UNIVERSITÉ D'ÉTAT D'HAÏTI (UEH)
ÉCOLE DE DROIT ET DES SCIENCES ÉCONOMIQUES DES
GONAÏVES
SECTION JURIDIQUE
THÈME: COUP D'OEIL SUR L'ÉVOLUTION DU
DROIT À L'ÉDUCATION DES ENFANTS DANS LA CHAINE DES CAHOS EN
HAÏTI DE 1983 À 2010
Mémoire de sortie de l'étudiant
Maréus TOUSSELIAT
Pour l'obtention du grade de Licencié Ès
Sciences juridiques
Directeur de recherche : Dufrène GUILLAUME
PROMOTION 2004-2008
TABLE DES MATIÈRES
TABLE
DES MATIÈRES
2
AVANT PROPOS
6
REMERCIEMENTS
8
DÉDICACES
9
SIGLES ET ABREVIATIONS
10
INTRODUCTION
12
PROBLÉMATIQUE
16
HYPOTHÈSES DE TRAVAIL
17
MÉTHODOLOGIE DU TRAVAIL
18
INTÉRÊT POUR LE SUJET
19
DÉLIMITATION DU SUJET
21
CHAPITRE I
22
DÉFINITION DES CONCEPTS DROIT ET ÉDUCATION
22
DROIT
22
ÉDUCATION
24
LE CONCEPT DE L'ÉDUCATION DANS LE TEMPS ET DANS L'ESPACE
25
Éducation dans l'Antiquité
25
La transmission du savoir en Grèce et à Sparte
25
Éducation au Moyen Âge
26
Éducation à l'Époque contemporaine
29
Historicité de la Chaîne des Cahos
31
Présentation géographique et
caractéristiques de la Chaîne des Cahos
31
Climatologie
32
Hydrographie
33
Géologie et pédologie
33
Les potentialités de la Chaîne des Cahos
34
Les principales denrées de la Chaîne des Cahos
35
La vie socioculturelle dans la Chaîne des Cahos
35
CHAPITRE II
38
LE DROIT À L'ÉDUCATION PRIMAIRE DE L'ENFANT EN
DROIT INTERNATIONAL PUBLIC
38
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT EN DROIT
CONVENTIONNEL
38
a) Le droit à l'éducation de l'enfant dans la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
39
Le droit à l'éducation de l'enfant dans la
Déclaration des droits de l'enfant de 1959
39
Le droit de l'enfant dans les Conventions régionales
ratifiées par Haïti
40
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT À TRAVERS
LES ENGAGEMENTS PRIS PAR L'ONU
44
a) La Déclaration du millénaire: un acte
unilatéral
44
Les actes unilatéraux des Organisation Internationales
44
La Déclaration du millénaire et les autres accords
non juridiques
45
Le sommet mondial pour les enfants et le rapport du
Secrétaire Général de l'ONU du 27 mars 2000
45
1) Le sommet mondial pour les enfants de 1990
45
2) Le rapport du Secrétaire Général de l'ONU
du 27 mars 2000
47
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT EN DROIT POSITIF
HAÏTIEN
49
a) Le droit à l'éducation de l'enfant dans la
Constitution de la République d'Haïti
49
L'égalité des chances dans la Constitution
Haïtienne
50
LA LOI-CADRE DE L'ENSEIGNEMENT EN HAÏTI
52
a) Les prescrits légaux et la réalité
observée: un contraste amer
52
Le retard enregistré en Haïti dans la mise en
application des Conventions et les Lois de la République relatives
à l'éducation
53
CHAPITRE III
54
LA RÉALITE DU DROIT À L'ÉDUCATION PRIMAIRE
DE L'ENFANT EN HAÏTI
54
ÉVOLUTION DU SYSTEME ÉDUCATIF EN HAÏTI
54
a) Le système éducatif haïtien après
l'indépendance
54
Création des premières écoles
55
L'évolution du système scolaire
56
Le contexte sociopolitique
57
ANALYSE CONTEXTUELLE DU DROIT À L'ÉDUCATION DE
L'ENFANT EN HAÏTI
60
a) Le cycle d'enseignement primaire/enseignement fondamental
60
Le cycle d'enseignement secondaire
61
Le cycle d'enseignement supérieur et universitaire
61
LES CONDITIONS ET LA QUALITÉ DE L'ENSEIGNEMENT EN
HAÏTI
62
Les conditions des enseignants
63
Les matériels et infrastructures scolaires
64
La vétusté et le délabrement des
infrastructures scolaires
66
CHAPITRE IV
67
L'ÉDUCATION DES ENFANTS DE LA CHAINE DES CAHOS AU REGARD
DU DROIT HAÏTIEN ET DES CONVENTIONS INTERNATIONALES
67
LE MILIEU SCOLAIRE DANS LA CHAINE DES CAHOS
68
a) Les établissements scolaires existant dans la
Chaîne des Cahos en 1983
68
b) Infrastructures scolaires dans la Chaîne des Cahos
68
c) Le niveau académique et pédagogique des
maîtres dans la Chaîne des Cahos
69
ÉVOLUTION DANS LA SCOLARISATION PRIMAIRE DANS LA
CHAÎNE DES CAHOS DE 1983 À 2010
71
a) Taux de scolarisation primaire dans la Chaîne des Cahos
en 1983
72
b) La qualité et le niveau d'enseignement dispensé
dans les écoles durant la première décennie
72
c) Nombre d'écoles créées dans la
Chaîne des Cahos de 1983 à 2010
73
IMPACT DE L'ÉDUCATION DES ENFANTS DE LA CHAÎNE DES
CAHOS SUR L'AVENIR DE LA SOCIÉTÉ
74
RECOMMANDATIONS
76
CONCLUSION
78
BIBLIOGRAPHIE
81
AVANT PROPOS
La situation des enfants partout à travers le monde
reste un problème majeur au début du XXIe
siècle. La grande majorité d'entre eux est confrontée
à une misère sans précédent. Ils sont privés
de soins élémentaires, victimes de crise politique ou
livrés à eux-mêmes. Ils sont liés à la
maltraitance non seulement en Haïti, mais aussi dans d'autres pays de la
Caraïbe et du monde, qui a provoqué une prise de conscience de part
et d'autre: les peuples, les gouvernants, les organisations des droits
humains... ils se sont tous mis à l'oeuvre en vue d'apporter une
amélioration considérable.
En effet, la priorité de garantir « les
droits de l'homme et de l'enfant » se manifeste afin que la
dignité des enfants soit enfin reconnue. La Convention relative aux
droits de l'enfant adoptée le 20 novembre 1989 par l'Assemblée
générale de l'ONU est le dernier-né des grands textes
internationaux de référence. Elle s'est donnée pour
objectifs de mieux faire respecter les droits de l'enfant dans le monde.
Désormais, les États doivent s'y référer.
Même s'il y a violation de droits, ce texte sert désormais de
recours et permet de faire pression. La mise en conformité par
Haïti de son droit interne avec la Convention, qu'elle a ratifiée
le 23 décembre 1994, est appréciable.
En fait, dans un monde où l'évolution de la
famille est rapide, où les enfants en difficulté deviennent plus
vite des adultes sans avoir l'âge réel prévu par la loi
pour être majeur parce que, confrontés à une vie
quotidienne plus difficile, il parait important que leurs droits soient
respectés pour pouvoir construire la génération future.
Mais ils doivent aussi savoir qu'avoir des droits implique des devoirs envers
eux-mêmes et envers les autres. Faire connaitre aux enfants, et aux
adolescents, leurs droits, c'est aussi leur apprendre à ne plus
être passifs et à s'engager à des pratiques sociales
responsables. Car, de plus en plus, le monde commençait à
apporter une attention soutenue aux enfants. Cela a déjà
commencé même dans les siècles antérieurs.
En effet, le XIXe siècle est
réellement le siècle qui se préoccupe le plus des enfants,
même s'il reste encore beaucoup à faire. La communauté
internationale ressent la nécessité de rédiger des textes
qui pourraient être applicables partout. La prise en compte de
l'intérêt de l'enfant sur le plan international se fait d'abord
dans le cadre de la Société des Nations, organisation
fondée en 1919 sur l'initiative du président des
États-Unis, Wilson et dont l'objectif est de maintenir la paix dans le
monde. La société des Nations crée un comité de
protection de l'enfance qui, en 1924, rédigeait et adoptait la
Déclaration de Genève. Celle-ci formule en
différents points les droits de l'enfant et précise la
responsabilité des adultes. La déclaration des droits de l'enfant
est adoptée par les Nations Unies à l'unanimité le 20
novembre 1959 malgré des divergences profondes entre les États.
Considérant ces deux actes parmi tant d'autres
posés par ces dernières, l'enfant devient une priorité
universelle quant à sa protection et au respect de ses droits. Chaque
pays membre de l'Organisation des Nations-Unies a pour mission de veiller
à ce que les principes universels soient respectés et que
l'enfant devienne un véritable sujet de droit. En Haïti, cette
nouvelle façon de voir l'enfant parait très difficile par rapport
à notre culture traditionnelle, le fonctionnement de notre
système judiciaire et la pratique du droit, etc. Toutefois,
l'éducation est la base de développement des pays du monde, il
est important que tous ceux qui sont en voie de développement s'en
servent comme boussole pour faire éliminer la pauvreté de toutes
sortes et donner libre cours à des progrès scientifiques pouvant
aboutir à une réelle croissance économique grâce au
développement de la technologie, de l'industrie et de la science.
Telles sont les raisons nécessaires pour lesquelles
Haïti, le pays le plus pauvre du Continent américain investisse
dans la formation académique, universitaire et professionnelle de ses
fils et filles. À travers cette étude qu'est loin d'être un
travail parfait, nous jetons un coup d'oeil sur la façon dont a
évolué le droit à l'éducation de l'enfant en
Haïti, particulièrement dans la Chaîne des Cahos qu'est une
région montagneuse du département de l'Artibonite.
REMERCIEMENTS
Tout d'abord, nous tenons à remercier le professeur
Dufrène GUILLAUME qui, en dépit de ses multiples occupations, a
accepté de diriger le présent travail. Notre gratitude s'adresse
également au corps professoral de l'École de Droit et des
Sciences Économiques des Gonaïves qui nous a donné une
formation de qualité. Nous pensons notamment à M.
Mécène JEAN-LOUIS, le Doyen de la faculté, ainsi
qu'à tout le personnel de l'École de Droit. Nous ne manquons pas
de remercier également Marc Dalème ACCEUS qui, malgré
toutes ses occupations personnelles et professionnelles, nous a consacré
plus que la moitié de son temps afin de nous aider sans relâche
à réaliser ce travail. Nous réitérons la même
gratitude envers Richard Wilfrid GEFFRARD, Abner ACHILLE, Marie Erline
LAMY, Mirza Jumelle THOMAS, Lécius DORLUSME et les autres collaborateurs
de l'OKPK qui nous ont supportés de façon très
spéciale dans le cadre de ce travail.
Nous remercions très spécialement les
Pères jésuites en Haïti qui ont apporté d'une
façon ou d'une autre leurs soutiens à la réussite de ce
travail. Notamment, les pères Godefroy MIDY sj qui a été
pour nous un conseiller inoubliable, et Kawas FRANCOIS sj, directeur de CERFAS
sj qui a mis à notre disposition non seulement le Centre de
documentation de ladite institution pour faire les recherches, mais aussi a
autorisé la sortie de certains ouvrages du Centre pour une longue
durée. Sans oublier l'infatigable père Achange
SIMÉUS sj qui, malgré ses multiples
tâches, a pris le soin d'apporter un support intellectuel énorme
pour mieux soigner notre travail.
Que tous nos frères et soeurs: Marieuse, Hector, Anita,
Elius, Anius et Odinier TOUSSELIAT trouvent dans le présent travail
l'expression de notre gratitude! Une pensée spéciale pour notre
très chère soeur, Célanise TOUSSELIAT la regrettée
mémoire qui avait contribué grandement durant son passage sur
cette terre à la réussite de notre formation classique. Un
remerciement spécial à ma mère et à mon père
qui ont travaillé efficacement avec un souci de parents responsables
depuis notre enfance jusqu'à la présente seconde. Nos
remerciements s'adressent enfin à tous nos compagnons de classe: Richard
Wilfrid Geffrard, Abner Achille, Monès Lorcéan, Eliclès
Joseph, Vionel Fils-Aimé, Julio Sinord, Duterval Vieux et tant d'autres,
avec qui nous avons passé un moment de dur labeur durant notre
cheminement académique.
DÉDICACES
L'amour maternel n'a pas de prix aux yeux de personne, et rien
ne peut compenser une mère qui a pris en charge la vie de son enfant
jusqu'à sa maturité. Avec un profond amour, nous dédions
ce mémoire de sortie à Marita Paul Célestin TOUSSELIAT,
notre très chère maman que nous aimons de tout coeur. Elle ne
sait ni lire, ni écrire, mais elle a sacrifié toute sa vie pour
l'éducation de ses enfants. Nous dédions aussi ce présent
travail à Macien Joseph TOUSSELIAT, notre très cher père
bien-aimé. Il s'est engagé entièrement dès notre
naissance, pour que notre vie soit une réussite. À notre cher
ami de vieille date, Jérôme CADET, ainsi que sa femme et ses
enfants qui nous ont supporté sans fatigue durant les années
d'études. Que chaque personne qui n'ait pas eu la chance un jour dans
leur vie de tenir en main une plume sur un morceau de papier pour exprimer leur
pensée puisse se retrouver pleinement à travers notre travail.
Enfin, que ce travail soit un outil vivifiant pour tous ceux
et toutes celles qui oeuvrent dans le domaine de l'éducation en
Haïti et qui luttent pour le respect et la dignité des enfants
d'Haïti.
SIGLES ET ABREVIATIONS
AG : Assemblée
Générale
Al : Alinéa
BDS : Bureau du District Scolaire
CADHESC : Convention Américaine
relative aux Droits de l'Homme traitant des droits
Économiques, Sociaux et Culturels
CEP : Certificat d'Études
Primaires
CIJ : Cour Internationale de Justice
UNESCO: Culture/United Nations Educational,
Scientific and Cultural Organization
DUDH : Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme
EPT : Éducation Pour Tous
FUNUAP : Fonds des Nations Unies pour la
Population
MENFP : Ministère de
l'Éducation Nationale et de la Formation
Professionnelle
OI : Organisation Internationale
OKPK : Òganis pou Kore
Pwojè Kominotè
OMD : Objectif du Millénaire pour
Développement
ONU : Organisation des Nations Unies
PIDESC : Pacte International relatif aux
Droits Économiques, Sociaux et Culturels
SIDA : Syndrome Immuno
Déficitaire Acquis
TIC : Technologies de l'Information et
de la Communication
UNESCO : Organisation des Nations Unies
pour l'Éducation, la Science et la
UNICEF : United Nations Children's Fund ou
Fonds des Nations Unies pour l'Enfance
VIH : Virus Immunodéficience
Humaine
CIDE : Convention internationale
relative aux Droits de l'Enfant (CIDE)
INTRODUCTION
Les droits de l'enfant sont des prérogatives reconnues
par le Droit, et qui sont attribuées à un individu
dans l`intérêt de lui permettre de jouir d'une chose, d'une valeur
ou d'exiger d'autrui une prestation. Le droit consacré par le
deuxième objectif du millénaire pour le
développement1(*)
peut être rangé dans la catégorie des droits de la
2ème génération qui sont les droits
économiques, sociaux et culturels. Il s'agit d'un droit qui tend
à l'amélioration des conditions matérielles d'existence
des citoyens. Les deux derniers objectifs, par contre, sont rangés dans
les droits de la troisième génération qui sont liés
au progrès de la technologie industrielle et de la Communauté
Internationale. Ils tendent à assurer une solidarité entre les
nations et protéger l'environnement.
L'UNICEF considère que jamais, dans l'Histoire, autant
de dirigeants politiques ne s'étaient réunis comme ce fut le cas
en septembre 2000, au siège de l'ONU, à l'occasion du nouveau
millénaire. Cent quatre-vingt-neuf (189) États, y compris la
République d'Haïti étaient présents au rendez-vous.
Pour Ann M. Veneman, Directrice Générale de l'UNICEF, ces
objectifs sont quantitatifs et visent à remédier d'ici 2015
à la pauvreté extrême et à la faim, à la
mortalité des enfants et des mères, à
l'amélioration de la santé maternelle, au VIH/SIDA et
autres maladies, tout en favorisant l'enseignement primaire universel,
l'égalité des sexes, la protection de l'environnement et un
partenariat mondial pour le développement. Les OMD,
renchérit-elle, constituent un cadre d'action pour instaurer le monde de
paix, de sécurité, de solidarité et de
responsabilités partagées décrit dans la
Déclaration du Millénaire.
Bien que ces objectifs concernent l'humanité tout
entière, mais ils concernent au premier chef, les enfants. Plusieurs
raisons peuvent justifier cet état de choses : réduire
l'extrême pauvreté et la faim, réduire la mortalité
des enfants, améliorer la santé maternelle, combattre le
VIH/SIDA, le paludisme et les autres maladies, promouvoir l'éducation
primaire pour tous, promouvoir l'égalité des sexes et
l'autonomisation des femmes, assurer un environnement durable et enfin, mettre
en place un partenariat mondial pour le développement.2(*)
En effet, l'ONU soutient ceux qui aident les enfants à
réaliser leur potentialité. Aider les enfants, c'est investir en
faveur du progrès de toute l'humanité. Investir en faveur des
enfants veut dire atteindre plus rapidement les OMD, car les enfants
représentent un élément important sur la planète et
sont prêts à se retrouver dans la rue lorsque leurs familles ne
sont pas capables d'assurer leur scolarité. La Déclaration des
droits de l'enfant de 1959 préconise le besoin de protection et de soin
pour les enfants, avant et après la naissance. L'éducation joue
un rôle prépondérant dans ces protections et ses soins.
C'est dans ce sens que la majorité d'instances juridiques tendent
à exiger que l'enseignement primaire soit non seulement gratuit, mais
également obligatoire.
L'enfant est défini comme tout être humain de
moins de dix-huit ans, sauf si la loi nationale accorde la majorité plus
tôt. La Constitution de la République d'Haïti de 19873(*) (non amendée) n'a pas
donné une définition contraire à celle indiquée
ci-contre. Elle dispose, en son article. 16-2, que « l'âge de
la majorité est fixé à dix-huit (18) ans». Il est
écrit dans son article 17: « Les Haïtiens, sans
distinction de sexe et d'état civil, âgé de dix-huit (18)
ans accomplis, peuvent exercer leurs droits civils et politiques, s'ils
réunissent les autres conditions prévues par la Constitution et
par la loi ». Cette même Constitution dispose, en son article.
32-3 que « l'enseignement primaire est obligatoire sous peine de
sanction à déterminer par la loi. Les fournitures classiques et
le matériel didactique seront mis gratuitement par l'État
à la disposition des élèves au niveau de l'enseignement
primaire». En fait, l'enfance correspond à une tranche d'âge
bien distincte de l'âge adulte, une période, pendant laquelle, il
peut grandir, jouer et s'épanouir en toute
sécurité4(*)
Kofi ANNAN, ancien secrétaire général de
l'ONU, souligne que c'est pour les futures générations, plus
encore que pour la nôtre, que l'Organisation des Nations Unies existe.
Cette allocution de l'ancien Secrétaire Générale de
l'ONU5(*), nous fait
comprendre l'attention que l'ONU attache à la protection de l'enfance.
Il signale, cependant, que des obstacles majeurs affectent le droit de l'enfant
à l'éducation dans divers pays de la planète et notamment
en Haïti. Ces obstacles sont, d'une part, liés à
l'inefficacité des mécanismes juridiques actuels de protection
des droits économiques, sociaux et culturels au niveau national et
international. D'autre part, ils sont d'ordre social et touchent l'insuffisance
de moyens financiers affectés au secteur de l'éducation en
Haïti. Quoique le droit à l'éducation consacré par
les OMD concerne l'enfant en premier lieu, et toute l'humanité en
général, il relève cependant d'une déclaration.
Pour BADINTER6(*), une
déclaration est un document dont les signataires (représentants
légitimes des gouvernements) manifestent leur accord sur des
finalités, des objectifs, des principes de cette dernière. Le
contenu d'une déclaration est l'objet d'une obligation morale, mais n'a
pas, stricto sensu, de force juridique contraignante. À en croire les
thèmes de cet auteur, l'on est en face des objectifs qui, aux yeux des
dirigeants, n'ont aucune force contraignante quant à leur
réalisation. Autrement dit, nous sommes en face des droits dont, pour
leur réalisation, l'État n'a qu'une obligation de moyen et non de
résultat.7(*)
Outre cette introduction générale, ce travail
comporte quatre chapitres. Le premier chapitre se divise en trois parties. La
première consistera à apporter une définition aux concepts
« droit » et « éducation ». La
deuxième traitera la notion d'éducation à travers trois
tranches d'histoire de l'humanité à savoir l'Antiquité, le
Moyen Âge et l'Époque contemporaine. Et dans la troisième
partie, nous verrons également une présentation
géographique et une vue d'ensemble de la Chaîne des Cahos qu'est
la zone d'étude. Le deuxième chapitre, divisé en quatre
parties, prend en compte le droit de l'enfant à l'éducation
primaire en droit international contemporain. Le droit à
l'éducation à travers les engagements pris par l'ONU, la
déclaration du millénaire à l'égard des enfants
à travers le monde. Le sommet mondial pour les enfants et le rapport du
secrétaire général de l'ONU le 27 mars 2000. Il porte
également un regard sur le droit à l'éducation de l'enfant
en droit positif haïtien, le droit à l'éducation de l'enfant
dans la Constitution de la République d'Haïti tout en tenant compte
de son application et de son évolution. Nous passerons aussi en revue
l'égalité des chances offertes par la Constitution haïtienne
aux enfants sans tenir compte de sexe, de situation socioéconomique.
Nous aborderons les prescrits légaux et la réalité
observée dans le système éducatif haïtien, ainsi que
la mise en application des Conventions et les lois de la République
d'Haïti relatives à l'éducation, etc. Le troisième
chapitre contenant trois parties, passe en revue tout le système
éducatif haïtien après l'indépendance avec la
création des premières écoles, l'évolution du
système scolaire et le contexte sociopolitique. Il fait allusion aussi
aux différents cycles d'enseignement dans le pays, à savoir
primaire, secondaire et universitaire. D'autant plus, on a fixé le
regard sur les conditions et la qualité de l'enseignement en Haïti:
conditions des enseignants, infrastructures scolaires, etc. Le
quatrième chapitre, avec deux parties, s'accentue sur l'éducation
des enfants dans la Chaîne des Cahos au regard du droit haïtien et
des Conventions internationales, le milieu éducatif dans la Chaîne
des Cahos, l'évolution de la scolarisation dans la Chaine des Cahos de
1983 à 2010, le nombre d'enfants scolarisé depuis cet intervalle
de temps, l'établissement scolaire existant, la formation
académique et professionnelle des enseignants, impact de
l'éducation des enfants de la Chaîne des Cahos sur l'avenir de la
société et une conclusion générale résumera
les acquis de la recherche.
Enfin de compte, nous n'avons pas l'intention de
présenter un travail complet qui sera la résolution
définitive des problèmes qui ravagent les enfants dans la
Chaîne des Cahos dans le domaine de la scolarisation. Mais c'est une
façon de stimuler les autres à avoir une idée plus large
sur « l'évolution du droit à l'éducation
de l'enfant dans la Chaîne des Cahos en Haïti de 1983 à
2010 ». Pour ce fait, nous proposons à d'autres
chercheurs ou toutes personnes intéressées par cette
démarche d'aller poursuivre cette recherche tout en prenant en compte le
résultat de notre travail.
PROBLÉMATIQUE
Le deuxième Objectif du Millénaire pour le
Développement (OMD), en tant que droit à l'éducation
primaire de l'enfant en Haïti, réfère à la
Déclaration du millénaire de l'Assemblée
Générale de l'Organisation des Nations-Unies, parmi les huit
objectifs retenus par celle-ci, et pouvant être réalisés
à l'horizon de 2015. Les six premiers ressortent directement de la
Convention de l'ONU relative aux droits de l'enfant, et deux d'entre eux
touchent directement au droit à l'éducation de l'enfant.
L'éducation est considérée comme l'action de former,
d'instruire quelqu'un, de lui inculquer les bons usages d'une
société.
L'enseignement est défini, quant à lui, comme
une manière de transmettre des connaissances8(*). D'aucuns
préfèrent parler de l'enseignement primaire, de l'enseignement
élémentaire, de l'enseignement de base ou de l'enseignement
universel. L'UNESCO préfère parler de l'éducation pour
tous (EPT), etc.
Dans ce qui précède, l'on peut
considérer, à plusieurs points de vue, que l'éducation
renferme l'enseignement. Ce dernier est un procédé permettant
à l'éducation d'être bien dispensée. Voilà
pourquoi certains instruments juridiques parlent du droit à
l'enseignement de base. C'est ce qui ressort de la définition
d'après laquelle, l'éducation permanente est l'ensemble des
moyens et des actions ayant pour fin l'instruction et la formation
professionnelle; elle comprend la formation initiale (scolarité
obligatoire, études secondaires et universitaires), l'apprentissage et,
pendant l'activité professionnelle, la formation professionnelle
continue.
Ainsi, face aux obstacles multiples que connaît le
système éducatif haïtien, comment parvenir à
déduire le caractère contraignant dudit objectif contenu dans une
déclaration qui pourtant n'est qu'une obligation morale ?
L'adoption du deuxième OMD par l'Assemblée Générale
de l'ONU emporte-elle pour les chefs d'États et des organisations de la
famille des Nations Unies des engagements juridiques nouveaux par rapport au
droit de l'enfant à l'éducation? Si le deuxième OMD a
apporté un éclairage nouveau dans l'opérationnalisation
d'un droit par nature qu'est le droit à l'éducation de l'enfant
et élargi le champ des responsabilités des sujets du droit
international, cela a-t-il eu des indices positifs sur l'effectivité
dudit droit en Haïti? Cela étant, le droit à
l'éducation de l'enfant dans la Chaîne des Cahos comment
évolue-t-il ? Quelles stratégies doivent être mises en
oeuvre pour l'effectivité du droit de l'enfant à
l'éducation en Haïti en général et
particulièrement dans la Chaîne des Cahos, zone montagneuse du
département de l'Artibonite ? Voilà les questionnements
auxquels nous tenterons d'apporter des réponses et qui font l'objet de
vérification tout au long de la présente étude.
HYPOTHÈSES DE TRAVAIL
Face à cet état de chose, nous devons rappeler
que le droit de l'enfant à l'éducation prôné par la
Déclaration du Millénaire se trouve dans plusieurs documents
juridiques nationaux et internationaux. L'ONU l'a fixé comme objectif,
pour la simple raison qu'il demeure l'un des droits-piliers du
développement de l'enfant. Soulignons en plus que, non seulement la
Convention de l'ONU reprend sans équivoque ledit droit, mais
également la Déclaration Universelle des droits de l'homme, le
Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels, les différentes Constitutions de la République
d'Haïti particulièrement celle qui est la plus récente
datée du 29 mars 1987 9(*) en ont mis l'accent.
La Déclaration du millénaire a été
mise sur pied par une résolution de l'AG de l'ONU; elle ne constitue en
rien une Convention renfermant un caractère obligatoire envers les
parties. Nous constatons, toutefois, que les droits qui sont consacrés
en OMD et qu'on retrouve dans les instruments juridiques internationaux
manquaient un aspect important aux fins de leur concrétisation, à
savoir, l'échéance. La Déclaration du
millénaire, ainsi que tous les textes juridiques internationaux et
nationaux protecteurs des droits de l'enfant précisent qu'en tout
état de cause, l'intérêt supérieur de l'enfant doit
compter dans la politique nationale de chaque État.
Voilà pourquoi, chaque année qui passe, à
dater de la mise sur pied de la Déclaration du millénaire, l'ONU
tient un sommet mondial pour se rassurer de l'évolution et du
défi qu'il faut relever. Dans le même cadre, le Fonds des
Nations-Unies pour l'enfance publie un ouvrage intitulé « La
Situation des enfants dans le monde » qui permet de faire un état
des lieux desdits objectifs sur la planète terre. Il est curieux de
constater que malgré les efforts fournis par la communauté
internationale à travers l'UNICEF, la Banque Mondiale et d'autres
institutions qui ont, et qui continuent à militer davantage pour
l'effectivité des objectifs fixés relativement à la
croissance du taux de la scolarisation en Haïti à travers des
campagnes d'encouragement de l'inscription des enfants ayant l'âge
scolaire à l'école, la réhabilitation et la construction
des écoles, le défi à relever reste majeur.
La Constitution d'Haïti de 1987 stipule dans son article
32-1: « L'éducation primaire est à la charge de
l'État et des collectivités territoriales. Ils doivent mettre des
écoles gratuitement à la portée de tous, veiller au niveau
de la formation des enseignants des secteurs publics et
privés. » À ce titre, le droit à
l'éducation de l'enfant en Haïti n'est jamais respecté, les
20%10(*) des écoles
primaires publiques11(*)
fonctionnent presque comme des écoles privées.
MÉTHODOLOGIE DU TRAVAIL
Eu égard aux contours que revêt le présent
travail, nous nous sommes inspirés de la méthodologie juridique,
sociologique et comparative. La technique documentaire et celle d'entrevue ont
soutenu les méthodes que nous venons d'évoquer. La méthode
juridique nous permettra de rechercher la législation existante relative
aux droits de l'enfant à l'éducation. Nous avons passé en
revue les textes juridiques internationaux et nationaux. Nous avons fait
également allusion aux textes constitutifs des différentes
institutions spécialisées de l'ONU engagées dans la
réalisation du droit à l'éducation de l'enfant. Cela nous
a permis de découvrir les techniques utilisées par le Fonds des
Nations-Unies pour l'enfance en vue de rendre effectif ledit objectif en
Haïti. Nous avons analysé enfin les rapports annuels des organismes
tant publics que privés, respectivement concernés en Haïti.
Nous avons fait également recours à la méthode
sociologique qui nous a permis d'appréhender certaines pratiques ou
coutumes pouvant mettre à mal le droit à l'éducation des
enfants, du moins la différenciation des sexes.
La méthode comparative nous a été utile
dans la mesure où, partant de la cible à atteindre par le
deuxième OMD et des rapports publiés annuellement par l'UNICEF
qui donnent l'aperçu du monde entier, nous avons essayé de
comprendre ce qui a été déjà fait ailleurs et le
défi qui reste à
élever par l'État haïtien. Elle nous a
permis aussi d'avoir une vision plus large sur l'évolution du droit
à l'Éducation de l'enfant dans la Chaîne des Cahos qui est
un milieu isolé du reste du pays, en particulier de la capitale
haïtienne. Poussé par la technique documentaire, notre travail a
puisé ses matériaux dans les différents textes juridiques
qui sont consacrés au droit à l'Éducation de l'enfant. Il
s'agit non seulement des instruments juridiques internationaux,
régionaux, nationaux, de la jurisprudence existante, mais
également de la doctrine. Par ailleurs, les techniques d'enquête
et l'interview libre nous ont permis de comprendre comment évolue le
droit à l'Éducation de l'enfant en Haïti en
général et dans la Chaîne des Cahos en particulier.
INTÉRÊT POUR LE
SUJET
L'étude de l'évolution du droit
à l'éducation de l'enfant dans la Chaîne des Cahos en
Haïti présente un intérêt d'ordre social, scientifique
et pédagogique. Sur le plan social, la réalisation du
deuxième OMD d'ici 2015 est un devoir, et non une obligation, de tout
État de droit qui veut maintenir le respect des engagements pris en face
du monde entier pour son peuple. Pour y parvenir, il importe successivement de
tenir compte de la dignité de l'État à protéger les
générations futures, mais également des
intérêts vitaux de la nation qui se trouvent en danger si, par
pure négligence des dirigeants, ledit OMD ne marque pas des points
importants d'ici les prévisions onusiennes qui, du reste, ne sont qu'une
continuation dans l'avenir.
D'ordre scientifique, cette étude, dans ses
limites, apporte une certaine contribution au débat scientifique dans un
domaine aussi sensible où il faut, non seulement ajuster, mais aussi
concilier à la fois les intérêts généraux et
fondamentaux des générations futures. Il constitue un outil
jugé nécessaire pour les futurs chercheurs qui voudront, dans la
mesure du possible, approfondir ou vérifier ces hypothèses. Il
s'agit d'une question qui agite la Communauté internationale et à
laquelle, depuis la mise sur pied de la Déclaration du
millénaire, les institutions spécialisées de l'ONU,
à travers l'UNICEF, cherchent à trouver des solutions à
l'égard de l'éducation des enfants à travers le monde.
Face à l'inexistence presque absolue de la
mise en application des prescrits relatifs à la question des OMD, le
présent travail inscrit enfin, pédagogiquement, dans la
sphère de l'analyse de la question relativement aux droits internes. De
ce fait, il complète et approfondit des notions apprises tout au long de
notre formation académique. Ces notions font référence au
droit international public, au droit des organisations internationales, aux
droits humains et libertés publiques, au droit civil des personnes,
à la sociologie et à d'autres notions.
DÉLIMITATION DU
SUJET
En raison de l'absence des indices adéquats
sur l'application des instruments juridiques internationaux, régionaux
et nationaux relatifs aux droits à l'Éducation de l'enfant, ainsi
que la jurisprudence existante; nous nous sommes limités à
analyser la Déclaration du millénaire dans le cadre de ce
travail. Autrement dit, être capable d'apprécier
l'efficacité du deuxième OMD, c'est-à-dire, s'il est
atteint ou pas (délimitation matérielle).
Nous avons fait également un état
des lieux de ce qui a été déjà fait depuis l'an
2000, année d'entrée en vigueur de la Convention de l'ONU
relative aux droits de l'enfant et de la tenue du sommet du nouveau
millénaire jusqu'à nos jours (délimitation temporaire). Il
a été donc question de jeter un coup d'oeil sur
l'évolution du droit à l'Éducation de l'enfant dans la
Chaîne des Cahos tout en restant dans la logique de l'ONU consistant
à vérifier annuellement les avancées afin de rappeler aux
États leurs engagements en face du monde en attendant l'horizon 2015
.
CHAPITRE I
DÉFINITION DES CONCEPTS DROIT ET
ÉDUCATION
DROIT
Selon le Larousse, le « Droit » est
l'ensemble des principes qui régissent les rapports des hommes entre eux
et qui servent à établir des règles juridiques.
Les juristes pensent effectivement qu'ils sont les seuls
à pouvoir étudier le droit, et tout particulièrement
à le définir. Ainsi, tous les cours de droit à
l'exception de la première année, intitulés
" Introduction au droit " commencent par une définition (plus
ou moins rapide) du droit. Ces définitions ont beaucoup de points
communs, mais à les lire, on s'aperçoit qu'il est possible de les
regrouper en deux catégories. En effet, certains ne définissent
le droit que par la manière dont il se présente, ce qu'on appelle
les définitions formelles, tandis que d'autres s'attachent à son
fond, ces genres de définitions basées sur le fond s'appellent
définitions substantielles.
Les définitions formelles sont plus nombreuses, (car
elles sont plus neutres et s'appliquant parfaitement au droit occidental),
définissent le droit comme un ensemble de règles pourvues de la
sanction étatique. Cette première définition formelle
n'est donc pas adéquate pour définir le phénomène
juridique dans son universalité. Selon les juristes, la
spécificité de la règle de droit c'est d'une part, son
caractère obligatoire, c'est-à-dire que son non-respect est
nécessairement sanctionné, et que cette sanction est
étatique, autrement dit le droit est lié à l'État.
On peut également tenter de définir le droit en s'attachant soit
à son contenu, soit à ses finalités. Les
définitions, quant au contenu, sont celles qui se rattachent aux
doctrines que l'on a appelées idéalistes ou du droit naturel
(définitions substantielles). Ces doctrines postulent que le droit
positif, le droit effectivement appliqué doit être conforme
à un idéal de justice. Elles ont toutes la même
conséquence, mais elles ont des contenus variables.
Sur le plan commun, ces doctrines s'accordent pour dire qu'une
règle de droit, une loi (au sens large) qui ne serait pas conforme au
droit naturel, n'est pas obligatoire, et qu'il est juste d'y résister,
il est même fortement recommandé de le faire. Ce qui implique que
le droit qui n'est pas conforme au droit naturel n'est pas du droit, puisqu'il
n'est pas obligatoire.
Pourtant, elles divergent sur le contenu de ce
droit naturel. Pour les uns, le droit naturel est celui qui est, celui qui est
voulu par Dieu et s'imposant aux hommes, il trouve son expression dans des
dogmes éternellement vrais qui sont à la base de la civilisation
chrétienne : respect dû à la parole donnée,
force obligatoire des contrats, réparation des dommages injustement
causés à autrui, intangibilité du droit de la famille, du
droit de propriété individuelle, du respect des droits de la
personnalité, etc.
Un autre courant du XVIIe siècle
intitulé « École du droit de la nature et des
gens » rend la notion de droit naturel infléchie dans une
direction individualiste. On part de la nature de l'homme (toujours et partout
le même) pour en déduire qu'il a des droits fondamentaux qui lui
appartiennent en tant qu'homme et qui doivent être reconnus par le droit
positif. Cette école a beaucoup influencé les
révolutionnaires et les rédacteurs du Code civil, ils font entrer
dans le droit naturel des institutions entières, telles que l'obligation
alimentaire, le mariage, la puissance paternelle, etc.
Le respect des droits de l'homme est obligatoire
et inviolable dans toutes les sociétés, car c'est un fondement
à la vie. De plus en plus, les nations se mettent d'accord pour
établir des principes communs régissant l'interaction entre
elles. Droit à la vie, à la dignité, à la
liberté, à la santé, à l'alimentation, à
l'éducation, etc. sont essentiellement la jouissance et la raison de
tout être humain.
La violation de ces principes fondamentaux peut
entraîner des sanctions établies à cette fin. Cependant,
certains juristes, ont montré que la sanction n'est pas inhérente
au droit, qu'il peut y avoir du droit sans sanction dans diverses traditions.
La sanction n'est pas ignorée dans les systèmes juridiques non
occidentaux, qu'ils soient étatiques comme en Chine et au Japon ou non
étatiques comme en Afrique ou chez les Inuits, etc. mais là non
plus elle n'est pas omniprésente.
Les conflits sont souvent réglés de
manière négociée. L'application des sanctions obéit
à un principe de flexibilité : des infractions similaires
n'entraînent pas les mêmes réactions sociales. En outre, on
y retrouve souvent des sanctions psychologiques, blâme, mise en
quarantaine... Et précisément, pour les juristes, notamment
français, ce n'est pas la sanction en elle-même qui
caractérise le droit mais la sanction étatique. Ce qui implique
de lier le droit à l'État.
ÉDUCATION
Parler de
«l'Éducation » revient à fixer le
regard sur un ensemble de thèmes liés à ce concept qui
sont aujourd'hui, un élément indispensable au
développement humain: le concept de l'éducation
générale et sociale, le concept des Droits de l'homme...
L'éducation est l'une des missions de l'école; elle lui est
attribuée par des dispositions légales. L'école, et
principalement l'établissement, est le lieu où les valeurs
reconnues sont enseignées, vécues, partagées et
respectées. L'école seconde les parents; école et parents
collaborent à cette éducation. L'éducation
générale est un projet global, qui passe à travers toutes
les activités de la vie scolaire: enseignement disciplinaire,
prévention, recherche de la qualité de vie dans
l'établissement pour s'y sentir bien, en tant que maître, en tant
qu'élève, en tant que partenaire de travail dans
l'école.
L'éducation, comme projet se repose sur
différents objectifs, dont sont coresponsables tous les acteurs de
l'école. Apprendre à exprimer ses besoins fondamentaux; mettre
en pratique des attitudes de communication et de respect; acquérir et
faire acquérir une bonne estime de soi par les maîtrises de
compétences; exercer la capacité de faire face aux contraintes et
d'assumer ses responsabilités; apprendre à devenir autonome et
libre; chercher un sens à sa vie en intégrant les dimensions du
bonheur et de l'amour... Tels sont, en partie, les objectifs spécifiques
de l'éducation. Cependant, pour avoir reçu une bonne
éducation, quatre éléments fondamentaux sont à
considérer:
· Être en santé c'est-à-dire avoir de
bonnes conditions physiques et morales pour apprendre.
· Être capable de vivre ensemble,
c'est-à-dire un long apprentissage de la vie en
société.
· Avoir un goût pour apprendre c'est-à-dire,
faire de l'apprentissage un métier dont la pratique se fait par des
stratégies de travail.
· Chercher un sens à la vie c'est-à-dire
avoir une ouverture à la philosophie, à la
spiritualité12(*).
LE CONCEPT DE L'ÉDUCATION DANS LE TEMPS ET DANS
L'ESPACE
Éducation dans l'Antiquité
Cette période débute avec l'invention de
l'écriture et s'achève avec la chute de l'Empire romain
d'Occident en 476. Elle concerne, dans les programmes de l'école, la
Gaule celtique (Vercingétorix), puis la Gaule romaine (jusqu'à
l'avènement de Clovis).
L'école naît avec l'apparition de
l'écriture, il y a 5 000 ans. L'écriture permet de
fixer les savoirs et les principes de vie que les hommes veulent transmettre
aux générations suivantes. Les premiers systèmes
d'éducation apparaissent dans les grands empires qui naissent en
Égypte, en Inde et en Chine. Les dirigeants de ces derniers ont besoin
de fonctionnaires formés pour les aider à assurer la
stabilité de leur pays. La prospérité économique et
les besoins de l'administration permettent ainsi la mise en place
d'institutions spécialisées dont le rôle est de transmettre
les connaissances: l'école est née. Parler de l'éducation
à cette tranche d'histoire la plus ancienne de l'homme revient à
tourner le regard sur les villes antiques ainsi que les différentes
étapes de la formation des générations dans le temps.
En Grèce comme à Rome, on
considère que l'enfant est une cire qu'il faut mouler pour former un
homme adapté aux exigences de la société. Jusqu'à
sept ans, il est élevé par sa mère. Puis les enfants de
milieux aisés fréquentent l'école financée par les
familles ou les villes où ils apprennent à lire, à
écrire et à compter. Les autres sont mis au travail.
L'apprentissage est fondé sur la mémoire, la
répétition, la lecture à haute voix de textes
célèbres qui ont la vertu d'exemples. Le rôle du
maître n'est pas valorisé. Il a recours aux châtiments
corporels pour imposer la discipline. En fait, il est important de voir
particulier l'éducation en Grèce dans cette époque, compte
tenu de son rôle dans la civilisation de l'homme au fil des
siècles.
La transmission du savoir en Grèce et à Sparte
En Grèce, l'éducation physique est une
formation nécessaire aux jeunes. C'est une initiation à la vie
civilisée et à l'esprit de compétition. Elle répond
aussi à des préoccupations d'hygiène, d'esthétisme
et de santé. L'athlétisme qui se pratique nu est le sport par
excellence, la lutte, la boxe, la course, le saut en longueur, le javelot et le
disque en constituent les disciplines. Avec les romains le prestige du sport
s'amenuise et il disparaît au Moyen Âge. En France, le sport
ne sera réintroduit à l'école que sous la troisième
république.
Au IIIe siècle avant Jésus Christ, le
« muséum d'Alexandrie » était un lieu de
recherche scientifique avec des jardins botaniques et zoologiques, un
observatoire d'astronomie et un laboratoire d'anatomie. Sa bibliothèque
est unique dans l'histoire de l'Antiquité par le nombre et la
diversité de ses ouvrages. Ce lieu attire de nombreux savants et
intellectuels: philosophes, astronomes, mathématiciens, certains sont
aussi célèbres qu'Archimède et Euclide. À Sparte,
l'éducation est organisée en fonction des besoins de
l'État. Le futur citoyen n'est accepté par la
société que s'il est beau, bien formé et robuste.
Jusqu'à l'âge de 7 ans, l'enfant est élevé par les
femmes considérées comme des reproductrices. Ensuite, il est pris
en main par l'État qui l'embrigade dans des formations de jeunesse
hiérarchisées et prémilitaires. Cette éducation
collective arrache l'enfant à sa famille.
Au début du deuxième millénaire avant
Jésus-Christ, la religion juive nait et se diffuse oralement. Elle est
ensuite consignée par écrit dans la Tora, le livre de la loi, qui
sera traduit en grec pour la bibliothèque d'Alexandrie. L'étude
des textes, au début de notre ère, est faite en hébreu,
langue sacrée. Outre l'éducation familiale, un système
d'enseignement collectif au sein des écoles hébraïques se
met en place. Le maître est respecté, car son rôle est de
transmettre la parole divine à l'enfant.
En effet, dans l'Antiquité, la tendance de
l'éducation est orientée généralement vers la
formation de l'homme et non vers le développement de l'enfant13(*). Dans les écoles
supérieures, le maître enseigne la rhétorique (art du
discours), la philosophie et les sciences à quelques disciples. Les
Romains, fascinés par l'éducation grecque et son caractère
social, en reprennent la littérature, ajoutent le droit écrit et
rejettent l'athlétisme, la musique et les arts plastiques.
Éducation au Moyen Âge
Le Moyen-âge est la plus
longue des périodes historiques. Mille ans de Clovis à la
découverte de l'Amérique en 1492. Trois dynasties
mérovingienne (celle de Clovis), carolingienne (celle de Charlemagne) et
capétienne (à partir d'Hugues Capet) marquent l'histoire
politique du royaume, longtemps dépendant des luttes féodales.
Peu à peu, l'État royal émerge de la
féodalité, à partir d'une capitale
« Paris », d'une langue « le
français » et d'un système socio-économique
fondé sur l'exploitation paysanne et l'impôt. Malgré les
déboires de la Guerre de Cent Ans, le royaume de France est l'un des
plus puissants en Europe à la fin du XVe siècle
(règne de Louis XI).
Il y a de nombreuses années, on ne pouvait
pas parler de l'écriture avec de représentation par des images ou
des dessins. En effet, ceux qui travaillaient alors sur l'histoire de
l'éducation dans le Haut Moyen Âge et même au Moyen
Âge, étaient rares. Bien lointaine était l'époque
où, entre 1880 et 1914, s'étaient multipliés les ouvrages
sur ce sujet, ceux de Clerval sur les écoles de Chartres (1895), de
Picavet sur Gerbert (1897), d'Aspinwall sur les écoles de la Province de
Sens (1904), de Roger sur L'enseignement des lettres classiques d'Ausone
à Alcuin (1905), etc. Dans d'autres pays européens comme en
Allemagne, en Italie, en Belgique, en Suisse, l'essor de l'enseignement public
conduisait également des historiens à s'interroger sur ce qui se
passait au Moyen Âge. Puis ce fut, du moins, en France, le grand silence.
Les historiens des autres pays ont pris le soin de s'occuper de l'histoire des
écoles médiévales. Il suffit de citer les noms
d'Anglo-Saxons: Rand, Haskins, Sandys, Laistner, Rashdall, de Hongrois:
d'Irsay, A. Gabriel, de Canadiens: Paré, Brunet, Tremblay, d'Allemands:
Schnürer, Patzelt, pour constater que le terrain était bien
occupé.
Très rares étaient les
Français qui s'aventuraient, tel le chanoine Glorieux, dans le monde de
l'enseignement médiéval. Pour le Haut Moyen Âge, il n'y
avait personne. D'ailleurs, ce temps était pour beaucoup une
époque « maudite » et impropre à toute production
intellectuelle. Il suffit de lire ce qu'en dit en 1927 Ferdinand Lot14(*). Il avait été
précédé par la décadence du Bas Empire,
s'enfonçait dans la nuit mérovingienne et se terminait par les
« terreurs de l'an mille ». À peine la Renaissance
carolingienne passait-elle pour une éclaircie dans ce ciel
désespérément noir.
Pourtant, en 1940, paraissait un livre sur Les
écoles de la fin du VIIe siècle et la fin du
XIe siècle. Émile Lesne en avait fait le
cinquième tome de l'Histoire de la propriété
ecclésiastique en France, publiée dans les « mémoires
et travaux des Facultés catholiques de Lille ». Pour cette raison
et parce qu'il paraissait pendant la guerre, ce remarquable ouvrage
d'érudition, qui remplaçait avantageusement le vieux travail de
L. Maître, n'eut pas le succès mérité. Le même
sort fut attribué à la thèse de M. M. Dubois sur le
grammairien anglo-saxon, thèse soutenue en 1943 et, « ô
scandale », écrite par une femme.
Enfin, après cette longue « traversée du
désert », un livre paraissait qui devait devenir un classique et
susciter de nouvelles études. Il s'agit de l'Histoire de
l'éducation dans l'Antiquité d'Henri Marrou (1948). L'auteur, qui
avait bien vu qu'il n'y avait pas de césure entre Antiquité et
Moyen Âge, sa thèse de doctorat et ses travaux postérieurs
le montrent, terminait son livre par un chapitre sur l'apparition des
écoles chrétiennes de type médiéval et un
épilogue sur « la fin de l'école antique ».
C'était comme une invitation à poursuivre son oeuvre.
Encouragé par Louis Halphen qui, à la fin de sa carrière,
s'intéressait aux problèmes de l'école et des
universités, et évidemment par Henri Marrou, « je
consacrai ma thèse à Éducation et culture dans
l'Occident barbare, VIe-VIIIe siècles ».
Cette thèse eut raison du scepticisme de quelques bons maîtres de
Sorbonne et n'a pas encore trop vieilli, ce qui d'ailleurs n'est pas un bon
signe pour les recherches en ce domaine. Contrairement à ce que Roger
avait fait, il envisageait tout ce qui concerne l'enseignement,
l'éducation et l'enfant dans ces siècles dits « obscurs
». La relecture des sources permettait de dire que l'enfant, surtout dans
le monde monastique, était l'objet d'attention et de
compréhension, ce qui s'opposait aux idées que Philippe
Ariès avait présentées avec un si grand talent que
beaucoup s'en étaient emparés. Lorsque, d'autre part,
Ariès écrivait : « la civilisation
médiévale avait oublié la païdeïa des
Anciens et elle ignorait encore l'éducation des modernes. Tel est le
fait essentiel, elle n'avait pas l'idée de l'éducation »,
beaucoup le suivaient.
Louis Halphen: « Les débuts de
l'Université de Paris », Paris, 1949, pp. 9-27. En 1939, Halphen
avait fait à l'Académie des inscriptions et belles-lettres une
lecture sur Guibert de Nogent et son pédagogue. Selon les constats faits
dans les différents textes parlant de l'éducation au Moyen
Âge, l'histoire de la culture intellectuelle et de l'enseignement a
été privilégiée et celle de l'éducation
proprement dite n'a pas encore la place qu'elle devrait avoir. L'enfant a
été le grand oublié des historiens du Moyen Âge,
alors que nous constatons par les documents écrits et l'iconographie
qu'il est présent dans la famille, à l'école et dans la
société. Cela nous pousse à poser des questions
liées à l'école d'aujourd'hui : par exemple, les
liens entre parents et enfants, l'éducation au sein de la famille ou
à l'extérieur, etc. L'éducation dans les milieux
aristocratiques, militaire ou courtoise, était mieux connue au Moyen
Âge classique. Le rôle de l'amitié, les rites de passage
peuvent être étudiés si on relit d'un autre oeil la
documentation en latin ou en langue vernaculaire.
Éducation à l'Époque contemporaine
Ce sont les deux siècles qui nous
séparent de la Révolution et de l'Empire napoléonien. Le
XIXe siècle est caractérisé par la difficile
naissance de la République démocratique et par des
bouleversements socio-économiques considérables (émergence
de l'ouvrier d'usine, des quartiers, des loisirs et de l'école
populaires, du socialisme et du communisme). Le XXe siècle
est marqué par des progrès techniques et scientifiques qui
prolongent ceux du XIXe jusque dans la mort industrielle des deux
guerres mondiales. Cette époque est aussi constituée par de
grandes évolutions mondiales et le progrès de connaissance de
l'homme.
L'éducation à l'Époque
contemporaine ne peut sembler universelle qu'au travers des habitudes et des
convictions qui sont le ciment de la société à laquelle
elle prépare. Mais elle est en réalité de toute part,
soutenue par un ensemble de choix philosophiques fondamentaux dont la
spécificité apparaît clairement par comparaison avec
d'autres modèles possibles. C'est ainsi que le vis-à-vis
traditionnel de la modernité peut permettre à cette
dernière de mieux se situer et se connaître. Tandis que
l'éducation traditionnelle se caractérise par une
référence constante à un ordre de réalité
proprement surnaturel. La modernité consiste à libérer
l'homme en le rendant à ses facultés et son environnement
naturel, et on commence donc véritablement avec le cartésianisme.
C'est donc bien au moyen de la double considération de la pensée
philosophique à partir de Descartes et d'une perspective traditionnelle
indissociable d'une référence à la transcendance que nous
voudrions réfléchir sur l'éducation à
l'Époque contemporaine.
D'abord la conception traditionnelle s'efface
progressivement au profit de la modernité. L'être ne se rapporte
plus à la transcendance, autrement dit, l'objet de la
métaphysique traditionnelle se voit privé de la qualité
d'être, et être expédié dans le néant pour
s'identifier, au rationalisme classique, à l'étendue et au
cogito. L'effacement de la tradition peut en effet se comprendre comme
une réduction de l'ontologie de référence. Les
conséquences de cette réduction vont alors sans dire du point de
vue de l'éducation et de la connaissance, dont l'objet varie
irrésistiblement en fonction de l'ontologie de référence
qui est son fondement.
Cette réduction de l'ontologie de
référence qui rythme toute l'histoire de la pensée
occidentale donne encore à réfléchir aux observateurs de
l'époque contemporaines dans la mesure où son point d'arrêt
peut ne pas être celui que le dualisme cartésien établit en
son temps: la conscience rationnelle et la matière étendue. Une
fois que la conscience rationnelle a tiré d'elle-même ses plus
ultimes conséquences, la psychanalyse n'a-t-elle pas effectivement fait
apparaître une subconscience ? Et après avoir
découvert la plus intime structure de la matière, la
physique quantique n'a-t-elle pas aussi démontré qu'une
énergie proprement immatérielle en était le
fondement ? La constante réduction de l'ontologie de
référence dont la philosophie occidentale consiste finalement
à décrire les étapes et les conséquences, nous
amène à nous demander si la vocation de la postmodernité
ne consiste pas à assumer l'émergence d'une infra
rationalité et d'une infra matérialité, pour
reprendre les deux termes d'un dualisme cartésien qui semblait pourtant
avoir déjà réduit le possible à ses plus naturelles
extrémités.
PRÉSENTATIONS GEOGRAPHIQUES ET HISTORIQUES DE LA
CHAÎNE DES CAHOS
Historicité de la Chaîne des Cahos
L'une des explications du nom des Cahos reviendrait à
MOREAU de SAINT MERY : quelques-uns écrivent
« Cahos », parce qu'elle exprime, selon eux, la
conformation tumultueuse de ce massif montagneux; d'autres écrivent
« Cahots » pour marquer des inégalités, des
hachures qui rendent les chemins difficiles. Il nous paraît cependant que
cette expression « Cahos » ou
« Cahots » n'est qu'une corruption du nom d'un indien
Caoba. Ce nom a été donné aussi à l'arbre que nous
appelons Acajou; car les Espagnols appellent cette montagne « Sierra
Prieta de las Caobas15(*)
(Montagnes Noires des Acajoux), et ils nomment Las Caobas [...], une plaine et
un bourg qui est sur la rive gauche de l'Artibonite dans le département
du Centre d'Haïti, où les Acajous sont communs "
Médéric Louis Élie, Moreau de
Saint-Méry (Tome 2 - p.834, 1787)16(*).
Cette région du pays reste l'une des zones les plus
stratégiques au temps des esclaves pour pratiquer le marronnage contre
les colombs blancs. Ils ont tous fui dans les montagnes pour pouvoir
résister aux travaux forcés de leurs maîtres. Cette
pratique courante les a amenés à construire de petits
ajoupas17(*) et à
peupler la région qui ne l'était pas à cette
époque.
Présentation géographique et
caractéristiques de la Chaîne des Cahos
La Chaîne des Cahos est située dans les
départements de l'Artibonite et du Centre d'Haïti. Elle fait partie
de quatre communes de l'Artibonite (Petite Rivière de l'Artibonite,
Dessalines, Saint Michel de Latalaye et Lachapelle) et 2 communes du Centre
(Maïssade et Boucan Carré). Elle comprend environ quatorze sections
communales. Pour la commune de la Petite-Rivière de l'Artibonite :
troisième section Labadie qui comprend Plassac 1, Plassac 2,
quatrième section Savane à Roche, cinquième section
Pérodin et sixième section Médor. Pour la commune de
Dessalines: cinquième section Fiéfié (Chenot),
sixième section Lacroix et quatrième section
Grand-Hatte/Esterling. Pour la commune de Saint Michel de
Latalaye :cinquième section Lermite et sixième section
Lacidras. Pour la commune de Lachapelle: première section Martineau et
deuxième section Bossou. Pour la commune de Maïssade:
quatrième section Madame Joa et cinquième section Ramier. Pour la
commune de Boucan Carré: première section Petite Montagne.
Carte géographique d'Haïti contenant
la Chaîne des Cahos, zone d'étude
Zone
d'étude
Climatologie
Le climat des Cahos est tropical, humide et
caractérisé par une saison sèche de décembre
à mars, et une saison humide d'avril à novembre. La
pluviométrie estimée est de 1500 à 3000 mm sur les
sommets. Les températures mensuelles moyennes oscillent entre 16 et
30°C, mais des températures de moins de 15°C sont courantes
durant les nuits de décembre et de janvier. On peut également
noter la présence fréquente de brouillards matinaux dans les
zones dépassant 700 mètres d'altitude ainsi que des chutes de
grêles non rares à ces mêmes altitudes. La zone se
caractérise également par une alternance de microclimats entre
adrets et ubacs due à l'effet de Foehn résultant de la rencontre
de masses d'air provenant majoritairement du Nord/Nord-Est avec la Chaîne
qui est orientée Nord-Ouest/Sud-Est. De ce fait, les versants les plus
humides et les plus frais sont ceux orientés au Nord/Nord-Est.
Hydrographie
Le réseau hydrographique est très dense et peut
être divisé en 3 grands bassins versants :
- Le bassin versant de l'Estère incluant les ravines
Morne Rouge et Cabeuil. L'Estère se jette dans la Mer des Antilles.
- Le bassin versant de la rivière Canot où l'on
trouve les rivières Fond-Gras et Fond-Bleu. La rivière Canot est
un affluent de la rivière Guayamouc qui rejoint le lac de
Péligre.
- Le bassin versant du fleuve de l'Artibonite incluant la
Ravine-Paresseux. L'Artibonite finit également sa course dans la Mer des
Antilles.
La plupart des affluents de ces rivières prennent leur
source dans la zone du Morne Piton, et au pied du Morne Boeuf et du Morne
Bonhomme. Le réseau hydrographique se caractérise
également par la présence de rivières en parties
souterraines (par exemple Tibra un affluent de l'Estère).
Géologie et pédologie
Le massif des Montagnes Noires se caractérise par une
succession d'anticlinaux et de synclinaux dont les plis s'orientent
principalement dans les directions Nord-Ouest/Sud-Est. On trouve 2
types de formation datant du Crétacé supérieur au
Miocène moyen (Martin, 2004):
- Les roches volcano-magmatiques (roches magmatiques
formées de basaltes, de dacites et d'andésites; formations
volcano-sédimentaires; laves ; intrusions magmatiques).
- Les roches calcaires (calcaires durs, calcaires marneux et
crayeux à lentilles).
Du point de vue pédologique, les sols se
caractérisent par des couleurs à dominante rouge, noire et grise
et par un taux plus ou moins élevé en argile. Les sols sont
souvent très rocheux sur les versants et les sommets.
Milieux naturels
À l'exception de quelques rares formations
situées dans les zones rocheuses escarpées, le milieu est
fortement anthropisé. La structure du paysage est donc directement
liée au mode de gestion de l'espace par les paysans. De ce fait, on peut
différencier 3 grands types de milieux: 1) Les jardins18(*)
éloignés des maisons dans lesquels sont essentiellement
cultivés, le pois (Haricots), le maïs, la patate douce et le manioc
et où l'on peut également trouver quelques arbres rares,
généralement des manguiers. 2) Les jardins proches des maisons
qui constituent la majeure partie des espaces boisées de la zone. Parmi
les espèces présentes dans ces jardins, on peut citer les Citrus
(Orange, Chadèque/pamplemousse, Citron...), l'avocatier, le sucrin, le
palmier de montagne, l'acajou. Ces zones présentent des sols aux
propriétés particulières du fait de l'apport de
matière organique (déchets ménagers, élevage,
couverture boisée) et d'un maintien de l'humidité qui permettent
d'y cultiver des cultures maraîchères (mirliton, tomate, chou...),
du riz, des tubercules (malanga, igname), des bananes et du café. 3)
Dans les vallées à proximité des rivières on
cultive les mêmes denrées qu'à la proximité des
habitations. À remarquer qu'on peut noter la
présence d'autres espèces qui ont la caractéristique des
formations subtropicales humides comme le pin et le bwatwonpèt
(Cecropia peltata).
Les potentialités de la Chaîne des Cahos
Malgré sa relative proximité de la capitale
(Port-au-Prince à 65 km. à vol d'oiseau), la Chaîne des
Cahos reste une zone enclavée en raison de son relief accidenté
et du faible développement du réseau routier. Le trajet menant
à Pérodin (Pérodin, lieu de résidence
durant la recherche) est d'environ trois heures de la route nationale
No1, 1 heure de pistes dans la vallée de l'Artibonite, deux
heures de piste de montagne (créée par Inter Aide19(*) et la Paroisse de Chenot en
1997), et se conclut par une heure de marche. Le trajet à pied entre
Petite Rivière de l'Artibonite et Pérodin nécessite
environ 7 (sept) heures de marche.
Administrativement, le 4/5 de la zone est situé dans le
département de l'Artibonite (Communes de Petite Rivière de
l'Artibonite, Marchand Dessalines et Saint Michel de Latalaye avec pour chacune
les quatrième, cinquième et sixième sections communales);
pour le reste, dans sa partie orientale, elle est rattachée au
département du Centre. Les Cahos se situent dans le massif des Montagnes
Noires, Chaîne centrale en Haïti. Il est délimité au
Nord-Est par le Plateau central, à l'Ouest et au Sud-Ouest par la
Vallée de l'Artibonite et au Sud-Est par les Montagnes du Trou d'eau.
Les principales denrées de la Chaîne des
Cahos
Les habitants de la Chaine des Cahos ont de fortes
denrées pouvant offrir au marché local, national et
international. Les principales productions trouvées dans les champs des
habitants sont très diversifiées. Cependant, les denrées
les plus répandues dans la région sont des haricots, du
maïs, du petit mil et du riz qui se retrouvent généralement
même chez un habitant qui ne possède aucune parcelle de terre.
D'autres cultures vivrières et végétales sont aussi dans
les champs: légumes, igname, patate douce, manioc, banane, cacao,
café, arachides... le Chadèque/pamplemousse, orange, citron,
ananas, grenadine...sont présents presque dans toute la région
des Cahos.
La vie socioculturelle dans la Chaîne des Cahos
1- Religions
En Haïti, on pratique majoritairement deux
obédiences du christianisme: le protestantisme et le catholicisme. Dans
la Chaîne des Cahos, on dénombre trois grandes paroisses :
Pérodin, Médor et Chenot au niveau de l'église catholique.
Chaque paroisse a un prêtre administrateur portant le titre
« curé ». Sur le plan
administratif, elles sont toutes placées sous la tutelle du
diocèse des Gonaïves. Quant au protestantisme, on peut noter
plusieurs sectes : église Baptiste, église de Dieu,
église Adventiste, église Méthodiste libre,
Armée du Salut... La pratique dans les cultes s'est
différée selon la foi de chaque secteur dans la religion. Elles
sont dirigées par des prédicateurs issus de la zone ou venus
d'ailleurs, mais placées sous l'autorité d'un pasteur responsable
d'un district religieux quelconque.
2- Réseau scolaire
On retrouve plusieurs écoles qui sont au service de la
population de la Chaîne des Cahos. Cependant, ce secteur
d'activité qui a fait l'objet de notre étude est beaucoup plus
contrôlé par la présence du secteur privé que
public.
2- Les marchés publics
Contrairement aux grandes villes ou petits villages
situés dans certains milieux ruraux du pays, les marchés publics
dans la Chaîne des Cahos ne fonctionnent pas tous les jours de la
semaine. Une famille de cette région doit obligatoirement
s'approvisionner de manière à ce qu'elle puisse attendre
l'arrivée du prochain jour de marché. Pour toute la région
de Haut Cahos, on peut compter environ quatre(4) grands marchés
publics : Pérodin qui fonctionne chaque jeudi et dimanche,
Médor qui fonctionne dimanche, mardi et jeudi ; Lacroix qui
fonctionne mardi et samedi, Eau-Contrée qui fonctionne lundi, mercredi
et vendredi. Pour la région du Bas-Cahos qui a un niveau de vie plus ou
moins élevé que celle de Haut Cahos, on rencontre de petits
villages qui ont du marché presqu'en permanence et qui comptent aussi un
ou deux jours de rassemblement au cours de la semaine. Quant aux femmes qui
représentent le pilier de la famille du point de vue économique,
elles se rendent souvent au marché des villes les plus proches pour
approvisionner leurs maisons des produits qui ne sont pas vendus sur place.
Par ailleurs, tous les habitants de la Chaîne des Cahos
qui ont besoin d'acheter un produit vendu dans les grands magasins par
exemple : aciers, ciments, tôles, clous...sont obligés
d'aller à Petite-Rivière de l'Artibonite, Maïssade, Saint
Michel de Latalaye comme étant les villes les plus proches malgré
les distances qu'on doit parcourir pour y accéder. D'une manière
générale, l'agriculture est la principale activité des
habitants de la région des Cahos, ils s'organisent d'une certaine
manière pour travailler ensemble : kombit20(*),
kolòn21(*), journalier22(*). Le kolòn, est compensé, de
plusieurs personnes qui travaillent ensemble.
Entre l'automne et l'hiver, les habitants se sont plus ou
moins libérés des travaux des champs. Partout dans les
localités, on rencontre des cercles de gaguère qui
représentent non seulement un véritable lieu de divertissement,
mais également une petite activité économique.
« Les batailles des coqs » se font
généralement contre-argent ; les femmes commerçantes
profitent de l'occasion pour vendre leurs produits. Cette activité se
fait toujours dans l'après-midi (à partir de 4h pm).
CHAPITRE II
LE DROIT À L'ÉDUCATION PRIMAIRE DE L'ENFANT EN
DROIT INTERNATIONAL PUBLIC
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT EN DROIT
CONVENTIONNEL
La présente section traite le droit à
l'éducation de l'enfant en droit international et en droit
régional. Loin de faire abstraction de la suprématie des normes
juridiques, nous allons partir d'une approche chronologique. Il est question de
passer en revue la DUDH23(*) et la Déclaration des droits de l'enfant de
1958, avant d'aborder le Pacte International relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels et la Convention relative aux droits
de l'enfant du 20 Novembre 1989.
Les articles 28 et 29 de la Convention font de
l'éducation des enfants, un droit fondamental à la charge des
États parties, lesquels doivent l'assurer sans ménagement et sur
une base égalitaire. L'objectif assigné à cet effet
à l'éducation est de «favoriser l'épanouissement de
la personnalité de l'enfant et le développement des dons et de
ses aptitudes mentales et physiques, dans toute la mesure de leurs
potentialités». Ainsi, l'éducation se présente comme
l'assurance d'un développement social individuel. Mais bien plus, sur le
plan national, elle est productrice de ressources humaines futures aptes
à affronter les problématiques existentielles émergeantes.
Les États ne s'inscriront dans les perspectives et objectifs de la
Convention que lorsque ceux-ci rendront l'éducation de base
institutionnelle c'est-à-dire rendre l'école préscolaire
et primaires obligatoires et gratuites, car des milliers d'enfants à
travers le monde n'ont pas d'accès ou sont exclus du système
scolaire pour des raisons diverses. Telles que: l''éloignement des
établissements d'enseignement et de formation des lieux d'habitation, le
coût élevé des frais de scolarité, la rudesse du
système scolaire sont autant d'explications à la
désaffection pour l'école.
En fait, malgré toutes ces difficultés,
l'école peut s'appréhender comme un vecteur de prévention
et de protection contre les différents abus exercés sur les
enfants. Mettre un enfant à l'école, c'est le soustraire de
toutes sortes d'exploitations, telles que: travail des enfants, mariage
précoce, exploitation sexuelle à des fins commerciales, traite et
vente des enfants. Aussi, façonne-t-elle les mentalités contre
certaines pratiques et rituels exercés à l'encontre des enfants
tels que les mutilations génitales et corporelles.
a)
Le droit à l'éducation de l'enfant dans la Déclaration
Universelle des Droits de l'Homme
En 1948, l'Assemblée générale des
Nations-Unies a adopté la Déclaration universelle des droits de
l'homme en vue de combattre l'oppression et la discrimination. Au lendemain
d'une guerre mondiale dévastatrice, qui avait été le
théâtre de pires actes de barbarie jamais commis dans l'histoire
de l'humanité, la Déclaration universelle énonçait,
pour la première fois, de façon détaillée, les
droits et les libertés individuels. Pour la première fois
également, il a été reconnu à l'échelle
internationale que les droits de l'homme et les libertés fondamentales
s'appliquaient à tout un chacun et en tout lieu.
L'article 26, al. 1er du texte sous examen
déclare que : «Toute personne a droit à
l'éducation. L'éducation doit être gratuite, au moins en ce
qui concerne l'enseignement élémentaire et fondamental.
L'enseignement élémentaire est gratuit24(*)». L'acceptation
quasi universelle de la Déclaration témoigne du succès de
cette entreprise. À l'heure actuelle, la Déclaration
universelle, fondement de la législation internationale en
matière de droits de l'homme, sert de modèle à de nombreux
traités et déclarations internationales et est reprise par les
constitutions et les lois d'un grand nombre de pays dont la République
d'Haïti. Point n'est besoin de rappeler qu'elle a été
l'inspirateur d'un texte spécifique sur les droits de l'enfant, à
savoir la Déclaration des droits de l'enfant de 1959, dont nous allons
aborder dans les lignes ci-dessous.
Le droit à l'éducation de l'enfant dans la
Déclaration des droits de l'enfant de 1959
Avec le vent des indépendances qui soufflait, les
États membres de l'ONU tenaient à tout prix à mettre sur
pied un texte international spécifique aux droits de l'enfant.
Dès lors, l'enfant était déjà rangé dans la
catégorie des personnes vulnérables dont une protection
spécifique de ses droits devait être assurée ; c'est
ce qui ressort du Préambule de la Déclaration, à son
troisième paragraphe, qui considère que :
«L'enfant, en raison de son manque de maturité
physique et intellectuelle, a besoin d'une protection spéciale et des
soins spéciaux, notamment d'une protection juridique appropriée,
avant comme après la naissance25(*)».
Il est toutefois impérieux de signaler que, la
nécessité de cette protection spéciale a été
énoncée dans la Déclaration de Genève de 1924 sur
les droits de l'enfant et reconnue dans la DUDH ainsi que dans les Statuts des
institutions spécialisées et des organisations internationales
qui se consacrent au bien-être de l'enfance.
Le plus précis est le 1er alinéa du
7ème principe de la Déclaration sous examen qui
dispose que:
«L'enfant a droit à une éducation qui doit
être gratuite et obligatoire au moins au niveau
élémentaire. Il doit bénéficier d'une
éducation qui contribue à sa culture générale et
lui permettre, dans des conditions d'égalité des chances, de
développer ses facultés, son jugement personnel et son sens des
responsabilités morales et sociales, et de devenir un membre utile de la
société26(*)».
Cette Déclaration qui n'est qu'une suite
spécifique de la DUDH a clairement indiqué que l'enfant doit
bénéficier d'une éducation intégrale tenant compte
de l'égalité des sexes. Avec le temps, les bonnes intentions non
assorties d'obligation juridique, mais encore spécifiques quant au
caractère essentiel du droit dont les questions ont été
accouchées dans des instruments internationaux plus contraignants dont
le Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et
culturels (PIDESC)28(*) et
la Convention relative aux droits de l'enfant.
Le droit de l'enfant dans les Conventions régionales
ratifiées par Haïti
Le présent paragraphe passe en revue le droit à
l'éducation de l'enfant tel que prévu par le droit
régional haïtien. Il fait allusion à la Convention
Américaine relative aux Droits de l'Homme traitant des droits
économiques, sociaux et culturels (CADHESC)29(*) « Protocole de San
Salvador » (Adopté à San Salvador, le 17 novembre 1988,
à la dix-huitième Session ordinaire de l'Assemblée
générale qui a été signé le 17 novembre 1988
et ratifié le 30 mai 2000 par Haïti. Le droit à
l'éducation de l'enfant dans CADHESC tant dans leur conception que dans
leur universalité, et que la satisfaction des droits économiques
sociaux et culturels garantit la jouissance des droits civils et politiques.
Faisant allusion au droit à l'éducation de l'enfant, elle
prévoit que tout le monde, en particulier l'enfant a droit à
l'éducation. L'État a le devoir de veiller à
l'élimination de toute discrimination contre la femme et d'assurer la
protection des droits de la femme et de l'enfant tels que stipulés dans
les déclarations et Conventions internationales. La CADHESC dans son
article 2 évoque ceci :
«Les États parties au présent Protocole
conviennent que l'éducation doit viser au plein épanouissement de
la personnalité humaine et du sens de sa dignité et renforcer le
respect des droits de l'homme, le pluralisme, les libertés
fondamentales, la justice et la paix. Ils conviennent en outre que
l'éducation doit mettre toute personne en mesure de jouer un rôle
utile dans une société démocratique et pluraliste et de se
procurer les moyens d'une vie décente, de favoriser la
compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les
nations et tous les groupes raciaux, ethniques ou religieux et promouvoir les
activités en faveur du maintien de la paix ».
La présente Convention fait de l'éducation une
priorité à tous les niveaux: primaire, secondaire, universitaire
et professionnelle pour toutes les couches de la société des
États parties. Ceci dit, dans toute action concernant un enfant,
entrepris par une quelconque personne ou autorité dans le domaine de sa
formation, son intérêt sera la considération, la
protection, car lui revient de droit reconnu par la loi. L'article 3 dans les
alinéas a, b, c, et d stipule ceci:
- « L'enseignement primaire doit être
obligatoire et accessible gratuitement à tous.
- L'enseignement secondaire, sous ses différentes
formes, y compris l'enseignement secondaire technique et professionnel, doit
être généralisé et rendu accessible à tous
par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration
progressive de la gratuité;
- L 'enseignement supérieur doit également
être rendu accessible à tous en pleine égalité, en
fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés,
et notamment par l'instauration progressive de la gratuité;
- L'éducation de base doit être
encouragée ou intensifiée, dans toute la mesure du possible, pour
les personnes qui n'auront pas bénéficié de l'instruction
primaire ou n'en auront pas parcouru complètement le cycle».
En fait, l'éducation est un droit sacré qui doit
être accessible à tous. Les États parties à la
présente Convention prennent toutes les mesures appropriées en
vue de parvenir à la pleine réalisation de ce droit et, en
particulier, ils s'engagent à fournir un enseignement de base gratuit
(...). De ce qui précède, il montre que la faiblesse du droit
à l'éducation de l'enfant tel que consacré par les
instruments juridiques ci-avant indiqués, réside dans la mise en
oeuvre effective de ce droit à caractère programmé et
à réalisation progressive. Cet aspect des mesures
législatives nous appellera à interroger quelques lois
budgétaires en Haïti pour parvenir à analyser le pourcentage
affecté au secteur éducatif depuis la mise sur pied des
différentes Conventions régionales ou internationales
ratifiées par Haïti.
Un autre point important est celui des ressources disponibles
pouvant favoriser la réalisation progressive du droit à
l'éducation auquel on peut adjoindre l'assistance et la
coopération internationales. En effet, quant à la notion des
ressources disponibles, on l'entend comme le niveau de richesse qu'un
État est capable d'atteindre, ces richesses ayant comme but d'apporter
satisfaction aux besoins économiques, sociaux et culturels. Elle est
très souvent utilisée pour justifier l'inaction, les limites
d'actions ou le retard d'action des États dans une perspective des
droits « réels », soit à réinterpréter
d'une façon positive et dynamique. Cela a amené le Comité
au DESC à déclarer que cette obligation existe
indépendamment de tout accroissement des ressources disponibles. Ce
même Comité admet que toutes les ressources existantes doivent
être consacrées de manière aussi efficace que possible
à la réalisation des droits consacrés dans le Pacte.
Également, conformément aux Principes de Limburg relatifs
à l'application du PIESC, il est fait obligation aux États
parties, quel que soit leur niveau de développement économique,
d'assurer le respect des droits de tous à un niveau minimum de
subsistance.
Cette une expression qui s'applique tant aux ressources de
l'État qu'à celles dont il dispose au titre de l'assistance ou de
la coopération économique ou technique internationale. Dans
l'utilisation des ressources disponibles, la priorité doit être
accordée à l'exercice des droits reconnus dans le Pacte, compte
tenu de la nécessité d'assurer à chacun la satisfaction de
la prestation de services de base. Ainsi, la répartition
budgétaire nous servira d'indices d'appréciation des efforts
fournis par l'État haïtien pour la réalisation effective du
droit à l'éducation de l'enfant. À ce titre, le manque de
ressources n'est pas un argument qui permet à l'État de justifier
le non-respect du droit de l'enfant à l'éducation.
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT À
TRAVERS LES ENGAGEMENTS PRIS PAR L'ONU
a)
La Déclaration du millénaire: un acte unilatéral
Cette Déclaration n'a pas fait mention des actes
unilatéraux parmi les sources de droit visées à l'article
38 du Statut de la CIJ. Ceci amène Joe VERHOEVEN à dire qu'en
l'absence d'une autorité habilité à
«légiférer», on ne peut normalement pas s'appuyer sur
la volonté d'un seul État pour affirmer l'existence d'une «
norme » dans l'ordre juridique international30(*). Toutefois, rien n'interdit
à une Organisation Internationales d'agir dans les limites des pouvoirs
lui attribués par son acte constitutif.
Les actes unilatéraux des Organisation Internationales
Dans les rapports de l'Organisation avec ses membres, ces
actes ont en revanche tous les effets qui leur sont reconnus par son
traité constitutif. Ceux-ci, quels qu'ils soient, ne suscitent en
principe aucune difficulté puisqu'ils reposent toujours, en
dernière analyse, sur la volonté des États fondateurs de
l'organisation. La Déclaration du millénaire entend exiger aux
États parties, dans ce cas précis, d'assurer l'éducation
primaire pour tous, d'ici l'horizon 2015.
Pour Joe VERHOEVEN, la pratique contemporaine relève
une multiplication de « textes » concertés qui n'expriment pas
un accord en droit de leurs signataires. Les appellations sont très
diversifiées: agreement, communiqué conjoint, déclarations
ou résolution, acte final d'une conférence, etc. Dans bien de
cas, poursuit-il, ces « textes » ne suscitent aucune
difficulté dès lors qu'ils se contentent, par exemple, de
manifester des opinions ou de formuler des recommandations. C'est d'ailleurs la
raison pour laquelle l'auteur les appelle des « accords non juridiques
»31(*).
Ainsi, nous sommes en droit de nous poser la question de
savoir en quoi est-ce que la Déclaration du Millénaire
diffère-t-elle des autres textes analogues, en faisant allusion à
la Déclaration des droits de l'enfant de 1959 ? La réponse
à cette question est localisable à plusieurs niveaux.
La
Déclaration du millénaire et les autres accords non
juridiques
Au niveau de la forme, la Déclaration du
millénaire a été adoptée par une résolution
de l'AG de l'ONU. Elle a suivi la procédure normale de toutes les autres
déclarations issues de l'AG de l'ONU, sauf, à la
différence de celles-ci, elle a été
précédée par le sommet mondial pour les enfants de 1990,
et le rapport du Secrétaire général de l'ONU du 27 mars
2000. À travers les lignes qui suivent, nous essaierons de
détailler un peu le contenu de ces derniers.
Le sommet mondial pour les enfants et le rapport du
Secrétaire Général de l'ONU du 27 mars 2000
1)
Le sommet mondial pour les enfants de 1990
Appelé encore sommet planète terre, le sommet
mondial pour les enfants s'était tenu au siège de l'ONU du 20 au
30 septembre 1990, à l'initiative de six pays avec l'appui de l'UNICEF
et d'autres institutions de l'ONU, sous les auspices du Secrétaire
général de l'ONU. Il avait réuni 159 dirigeants, dont 71
chefs d'État ou de gouvernement, avec comme thèmes principaux
« Objectifs à atteindre d'ici 2000 pour les enfants: leur
santé, leur nutrition, leur éducation et l'accès à
de l'eau salubre et à l'hygiène ». Le point
fort de cette rencontre, fut la signature d'une Déclaration mondiale en
faveur de la survie, de la protection et du développement des enfants et
d'un plan d'action qui énonce une série d'objectifs du
développement humain concernant les enfants pour l'an 2000.
Ce sommet avait approuvé sept (7) objectifs et vingt
(20) annexes, et il avait demandé à tous les pays de chercher
à les atteindre32(*). Entre 1990 et 2000, une réduction d'un tiers
des taux de mortalité pour les nourrissons et les moins de cinq
objectifs à la situation spécifique de chaque pays, en ce qui
concerne les étapes, les critères, les priorités et la
disponibilité des ressources. Pour mobiliser les ressources
nécessaires pouvant permettre d'atteindre les objectifs pour les
enfants, le Plan d'action du Sommet a exhorté les pays donateurs et les
pays en développement à accorder, lors de l'élaboration de
leur budget, un rang de priorité plus élevé à la
question du bien-être des enfants. Cette orientation a abouti à ce
qu'on a appelé l' «Initiative 20/20», une stratégie de
financement qui veille à assurer la disponibilité des ressources
nécessaires pour subvenir aux besoins essentiels et combattre les pires
aspects de la pauvreté. L'initiative proposait que les pays en
développement consacrent au moins 20% de leurs budgets nationaux aux
services sociaux de base et que, de leur côté, les pays
industrialisés affectent 20% de leur aide au développement au
même but.
À la fin du sommet, la Déclaration mondiale et
le Plan d'action en faveur de la survie, de la protection et du
développement de l'enfant furent mis sur pied. En vue de s'assurer de
leur mise en oeuvre, il fut demandé au Secrétaire
Général de rédiger un rapport à présenter
à la mi- décennie lors de la session de l'Assemblée
Générale de 1996 à l'occasion de l'anniversaire du Sommet
pour les enfants. En 1995, lors du Sommet mondial pour le développement
social de Copenhague, le PNUD, l'UNESCO, le Fonds des Nations Unies pour la
population (FNUAP), l'UNICEF et l'OMS se sont tous prononcés en faveur
de cette initiative, estimant qu'elle représentait le moyen de
générer suffisamment de ressources supplémentaires (entre
30 et 40 milliards de dollars US par an) pour que, d'ici à la fin du
siècle, chacun ait accès à des services sociaux
essentiels. Entre 1990 et 2000, une diminution de moitié des taux de
mortalité maternelle. Dans ce même intervalle, une diminution de
moitié des taux de malnutrition des enfants de moins de cinq ans.
Accès universel à de l'eau potable et à une
évacuation hygiénique des déchets humains.
D'ici à l'an 2000, accès universel à
l'éducation de base. Au moins 80% des enfants en âge d'aller
à l'école primaire doivent achever le cycle primaire.
Réduction du taux d'analphabétisme des adultes (chaque pays
déterminera la catégorie d'âge appropriée) à
moins de la moitié du taux de 1990, et priorité à
l'alphabétisation des femmes. Protection des enfants en situation
difficile, en particulier dans les situations de conflit armé.
Déjà, le 30 septembre 1996, sixième anniversaire du Sommet
mondial pour les enfants, on présenta à l'Assemblée
Générale une évaluation complète des progrès
accomplis à la mi- décennie vers les objectifs de l'an 2000. Le
rapport du Secrétaire général souligna les progrès
impressionnants accomplis pour la survie des enfants, notamment dans les
domaines de la couverture vaccinale, de la lutte contre la polio, le ver de
Guinée et les maladies provoquées par les carences en iode, de
l'accès à l'eau potable et de la promotion de l'allaitement au
sein. À la même occasion, il fut constaté qu'au mois
d'octobre 1996, 167 pays au total avaient signé la Déclaration et
le Plan d'action au nom des enfants du monde entier.
Quant au résultat, il était prouvé que
les États n'ont pas fourni assez d'efforts pour rendre
l'éducation de base et l'égalité des sexes possible. Comme
cela fut le cas lors de toutes les grandes conférences de cette
décennie, il est prévu que la responsabilité essentielle
de la mise en oeuvre des plans d'actions qui en ont résulté
incombe aux gouvernements. Voilà pourquoi le Secrétaire
Général de l'ONU a élaboré un rapport qui a
réitéré les engagements de 1990, et dans lequel il a
encore une fois insisté sur le droit à l'éducation de
l'enfant.
2) Le rapport du Secrétaire Général de
l'ONU du 27 mars 2000
Ce rapport intitulé « Nous les
peuples » : le rôle des Nations Unies au
XXIe siècle, n'a fait que rappeler aux États leur
responsabilité en face du monde. Mais la même difficulté
liée au fait que ces engagements ne soient consacrés que dans des
déclarations n'a toujours pas trouvé de remède. Cette
fois, c'est avec plus de précision que le Secrétaire
Général de l'ONU va s'adresser au monde. Ceci relève du
fait que la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée le 20
novembre 1989, venait d'entrer en vigueur en septembre 2000.
Il avait comme objet: «alimenter la
réflexion et stimuler le débat».
Voilà pourquoi le point 15 prévoit:
«Ils nous faut sortir des sentiers battus et repenser les
moyens de gérer notre action commune et de servir l'intérêt
général. Aucun État ne peut espérer venir à
bout à lui seul de la plupart des problèmes auxquels nous devons
faire face aujourd'hui. Pour mieux gouverner au niveau national et mieux
gouverner ensemble au niveau international, il faut des États forts
dotés d'institutions efficaces ».
Quant au point 16 de renchérir que le plus important,
c'est que l'être humain soit au centre de tout ce que nous faisons. Il
n'est pas d'aspiration plus noble, pas de responsabilité plus
impérieuse que d'aider, dans le monde entier, des hommes, des femmes et
des enfants à vivre mieux (...).
Il poursuit, dans le point 17, qu'il ne suffit pas
d'évoquer l'avenir, il faut dès à présent se mettre
à le forger. Puisse le sommet du millénaire être l'occasion
pour les États membres de renouveler leur engagement à
l'égard de l'organisation et de ce que doit être sa mission. Et
puissent les dirigeants de la planète témoigner de leur bonne
volonté en donnant suite aux engagements pris33(*).
Plus loin, dans le point 364, il déclare que:
« Pour faire respecter ces valeurs au XXIe siècle,
nos priorités doivent être clairement définies. Nous ne
devons ménager aucun effort pour libérer nos semblables, hommes
et femmes, de la pauvreté abjecte et déshumanisante dans laquelle
vivent actuellement plus d'un milliard d'entre eux. En conséquence,
engageons-nous à faire en sorte que, d'ici 2015, tous les enfants,
garçons et filles, puissent suivre le cycle complet de l'enseignement
primaire et que les filles aient accès, sur un pied
d'égalité, avec les garçons, à tous les cycles de
l'enseignement ».
LE DROIT À L'ÉDUCATION DE L'ENFANT EN DROIT
POSITIF HAÏTIEN
Le droit positif est un droit constitué par l'ensemble
des règles juridiques en vigueur dans un État ou dans une
communauté internationale, à un moment donné, quelles que
soient leurs sources. La présente section passe en revue le droit
à l'éducation de l'enfant tel que prévu par la
Constitution haïtienne en vigueur et la Loi-cadre de l'enseignement
national.
a)
Le droit à l'éducation de l'enfant dans la Constitution de la
République d'Haïti
La Constitution haïtienne de 1987 stipule dans son art
32.2 «La première charge de l'État et des
collectivités territoriales est la scolarisation massive, seule capable
de permettre le développement du pays. L'État encourage et
facilite l'initiative privée en ce domaine34(*) ».
L'éducation devient non seulement un droit à chacun,
mais également un devoir du citoyen pour le développement du
pays. L'enseignement national comprend les établissements publics et les
établissements privés qui sont autorisés à
fonctionner par l'État. La loi fixe les conditions de création et
de fonctionnement de ces établissements. Les parents ont le droit de
choisir le mode d'éducation à donner à leurs enfants.
« L'enseignement primaire est obligatoire et gratuit
dans les établissements publics ». Cette Constitution qui avait
été précédée par la chute du régime
des Duvalier, le 07 février 1986, tient compte de différents
textes de loi relatifs aux droits humains. En effet, le droit à
l'éducation devient une priorité et est inséré dans
cette Constitution pour que tous puissent l'en avoir accès. Cela n'est
pas étonnant, car le peuple haïtien, y compris aussi les hommes de
loi faisant partie prenante des textes qui font l'objet même de cette
Constitution ont subi des représailles de l'ancien régime
militaire de Jean-Claude Duvalier. En cherchant à
délibérer le peuple de son martyr sans précédent,
en s'appuyant sur tous les instruments juridiques internationaux relatifs aux
droits de l'homme, particulièrement celui qu'est relatif à
l'éducation, la Constitution de la transition prévoyait que tout
haïtien a le droit à l'éducation. L'enseignement est
obligatoire jusqu'au niveau d'études et à l'âge
prévus par la loi.
L'égalité des chances dans la Constitution
Haïtienne
La consultation de différentes Constitutions
d'Haïti depuis la création de la nation nègre après
l'indépendance de 1804, donne une vision commune sur le droit à
l'éducation de l'enfant. Elles sont, sous examen également
explicites quant à l'égalité des chances.
Considérons trois parmi les vingt-cinq (25) Constitutions qu'a connues
la République d'Haïti depuis 1801 jusqu'à 1987. La
première qu'est datée de 1801 fait mention du droit à
l'éducation pour tous dans son Article 68 en disant: « Toute
personne a la faculté de former des établissements particuliers
d'éducation et d'instruction pour la jeunesse sous l'autorisation et la
surveillance des administrations municipales ». Dans son Article 69,
il a fait mention que « La loi surveille particulièrement les
professions qui intéressent les moeurs publiques, la
sûreté, la santé et la fortune des citoyens35(*) ». L'État
avait pour mission de faire valoir l'éducation dans la colonie de
Saint-Domingue sous l'autorité du gouverneur qu'était Toussaint
Louverture à l'époque.
Sans ignorer nombreuses Constitutions parlant du droit
à l'éducation de l'enfant, un siècle plus tard presqu'au
centenaire de l'indépendance de la nation haïtienne, soit en 1902 ;
le droit à l'éducation de l'enfant ne reste pas sans faire
l'objet d'une obligation de l'État. Sur ce même pied
d'égalité, la Constitution haïtienne de 1957, sous la
présidence de François Duvalier, prévoyait à son
article 167 que « l'Éducation doit tendre au plein
épanouissement de la personnalité des intéressés de
façon qu'ils apportent une coopération constructive à la
société et contribuent à inculquer le respect des droits
de l'homme, à combattre tout esprit d'intolérance et de haine et
à développer l'idéal d'unité morale, nationale et
Panaméricaine. L'éducation de base est obligatoire et doit
être fournie gratuitement par l'État en vue de réduire le
nombre des illettrés absolus et permettre à tous de remplir
consciemment leur rôle de travailleurs, de pères de famille et de
citoyens36(*) ».
En dehors de la gratuité de l'éducation dans
cette Constitution, elle fait aussi l'objet d'une obligation pour tous dans la
société. Ainsi, dans son article 168, elle déclare
qu' « Aucun établissement d'éducation officielle
ou privée ne peut refuser des élèves en se fondant sur la
nature de l'union de leurs parents ou tuteurs, ni sur des différences
sociales, raciales, politiques ou religieuses ».
En effet, ces trois Constitutions considérées
dans le cadre de ce travail font le droit à l'éducation de
l'enfant une nécessité pour le développement de la nation.
Comme dans la Constitution de la République d'Haïti en vigueur,
l'enseignement national comprend les établissements publics et
établissements privés, la Loi fixe les conditions de
création et de fonctionnement des établissements d'enseignement.
À ce niveau, l'État doit prendre toutes les mesures
appropriées pour éliminer la discrimination à
l'égard des femmes afin de leur assurer des droits égaux à
ceux des hommes en ce qui concerne l'éducation et, en particulier, pour
assurer, sur la base de l'égalité de l'homme et de la femme. Les
mêmes conditions d'orientations professionnelles, d'accès aux
études et d'obtention de diplômes dans les établissements
d'enseignement de toutes catégories, dans les zones rurales comme dans
les zones urbaines, cette égalité devant être
assurée dans l'enseignement préscolaire, primaire, secondaire,
universitaire, professionnel et technique, ainsi que dans tout autre moyen de
formation professionnelle. Cela va nous amener, à présent,
à jeter un regard sur la Loi Cadre de l'enseignement national.
LA LOI-CADRE DE L'ENSEIGNEMENT EN HAÏTI
La présente Loi réglemente l'enseignement
maternel, primaire, secondaire, professionnel, supérieur et
universitaire. Étant donné que notre champ matériel porte
sur l'enseignement primaire, nous allons focaliser notre attention sur les
articles spécifiques y relatifs. L'article 1er. -
L'enseignement primaire se donne soit dans les écoles publiques,
c'est-à-dire des écoles fondées et entretenues par
l'État, soit dans les écoles privées, c'est-à-dire
fondées et entretenues par des particuliers ou des associations. Il
vise à faire de l'enseignement primaire des écoles qui ont pour
objectif de préparer les enfants à la vie, de leur donner un
premier niveau de formation intellectuelle et sociale. Il doit notamment: 1)
Préparer l'enfant à s'intégrer dans la
société, tout épanouissement et intégration
d'enfant. 2) Préparer à la poursuite d'études
ultérieures, les enfants qui se seront relevés capables.
a)
Les prescrits légaux et la réalité observée: un
contraste amer
On ne peut évoquer la problématique de
l'éducation en Haïti sans parler des enfants des rues qui
représentent de véritables « bombes sociales à
retardement » et provoquent l'insécurité dans les villes.
Des dizaines de milliers d'orphelins sont « confiés » à
des familles. Il faut ajouter à ce panorama les nombreux enfants, en
majorité des filles, qui sont contraintes pour des raisons
économiques de manquer l'école pour remplir des travaux divers
pour le compte de leur famille. Réinsérer ces enfants dans
l'école est un défi aussi fondamental que périlleux.
Toutefois, des initiatives existent, mais leur ampleur est limitée. Les
différentes institutions sociales (bien-être social,
Ministères des affaires sociales, l'UNICEF...) ont souvent mis sur pied
différents programmes pour permettre aux enfants des rues de se
retrouver dans la vie sociale et parfois même de rattraper leur retard
dans les six années du primaire, mais le résultat escompté
n'est pas toujours satisfaisant. Parfois cela dû à la faiblesse de
l'État relativement à l'économie ou la politique du pays.
Dans ce contexte particulier au niveau de la faiblesse diverse de
l'État, il est difficile et même impossible pour respecter les
échéances fixées dans les Conventions Internationales ou
les prescrits de la Lois en Haïti dans le domaine de l'éducation.
Maintenant, jetons un coup d'oeil dans les lignes qui suivent sur la mise en
application des différents prescrits relatifs au droit à
l'éducation dans le pays.
Le retard enregistré en Haïti dans la mise en
application des Conventions et les Lois de la République relatives
à l'éducation
Face à ce constat malheureux, la République
d'Haïti a enregistré une baisse dans la plupart des indicateurs et
n'atteindra à ce rythme jamais le deuxième OMD à
l'échéance fixée qu'est 2015. Un enfant sur deux n'a
toujours pas accès à l'école primaire à l'âge
légal, le taux d'alphabétisation reste autour des deux tiers et
les disparités entre les sexes demeurent très fortes surtout dans
les milieux ruraux et particulièrement dans la Chaîne des Cahos.
Par ailleurs, seulement trois élèves sur dix achèvent le
cycle complet du primaire.
Étant entendu que l'obligation première de la
réalisation des droits proclamés dans le PIDESC incombe d'avance
aux États, bien entendu en tenant compte des ressources disponibles, et
que la Déclaration du millénaire, a apporté des
engagements nouveaux dans les Organisations de l'ONU qui se sont
engagées dans la protection des droits de l'enfant. Vérifions
à présent, dans un deuxième chapitre, les points saillants
sur l'effectivité du droit à l'éducation de l'enfant en
Haïti.
CHAPITRE III
LA RÉALITE DU DROIT À L'ÉDUCATION
PRIMAIRE DE L'ENFANT EN HAÏTI
ÉVOLUTION DU SYSTEME ÉDUCATIF EN HAÏTI
a)
Le système éducatif haïtien après
l'indépendance
Les Colons Français établis à Saint
Domingue dans le but de se faire une fortune, se souciaient très peu
d'établir dans la colonie des écoles et des centres
éducatifs qui dispenseraient d'un enseignement allant au-delà du
stade primaire. Ceux-ci jugés incompatibles avec le système
esclavagiste sur lequel reposait la production de la colonie. Dans la
majorité des cas, ils se contentaient d'envoyer leurs
progénitures dans la mère-patrie, à savoir la France pour
les éduquer dans le but de les éloigner de l'ambiance de
libertinage et de promiscuité qui régnait dans cette colonie
française. Il n'était donc pas question pour la masse d'esclaves
noirs, considérés comme des choses dont on pouvait se disposer
à volonté, de recevoir une instruction. Des chanceux, comme
Toussaint Louverture ont reçu des rudiments d'éducation. Il
était parmi ceux qui ont été amenés en France pour
être éduqués. D'autres, comme le reconnaît Jean
Fouchard, débarquaient des bateaux négriers avec un bagage
éducatif assez solide. Ils sont appelés des marrons du
syllabaire.
Il est intéressant de noter ici, comment certains
colons, dans leur souci d'avoir une main d'oeuvre gratuite et
compétente, se donnaient pour tâche de doter certains de leurs
esclaves d'un métier, et devenaient les premiers
bénéficiaires des produits de leur art, se passant ainsi des
artisans européens qui coûtaient trop chers.
Après l'indépendance d'Haïti, à part
quelques rares exceptions, l'éducation ne fut pas l'une des
priorités des différents gouvernements qui se sont
succédés, quoique tous, dans leurs discours ou à travers
des documents légaux soulèvent la problématique de
l'éducation. Dessalines fit inscrire dans la
Constitution
impériale, c'est-à-dire celle de 1805 une école
populaire pour chacune des six divisions militaires de son empire (article 19)
sans toutefois réaliser ce projet. Christophe érigea des
écoles dans certaines villes de son royaume, fonda des académies
royales servant d'écoles secondaires et s'intéressa même
à l'éducation des jeunes demoiselles du royaume en fondant deux
écoles privées de filles au Cap-Haïtien. Pour superviser ces
écoles, il fonda la Chambre Royale d'Instruction Publique et fit appel
à des enseignants anglais. Pétion commença à
manifester presqu'à la fin de sa présidence un certain souci pour
l'instruction de ses concitoyens en établissant quelques écoles
et en fondant le premier lycée national et en créant un
pensionnat pour les demoiselles à Port-au-Prince. Dans la constitution
de 1816, il affirma aussi le principe de l'éducation primaire et celui
de l'enseignement gratuit pour tous. Sous Boyer, l'éducation fut
reléguée aux champs des bonnes intentions à travers la
préconisation des établissements destinés aux enfants de
ceux qui auraient rendu des services à la patrie. Boyer passa
également dans l'histoire comme celui qui, après avoir
réalisé l'unité de l'île, ferma l'Université
de Santo Domingo.
Création des premières écoles
En 1844, sous la présidence de Philippe Guerrier un
ministère de l'instruction publique fut créée, mais le
manque d'organisation et l'absence d'une politique d'éducation
rationnelle et continue rendit ce nouveau ministère non fonctionnel, et
ce, jusqu'à la nomination d'Elie Dubois, sous la présidence de
Fabre Nicolas Geffrard, comme ministre de l'instruction publique. Ce dernier,
est reconnu comme le seul président du dix-neuvième siècle
dont le gouvernement accorda une attention spéciale à
l'éducation. En effet, son gouvernement établit de nombreuses
écoles en Haïti et encouragea l'instruction à grande
échelle sur tout le territoire national. Après la signature du
Concordat le
28 mars
1860 qui fit du catholicisme la religion officielle d'Haïti, il
accueillit des missionnaires catholiques qui ont établi les
premières écoles congréganistes en Haïti. Il
réorganisa l'École de médecine et l'École de Droit
et créa les écoles de peinture, de musique et de navigation.
Depuis la proclamation de l'indépendance, nombreuses
constitutions furent promulguées. Cependant, celle de 1874 fut la
première à reconnaître l'importance de l'instruction
publique, au moins dans sa phase primaire en déclarant l'enseignement
primaire est obligatoire. Les Constitutions suivantes stipuleront que
l'enseignement primaire est non seulement obligatoire, mais gratuit.
Malgré ces bonnes intentions, les structures ne
s'améliorèrent guère, et l'État haïtien
continua de négliger ses devoirs en ce domaine, préférant
laisser la responsabilité d'éduquer les petits Haïtiens aux
étrangers.
À la fin du premier siècle de
l'indépendance d'Haïti, l'éducation se retrouva pratiquement
à la charge des religieux catholiques étrangers présents
dans le pays. Ces religieux ont fondé des écoles en grande partie
pour éduquer surtout les enfants de la bourgeoisie, les gens de la masse
étaient négligés. Léon D. Pamphile a
rapporté qu'en l'année du centenaire de l'indépendance
(1904), « seulement 3% des enfants entre cinq ans et dix-huit ans
fréquentent les écoles en Haïti »37(*). Comme au temps de la colonie,
les forces politiques et économiques du début du XXIXe
siècle continuèrent d'empêcher la diffusion du
progrès et à l'éducation du peuple (idem.)
L'occupation américaine de 1915, qui bouleversa la vie
sociale et politique du pays et assura aux Américains une main mise
robuste sur toute l'administration publique, ne contribua nullement à la
réduction de l'analphabétisme en Haïti. Le peu d'attention
accordée à l'éducation se concentra dans le domaine
technique et agricole aux heureux de l'élite intellectuelle de
l'époque, gens de lettres et des humanités, tenants de la culture
francophone. En 1941, Maurice Dartigue fut nommé à la tête
du Ministère de l'Instruction Publique. Pendant quatre ans, il essaya de
créer un corps d'enseignants compétents et des programmes de
perfectionnement des cadres scolaires d'une telle envergure qu'on
n'hésita pas de parler de « réforme
Dartigue » pour résumer ces démarches.
L'évolution du système scolaire
Au niveau de l'éducation, les quarante dernières
années sont marquées par quatre phénomènes de
grandes importances: 1) L'exode massif de ceux et celles qui pourraient
être des enseignants compétents, attirés par les offres
alléchantes de certains pays étrangers comme l'Afrique, le Canada
ou forcés à l'exil. 2) La production des "écoles
borlettes", incapables de se pourvoir d'un personnel vraiment
qualifié. Ce qui les accuse d'un taux d'échecs quelquefois
embarrassants. Toutefois, elles suppléent à l'État en
acceptant des étudiants qui, autrement, ne seraient pas acceptés
dans les écoles publiques ou congréganistes. 3) L'échec de
la réforme du système de l'enseignement entreprise par le
ministre Joseph C. Bernard à la fin des années 1970 ; une
réforme qui prenait en compte la réalité linguistique
d'Haïti et tentait de restructurer les dispositifs de l'éducation
à partir de cette réalité. Certains éléments
de cette réforme, qui aurait constitué un acte
révolutionnaire dans l'histoire de l'éducation, furent repris
après 1986. 4) Le lancement du plan national d'éducation et de
formation.
Aujourd'hui, l'État haïtien n'est toujours pas en
mesure de mettre l'éducation à la portée du grand nombre,
et ce malgré des demandes sans cesse accrues de la part des masses
prenant chaque jour conscience de l'importance d'une bonne formation
académique pour leurs progénitures. Les fonds du budget national
alloués à cet effet demeurent insignifiants, et l'absence d'une
politique d'éducation bien structurées et tenant compte de ces
demandes laisse les gens perplexes.
Le contexte sociopolitique
Après la chute de Jean-Claude Duvalier, le 07
février 1986, Haïti a connu une longue période de transition
démocratique au cours de laquelle la Constitution de 1987 a
été élaborée et votée par le peuple
haïtien. Durant cette période, une crise d'instabilité
politique règne dans le pays. Elle a été engendrée
par les partisans du pouvoir du régime déchu et de ceux qui
voulaient implanter la démocratie en Haïti. Les premières
élections démocratiques ont eu lieu le 16 décembre 1990 et
le père Jean-Bertrand Aristide a été
démocratiquement élu président d'Haïti pour 5 ans,
conformément à la Constitution de 1987. Cependant, après
seulement 8 mois au pouvoir, le nouveau président a dû quitter le
pouvoir, car le 29 septembre 1991, les militaires, suppôts de la
dictature macoute ont organisé un coup d'État militaire et l'ont
forcé à s'exiler. Après trois ans d'embargo international,
de résistance populaire et de négociations internationales, le
gouvernement constitutionnel a repris le pouvoir le 14 octobre 1994,
grâce à l'appui de la communauté internationale et
l'intervention des militaires des États-Unis. Cependant,
après ce retour au pays, il y avait encore des troubles politiques entre
le parti au pouvoir et les autres partis politiques. Ces perturbations
politiques ont eu des conséquences négatives sur la vie
socio-économique et politique de la population. Ce contexte de longue
crise politique a occasionné le blocage de l'aide économique
internationale et de l'investissement des entrepreneurs nationaux et
internationaux. Celui-ci n'est pas sans effet sur le système
éducatif haïtien, et encore plus, a fait longuement retarder le
progrès et l'atteinte de l'Objectif du Millénaire pour le
Développement fixé d'ici 2015.
En effet, depuis les premières constitutions, le cadre
légal des politiques éducatives existe en Haïti. Dans les
articles 32.1 à 32.3 de la Constitution en vigueur, celle de 1987, on
pourrait lire que l'éducation est à la charge de l'État et
des collectivités territoriales. Elle consacre en même temps la
gratuité et l'universalité de l'enseignement primaire.
L'éducation fonctionne également sous le régime du
décret-loi de 1989 qui confère au Ministère la charge de
l'élaboration, de la mise en oeuvre de l'évaluation et de la mise
à jour de la politique générale de l'État dans les
domaines de l'Éducation, de l'Alphabétisation et de la Formation
professionnelle. De plus, l'État haïtien est le signataire de la
Convention des droits de l'enfant ainsi que des engagements du Forum de Dakar
en l'an 2000 sur l'Éducation Pour Tous. Par ailleurs, le MENFP dispose
d'un Plan National d'Éducation et de Formation (PENF), principale
boussole pour l'avenir de l'éducation en Haïti. Les actions du
Ministère s'inspirent également de l'avant-projet de loi de 1998
déposé au parlement haïtien aux fins de ratification.
Selon le bilan commun de pays pour Haïti, une
étude publiée en 2000 par les Nations Unies et le gouvernement
haïtien, souligne qu'un tiers des enfants d'âge scolaire n'avait pas
accès à l'école. Outre cela, seule une faible
minorité d'enfants demeuraient à l'école pendant quatre
années consécutives. Quant aux installations, la majorité
des écoles sont improvisées dans des bâtiments qui n'ont
pas été conçus à cette fin. Avant le séisme
du 12 janvier 2010, à peine 21 % d'entre elles disposent de
l'électricité et 42 % bénéficient de l'eau
courante. Depuis le séisme, quelque 4000 établissements
d'enseignement ont été détruits dans la zone de
Port-au-Prince. Les classes ont repris dans des abris temporaires,
généralement sous des tentes. De plus, il faut faire
disparaître des montagnes de débris avant d'installer les tentes.
Il faut aussi prévoir des latrines, un approvisionnement en eau potable,
etc. Dans sa grande sagesse, la communauté internationale a
décidé qu'il fallait construire rapidement des écoles pour
renvoyer les élèves à l'école. On a donc construit
ici et là des écoles avec des toits de tôle en plein
soleil. Quand on sait que le changement dans un pays comme Haïti ne peut
se faire que par l'éducation, on reste perplexe.
Plus de 70 % de la population est analphabète et 500
000 enfants ne vont pas à l'école, faute de moyens. L'État
haïtien ne débourse que 13 % des montants associés à
l'éducation, le reste étant assumé par les parents. Si
l'école en Haïti est obligatoire, elle n'est pas vraiment gratuite,
et de moins en moins publique. La qualité variable de l'enseignement,
les problèmes de malnutrition, les piètres conditions
matérielles, l'analphabétisme des parents (au moins de 70 %),
l'absence de bibliothèques publiques ou scolaires, l'éloignement
des écoles et l'absence d'électricité dans les foyers sont
d'autant d'éléments responsables du taux de scolarisation peu
élevé. Or, l'élite haïtienne a toujours
considéré que l'éducation, comme les soins de
santé, était un privilège réservé à
une minorité, non un droit pour tous38(*). La plupart des Haïtiens voudraient bien
s'instruire, mais tout simplement ils ne le peuvent pas. Bon nombre d'entre eux
ont honte d'être analphabètes, mais s'instruire dans ce pays ne
dépend apparemment pas uniquement de soi, avec un système assez
complexe.
Comme l'État n'a aucun moyen pour prendre des
dispositions permettant à tous de s'instruire, donc un grand nombre de
gens sont condamnés à vivre dans l'ignorance. Sur 1000
élèves inscrits au primaire, 900 abandonneront l'école
avant la fin de leurs études. Les causes sont multiples et pas toutes
d'ordre pédagogique : infrastructures inexistantes ou
désuètes, programmes mal adaptés, enseignants mal
formés, distances à parcourir trop longues dans les zones
rurales, chemins impraticables par mauvais temps, absence
d'électricité dans les écoles et à la maison,
manque d'équipements scolaires adéquats, pénurie de
manuels, sous-alimentation de plusieurs élèves, etc. Le proverbe
« Ventre affamé n'a pas d'oreilles »
traduit bien ce qui se passe dans ce pays ; il correspond à la
maxime créole « Sak vid pa kanpe »
(Celui qui n'est pas nourri ne tient pas sur ses pieds.)
ANALYSE CONTEXTUELLE DU DROIT À L'ÉDUCATION DE
L'ENFANT EN HAÏTI
a)
Le cycle d'enseignement primaire/enseignement fondamental
L'enseignement primaire ou fondamental est la première
étape dans la formation intellectuelle d'un enfant jusqu'à son
âge d'adulte et la fin de sa carrière d'apprentissage. En
Haïti, comme dans presque tous les pays du monde, les différentes
étapes de formation d'un individu doivent être
réglées et contrôlées par l'État. La
Constitution haïtienne de 1987 s'en fait le point comme suit :
1) L'enseignement primaire se donne soit dans les
écoles publiques, c'est-à-dire fondées et entretenues par
l'État; soit dans les écoles privées, c'est-à-dire
fondées et entretenues par des particuliers ou des associations.
2) Il est divisé en enseignement primaire de 1er
cycle et en enseignement primaire de 2ème cycle.
3) Les écoles primaires du 1er cycle
comprennent un cours élémentaire et celui du 2ème
cycle un cours moyen. La durée de chacun est de trois ans.
Aujourd'hui, on utilise souvent le thème
d' « enseignement fondamental » pour parler des
classes primaires et les trois autres classes précédant le
début du secondaire au collège ou au Lycée. Ce dernier
s'étend sur une période de neuf (9) années et a pour
objectif d'amener les élèves à un niveau de connaissances
générales, scientifiques et techniques par la maîtrise des
outils de base essentiels à leur intégration sociale, leur
insertion à la vie active et leur accession au niveau du secondaire. Il
est organisé en trois cycles : un premier cycle de quatre ans, un
deuxième de deux ans et un troisième de trois ans. L'âge
officiel d'entrée est de 6 ans.
À remarquer, avant d'entrer en première
année fondamentale qu'est le point de départ de l'enseignement
primaire/fondamental, à l'âge de trois ans, les parents peuvent
envoyer leurs enfants en classe de préscolaire pour une durée de
trois ans. Il a pour objectif de contribuer au développement de la
personnalité de l'enfant sous toutes ses formes. Il ne s'agit pas d'un
cycle d'enseignement à proprement parler, mais constitue plutôt
une phase d'exploration et d'éveil contenant des activités de
scolarisation qui préparent l'enfant à son entrée à
l'école formelle.
Le cycle d'enseignement secondaire
L'enseignement secondaire, a pour objectifs de
développer «les qualifications indispensables à l'exercice
d'une activité de production et à préparer l'accès
à l'enseignement supérieur et universitaire ». Il est
organisé en un cycle de quatre années et comprend 3
filières : une filière générale, une filière
pédagogique et une filière d'enseignement technique
professionnel. Il est sanctionné par le diplôme de
baccalauréat (Bacc II)39(*). L'enseignement secondaire, proprement dit, a une
durée de quatre ans. Il succède le troisième cycle
fondamental qui a pris fin avec un examen officiel organisé par
l'État (en 9ème année fondamentale). Il
comprend les classes de troisième, seconde, rhéto et philo.
Le cycle d'enseignement supérieur et universitaire
L'enseignement supérieur comprend l'enseignement
universitaire et l'enseignement non universitaire. L'enseignement
universitaire, de portée générale, est dispensé
dans une université ou autre établissement reconnu par
l'État. Pour le moment, les enseignements vont de la 3ème
jusqu'à la 6ème année après le Bacc II et sont
sanctionnés par la délivrance d'un diplôme de licence (en 3
ou 4 ans selon les cas après le Bacc II). Des efforts sont
développés par l'Université d'État d'Haïti
(UEH) et d'autres universités pour mettre sur pied un programme de
maîtrise dans les universités haïtiennes. Le programme de
doctorat ne se donne pas en Haïti pour le moment. L'enseignement
supérieur non universitaire est d'orientation essentiellement pratique
et a pour but de développer la capacité de l'étudiant
à se placer sur le marché du travail. Pour avoir accès
à l'enseignement supérieur universitaire et non universitaire
l'obtention du diplôme de bacc. II est obligatoire. Certains de ces
établissements exigent un examen d'entrée.
LES CONDITIONS ET LA QUALITÉ DE L'ENSEIGNEMENT
EN HAÏTI
Le système éducatif haïtien fait face
à trois problèmes principaux. Tout d'abord, en termes de
gouvernance, le ministère de l'éducation fait face à la
fois à des difficultés financières et techniques. Le
secteur privé et des organismes de soutien scolaire offrent actuellement
80% de l'éducation en Haïti, mais il y a peu de dialogue entre les
prestataires de service privés et publics, et tout ceci se traduit par
un manque de connaissances, d'analyse, de coordination et de soutien dans les
établissements d'enseignement. Deuxièmement, le manque
d'accès à une éducation de qualité, en particulier
dans les régions pauvres et rurales, le système
génère encore beaucoup trop d'exclusion (les groupes
vulnérables, les abandons scolaires, les excédents et les
surâgés). Environ 500,000 enfants n'ont toujours pas accès
à l'éducation de base. Enfin, la qualité et
l'efficacité de l'éducation offerte est très faible.
Seulement 35 % des enfants qui accèdent à l'éducation
arrivent à terminer les six premières années à
l'école primaire dite fondamentale. La qualité de
l'éducation fournie par la plupart des établissements publics et
privés est beaucoup plus faible. Celle-là est bien
témoignée dans le nombre d'enseignants non qualifiés,
l'insuffisance ou l'inexistence des manuels scolaires, les taux de redoublement
et d'abandon, nombre élevé de surâgés, et les
faibles scores d'achèvement des examens de l'enseignement primaire.
Les écoles publiques sont souvent en très
mauvais état, avec des classes surchargées, des latrines dans un
état délabré. L'enseignement n'est pas de haute
qualité. Le peu de manuels scolaires disponibles sont
généralement en français, bien que le créole soit
la langue principale d'enseignement dans les premières années
d'études surtout dans le cycle primaire. Les pratiques d'enseignement
sont presque exclusivement «craie et
répétitions », alors que les élèves
doivent réciter des mots et des expressions qu'ils ne peuvent pas
comprendre la plupart du temps. Une bonne partie de l'enseignement se fait sur
un tableau avec de la craie. Les élèves doivent apprendre par
coeur des morceaux de texte. Il arrive, quelque fois, qu'ils ne les comprennent
pas. Beaucoup affirment que le manque d'enseignants bien préparés
est la principale cause de la faible qualité de l'éducation en
Haïti. Au niveau national, environ 400 nouveaux enseignants sont
certifiés chaque année, contre un besoin estimé à
plus de 2000 enseignants par an pour réaliser l'éducation pour
tous (EPT) d'ici l'an 2015. La préformation, fournie par les deux
secteurs: public et privé, n'a bénéficié d'aucun
investissement en capital de plus de dix ans. Les installations sont en mauvais
état, les programmes sont inappropriés, les formateurs
d'enseignants transmettent des méthodes d'enseignement
dépassées et les stagiaires n'ont pas le matériel dont ils
ont besoin pour développer leurs connaissances, la compréhension
théorique et les stratégies pédagogiques. Près de
25 % des enseignants du primaire n'ont jamais fréquenté
l'école secondaire, et seulement 15 % sont considérés
comme qualifiés, c'est-à-dire ayant un diplôme40(*) .
Les conditions des enseignants
Les enseignants qualifiés sont la pierre angulaire
d'une éducation de qualité. La sonnette d'alarme a
été tirée dans maintes régions du monde devant la
pénurie de plus en plus aiguë d'enseignants. La faiblesse des
salaires qui leur sont versés, leurs mauvaises conditions de travail et
l'insuffisance de leur qualification ont contribué à la lente
érosion de leur statut social. L'UNESCO s'emploie à soutenir les
politiques nationales et internationales de formation des enseignants à
tous les niveaux du système éducatif, à renforcer les
capacités nationales en matière de formation des enseignants,
notamment dans des disciplines spécialisées comme les
Technologies de l'Information et de la Communication (TIC), et à
encourager le recours à l'enseignement à distance dans les
programmes de formation41(*). À cette fin, elle s'efforce de renforcer les
capacités des principales institutions de formation de façon
à accroître substantiellement le nombre d'enseignants
qualifiés, notamment dans le fondamental.
En Haïti, depuis la fin des années 1980, le corps
professoral haïtien revendique un meilleur traitement salarial et
l'amélioration du cadre de travail. On parle par ailleurs d'une
école haïtienne à deux vitesses une avec les enseignants
formés, et l'autre avec ceux qui ne sont pas formés. Selon le
programme-cadre de la formation des agents de l'enseignement, publié par
le ministère de l'Éducation Nationale et de la Formation
professionnelle (MENFP), Haïti compte près de 70 000 enseignants
dont 85% n'ont reçu aucune formation professionnelle et dont 30%
possèdent un niveau inférieur à la neuvième
année fondamentale (MENFP. 2005. p.3)42(*). Le mauvais traitement salarial dont sont victimes
généralement les enseignants des écoles publiques et
privées, est-il dû uniquement à leur non-qualification? Les
statistiques disponibles font état de plus de 60% des enseignants du
secteur privé qui n'ont aucune qualification académique et
professionnelle. Cependant, environ un tiers des enseignants du public sont des
normaliens. Mais ceux-ci ne bénéficient nullement d'avantages de
la part de l'État. La plupart de ces enseignants réclament en
vain des arriérés de salaire depuis plusieurs années, et
ils n'ont pas d'accès à aucune autre forme d'avantages sociaux.
Il existe des professeurs qui paient leur police d'assurance
régulièrement. L'État perçoit des taxes en
conséquence, mais lorsqu'un professeur est malade, il se rend compte
qu'il n'a jamais été couvert réellement d'une assurance de
santé. Il est obligé lui-même de payer ses frais
médicaux.
Les matériels et infrastructures scolaires
Au moment où on peut considérer que la
réussite des élèves est tributaire de l'existence d'au
moins d'un manuel scolaire par élève, la majorité de ceux
du primaire, surtout du milieu rural, en est dépourvu. Si l'on
considère l'ensemble des enfants scolarisés, l'État ne
parvient à assurer la scolarisation que d'un quart environ de ceux-ci.
Ce sont donc les nombreuses écoles privées, religieuses ou
laïques, payantes pour la très grande majorité, qui
reçoivent le plus grand nombre d'enfants en âge scolaire. Dans les
zones rurales, certaines familles habitent trop loin de toute école pour
pouvoir y envoyer leurs enfants. Ou s'y prennent trop tard pour les
inscriptions, et bien des enfants ne trouvent place ni dans les écoles
de l'Éducation nationale ni dans les écoles privées
proches de leur domicile, tant ces établissements sont
déjà surchargés. Il arrive souvent que les classes des
écoles accessibles à d'autres qu'aux enfants des riches comptent
jusqu'à cent élèves, dans un espace prévu pour
trente, et avec du matériel scolaire à peine suffisant pour
vingt. Dans ces «pépinières», un malheureux enseignant
s'épuise à donner l'illusion d'une école faisant
bégayer et répéter par coeur à ses
élèves des notions qui restent totalement hermétiques au
plus grand nombre, et parfois à l'enseignant lui-même. Les
enseignants mal formés, accablés par un trop grand nombre
d'élèves, se contentent souvent d'utiliser des manuels
désuets jusqu'à l'absurdité, qu'ils ont eux-mêmes
quand ils étaient élèves, ce qui les incite aussi à
pratiquer des méthodes pédagogiques dépassées,
répétitives et décourageantes.
En Haïti, l'un des problèmes les plus persistants
des écoles publiques ou privées, particulièrement en zone
rurale, est celui du matériel scolaire. Il n'est pas rare de voir une
classe de plus de cinquante élèves, dont une dizaine seulement
ont en main le livre de lecture, ou de géographie, ou d'histoire...
nécessaire pour suivre le programme. Certains élèves n'ont
même ni plume ni cahier. Scolariser un enfant représente pour les
parents une très lourde charge. Il faut d'abord payer un écolage
mensuel ou annuel (même dans les écoles nationales, il faut payer
un frais d'inscription). Ensuite, le port de l'uniforme est nécessaire.
Et la tradition, ainsi que la fierté familiale et surtout celle de
l'enfant exigent que les petits écoliers et écolières se
présentent convenablement chaussés à l'école.
En fait, dans la grande majorité des écoles,
aucun matériel scolaire n'est vendu à des conditions avantageuses
ni prêté gratuitement aux élèves. Dans le milieu
rural, l'argent est rare. Sur le plan alimentaire, on consomme d'abord ce qu'on
y produit. Le peu d'argent disponible est d'abord utilisé pour les
besoins essentiels. Étant donné son prix, le matériel
scolaire n'a pas la priorité pour l'écolier. Les parents ne
perçoivent pas la nécessité d'en procurer aux
élèves, car eux-mêmes n'ont jamais fréquenté
l'école. Le peu de parents qui savent lire et écrire ont
été dans le système de répétition de phrases
ou de mots dont le sens demeurait bien souvent énigmatique. Les parents
doivent donc faire face, à chaque rentrée scolaire, à des
dépenses considérables pour chacun de leurs enfants. Dès
lors, on comprend qu'ils choisissent de n'envoyer que certains de leurs enfants
à l'école et qu'ils fassent l'économie des
matériels scolaires. En ville comme en campagne, la dégradation
de la situation économique des familles entraîne chaque
année le retrait de l'école de bon nombre d'enfants qui avaient
entamé une scolarité primaire normale. Non seulement les familles
ne se trouvent plus en mesure d'assumer les frais de scolarité, mais la
performance de l'enfant à l'école est requise pour encourager sa
famille... Cette complication pour la scolarisation des enfants en Haïti
peut être définie comme un fléau national.
L'éducation des écoliers haïtiens n'est
pas toujours assurée dans de bonnes conditions d'infrastructures
physiques et environnementales. L'espace insuffisant dans les salles de classes
pour accueillir tous les enfants inscrits au cours d'une année scolaire
surtout dans les écoles publiques, la quantité de mobiliers
disponibles sont autant de facteurs qui provoquent les échecs scolaires
souvent enregistrés chez les enfants.
La vétusté et le délabrement des
infrastructures scolaires
Les conditions de travail dans lesquelles se trouvent les
enseignants et les élèves ne sont pas pédagogiques. Le
Nombre d'élèves excède le nombre de sièges
disponibles. De ce fait, les enseignants sont inconfortables et les
élèves sont moins réceptifs. Cette situation conduit les
étudiants à l'échec. Selon certains experts dans domaine
de l'éducation, les établissements scolaires performants doivent
disposer d'excellentes infrastructures, des mobiliers scolaires, des salles de
classe et de services essentiels tels que l'eau potable et les installations
sanitaires). La plupart des études ont montré qu'il existe des
relations positives entre la qualité des bâtiments scolaires et le
rendement des élèves. Les écoles qui sont dotées de
bâtiments modernes et de nouvelles installations pédagogiques
telles que bibliothèque et espaces ludiques ont donné de
meilleures performances. Malgré l'effort des familles et du gouvernement
haïtien, malgré l'appui constant des partenaires techniques et
financiers qui ont permis « un accroissement non négligeable du
nombre d'écoles et d'élèves qui ont pu y avoir
accès, les faits marquants caractérisant le système
éducatif national sont, à quelques nuances près,
restés les mêmes ».
CHAPITRE IV
L'ÉDUCATION DES ENFANTS DE LA CHAINE DES CAHOS AU
REGARD DU DROIT HAÏTIEN ET DES CONVENTIONS INTERNATIONALES
Dans les différentes constitutions qu'a connues la
République d'Haïti depuis sa fondation en tant que nation libre et
indépendante, l'éducation des enfants pour le
développement du pays y est inscrite. Ainsi, les conventions
internationales ne cessent non plus de plaider en faveur des enfants dans le
monde pour un meilleur respect de leur droit à l'éducation.
Cependant, ce n'est pas toujours le cas surtout dans les pays en voie de
développement comme Haïti qui est dans une situation
spéciale. Dans les milieux reculés, les sections communales et
les endroits d'accès difficiles comme la Chaîne des Cahos, le
droit à l'éducation des enfants est totalement
négligé. L'État ne prend pas en compte, d'une
manière officielle l'éducation des enfants de la zone. Comme
mentionné dans les pages précédentes, pour toute la
région des Cahos, il n'y a que deux écoles nationales qui
fonctionnent. Ces écoles fonctionnent très mal. Elles n'ont pas
les infrastructures nécessaires, elles ne sont pas supervisées.
Ce sont les parents qui prennent en charge l'éducation de ces enfants,
en leur donnant les matériels nécessaires et en payant leurs
frais de scolarité.
En effet, Haïti en général et la
Chaîne des Cahos en particulier sont loin d'être à jour
quant au respect du droit à l'éducation des enfants par rapport
aux prescrits de ses propres lois et celles des différentes Conventions
internationales.
LE MILIEU SCOLAIRE DANS LA CHAINE DES CAHOS
a)
Les établissements scolaires existant dans la Chaîne des Cahos en
1983
Dans la région de la Chaîne des Cahos, dans les
années 1980, on ne comptait que trois écoles primaires:
l'école presbytérale Notre-Dame de la Providence située
à Chenot, 5ème section de Dessalines, dirigée
par les Petites Soeurs de Sainte Thérèse de l'Enfant
Jésus, l'école presbytérale Sainte-Élizabeth
d'Hongrie située à Pérodin, 5ème section
communale de Petite-Rivière de l'Artibonite, dirigée par les
Petites Soeurs de Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus,
l'école Nationale de Pérodin dirigée par un directeur
nommé par l'État. Ces trois écoles, malgré leur
proximité aux multiples localités de la région, desservent
toute la population des Cahos. Maintenant, en 1983, par le biais de
l'Église catholique, les Pères de Saint Jacques, avec la
collaboration d'Inter-Aide, un organisme humanitaire international arrivait
à Chaîne des Cahos en vue d'apporter une amélioration dans
la situation de cette population. Ils ont implanté quelques
écoles communautaires sur le territoire de la région. Dans
chaque zone où il y avait une chapelle catholique, une école
semi-presbytérale a été implantée. Durant la
première décennie de la présence d'Inter-Aide dans la
zone, on pouvait compter environ une quinzaine d'écoles qui ont
été créées.
b)
Infrastructures scolaires dans la Chaîne des Cahos
Comme mentionnée au début de ce travail de
recherche, la région de la Chaîne des Cahos est l'une des zones
d'accès difficile en Haïti. À cause de l'absence des
infrastructures routières, il est difficile et même impossible
parfois de transporter les matériaux de construction et
équipements dans les différentes localités où se
trouvent les écoles. Il faut noter que dans la zone, les
matériaux locaux utilisés dans les constructions comme le sable,
les graviers... ne sont pas de bonne qualité. Quant aux autres
matériaux comme tôles, ciment, fer, clous, bois... il faut
absolument parcourir au moins huit heures (8 h) de marche pour aller les
acheter dans une ville ou un bourg. C'est ce qui explique en effet, que
nombreux bâtiments scolaires visités dans le cadre de ce travail
sont délabrés et n'offrent pas de bonnes conditions
d'apprentissage. La grande majorité des écoles fonctionnent sous
des tentes en paille de cocotier, sous un arbre, à l'intérieur
d'une église qui elle-même n'a pas une bonne infrastructure.
Certaines écoles de la zone sont placées sous un bâtiment
plus ou moins acceptable, mais ne répondent pas vraiment aux normes
prescrites par le MENFP ainsi que ceux des constructions parasismiques.
Sous un total de 10 écoles visitées faisant
partie d'un réseau d'écoles soutenues par l'association
OKPK43(*)/Inter-Aide
et 5 autres hors réseau dans toute la région de la Chaine des
Cahos, on a rencontré différentes sortes d'infrastructures
scolaires possibles. Grâce à cette association locale qui
s'engage dans des investissements comme la construction de bâtiments
scolaires, la formation des professeurs, les matériels et fournitures
scolaires, etc., plusieurs écoles ont pu trouver un espace pour
fonctionner et posséder certains équipements dans les salles de
classe. Cependant, malgré la présence d'Inter-Aide et d'OKPK, de
nombreuses écoles fonctionnent dans des bâtiments qui, le moins
qu'on puisse dire, laissent à désirer. On a constaté que
certaines écoles des localités situées en altitude,
(Dodard à Médor, Ingrand à Pérodin) fonctionnent
dans un espace exigu, sans cour de récréation, dans des immeubles
sans équipements ni portes. Ce qui signifie que les chèvres,
les brebis ou les autres animaux peuvent y entrer à volonté et
souiller les lieux.
c)
Le niveau académique et pédagogique des maîtres dans la
Chaîne des Cahos
La formation des maîtres constitue toujours
l'élément principal de l'appui d'Inter- Aide aux écoles de
la région des Cahos depuis son arrivée dans la zone en 1983.
C'est la problématique du manque de formation académique des
maîtres disponibles dans la région qui a été la
principale difficulté pour la zone. Pour mieux appuyer les
communautés scolaires, Inter-Aide organise des séances de
formation régulièrement qui consistent à augmenter les
niveaux académiques et pédagogiques des maîtres. Ces
sessions de formation organisées à leur intention sont
relativement fréquentes à cause de l'immensité des
besoins. Cela fait plus d'une quinzaine d'années qu'Inter -Aide et OKPK
disposent d'un centre de formation installé à Sterling dans la
commune de Dessalines. Ce centre offre plusieurs sessions de formation chaque
année, notamment, durant les vacances de Noël, de Pâques et
d'été. Pendant l'année 2004, par exemple, ce dernier a
formé 1075 personnes issues de la région. Les maîtres ainsi
formés alimentent les besoins du préscolaire ainsi que des 2
premiers cycles du fondamental. Il importe de noter que la formation fournie
par le centre est une formation qui entre dans le cadre d'un plan de
formation qui répond aux exigences du MENFP.
En effet, selon un rapport d'évaluation fait par Aide
et Action44(*) en
2006 en tant que bailleurs de fond dans certains projets réalisés
par OKPK45(*), ces
interventions sur l'amélioration des méthodes d'apprentissage, au
moyen de la formation des maîtres a déjà rapporté de
grands succès dans le projet de scolarisation de la région des
Cahos.
ÉVOLUTION DANS LA SCOLARISATION PRIMAIRE DANS LA
CHAÎNE DES CAHOS DE 1983 À 2010
Dans un pays en voie de développement où la
population est analphabète, l'éducation a un grand rôle
à jouer quant à l'avenir de la nation. La population attend de
grands espoirs ; elle est le seul moyen d'accès à la culture,
elle transmet les valeurs et symbolise le changement pour tout un peuple. En
Haïti, l'État est moins présent dans les sections
communales et les zones rurales qui n'ont pas une bonne infrastructure. Par
ailleurs, nous vivons dans une société en pleine mutation,
perturbée par des crises politiques et sociales à
répétition. L'école ne peut plus se contenter de son
rôle de trie et de reproduction de l'élite. Elle a un devoir
envers son peuple et doit s'adapter à la mutation sociologique.
Le système éducatif haïtien n'est pas
capable de remplir pleinement sa fonction, car des problèmes d'ordre
économique, social, politique et même culturel se sont
imposés souvent au premier rang. S'il en est ainsi dans les grandes
écoles des milieux urbains, celles des zones rurales connaissent le
pire. Considérant la situation actuelle des enfants dans la Chaine des
Cahos sur le plan éducatif, on peut affirmer que de nombreux
progrès ont été réalisés. Une prise de
conscience énorme peut-être constatée chez les habitants de
la région. Tel n'était pas le cas en 1983 avant l'arrivée
d'Inter-Aide, car il y avait très peu d'écoles dans la zone.
Quelques années plus tard, entre 1983 et 1996, des formations
pédagogiques ont été organisées à
l'intention des enseignants et un réseau d'école a
été mis sur pied . Ce qui, par la suite, commence à
régulariser le système éducatif de la Chaine des Cahos en
le conduisant vers une standardisation nationale. L'enseignement commence
à être dispensé dans les écoles en respectant les
programmes élaborés par le Ministère de l'Éducation
Nationale grâce à des ressources locales qui deviennent de plus en
plus disponibles. Cependant, ce système ne fonctionne pas tel qu'il
devrait être. L'État haïtien n'est pas toujours en mesure de
mettre l'éducation à la portée du grand nombre, et ce,
malgré des demandes sans cesse de la part des masses prenant chaque jour
conscience de l'importance d'une bonne formation académique pour leurs
progénitures.
a) Taux de scolarisation primaire dans la Chaîne des
Cahos en 1983
Au début de l'intervention d'Inter-Aide dans la
Chaîne des Cahos en 1983, le niveau d'éducation de base y
était extrêmement faible (analphabétisme estimé
à 95%). Quelques rares écoles presbytérales fonctionnaient
très mal. Avec un taux aussi élevé d'analphabétisme
et l'existence d'une seule école primaire publique au fonctionnement
très aléatoire avec 60 élèves pour toute la zone,
il était très difficile de trouver des personnes
alphabétisées susceptibles d'enseigner. Donc, la grande
majorité des enseignants n'étaient pas préparés
intellectuellement et pédagogiquement afin d'apprendre aux enfants
à lire, à écrire et à compter correctement.
Académiquement, ils se situaient entre la 1ère et la 6ème
année fondamentale. La 6ème année fondamentale
étant le plus haut niveau, moins de 50% détenaient le Certificat
d'Études Primaires (CEP). Sur 10000 enfants, seulement 200
étaient scolarisés46(*).
b) La qualité et le niveau d'enseignement
dispensé dans les écoles durant la première
décennie
Il va de soi que l'enseignement de qualité se trouve en
ville notamment dans les grandes villes, mais très rarement dans les
sections rurales. En ville, l'accès à l'établissement
scolaire qui fournit un enseignement de qualité est plus favorable aux
familles ayant un niveau de vie élevé qui peuvent prendre en
charge les coûts appropriés. On a pu constater aujourd'hui, l'un
des mécanismes qui se développe grandement dans les
inégalités des chances scolaires est la mise en place dans
certains établissements scolaires des concours d'entrée en
préscolaire et en première année fondamentale.
Dans la Chaîne des Cahos, durant la première
décennie incluant l'intervalle de temps que comprend notre travail de
recherche, on peut parler d'une éducation plutôt traditionnelle
qui ne tient compte d'aucune évolution dans son système propre.
Selon les informations recueillies sur place et les données
consultées à travers les archives de l'association
OKPK /d'Inter-Aide, l'enseignement dispensé était comme une
alphabétisation avancée pour les enfants. Leurs études
commencent à la première année fondamentale pour arriver
à la 3ème année, c'est-à-dire seulement
le premier cycle de l'école fondamentale. Cela étant, à
cause du manque de ressources humaines qualifiées pour enseigner dans
les écoles. Au fur et à mesure, les écoles se dirigent
vers le second cycle pour permettre aux enfants de terminer toutes les classes
primaires et avoir leur certificat donné à cette fin par
l'État. En effet, après leur CEP, la grande majorité des
enfants s'embarquent dans le système pour enseigner eux aussi dans les
classes dont le niveau est inférieur à la 6ème
année fondamentale. Ceci dit, ils n'ont reçu aucune formation
professionnelle pouvant les aider à répondre correctement
à leur tâche d'enseignant. Tout cela entraine, à la fin,
une faiblesse au niveau de la qualité de l'enseignement reçu par
les enfants dans la région des Cahos durant la première
décennie.
c) Nombre d'écoles créées dans la
Chaîne des Cahos de 1983 à 2010
Dans les deux décennies suivantes, c'est-à-dire
les années 1990-2010, on observe une augmentation graduelle dans le
nombre des écoles primaires fondées dans toute la région
des Cahos. Certaines communautés ont pris cette initiative
elles-mêmes et cherché à développer un partenariat
avec OKPK/Inter-Aide. Certaines fonctionnent selon leurs propres moyens. On
rencontre également des écoles privées
créées par des habitants de la zone pour faciliter la
scolarisation des enfants. Ces dernières elles aussi cherchent à
développer des partenariats avec d'autres institutions en vue d'assurer
leur pérennité. Malheureusement, il n'y pas de structure
étatique toujours présente dans ces écoles, elles n'ont
pas une reconnaissance légale venant du Ministère de
l'Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle pour
fonctionner. Pour celles qui arrivent à la fin des études
primaires, pour se faire inscrire aux examens d'État à la fin du
cycle d'études, elles sont obligées de passer par une autre
école déjà reconnue ou de trouver une autorisation
spéciale au niveau du BDS de leur juridiction.
Partant au début des années 1980 pour arriver
à aujourd'hui en 2010, près d'une centaine d'écoles
primaires ont été créées et sont fonctionnelles bon
gré mal gré. Certaines d'entre elles se regroupent en
réseau et forment des associations de directeurs d'écoles ou
parents d'élèves pour bien gérer leurs
écoles47(*).
IMPACT DE L'ÉDUCATION DES ENFANTS DE LA CHAÎNE
DES CAHOS SUR L'AVENIR DE LA SOCIÉTÉ
L'éducation est, étymologiquement l'action de
« guider hors de 48(*)», c'est-à-dire développer, faire
produire. Il signifie maintenant plus couramment l'apprentissage et le
développement des facultés physiques, psychiques et
intellectuelles. Spécifiquement, l'éducation humaine inclut des
compétences et des éléments culturels
caractéristiques du lieu géographique et de la période
historique. Chaque pays dans le monde dispose de son propre système
éducatif, avec un rôle traditionnellement dévolu aux
parents d'un enfant (ou à leur substitut) d'amener cet enfant à
l'âge de la maturité. L'éducation est
considérée comme un élément important du
développement des personnes, d'où le développement d'un
droit
à l'éducation. Inversement, être privé
d'éducation sera considéré comme un lourd handicap.
Aujourd'hui, dans l'intervalle de trois décennies
incluant le temps de notre recherche, nombreux changements de comportement sont
enregistrés dans la vie des citoyens vivant dans la Chaine des Cahos.
Ils ont une tendance positive sur l'importance de l'éducation pour un
développement durable de la zone. Certains jeunes originaires de la
région y sont retournés après quelques années
d'études ailleurs pour s'investir dans des activités sociales
comme santé, éducation, culture etc. C'est un signe d'espoir pour
la société qui a grandement besoin de ces ressources locales pour
l'amélioration des conditions de vie de la population en termes de
services de base et en assurer un bon avenir.
En effet, il est possible maintenant de constater qu'un
accroissement du niveau de motivation et d'encouragement des parents
d'élèves, d'une part, et de la communauté d'autre part,
est présent dans la région des Cahos. D'après les
habitants de la zone, l'amélioration de l'accès à
l'école et à un enseignement de qualité par rapport aux
années 1980 ouvre une fenêtre sur les possibilités de
développement des communautés isolées de la Chaine des
Cahos. Le nombre d'enfants scolarisés est passé d'un taux de 55%
en 2007 contre 5% en 1983, soit une croissance de dix fois plus en moins de
trois décennies.
L'éducation est la clef de la transformation rurale:
c'est un facteur indispensable à la vitalité économique,
culturelle et écologique des zones et des communautés rurales. Le
phénomène d'exode rural, les problèmes de pauvreté
et de dénuement enregistrés souvent dans les milieux ruraux ne
peuvent-ils pas être résolus en développant les milieux
ruraux ? Si on veut empêcher la prolifération des
bidonvilles, il faut emprunter le même chemin qu'à emprunté
la Chaîne de Cahos. Le peut qu'il soit, l'éducation commence
déjà à servir pour transformer la vie rurale dans la
Chaine des Cahos. Telle doit être l'un des premiers
éléments pour assurer le développement durable de la
communauté.
Maintenant, comme nous l'avons si bien mentionné dans
les pages antérieures de ce travail, il reste beaucoup de choses
à faire pour que les enfants de la Chaîne des Cahos puissent jouir
pleinement de leur droit à l'éducation comme le voeu de la
Constitution haïtienne et les différentes Conventions
internationales signées et ratifiées par Haïti. Il est clair
dans les constats faits de la réalité, que ce groupe d'enfants du
pays n'a aucune chance d'être éduqués et formés par
une prise en charge de l'État haïtien sinon par des efforts
communautaires et des partenaires externes. La potentialité est
là chez eux, ils font d'énormes sacrifices pour se rendre
à l'école dans des conditions difficiles inimaginables. Il faut
tourner vers eux pour construire une nation prospère.
RECOMMANDATIONS
L'éducation en Haïti est un défi
énorme malgré les efforts conjugués de nombreux
intervenants de ce secteur dans le pays. L'enfant d'Haïti est l'espoir de
demain pour une société plus juste et équitable. Ainsi, en
vue de solutionner ce problème, nous recommandons de:
Ø Donner un permis de fonctionnement aux
différentes écoles communautaires de la Chaine des Cahos.
Ø Développer de partenariat entre l'État
et les communautés de la Chaine des Cahos oeuvrant dans le secteur
éducatif.
Ø Améliorer la qualité de certaines
écoles qui présentent un état physique et un environnement
déplorables caractérisés notamment par une infrastructure
inadéquate et détériorée, un manque de services
essentiels, une insuffisance de mobiliers, d'équipements scolaires et de
bibliothèques.
Ø Adopter des mesures spéciales pour atteindre
les enfants les plus désavantagés.
Ø Ouvrir des écoles à la proximité
des domiciles des enfants.
Ø Intégrer le programme de la cantine scolaire
dans les différentes écoles communautaires de la région
afin de favoriser les bonnes conditions d'apprentissage des enfants.
Ø Permettre la présence concrète et
réelle de l'État dans la zone pour pouvoir augmenter l'offre
scolaire.
Ø Améliorer la qualité de
l'éducation et de l'efficacité externe du système
éducatif.
Ø Réhabiliter et construire des écoles
répondant aux normes prescrites par la loi.
Ø Encadrer les enseignants et directeurs
d'écoles et mettre en place un système permettant de
développer un programme alternatif d'alphabétisation pour les
enfants surâgés.
Ø Encourager la présence des comités de
gestion d'écoles formés avec les parents d'élèves
pour favoriser une participation communautaire active dans la vie
éducative de la zone.
CONCLUSION
Le taux de scolarisation est de 60%. Les garçons
fréquentant l'école pendant quatre ans en moyenne, et les filles
pendant deux ans seulement. Il y a peu de chances que l'éducation
primaire universelle devienne une réalité d'ici à 2015.
L'UNICEF appuie des initiatives visant à atteindre une éducation
primaire universelle de qualité. Avec ses partenaires, il soutient des
campagnes encourageant les enfants à s'inscrire à l'école
ou à y revenir, et même pendant les récentes
périodes de troubles civils graves. La prévention du VIH/SIDA, la
non-violence et les responsabilités citoyennes sont des
éléments fondamentaux de l'action de l'UNICEF dans le domaine de
l'éducation49(*).
En fait l'éducation des enfants est une priorité
aujourd'hui pour tous les pays en voie de développement. Pour cela, elle
a fait l'objet même de nombreux textes de loi nationale qu'internationale
en vue de développer une conscientisation réelle des droits de
l'enfant à travers le monde. La législation haïtienne et les
institutions d'encadrement relatives aux droits de l'enfant ne cessent pas de
faire la promotion pour le respect des principes généraux de la
convention et des droits humains. Cependant, les différentes
réalisations effectuées ne peuvent occulter les
difficultés qui entravent une opérationnalisation de ces
dispositions. Donc, la protection des enfants contre toutes les formes d'abus,
de violences, d'exploitations et de discriminations demeurent des défis
importants à relever. Plus particulièrement, l'accès aux
services sociaux de base (éducation, soins appropriés,
nourriture, etc.) est limité pour les enfants en situation de
vulnérabilité. Face à ce constat, la situation des enfants
en Haïti, spécialement dans la Chaine des Cahos en termes de
promotion et de réalisation effective de ses droits demeure un
problème pour les autorités et même pour la
communauté tout entière. La plupart des indicateurs relatifs
à l'évolution de l'éducation dans la région ne sont
pas des plus intéressants. Cela fait appel à une prise de
conscience immédiate en reconnaissant que des efforts importants restent
à faire par le gouvernement pour renforcer le système
éducatif au profit des enfants contre tout effet nuisible aux
intérêts des enfants , à leur droit et à leur
éducation. L'ère de la globalisation et de la mondialisation
exige des ressources humaines aptes à affronter et à surmonter
les embûches et les défis qui mineront la concurrence au
développement entre les nations. C'est pourquoi, il est impératif
à tous, d'entretenir nos enfants en leur offrant toutes les prestations
sociales minimales pour leur assurer un bien-être et un
développement physique, mental et social afin de leur permettre de
contribuer à la construction d'une nouvelle nation.
L'éducation est un droit. Ce droit est inscrit dans un
grand nombre de Conventions internationales de droit humanitaire et les droits
humains, notamment les Conventions de Genève qui s'appliquent en temps
de guerre, la Convention sur les droits de l'enfant, la Déclaration
universelle des droits de l'homme, ainsi que de nombreux autres instruments
juridiques régionaux qui portent sur les droits fondamentaux. Dans ce
travail qui nous a amené à jeter un coup d'oeil sur
l'évolution du droit à l'éducation de l'enfant dans la
Chaine des Cahos en Haïti de 1983 à 2010, notre regard était
fixé sur les progrès réalisés au niveau de la
scolarisation par rapport aux différents textes de loi régissant
la matière à l'égard des enfants sur le plan national
qu'international.
En effet, sans ignorer les multiples efforts des acteurs
divers oeuvrant dans les domaines de l'éducation et des droits humains
en Haïti, le droit à l'éducation des enfants est loin
d'être une réalité dans son ensemble en Haïti et
particulièrement dans la Chaine des Cahos. Cela met en question
l'atteinte de l'Objectif du Millénaire pour le Développement
d'ici 2015 et les articles 32.1 à 32.3 de la Constitution haïtienne
de 1987 qui font exigence que l'éducation soit obligatoire et gratuite.
L'importance de l'éducation dans la petite enfance est
désormais reconnue, et l'idée que l'éducation commence
à la naissance s'est ancrée dans de nombreuses
sociétés. Quelques pays ont réussi à réduire
les inégalités de chances d'être éduqué en
fonction du sexe, de l'infirmité, de l'appartenance ethnique, du lieu de
résidence (rural ou urbain) etc. La tendance positive
observée dans l'enseignement primaire voile, cependant, dans de nombreux
cas, les disparités de l'accès à l'éducation entre
pays et à l'intérieur des pays; les disparités de
qualité de l'éducation peuvent persister même là
où le taux de scolarité est élevé. Les habitants
des communautés pauvres et rurales comme celles de la Chaine des Cahos
méritent une attention particulière des dirigeants afin qu'ils
puissent bénéficier d'un accompagnement adéquat pour le
développement de leur région en passant par le respect du droit
à l'éducation des enfants.
Enfin, estimant de n'avoir pas tout dit quant à
l'application de la Convention relative aux droits de l'enfant en Haïti,
des différents textes de lois régionaux et nationaux, nous
pensons que notre travail, malgré ses limites, pourra apporter une
contribution dans l'orientation d'autres chercheurs appelés à
aborder un tel sujet.
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Pamphile, Léon Denius. L'éducation sous
l'occupation américaine: 1915-1934. Port-au-Prince: Imprimerie
des Antilles, 1988.
Pierre Enocque François.
Politiques Éducatives et Inégalités des chances
scolaires en Haïti. Éditions de l'Université
d'État d'Haïti, 2010
Raymond Guillien et Jean Vincent, 13ème
édition Dalloz: Lexique des termes juridiques. Edition Dalloz
2001, Paris Cédex14
Tardieu, Charles. L'éducation en Haïti: de la
période coloniale à nos jours (1980). Port-au-Prince,
Imprimerie Henri Deschamps, 1990.
MÉMOIRES
Jems LUCIEN: « Approches sociojuridiques de la
situation difficile des enfants de rues de la zone métropolitaine de
Port-au-Prince de 2004 à 2009 », mémoire de
licence, Université d'État, 2009
Julien SCHWARTZ: « Étude de la dynamique
de déboisement et du circuit du charbon de bois dans les systèmes
agraires de la Chaîne des Cahos » DESS, Université
des Antilles et de la Guyane, octobre 2005
Nelson
SENECHARLES: Études sociojuridiques de la famille et de la
société haïtienne. Mémoire e licence,
Université d'État d'Haïti, 2007
DOCUMENTATIONS ET ARTICLES PUBLIES DANS LES REVUES ET
JOURNAUX
Le Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels, adopté et ouvert à
la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'AG
de l'ONU dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966,
entrée en vigueur le 03 janvier 1976, conformément aux
dispositions de l'art. 27.
Le Pacte international relatif aux droits civils et
politiques, adopté et ouvert à la signature, à la
ratification et à l'adhésion par l'AG de l'ONU dans sa
Résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966, entrée en
vigueur le 23 mars 1976 conformément aux dispositions de l'article
49.
La Convention relative aux droits de l'enfant,
adoptée par l'AG de l'ONU le 20 novembre 1989 ; reconnait le droit
à l'éducation de l'enfant, ratifiée par Haïti dans la
nuit du 23 au 24 décembre 1994.
La Déclaration Universelle des droits de
l'homme, adoptée à Paris par l'Assemblée
Générale de l'ONU dans sa Résolution 217 A (III) du 10
décembre 1948.
La Déclaration des droits de l'enfant,
proclamée par l'AG de l'Organisation de l'ONU le 20 novembre 1959
[Résolution 1386(XIV)].
La Déclaration du millénaire,
adoptée par l'AG de l'ONU, dans sa Résolution A/RES/55/2.2000 du
13 Septembre 2000.
Constitution de la Colonie Française de Saint
Domingue, 1801, page 46
La Constitution de la République d'Haïti de
1957.
La Constitution de la République d'Haïti de
1987, CEDH 2002
Institut Haïtien de Statistique et
d'Informatique (IHSI): Division Analyse et de Recherche
Démographique, La scolarisation en Haïti.
La loi de 1843: Relative au Ministère de
l'Instruction Publique interdisant l'utilisation des punitions corporelles
à l'École en Haïti.
Le décret de 1960: Faisant obligation aux
père et mère et toute personne ayant la garde d'un enfant de
l'envoyer à l'école sous peine de sanction.
Projet de Plan Cadre des Nations Unies pour l'Aide au
Développement (UNDAF) en Haïti 2009-2011.
. Secrétariat Général de l'ONU, Nous
les peuples: le rôle des Nations Unies au XXIe siècle,
Rapport A/55/2000, 27 mars 2000.
* 1 Objectifs fixés
pour le deuxième millénaire par l'ONU pour le
développement du monde.
* 2 UNICEF, la Situation
des enfants dans le monde, New York, Unicef, 2005, p. VII.
* 3 Chaque fois qu'on parle
de la Constitution de 1987 dans ce travail de recherche, on tient compte de
celle qui n'a jamais fait l'objet d'un amendement depuis son entrée en
vigueur le 29 mars 1987.
* 4 Déclaration des
droits de l'enfant proclamée par l'AG de l'ONU le 20 novembre 1959,
Résolution 1386(XIV), Art. 1er de la Convention de l'ONU
relative aux droits de l'enfant.
* 5 UNICEF, La Situation des enfants
dans le monde, message du Secrétaire Général de l'ONU, New
York, Unicef, 2006, p. VI.
* 6 R. BADINTER., Le Vocabulaire des
droits de l'homme, disponible sur
www. fidh.org.
* 7 UNICEF, La Situation des enfants
dans le monde, New York, Unicef, 2005, p. 3.
* 8 Dictionnaire LE ROBERT,
107, Av. Parmentier-Paris (11è) 1972. Page 582
* 9 Ici on parle de la Constitution du
29 mars 1987 non amendée.
* 10 Recensement des
écoles en Haïti année 2000
* 11 Les écoles
publiques sont dites des écoles nationales.
* 12F. Bourqui, M. Bussard
et M. Foucart
* 13 Éducation dans
la Grèce antique, [en ligne], 11 juillet 2006,
http:agora.qc.ca/
(page consultée le 13 décembre 2010).
* 14 G. Paré. A.
Brunet. P. Tremblay: La Renaissance du XIIe siècle. Les écoles et
l'enseignement. Paris-Ottawa, 1933
* 15 MOREAU DE SAINT MERY, Description
topographique, physique, civile, politique et historique de la partie
française de l'Isle de Saint Domingue - 1787, Tome second -
Nouvelle édition 1984 (1958) par B. Murel et E. Taillemite - Paris
Société d'Histoire d'Outre-Mer (3 tomes)
* 16 Médéric Louis
Élie Moreau de Saint-Méry, Avocat, homme d'une vaste culture
juridique, c'est aussi un acteur de la
Révolution
française. Moreau de Saint-Méry est un colon créole
[1],
érudit et propriétaire d'esclaves, en rupture avec les principes
de la philosophie du droit naturel, pour revendiquer le despotisme légal
du régime esclavagiste et la ségrégation contre les hommes
libres de couleur par le préjugé de couleur.
* 17 Petite maison traditionnelle des
esclaves recouverte par des herbes au temps de la colonie. Cette forme
d'habitat existe encore aujourd'hui dans la région, mais on les retrouve
chez les familles les plus démunies.
* 18 Parcelles cultivées
* 19 Inter Aide est une ONG
française à caractère humanitaire qui travaille dans la
Chaîne des Cahos depuis 1983 dans les domaines de l'éducation, la
santé, l'agriculture, eau et assainissement
* 20 Plusieurs personnes qui
se regroupent ensemble pour travailler dans le jardin d'un habitant. À
ce moment-là, le maitre du champ prépare de la nourriture pour
les travailleurs.
* 21
Regroupement/association de travailleurs des champs pour préparer les
jardins. Ils travaillent de très tôt dans la matinée, entre
5h à 9h AM.
* 22 Une certaine
façon dont une personne vend son temps à une autre pour l'aider
à la préparation de son jardin. Le prix varie d'une région
à une autre mais on peut acheter un journalier jusqu'à 50 gourdes
et obligatoirement accompagner de la nourriture.
* 23 DUDH=
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme
* 24 Historique de la
Déclaration Universelle des droits de l'homme, [en ligne], 2000,
http://
www.un.org. (Page consultée le 15
décembre 2010).
* 25 Déclaration des
droits de l'enfant de 1959, Préambule, Paragraphe 4
* 26 27
Déclaration des droits de l'enfant de 1959
* 28 Pacte International
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
* 29 Un protocole
additionnel à la Convention Américaine relative aux droits de
l'Homme traitant des Droits Économiques, Sociaux et Culturels.
* 30 J. VERHOEVEN, Droit
International Public, ville d'édition, Larcier, 2000, p. 441.
* 31 441 Idem., p.
365
* 32 Sommet mondial pour les
enfants, (en ligne), 2005,
www.un.org (page consultée le 14
décembre 2011)
* 33 Résolution
A/54/2000, 27 mars 2000
* 34 CEDH, Constitution de
la République d'Haïti, 29 mars 1987, Port-au-Prince, 2002
* 35 Constitution de la
Colonie Française de Saint Domingue, 1801, page 46
* 36Constitution de la
république d'Haïti de 1957, imprimerie de l'État, rue
hammerton, 1957, Port-
au-Prince Haïti.
* 37 Pamphile, Léon
Denius. L'éducation sous l'occupation américaine:
1915-1934, p. 37 Port-au-Prince: Imprimerie des Antilles,
1988.
* 38
www.unicef.org/haiti
* 39 MENJS (juillet 1998).
Projet de loi d'orientation de l'éducation
* 40 Rapport de la Fondation
Digicel sur l'éducation en Haïti, 2010
* 41 UNESCO, Rapport
mondial de suivi sur l'EPT, 2008
* 42 Rapport du
Ministère de l'Éducation Nationale et de Formation
Professionnelle sur Éduction en Haïti l'année 2005
* 43 OKPK est une
association locale créée par Inter Aide depuis 1998 pour venir en
aide à la population de la Chaine des Cahos notamment dans la
scolarisation primaire. Elle soutient actuellement un réseau de 40
écoles communautaires réparties dans toute la région.
* 44 Principal bailleur de
fonds soutenant les actions d'Inter Aide sur le terrain dans les années
2000
* 45 Rapport
d'évaluation Aide et Action en 2006 sur les interventions
d'Inter-Aide/OKPK dans la Chaine des Cahos
* 46 Selon les
données sur la scolarité dans la Chaîne des Cahos
consultées dans les archives d'Inter-Aide/OKPK
* 47 Cartes des
écoles de la Chaine des Cahos mise en place par OKPK
* 48 Dictionnaire LE ROBERT,
-107, av. Parmentier-Paris (11è), 1972, page 541
* 49 UNICEF, situation de
l'éducation dans le monde, (en ligne),
www.unicef.org/french/mdg
Page consultée le 22 décembre 2010
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