Section 2 : La sociologie des usages
Pierre Chambat (1994), précise que la sociologie des
usages n'est pas une sous-discipline reconnue de la sociologie mais qu'elle
est une préoccupation qui traverse trois disciplines : la sociologie de
la technique, la sociologie de la communication et la sociologie des modes de
vie75.
Ces trois (03) disciplines se reconnaissent dans le pouvoir de
l'information chez Taylor, la sociologie cognitive de Cicourel, et les nouveaux
paradigmes du langage chez Mercklé.
73 Marshall McLUHAN et Quentin FIORE (1967), The
medium is the message, an inventory of effects, Torronto, New York, Bantam
books Inc.
74Voir entretien accordé par Marshall
McLUHAN (1969), "Je n'explique rien, j'explore". In: Communication et
langages, n°2, pp. 89-100.
75Voir Josiane JOUET (2000), Retour critique
sur la sociologie des usages, article de la Revue réseaux
n°100, p.2.
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2.1. L'information, une arme redoutable chez Robert S.
Taylor :
Parlant de toile de fond, Taylor conclut en 1991 dans un de
ses ouvrages76, qu'on peut utiliser l'information pour plusieurs
raisons parmi lesquelles : comprendre une situation, faire et savoir
comment faire quelque chose, prévoir des événements,
développer ses rapports avec l'autre en favorisant sa situation sociale
ou son épanouissement ... L'information devient à ce titre
une arme redoutable pour s'affirmer dans l'ère du numérique. A en
croire finalement Taylor, il faut la chercher où qu'elle se trouve,
même dans les réseaux sociaux. Mais tout dépendra de la
finalité de son porteur et de ce qu'elle (l'information) porte.
2.2. Cicourel mise pour la sociologie cognitive
:
Aaron Cicourel s'appuie sur le langage et la signification, en
tant qu'éléments essentiels de la manière dont
l'interaction sociale quotidienne est coordonnée et
représentée. Il supplante un peu Garfinkel du fait qu'il essaie
de consolider son intérêt à la fois pour la cognition et la
technique. Il cherche à montrer comment les individus appartenant
à différents groupes essaient de développer, de
représenter et d'évaluer leurs méthodes de communication :
comment ils créent ce que nous appelons le langage ? Comment cette
représentation saisit et altère nos expériences ? Et
enfin, comment nous utilisons le langage pour décrire notre
procès de connaissance. Pour tenter de répondre à ces
trois préoccupations de Cicourel, Levy (1990) recommande l'innovation.
Il affirme que les technologies de l'intelligence nous présentent
les innovations technologiques depuis l'écriture jusqu'à
l'informatique comme une nouvelle potentialité pour la pensée
humaine. L'homme va donc toujours s'adapter en conséquence face
à l'innovation.
76Robert S. TAYLOR (1991), Information use
environment, in Progress in communication science, eds., Brenda DERVIN and
Melvin J. VOIGT, Norwood, p.105.
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En outre, avec Cicourel, le problème de la
médiation ou de conciliation des outils et techniques est posé
tant en termes d'outils intellectuels (au sens de Vygotski) qu'en termes
concrets. La rencontre entre ethnométhodologie et informatique se
consolide, en passant par la confrontation avec l'intelligence artificielle, et
l'on commence à sortir peu à peu du modèle d'interaction
physique ou de relation face à face qui était le
référent Schutz.
2.2. Mercklé recommande un journalisme plus
créatif !
Avoir une fenêtre sur un réseau social peut
répondre au besoin d'appartenance d'un individu à une
communauté qui partage ses intérêts, voire son langage,
avec laquelle il a des affinités. On parle de tribu. Cela répond
aussi au besoin d'être reconnu par les membres de sa communauté.
Selon le sociologue Pierre Mercklé, les réseaux sociaux
pourraient constituer un nouveau paradigme sociologique, une
«troisième voie» théorique entre le holisme et
l'individualisme sociologique dans la mesure où d'une part, on
assiste à une montée de l'individualisme et d'autre part,
à une résurgence de l'interactionnisme grâce ou à
cause d'un fort besoin d'appartenance à une ou plusieurs
communautés qui se frottent régulièrement et se
complaisent à plus de créativité de la part de leurs
acteurs respectifs.
En effet, parlant de créativité, l'utilisation
de la technique est indispensable. Elle nécessite d'acquérir un
certain nombre de savoir-faire et d'habiletés. Josiane Jouët
précise que les valeurs de la rationalité et de la performance de
la technique imprègnent les usages fonctionnels mais aussi ludiques
du Web. Elle affirme que les travaux en sociologie de l'innovation
ou en ethnométhodologie mettent en évidence les va-et-vient entre
usager et concepteur77 ou encore la solidarité entre
l'homme, en général, et la machine.
77Voir Josiane JOUET (2000), Retour critique
sur la sociologie des usages, article de la Revue réseaux
n°100, p.3.
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En s'appuyant par exemple sur la pyramide des besoins de
Maslow, les réseaux sociaux permettent aux utilisateurs de satisfaire
les besoins d'appartenance (faire partie d'un groupe, d'un club) et de
reconnaissance (par ses amis, le fait d'avoir le plus d'amis possible).
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