CHAPITRE 2 : DISCUSSION THEORIQUE:
Dans l'optique d'évaluer la validité de nos
hypothèses de recherche, il importe de rappeler notre question
principale de recherche : Est-ce que la fréquentation de
Facebook et Twitter participe à rendre plus intelligente la
manière de travailler du journaliste de quotidien au Cameroun ?
Cette interrogation va nous nous permettre de déterminer
plus facilement les notions qui feront l'objet de ce chapitre.
D'après Galtung (1970), une théorie est un
ensemble d'hypothèses structurées par une relation d'implication
ou de déduction.
Jacob Levy Moreno (1933) est le premier à avoir
représenté un réseau social vers le début de la
décennie 1930 - 1940. Son objectif étant de visualiser
graphiquement un réseau social, il a représenté les
personnes par des points et une relation entre deux personnes par une
flèche.
Figure 2 : le réseau social chez Moreno
A B
Relation (AB, BA)
Personnes A et B
Source : nos recherches.
Au milieu du vingtième siècle, Cartwright et
Harary ont appliqué la théorie des graphes à l'analyse des
réseaux sociaux dont l'évolution et la représentation
seront passées en revu par Scott (2000). Plus tard, Newman (2003) et
Mika (2007) vont rappeler quant à eux, les caractéristiques
relatives à la structure des réseaux sociaux. La principale
caractéristique est l'effet de petit monde issu de la
célèbre expérience de Milgram (1967). Ce
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dernier essaie de montrer dans un réseau social la
connexion est établie entre deux ou plusieurs personnes (ayant
habituellement une affinité) par un chemin de courte distance. Il
parviendra à être plus convainquant en expliquant que le plus
court chemin entre deux sommets dans un réseau social de taille « n
» est de l'ordre de log(n). Autrement dit, lorsque la taille du
réseau augmente, la communication devient plus directe.
Wellman (2001) argumente que les relations en ligne forment
des réseaux sociaux virtuels représentatifs des réseaux
sociaux réels. En effet ces réseaux virtuels sont
créés à partir d'interactions initiées par des
personnes physiques. Cet argument est confirmé par Mika (2007), mais il
souligne le caractère incomplet de ces réseaux sociaux, en raison
de l'absence, online, de certaines composantes, de la réalité.
Hendler et Al(2008) montrent que le web amplifie littéralement la
connectivité des utilisateurs en rapprochant qualitativement les
réseaux virtuels des réseaux réels.
Pour mieux expliquer le courant théorique de
l'ethnométhodologie interactionniste évoquée plus haut, il
convient tout d'abord de le définir avant d'aborder le débat dans
le détail. Nous parlerons tour à tour de la notion de
réception dans les médias, de la sociologie des usages, et enfin
de l'analyse des contenus.
De manière littérale, l'ethnométhodologie
est un courant qui étudie les groupes à travers des
procédés ingénieux que les sujets du groupe connaissent ou
fréquentent pour l'accomplissement continu des activités
concertées de la vie quotidienne.
Outre l'interactionnisme, l'ethnométhodologie de Harold
Garfinkel va puiser dans une autre source, celle de la sociologie
phénoménologique d'Alfred Schütz (1899-1959).
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Section 1 : La réception dans les
médias
1.1. Balle et la fonction réception dans les
nouveaux médias :
Balle sera l'un des pionniers de la communication
médiatisée dans une perspective interactionniste. A travers
cette notion, il essaye de traduire un partage d'information dans lequel les
usagers des médias, qu'ils soient émetteurs ou
récepteurs, se confondent désormais et agissent en fonction non
seulement des objectifs qu'ils se fixent (cf. la figure 3 plus bas). Il
considère également que ces usagers des médias se
font une représentation des moyens dont ils disposent et des contraintes
qu'ils subissent pour s'exercer ; il ne fait plus de doute aujourd'hui
qu'un grand nombre de contenus médiatiques (images violentes,
publicité, actualités, idéologies sous-jacentes aux
émissions...) forment, renforcent ou modifient les
représentations, les idéologies et les actions
sociales72. A en croire Balle, le web est favorable au fait que
tout le monde puisse devenir du jour au lendemain usager des médias
(journaliste), et de la même manière, que ce dernier devienne
consommateur d'une information provenant d'un simple usager (un simple
journaliste, un journaliste témoin,ou un journaliste citoyen).
Avec les réseaux sociaux, nouveaux médias
d'après Balle, la communication n'est plus n'est plus verticale et
unidirectionnelle. La réception de l'information n'est plus seulement
réservée au consommateur traditionnel, elle l'est aussi pour
l'émetteur traditionnel.
72Pascal MARCHAND (Dir.) (2004), Psychologie
sociale des médias, Presses Universitaires de Rennes, 2004. Didier
COURBET, Marie Pierre FOURQUET-COURBET (Dir.) (2003), La
Télévision et ses influences, Bruxelles, De Boeck
Université/INA.
Figure 3 : La réception de l'information avec les
médias classiques (sans la technologie Web 2.0)
Emetteur (porteur de l'information)
Information
Récepteur
Sens de la hiérarchie
A
B
Source : nos recherches.
Figure 4 : La réception de l'information dans les
nouveaux médias (avec la technologie Web 2.0)
Récepteur/ Emetteur
B
Récepteur/ Emetteur
A
Internet
A Sens de la B
hiérarchie
Information
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Source : nos recherches.
De ce qui précède, la relation qui existe entre
les interlocuteurs et le message est étroite et jette les bases de la
dépendance de Marshall McLuhan.
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1.2. McLuhan mise sur l'importance des contenus
:
Dans son livre « pour comprendre les médias
», publié en 1964, en affirmant que « le message,
c'est le médium », Marshall McLuhan essaie de mettre au sein d'une
même sphère le contenu et le contenant. Selon lui, ce qui
importe ce n'est pas le contenu des messages, mais la façon dont
ceux-ci sont transmis, et, ajouterions-nous, reçus. L'important
c'est le « message » exercé par les médias sur les
modes d'appréhension et de perception du monde et de ses
réalités. Il affirme que le média est toute extension
de la faculté humaine..., la roue est une extension du pied et
le livre une extension de l'oeil73.C'est pour cette raison que
certains réseaux sociaux pourraient être comparés à
l'image même des contenus qu'ils portent et des utilisateurs qui s'y
trouvent. Mais des contenus qui malgré une certaine
illégitimité se reconstruisent régulièrement dans
un environnement que McLuhan qualifie d'électronique, où
tout va vite, où tout change, et dont une des conséquences est
que nous en sommes tous ou presque devenus dépendants : tous, nous
dépendons de tout74.
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