont concernés par le projet.

Dans cette mesure, il apparaît également raisonnable de penser que le Lean, dès lors qu'il a été diffusé dans les entreprises pour amorcer en amont des changements organisationnels et mettre en place une « culture Lean » peut être un soutien non négligeable au déploiement d'une

38

transformation digitale au sein de l'entreprise, et s'il ne le fait pas directement, force est de constater qu'il en emprunte de nombreux codes et objectifs, ce qui par ailleurs peut également nous amener à penser que déployer efficacement une transformation digitale revient à déployer une démarche Lean qui n'en porte pas le nom tout en permettant d'aboutir aux mêmes résultats sur des problématiques numériques.

Parce qu'au-delà de leur simple proximité liée à leurs objectifs et leurs combats communs, il y a fondamentalement et intrinsèquement cette dimension visant à remodeler l'organisation de l'entreprise dans son ensemble, comme l'évoquait une étude d'Ernst & Young montrant que 42% des projets de transformation digitaux (Annexe 2, page 7) se faisait à l'échelle globale. Aussi, on retrouve cette fois-ci le concept de « culture », perçue à la fois comme un levier indispensable de l'entreprise « data-driven » sur la question de la digitalisation, mais également tout aussi présente dans le Lean qui redéfinit la position de l'homme dans la chaîne de valeur, à tel point que Yves Caseau parlera de « deux approches profondément humanistes ».

Ainsi et derrière ces réalités techniques, complexes et organisationnelles, il y a une fois encore un problème et un facteur commun, l'humain. En effet, ces démarches impliquant bien souvent la remise en question profonde de processus et pratiques existantes nécessitent une appropriation et acceptation de la part des organisations qui décident de se lancer dans de tel projets de transformation. On constate assez rapidement que l'enjeu n'est plus de s'armer d'experts et d'investir financièrement dans ce type de projets, mais avant tout de considérer que la transformation est une affaire de temps long qui ne peut réussir que par la capacité de l'organisation à emporter chacun de ses membres dans cette transformation, de la Direction jusqu'aux salariés en passant notamment par les managers comme intermédiaires.

Mais là où l'on peut retrouver l'ombre du Lean derrière la digitalisation, c'est bien évidemment en considérant que le Lean est une méthode reposant sur des principes testés et éprouvés, car plus anciens, mais aussi et surtout transverses et pouvant concerner l'ensemble de l'entreprise. Il est donc évident que le digital se soit approprié nombre de ces principes puisqu'il consiste, tout comme le Lean, à transformer l'entreprise par et pour l'homme, qu'il soit client ou salarié, tout en dégageant de la valeur ajoutée.

A ce titre, Michelin a tenté de s'approprier pour partie ces réflexions, notamment concernant la digitalisation qui, au travers de nombreux projets, a systématiquement veillée à remettre l'humain au centre des transformations de l'entreprise, que ce soit à l'échelle locale ou plus

39

globale, mais aussi en redéfinissant plus largement la position de l'humain dans ces processus de transformation.

Cependant cette appropriation transposée sur le terrain peut parfois témoigner de difficultés inhérentes à un grand Groupe où la communication en interne repose davantage sur la confiance dans des réseaux internes dont la constitution et l'animation nécessitent du temps.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Je voudrais vivre pour étudier, non pas étudier pour vivre"   Francis Bacon