II.2.5. Le statut de
l'innovation technologique dans les théories dudéveloppement
durable(FTU, 2001, pp.13-14).
Le rôle dévolu à l'innovation
technologique dans les différentes théories du
développement durable est une question épistémologique,
qui dépend essentiellement de la représentation que construit
chaque théorie de la croissance, du développement, de
l'environnement et des rapports entre l'homme, la nature et la
société (Valenduc G., Vendramin P, 1997) cité par (FTU,
2001, p.13).
Dans cette optique, le progrès technologique est
censé générer en permanence des solutions techniques
concrètes aux défis environnementaux posés par
l'accroissement de la production de biens et de services. Les mécanismes
du marché finissent par rendre rentables le développement et la
diffusion de «technologies de la dernière chance» (back-stop
technologies), même si celles-ci sont restées longtemps sous le
seuil de rentabilité, comme c'est le cas de l'énergie solaire
(Faucheux S., Nicolaï I, 1998).
Selon le principe de soutenabilité forte
(strongsustainability), par contre, le capital naturel et le capital
construit ne peuvent pas être substitués l'un à l'autre de
manière parfaite. Il existe un seuil de «capital naturel
critique» au-delà duquel le capital naturel doit être
préservé. Le capital naturel permet en effet de fournir à
l'homme et à la société des biens et des services qui ne
sont pas remplaçables par le capital construit. Hernan Daly et Nicholas
Georgescu-Roegen sont parmi les fondateurs de ce courant d'analyse.
Le processus de substitution entre capital naturel et capital
construit rencontre certaines limites, que l'on peut énoncer de la
manière suivante (Van Hauwermeiren S, 1998) cité par (FTU, 2001,
p.14):
1. les ressources naturelles ne peuvent pas être
utilisées ou dégradées à un rythme tel que leur
disponibilité vienne à se raréfier de manière
significative pour les générations futures ;
2. les déchets de l'activité humaine ne peuvent
pas s'accumuler dans des quantités qui pourraient compromettre le bon
usage futur de la biosphère ;
3. la diversité biologique ne peut pas se
réduire d'une manière qui puisse menacer la variété
de la vie non humaine, ni restreindre les usages futurs de la biosphère
par les êtres humains ;
4. les modèles existants de croissance et de
développement ne peuvent pas continuer à produire des biens et
des services qui n'ont pas d'utilité sur le plan social et humain, ni
à entretenir des situations inéquitables entre les pays
développés et les autres, pas plus qu'à l'intérieur
des nations.
Dans l'optique de la soutenabilité forte, les limites
imposées à l'utilisation du capital naturel entraînent une
forte demande pour des technologies de réduction des inputs
matériels et énergétiques. Cette solution est souvent
qualifiée de «dématérialisation» de
l'économie (Von Weizsäcker E.U., Lovins A.B., Lovins L.H, 1997).
Elle repose sur le principe suivant : afin de limiter la dégradation
qualitative et quantitative du capital naturel, il faut faire porter l'effort
d'innovation sur la maîtrise des inputs, c'est-à-dire limiter les
quantités de matière et d'énergie extraites de la
biosphère, puis utilisées et transformées au cours de la
production et finalement déposées et émises dans la
nature. On utilise aussi le terme «éco-efficience». La
contribution du changement technologique est fondamentale dans cette
perspective.
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