C. Le syndicat des gens de maison
En vertu des dispositions des conventions 87 et 98 de l'OIT,
portant respectivement sur les principes de liberté syndicale et de
protection du droit syndical et du droit d'organisation et de
négociation collective, qui soit dit en passant, font partie des huit
conventions fondamentales, lesquels sont repris par la constitution
sénégalaise en son article 25, le syndicat national des
domestiques et gens de maison a été mis sur pied, et, est
affilié à la CNTS. Son secrétaire général M.
Aliou Tandian, est revenu sur les difficultés auxquelles ils sont
confrontés ; elles ont pour noms : « salaires non
conventionnels, harcèlements sexuels, longues heures de travail, absence
de bulletin de paie ». En outre, ce syndicat plus que tout autre,
doit relever de nombreux défis à commencer par la massification
qui reste le premier argument d'un syndicat alors que le recrutement se heurte
à plusieurs écueils : le caractère
hétérogène de ce groupe, son caractère informel, la
faiblesse des niveaux de qualification, la répartition ethnique,
géographique et l'analphabétisme. En sus de ces contraintes de
nature socioculturelle, d'autres liés à l'exercice de la
profession concourent à plomber la montée en puissance de ce
syndicat. On peut citer pêle-mêle l'isolement, l'ampleur des heures
de travail, la non appréhension du véritable rôle du
syndicat, comme en atteste le faible nombre d'adhérents.
C'est pour inverser cette tendance défavorable que le
syndicat a mis en place un centre de formation et une mutuelle. Il s'agira
d'abord d'assurer la formation des membres dans le domaine
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de la teinture et de la couture. Ensuite, il leur permettra de
connaître davantage leurs droits. Le centre se propose d'être un
outil de vulgarisation à la disposition des employeurs pour leur fournir
toutes les informations utiles sur les modalités d'embauche et les
dispositions réglementaires. Le syndicat national des domestiques et
gens de maison peut compter sur l'expertise de la CNTS pour atteindre ses
objectifs, entre autres la massification. « C'est dans cette politique
de rassemblement de tous les domestiques que nous essayons de renforcer les
capacités de leurs différentes déléguées
pour leur permettre d'accroître la sensibilisation » a
déclaré Mme Fatou Binetou Yafa, présidente du
comité national des femmes de la CNTS. En lui emboitant le pas, Mme
Véronique Niouky, présidente des domestiques dit tout l'espoir
qu'elle porte sur ce centre de formation, « la démarche est
salutaire, elle permet la formalisation de notre travail et
l'élimination des sévices auxquels nous sommes confrontées
», ajoute-t-elle. C'est dire que beaucoup reste à faire pour
que le syndicat des gens de maison occupe sa place dans l'univers syndical
sénégalais.
Par rapport à la Convention Collective Nationale
Interprofessionnelle dont ce syndicat était signataire,
déjà en 1982, elle dispose en son article premier,
quatrième alinéa que « des annexes par branche ou groupe
de branches professionnelles tenant compte des particularités de chaque
branche, notamment en ce qui concerne les catégories professionnelles
dans lesquelles sont classés les travailleurs seront conclus entre les
employeurs et les travailleurs représentant les branches
considérées ». Il n'a pas été
donné de suite favorable à cette disposition, faute d'avoir une
organisation patronale représentative. Par conséquent, les
employeurs des gens de maison ne sont aucunement liés par ses
dispositions qui sont plus favorables. De ce fait, le secteur domestique tout
comme le secteur agricole sont déshérités par rapport aux
autres secteurs régis par des annexes de la Convention Collective
nationale interprofessionnelle. Il appartiendra au syndicat des gens de maison
et d'autres qui suivront plus tard , à travers une action
éducative d'envergure, de lobbying et de plaidoyer d'aboutir à
moyen terme à une organisation forte susceptible d'infléchir dans
le sens souhaité la situation des employés de maison. D'où
la nécessité de faire appel à d'autres acteurs
étatiques ou non qui par leurs actions contribuent à rendre
l'avenir beaucoup plus radieux.
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D. L'action des acteurs impliqués
1. LES ACTEURS ETATIQUES
a. Le Ministère de la Fonction Publique, du Travail
et des Organisations Professionnelles
Il appartient à l'Etat de par ses fonctions
régaliennes de veiller entre autres à la bonne tenue de l'ordre
public social ou du climat social, comme on a coutume de dire à travers
ses structures compétentes. Ce travail exaltant est dévolu
à ce ministère à travers son bras armée, la
Direction du Travail et de la Sécurité Sociale qui chapeaute les
onze Inspections Régionales, toutes mises à contribution dans
l'élaboration des projets de loi et de règlements dans le domaine
social et le suivi de leur application, la prévention et le
règlement des différends, pour ne citer que ces missions.
La loi 97-17 du 1er décembre 1997 portant
Code du travail, déclinait ses ambitions dans l'exposé des motifs
en ces termes ; il s'agit d'adapter le Code du Travail « aux
réalités sociales et économiques de notre pays, en faire
un vecteur dynamique de la croissance et assurer à notre pays un
développement durable, dans l'équité et la justice
». Au nom du principe d'équité et de justice il doit
davantage contribuer à changer les mentalités et les
comportements par la dénonciation des abus et violation de toutes
sortes. Contrairement à beaucoup de pays où les employés
domestiques évoluent dans une zone de non-droit, les dispositions
légales prévues par le ministère de tutelle sont une
volonté manifeste du législateur sénégalais de
mettre fin à l'illégalité, un engagement pour la justice
sociale. C'est par des actions conjointes impliquant d'autres ministères
que cette question transversale pourra être résolue.
b. Le Ministère de la Femme de La Famille et de
l'Entreprenariat Féminin
Le Ministère de la Famille, de la Solidarité
Nationale, de l'Entreprenariat féminin et de la Micro finance, en tant
que point focal de la lutte contre la traite et les pires formes de travail des
enfants développe des stratégies consistant à intervenir
au niveau des zones de départ. Une étude menée dans le
département de Nioro a permis de juger de l'ampleur du mal. Selon ses
résultats, 42 % des 400 000 enfants recensés dans la rue y
prennent leur départ pour s'infiltrer dans les différentes
régions. Pis encore, 37 000 jeunes filles de 7 à 19 ans
travaillent comme employées de maison. Fort de ce constat, la
délégation ministérielle qui s'est déplacée
sur Nioro s'est engagée à
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mettre en oeuvre toutes les stratégies idoines pour
rester en conformité avec la convention 182 de l'OIT dont l'un des
principaux axes consiste à lutter contre la pauvreté et à
protéger les enfants.
C'est pour soutenir cette lutte que le gouvernement italien a
mis à la disposition du Sénégal, en décembre 2008,
un fond d'urgence de 117 millions de franc CFA pour le financement d'une
cinquantaine de microprojets en faveur des enfants et des familles
vulnérables. « En touchant les familles vulnérables, nous
touchons les enfants vulnérables. C'est dans ce cadre que des
activités génératrices de revenus seront mises à la
disposition des familles pour qu'elles fixent les enfants dans les foyers et
éviter ainsi les travaux domestiques précoces, les abus et la
mendicité », a confié le ministre de la famille.
Dans la même lancée, nous pensons que ce
ministère pourrait s'investir davantage dans le conseil puis le
financement de projets de reconversion d'employées de maison dans le
maraîchage, la restauration, le commerce etc. Cependant, la question des
employées de maison intéressent au premier chef d'autres acteurs
qui se sont déjà illustrés sur la scène
nationale.
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