A. Adoption d'une politique claire de protection du Parc
National de la Kibira
Le Burundi se préoccupe de la gestion des ressources
forestières du PNK pour permettre leur utilisation durable dans
l'intérêt de la communauté nationale. C'est avec la
ratification des différentes Conventions en rapport avec la conservation
de la diversité biologique du PNK que le Burundi a
concrétisé sa ferme volonté de conserver les ressources
naturelles du PNK et de les gérer de façon durable. Cet acte est
venu compléter les décisions antérieures en faveur de la
préservation de ses ressources biologiques pour leur utilisation durable
notamment à travers la création de l'Institut National pour
l'Environnement et la Conservation de la Nature (INECN), l'établissement
d'un système des espaces protégés (article 8 de la
Convention sur la diversité biologique) en 1980, en même temps que
la création du Ministère ayant l'Environnement dans ses
attributions en 1989.
En plus, ces dernières années, les politiques
relatives à la gestion rationnelle des ressources forestières ont
été renforcées par l'existence de plusieurs documents de
politique qui militent en faveur de la conservation des ressources
forestières du PNK. Ceux-ci existent tout en assurant le bien-être
des populations surtout riveraines. Il s'agit entre autres de la Politique
Sectorielle du Ministère ayant la protection de l'environnement dans ses
attributions en rapport avec les aires protégées, la formulation
de la Stratégie Nationale pour l'Environnement et son Plan d'action,
ainsi que par la restructuration du Ministère de l'Eau, de
l'Environnement, de l'Aménagement du Territoire et de l'Urbanisme, le
Cadre Stratégique de lutte contre la pauvreté, la loi sur la
création et la gestion des aires protégées, les mesures
incitatives pour la gestion des aires protégées48. Il
existe un code de l'environnement dans lequel les éléments des
codes forestier et foncier ont été révisés. Ces
différents documents de politique qui sont à la base de la
gestion des ressources naturelles, prouvent à suffisance que les
responsables politiques du pays sont convaincus de la nécessité
de lutter contre la dégradation des ressources naturelles du PNK.
En matière de promotion de la conservation et
d'utilisation durable des ressources du PNK, le Burundi encourage et participe
activement aux projets sur la connaissance de sa diversité biologique et
la recherche des voies et moyens de son utilisation durable pour le
bénéfice de communauté. A titre illustratif, nous citerons
le Projet Parcs pour la Paix « PPP/Kibira », qui appuie l'INECN dans
le but de pouvoir mener une gestion efficace du PNK sur le plan
écologique, bénéfique sur le plan social et viable sur le
plan économique. Ce projet est la
48 INECN, Rapport d'étude sur les modes de
gouvernance et les catégories d'aires protégées au
Burundi, Bujumbura, 2008, p.11.
concrétisation de l'appui de la Conférence des
Ecosystèmes des Forêts Denses et Humides d'Afrique Centrale
(CEFDHAC) aux pays membres dont le Burundi, dans ses efforts de protection des
forêts montagnardes. Ce projet a pour objectif de promouvoir la
conservation et l'utilisation durables de la biodiversité en temps de
troubles armés en constituant un réseau d'aires
protégées pour la paix et en contribuant à
l'amélioration des conditions de vie des populations sinistrées
au tour du Parc National de la Kibira. Avec la guerre civile de ces dix
dernières années, les plus grandes batailles entre la
rébellion et l'armée gouvernementale se déroulent dans la
Kibira. En effet, cela porte un coup dur au parc étant donné que
et les belligérants et les populations environnantes en ont
profité pour surexploiter les ressources forestières de cet
écosystème naturel.
Aujourd'hui, les préoccupations liées à
la gestion rationnelle des écosystèmes forestiers au Burundi
n'ont pas encore été maîtrisées de façon
suffisante. Ainsi, quelques lacunes subsistent au niveau de la sensibilisation
des décideurs politiques sur la complexité et les processus des
écosystèmes naturels comme de leur mode de gestion.
B. Les lacunes de la politique existante relative
à la protection du Parc National de la Kibira
Au niveau des politiques nationales, les problèmes de
conservation de la biodiversité du PNK existent, certains sont souvent
liés aux politiques mises en oeuvre dans d'autres domaines.
En effet, les politiques mises en oeuvre dans les secteurs
autres que la gestion des ressources biologiques sont fondées sur des
décisions accordant une importance insuffisante aux
considérations d'écologie et de biodiversité. De
même, les politiques sectorielles mises en oeuvre par le passé par
exemple dans le domaine de l'énergie, de l'agriculture pour ne citer que
ceux-là ont toujours été établies en tenant compte
essentiellement des intérêts du secteur en question. Il en a
été souvent le cas des politiques sectorielles lorsque les
intérêts et les enjeux sectoriels l'emportaient sur les
considérations de biodiversité ou les faisaient oublier.
Actuellement, l'initiation et la mise en application des
politiques sectorielles ne tiennent pas toujours suffisamment compte de leur
impact sur la biodiversité. Les politiques commerciales actuelles
sous-évaluent souvent les éléments non commercialisables
de la biodiversité telles que les valeurs esthétiques,
éducatives, scientifiques et socioculturelles. Cette situation conduit
à encourager de plus en plus la conversion des ressources et
l'exploitation non durable au détriment de la conservation et de
l'utilisation durable de la diversité biologique de cet
écosystème naturel. En conséquence, les décideurs
politiques qui ne sont pas suffisamment informés sur la
complexité et les processus des écosystèmes naturels et
sur les systèmes traditionnels de gestion des ressources, peuvent
prendre des décisions politiques non appropriées pour la
préservation de ses ressources naturelles. Ainsi, les difficultés
à intégrer les considérations relatives à la
conservation et l'utilisation durable dans le processus de prise de
décision nationale sont soulignées par les articles 6 et 10 de la
Convention sur la diversité biologique.
Notons que la crise socio-politique de 1993 est venue remettre
en cause les efforts entrepris par le pays dans la protection du PNK et depuis
un relâchement s'observe en matière de la protection et de la
conservation de la diversité biologique sauvage qui est
sérieusement menacée par des activités anthropiques de
destruction ou de surexploitation. Cette dernière risque
d'entraîner la disparition imminente de beaucoup d'espèces
biologiques de cet écosystème forestier49.
Bien qu'il y ait eu un petit relâchement, l'on peut
signaler qu'actuellement, le Gouvernement déploie des efforts de
réinstallation d'un boisement artificiel en collaboration avec les
partenaires internationaux conventionnels et les ONGs dans le but de
protéger ce patrimoine forestier naturel qui est le principal habitat de
la diversité biologique. Dans le cadre de cette politique de
reboisement, les responsables privilégient la participation de la
population, afin qu'elle se sente bénéficiaire de ce boisement
qu'elle est appelée à gérer communautairement. Le but de
cette approche est de permettre la conservation de cet écosystème
forestier pour l'utilisation judicieuse de la biodiversité qu'il
contient, dans l'intérêt de tous, et pour faire profiter à
la population des bienfaits environnementaux en rapport avec l'existence de
cette formation forestière, en plus du souci de pouvoir répondre
durablement aux besoins en bois de chauffage, en bois de service et d'oeuvre.
Nous citons ici la participation du Gouvernement au Projet Protection de la
Kibira, à travers l'INECN, organe gestionnaire du PNK. Le Projet a
concouru à la plantation de deux mille hectares de boisements
artificiels d'essences exotiques et de 49 ha d'enrichissement de la forêt
naturelle par l'Entandrophragma excelsum, une essence autochtone de
valeur50. Cette politique nationale va dans l'esprit de l'article 10
de la Convention sur la Diversité biologique.
§2. Les forces et les contraintes liées
à l'application et à l'efficacité des textes légaux
et des Conventions internationales
En vue de faire face aux défis environnementaux, le
Burundi s'est doté d'une importante législation consacrant la
protection des aires protégées notamment liées à la
conservation des ressources naturelles du PNK. Elle est composée de
textes légaux relevant du droit interne et des conventions
internationales ratifiées par le Burundi. Bien que cette
législation comporte des aspects positifs non moins importants de
conservation de la biodiversité du PNK(A), elle contient cependant
plusieurs contraintes et lacunes liées à sa mise en application
et qui, par conséquent, limitent son efficacité (B).
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