Autonomisation de la femme malienne face à la tradition: mythe ou espoir ? Etude de cas en commune IV du district de Bamako( Télécharger le fichier original )par Issa DOUMBIA Institut National de Formation des Travailleurs Sociaux - Diplome Supérieur en Travail Social 2016 |
CHAPITRE II : HISTOIRIQUE DE L'EMANCIPATION DE LA FEMME MALIENNE A PARTIR DE BAMAKO.L'émancipation est définie par les juristes
comme un
acte
juridique qui soustrait, de manière anticipée, un mineur
à la
puissance
parentale ou à sa
tutelle afin de le
rendre capable d'accomplir tous les actes de la vie civile nécessitant
la
majorité
légale : gérer ses biens, percevoir ses
revenus,
réaliser des actes d'
administration...
En disposant de sa pleine capacité juridique, le mineur est
assimilé
à un majeur. Par extension, dans le langage courant, émanciper signifie affranchir d'une autorité, d'une tutelle, d'une domination, d'une servitude, d'une aliénation, d'une entrave, d'une contrainte morale et intellectuelle, d'un préjugé...Elle donne à une catégorie de la population des droits identiques aux autres catégories. En Afrique et au Mali en particulier, le combat des femmes pour l'émancipation se confondit avec la lutte pour l'indépendance politique, la colonisation (en fait le système colonial) était considérée comme la principale source de l'oppression des colonisés (hommes et femmes). Après les indépendances, la lutte pour la libération de la femme fut marqué par quatre (4) grandes associations (I) d'envergure nationale ayant lutté à des périodes diverses du Mali indépendant pour l'émancipation, le respect des droits, l'égalité et pour l'autonomisation de la femme et dont les objectifs et mobilisations ont permis aux autorités de valoriser les questions féminines qui s'est traduit par la mise en place des « institutions » consacrées aux femmes(II). I- LES PRINCIPALES ORGANISATIONS FEMININES DE 1960 A NOS JOURSIl s'agit de la Commission Sociale des Femmes de 1960 à 1968, du Secrétariat d'Etat aux Affaires Sociales de 1968 à 1979 sous la transition du CMLN, l'Union Nationale des Femmes entre 1974 et 1991 et la Coordination des Associations et ONG Féminines de l'avènement de la démocratie à nos jours. A. La commission Sociale des FemmesLa commission sociale des femmes a vu le jour en mars 1963.Elle était affiliée à US-RDA, parti au pouvoir dont elle était un instrument de travail. La principale mission de la CSF était de soutenir les actions de construction nationale, susciter chez les femmes la prise de conscience de leur rôle de citoyennes et d'oeuvrer pour leur promotion. Aussi, à ce tournant de notre histoire, les femmes d'un engagement, d'un dévouement et d'un dynamisme sans précédent dans l'accomplissement de la mission qui leur était dévolue. Pour atteindre les objectifs, il fallait un minimum d'instruction alors qu'à l'époque, la population féminine était quasi analphabète. C'est pour cette raison que, la commission sociale avait fait de l'alphabétisation son cheval de bataille. A l'époque, les femmes s'étaient d'abord, organisées en comité de quartiers, de villages et en comités exécutifs. Des démembrements de la commission sociale avaient été créés au niveau des cercles, des arrondissements et des quartiers de la capitale. En outre, les femmes étaient représentées dans les organes de direction du parti par des commissaires chargés de la diffusion des mots d'ordre du parti et de la coordination des activités des femmes. Dans la bataille pour la construction nationale, les présidentes des femmes ont su mobiliser et rassembler les femmes aussi bien lettrées qu'illettrées. C'est à la suite de ce travail que la CSF a été mis en place. La commission sociale était divisée en six sous-commissions : la sous-commission accueil ; fêtes et théâtre ; éducation civique et morale ; santé ; alphabétisation ; et la sous- commission de rédaction. Chaque sous-commission était dirigée par une présidente et un rapporteur. L'ensemble des présidentes et des rapporteurs constituaient la grande commission sociale dirigée par l'épouse du Chef d'Etat, Mme Keita Mariame Travélé et Mme Diallo Aoua Keita. Les questions majeures qui figuraient au centre des préoccupations de la commission étaient : la lutte contre l'analphabétisme, le redressement moral, la rénovation du folklore, l'amélioration de la santé de la mère et de l'enfant. La lutte contre l'analphabétisme avait donné lieu à une campagne intense de formation des femmes. C'était un défi national. Dans ce processus, la sous-commission alphabétisation avait lancé un vaste mouvement de d'alphabétisation auquel ont contribué de nombreuses institutrices et animatrices volontaires et enthousiastes. Les quelques femmes lettrées devaient aider les soeurs analphabètes en leur transmettant les notions pratiques et utiles. Un plan dont le principe était « quiconque sait lire doit apprendre à l'autre » avait été élaboré qui fut initié par Mme Diop Sira Sissoko en 1965. La démarche était d'alphabétiser les femmes au niveau des quartiers. Les cours étaient dispensés essentiellement par les femmes. Des fournitures scolaires étaient distribuées à cet effet. La commission envisageait, en perspective de mettre à la disposition de chaque collectivité villageoise une animatrice qualifiée. La commission éducation civique et morale était chargée de la reconversion des mentalités féminines à travers les vastes campagnes de sensibilisation et d'information sur la scolarisation des enfants, la surveillance des tout-petits. Les mères étaient sensibilisées pour empêcher les petites filles de faire les vendeuses ambulantes. La formation idéologique venait compléter les activités avec la répétition des slogans relatifs à des sujets jugés très importants. Quant à la sous-commission santé, elle avait pour mission d'éduquer les femmes, de la préparer à son rôle de mère à travers les causeries dans les quartiers, les villages et les villes, à la radio, en assemblées générales sur l'hygiène, la puériculture etc. Entre autres elle encourageait les femmes à fréquenter les centres de protection maternelle et infantile. Pour la concrétisation des objectifs de la CSF, il fut créé le 8 mars 1963 le foyer de femme malienne. Appelé à jouer le rôle de centre pilote, le foyer de la femme avait pour vocation la formation idéologique et l'alphabétisation fonctionnelle. Il devait aussi préparer les animatrices formatrices pour les centres régionaux dont la création était en vue. Le foyer disposait salle de couture dotée de douze(12) machines, de tables de coupe et de repassage, de vitrines d'exposition de travaux. Il était équipé d'une cuisine et d'une case modèle (qui permettait d'apprendre aux femmes l'entretien et l'aménagement de la maison), d'un bureau et d'une salle de réunion contigus et d'une salle d'alphabétisation. Des cours pratiques et théoriques y étaient dispensés. On apprenait aux femmes à coudre, à tricoter, à raccommoder, à faire la lessive et le blanchissage. Elles étaient initiées aux notions de budget familial, de cuisine, de puériculture, d'hygiène et d'éducation des enfants. La commission sociale s'est illustrée dans la campagne de sensibilisation de la loi du 03 février 1963 sur le code du mariage et de la tutelle. Grace à de nombreux dons qu'elle recevait de ses partenaires, elle distribuait des médicaments, de matériels médicaux et a mené des campagnes d'assainissement par investissement humains dans tous quartiers (curage de caniveaux, ramassage d'ordures ménagères, balayage des rues...) |
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