Les matériels et infrastructures scolaires
Au moment où on peut considérer que la
réussite des élèves est tributaire de l'existence d'au
moins d'un manuel scolaire par élève, la majorité de ceux
du primaire, surtout du milieu rural, en est dépourvu. Si l'on
considère l'ensemble des enfants scolarisés, l'État ne
parvient à assurer la scolarisation que d'un quart environ de ceux-ci.
Ce sont donc les nombreuses écoles privées, religieuses ou
laïques, payantes pour la très grande majorité, qui
reçoivent le plus grand nombre d'enfants en âge scolaire. Dans les
zones rurales, certaines familles habitent trop loin de toute école pour
pouvoir y envoyer leurs enfants. Ou s'y prennent trop tard pour les
inscriptions, et bien des enfants ne trouvent place ni dans les écoles
de l'Éducation nationale ni dans les écoles privées
proches de leur domicile, tant ces établissements sont
déjà surchargés. Il arrive souvent que les classes des
écoles accessibles à d'autres qu'aux enfants des riches comptent
jusqu'à cent élèves, dans un espace prévu pour
trente, et avec du matériel scolaire à peine suffisant pour
vingt. Dans ces «pépinières», un malheureux enseignant
s'épuise à donner l'illusion d'une école faisant
bégayer et répéter par coeur à ses
élèves des notions qui restent totalement hermétiques au
plus grand nombre, et parfois à l'enseignant lui-même. Les
enseignants mal formés, accablés par un trop grand nombre
d'élèves, se contentent souvent d'utiliser des manuels
désuets jusqu'à l'absurdité, qu'ils ont eux-mêmes
quand ils étaient élèves, ce qui les incite aussi à
pratiquer des méthodes pédagogiques dépassées,
répétitives et décourageantes.
En Haïti, l'un des problèmes les plus persistants
des écoles publiques ou privées, particulièrement en zone
rurale, est celui du matériel scolaire. Il n'est pas rare de voir une
classe de plus de cinquante élèves, dont une dizaine seulement
ont en main le livre de lecture, ou de géographie, ou d'histoire...
nécessaire pour suivre le programme. Certains élèves n'ont
même ni plume ni cahier. Scolariser un enfant représente pour les
parents une très lourde charge. Il faut d'abord payer un écolage
mensuel ou annuel (même dans les écoles nationales, il faut payer
un frais d'inscription). Ensuite, le port de l'uniforme est nécessaire.
Et la tradition, ainsi que la fierté familiale et surtout celle de
l'enfant exigent que les petits écoliers et écolières se
présentent convenablement chaussés à l'école.
En fait, dans la grande majorité des écoles,
aucun matériel scolaire n'est vendu à des conditions avantageuses
ni prêté gratuitement aux élèves. Dans le milieu
rural, l'argent est rare. Sur le plan alimentaire, on consomme d'abord ce qu'on
y produit. Le peu d'argent disponible est d'abord utilisé pour les
besoins essentiels. Étant donné son prix, le matériel
scolaire n'a pas la priorité pour l'écolier. Les parents ne
perçoivent pas la nécessité d'en procurer aux
élèves, car eux-mêmes n'ont jamais fréquenté
l'école. Le peu de parents qui savent lire et écrire ont
été dans le système de répétition de phrases
ou de mots dont le sens demeurait bien souvent énigmatique. Les parents
doivent donc faire face, à chaque rentrée scolaire, à des
dépenses considérables pour chacun de leurs enfants. Dès
lors, on comprend qu'ils choisissent de n'envoyer que certains de leurs enfants
à l'école et qu'ils fassent l'économie des
matériels scolaires. En ville comme en campagne, la dégradation
de la situation économique des familles entraîne chaque
année le retrait de l'école de bon nombre d'enfants qui avaient
entamé une scolarité primaire normale. Non seulement les familles
ne se trouvent plus en mesure d'assumer les frais de scolarité, mais la
performance de l'enfant à l'école est requise pour encourager sa
famille... Cette complication pour la scolarisation des enfants en Haïti
peut être définie comme un fléau national.
L'éducation des écoliers haïtiens n'est
pas toujours assurée dans de bonnes conditions d'infrastructures
physiques et environnementales. L'espace insuffisant dans les salles de classes
pour accueillir tous les enfants inscrits au cours d'une année scolaire
surtout dans les écoles publiques, la quantité de mobiliers
disponibles sont autant de facteurs qui provoquent les échecs scolaires
souvent enregistrés chez les enfants.
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