3. L'émergence d'entreprises data-driven
Cette révolution numérique et les outils qu'elle
a transporté dans son sillage auront permis l'apparition d'entreprises
à dimension mondiale, connu du grand public et
généralement regroupé sous l'appellation «
Géants du Web » que l'on retrouvera tout d'abord sous un acronyme
désignant 5 entreprises : les GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon,
Microsoft). Ce phénomène GAFAM observé dès les
années 2000 (Vitali-Rosati, 2018)
26
regroupe des entreprises possédant une part importante
de marchés liés aux technologies numériques :
- 57% des part de marché du Cloud en en 2019
étaient détenus par Google, Amazon et Microsoft (Crochet-Damais,
2019)
- 95% des systèmes d'exploitation pour ordinateurs de
bureau, et la quasi-totalité de ceux
pour téléphones mobiles, sont détenus par
Microsoft et Apple (Net Marketshare, 2019) - 80% du marché des
navigateurs web sont détenus par Microsoft et Google (Net
Marketshare, 2019)
- En 2019, quatre des dix applications les plus
téléchargées appartenaient à Facebook (Cnews,
2019)
D'un côté et plus récemment, d'autres
entreprises surfant sur la révolution numérique ont su
émerger aux côté de des GAFAM au point même, du fait
de leurs croissances rapides dans divers domaines, de devenir de sérieux
compétiteurs. Ces entreprises se retrouvent regroupées sous
l'acronyme NATU (Netflix, Airbnb, Tesla, Uber) qui, ne pouvant jouir à
l'origine de leur création du monopole des GAFAM pionnières sur
certains marchés du numérique, ont su innover et se positionner
en rupture de certains business (Haski, 2019). Mais leurs développements
n'en restent pas moins le fruit d'une profonde intégration des enjeux et
opportunités liées à la digitalisation. Ainsi, on
retrouvera par exemple :
- Le recours intensif aux données issues du Big Data par
Uber et Netflix, l'un pour
optimiser la tarification des trajets (distance,
affluence...), l'autre pour constamment proposer du contenu vidéo plus
proche des attentes de ses utilisateurs (L, 2016).
- L'existence d'une fonction de commande automatique de
pièces défectueuses pour les propriétaires de voiture
Tesla (Benhammouda, 2019).
Ce faisant, il semblerait que l'atout des NATU par rapport
à leurs homologues plus anciens que sont les GAFAM semble être,
au-delà de la maîtrise des technologies numériques, une
compréhension profonde des attentes de clients comme pilier central
à tout processus de digitalisation et décisionnel, à tel
point qu'il n'est pas anodin de voir le nom de ces entreprises apparaître
dès que l'on parle d'entreprises « data-driven ». Dans ce
contexte, il ne s'agit plus de se digitaliser pour jouir des avantages de
technologies innovantes et nouveaux marchés qui en découlent,
mais de répondre toujours mieux aux attentes du client.
Les entreprises « data-driven », que l'on peut
traduire par « pilotées par la donnée », sont des
entreprises comme les autres en apparence (organisation humaine tournée
vers un objectif de
27
profitabilité) si ce n'est qu'elles ont su pleinement
s'approprier les enjeux et opportunités de la digitalisation. En ce sens
et pour pouvoir définir ce que peut être une entreprises
data-driven, il faudrait tout d'abord comprendre le terme « data-driven
» qui renvoie à « la construction d'outils, de
capacités, et, plus important, une culture tournée vers la
donnée » (Anderson, 2015). En ce sens, on constate qu'il ne s'agit
pas seulement d'être une entreprise disposant d'outils performants et
d'indicateurs extrêmement précis pour le pilotage de leurs
business, mais aussi et surtout des organisations où chaque individu
s'approprie les enjeux et bénéfices de la digitalisation.
L'aspect humain de l'entreprise data-driven se retrouve
d'autant plus confirmé qu'un récent sondage de NewVantage
Partners de 2019, intitulé « Big Data and AI Executive Survey 2019
» mené auprès de 64 dirigeants exécutifs de grande
entreprise à démontrer que le facteur humain était l'une
des raisons majeures des échecs des projets de transformation de ces
entreprises en entreprise data-driven. En effet, 72% des participants
estimaient qu'ils n'avaient pas réussi à forger une culture
« data » dans leurs entreprises quand dans le même temps 69%
d'entre eux révélaient également qu'ils n'étaient
pas parvenus à créer une organisation « data-driven »
(Bean, 2019).
Il apparaît donc que la volonté de devenir une
entreprise « data-driven » est une démarche de digitalisation
exigeante, bien souvent couronnée d'échec, et qui repose avant
tout sur la prise en compte de l'aspect humain de tout processus de
digitalisation qu'une entreprise souhaite déployer mais aussi et surtout
sur la compréhension des besoins clients qui ne peuvent qu'être
autrement placés au centre de tout processus décisionnel. En
effet et dans ce cadre, la digitalisation n'est plus seulement une question de
gain de performance de ses processus internes et externes à l'aide de
technologies numériques révolutionnaires, mais plutôt une
démarche basée sur la prise en compte de facteurs allant bien
au-delà des contraintes techniques inhérentes aux solutions
digitales, à savoir l'humain et le client.
|