B. Multiplicité de texte sur l'environnement
Les AME constituent l'épine dorsale de la gouvernance
mondiale de l'environnement. Depuis les années 1960, période
d'apparition des premiers accords, les AME se sont multipliés puis ont
connu leur apogée trois décennies plus tard. Après un
léger recul, on dénombre aujourd'hui plusieurs centaines
d'accords sur l'environnement, régionaux et bilatéraux pour la
plupart. Ils ont pour point de départ un traité ou une
convention-cadre que de nouvelles règles plus précises viendront
compléter par la suite, par le biais d'un ou plusieurs protocoles. Pour
être légalement contraignant, le traité doit être
ratifié par le nombre minimal requis de pays. Les AME reposent
généralement sur un secrétariat permanent pour les
activités d'organisation et de préparation du processus de
négociations. Organe décisionnel suprême, la
conférence des parties, c'est-à-dire l'assemblée des
états signataires, a lieu une ou deux fois par an.
Les conventions mondiales de l'environnement s'appuient
également sur des organes subsidiaires spécialisés dont le
rôle est de fournir des avis scientifiques, de mise en oeuvre ou de
conformité. Bon nombre d'AME opèrent en lien étroit avec
le Programme des Nations Unies pour le développement, qui fournit
assistance et conseils aux parties sous des formes variées. Soutenant
majoritairement les pays en développement signataires des principaux AME
dans la mise en oeuvre de leurs engagements, le Fonds pour l'environnement
mondial joue un rôle crucial. Quelques AME disposent également
d'un fonds dédié à la mise en place des initiatives dans
les pays du Sud. Enfin, pour compléter le paysage juridique de la
gouvernance mondiale, des partenariats et des instruments non contraignants
procédant du soft law (le droit mou) ont également vu le
jour. En somme, les organes multilatéraux en faveur de l'environnement
se sont appuyés sur un cadre institutionnel sophistiqué et
élaboré qui n'a eu de cesse d'évoluer. Que les
institutions oeuvrent en silo ou en interaction, l'objectif global de ce «
complexe de régimes environnementaux » est de protéger
l'environnement, par des initiatives locales ou mondiales177.
D'aucuns reprochent à ce complexe d'être trop
fragmenté, d'où son manque d'effectivité, et prônent
la création d'une Organisation mondiale de l'environnement (OME).
Nombreux sont les partisans du rattachement d'une CIE à l'OME. Or, face
à la profusion institutionnelle, la nécessité d'une ou
plusieurs cours spécialisées ne va pas de soi. Mais l'argument
principal en faveur d'une CIE réside dans l'ineffectivité du
système existant. De
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fait, les juristes mesurent l'effectivité sur le seul
critère des procédures de règlement des différends.
Les régimes internationaux de l'environnement présentent des
mécanismes de règlement des différends plus ou moins
effectifs. Dans les années 1970, les auteurs des traités se sont
contentés de s'accorder sur l'existence d'un problème et d'y
remédier par l'instauration d'un AME, sans autre
considération178.
Dans la décennie suivante, des objectifs et des
échéanciers ont été fixés afin de mesurer
les avancées éventuelles. Dans les années 1990, des
obligations différentielles et des considérations sur le rapport
coût performance ont été introduites ; depuis, certains
régimes s'appuient sur des mécanismes de marché. Avec
l'expansion démographique et la croissance de l'activité
économique de ces trente dernières années, nous pouvons
sans hésiter formuler l'argument contrefactuel selon lequel sans ces
AME, la situation de l'environnement serait bien pire. Pourtant, aucun
défi environnemental majeur n'a été complètement
résolu par ces régimes et rares sont les exemples de
réussite179.
De façon générale, les mécanismes
de suivi et de contrôle de l'application des AME sont mous, les
règles souvent imprécises et les sanctions rarement
appliquées. Le régime sur la couche d'ozone, le Protocole de
Kyoto et la Convention Aarhus font figure d'exceptions. Souvent, le niveau de
conformité n'est pas lié à l'effectivité ou la
capacité d'un AME à résoudre un différend, car les
règles ne sont en général pas assez contraignantes pour
apporter une solution au problème180.
§2. Obstacles procéduraux
« La justice est gratuite mais onéreuse »
dit-on. Ce principe longtemps consacrer par les droits interne des Etats peut
également constitue un obstacle à l'effectivité du droit
d'accès à la justice du fait que le frais de justice joue un
rôle non négligeable dans le déroulement d'un procès
de manière générale et encore plus en matière de
protection de l'environnement. Ainsi, le manque de moyen peut impacter le sort
du procès. Il en est de même de la durée des
procédures. Les instruments universels que régionaux ne cessent
de rappeler au juge la nécessité de respecter un délai
raisonnable dans le traitement des dossiers.
178 Steinar Andresen, Op. Cit.
179 Idem 180Ibidem
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Cependant, nous ne retiendrons à ce niveau que deux
obstacles procéduraux à l'effectivité du droit
international de l'environnement et du droit d'accès la justice
environnement : l'inexistence d'une juridiction internationale de
l'environnement qui connaitrait des atteintes à l'environnement dans le
chef des Etats et des individus, d'une part ; les coûts de
procédure en matière environnementale.
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