§.2- L'inadéquation des règles de
procédures en matière pénale
Pour l'heure, on note une insuffisance des règles de
procédure pénale avant et pendant le jugement (A) et l'absence de
véritable sanction de la violation du délai raisonnable (B).
A- L'insuffisance des règles de procédure
pénale avant et pendant le jugement
Les règles de procédure pénale sont
l'ensemble des règles qui organisent le processus de répression
d'une infraction. Elles font le lien entre l'infraction et la peine, par le
biais de
78 Bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de
l'homme au Togo, op cit, p.26.
79 Rapport 2016 sur les droits de l'Homme-Togo,
United States Department of State · Bureau of Democracy, Human Rights
and Labor p.5.
80 L'unité de l'Etat de droit (rule of law),
ONUCI ; Etude d'évaluation du système judiciaire ivoirien,
l'organisation et le fonctionnement du système judiciaire en Côte
d'Ivoire ; Juin 2007.
SONDOU Solim Aimée : « Le temps dans la
justice pénale au Togo », 17-04-2019. Page
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phases intermédiaires et nécessaires portant sur
la constatation des infractions, le rassemblement des preuves, les poursuites
et le jugement de l'autorité compétente.
Le législateur a prévu dans son Code de
procédure pénale, des règles pour diligenter la
procédure pénale. Cependant, ces règles sont insuffisantes
puisqu'il existe d'autres règles telles le « plaider coupable
», « le délai de rigueur » et la limitation du nombre de
renvoi qui facilitent aussi la procédure pénale mais qui ne
figurent pas parmi les règles prévues par le législateur.
Il faut noter que l'absence de ces règles handicape sérieusement
la célérité de la justice pénale.
D'abord, le « plaider coupable » : il est d'origine
anglo-saxonne et a été introduit en procédure
française sous le nom de « comparution sur reconnaissance
préalable de culpabilité » par la loi du 09 mars 2004. Cette
règle est un mode de traitement des infractions qui consiste à
l'issue d'une procédure alléguée, à proposer au
prévenu une peine inférieure à celle encourue en
échange de la reconnaissance de sa culpabilité. Initialement
réservée au jugement de quelques petits délits, cette
règle concerne depuis la loi du 13 décembre 2011 tous les
délits. Toutefois elle n'est pas applicable à certains
délits ou certaines accusations graves. En d'autres termes, elle n'est
applicable qu'aux délits punis à titre principal d'une peine
d'amende ou d'emprisonnement d'une durée égale ou
inférieure à 5 ans81. Le « plaider coupable
», est destiné à accélérer le cours de la
justice pénale en organisant un traitement plus rapide d'un nombre
important de délits.
Le « plaider coupable », est mentionné
à l'article 93 du Code pénal82 mais ne fait pas encore
partie intégrante du Code de procédure pénale. Pourtant,
le législateur renvoie au Code de procédure pénale, les
conditions d'application, la détermination des infractions, et les
modalités du recours à cette procédure83. Il
faut préciser que l'application du plaider coupable est courante dans
les pays anglo-saxons, environ 90 fois sur 100 aux Etats-Unis84. Au
niveau national par contre, l'application du plaider coupable se
révèle difficile en raison de sa non actualisation dans le Code
de procédure pénale par le législateur. En France, la
comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité a
été appliquée pour la première fois par la justice
le 1er octobre 200485 et a acquis très tôt
une notoriété dans la mesure où les premières
81 Article 455 CPPF.
82 « Le Procureur de la République peut, d'office
ou à la demande du prévenu qui reconnaît les faits qui lui
sont reprochés, ou de son avocat, recourir à la procédure
de reconnaissance préalable de culpabilité ».
83 Article 94 CPT.
84 PRADEL (J.), Procédure pénale,
Edition Cujas, 19e édition, 10-2017, p. 297.
85 DELAGE (P.J.), La Comparution sur
Reconnaissance Préalable de Culpabilité : quand la pratique
ramène à la théorie, Dalloz 28 juillet 2005,
n°29, pp. 1970-1973.
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statistiques attestent que deux tiers des juridictions
pénales appliquent le « plaider coupable
»86.
Ensuite, le délai de rigueur : cette règle n'est
pas encore consacrée par le législateur togolais. Son homologue
sénégalais dans la quête d'une justice pénale dans
le délai optimal, a introduit le « délai de rigueur »
en matière de détention provisoire à travers l'article 127
de son Code de procédure pénale87.
Enfin la limitation du nombre de renvoi : le
législateur, a de même gardé silence par rapport à
la limitation du nombre de renvoi. Ce n'est pas le cas du législateur
sénégalais qui, dans sa volonté de proscrire des
manoeuvres dilatoires dont fait souvent fi certains justiciables et leur
conseil, a disposé à son article 385 de son Code de
procédure pénale : « une affaire en état
d'être jugée ne peut faire l'objet de trois renvois successifs
pour quelque cause que ce soit ».
Relativement au silence du législateur togolais
concernant ces nouvelles règles de procédure, il faut estimer que
le Code de procédure pénale est dépassé. L'absence
de véritable sanction de la violation du délai raisonnable
entrave la bonne administration de la justice pénale.
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