A. De la protection de la faune et de la flore du Parc
National de la Kibira
Ce texte prévoit toute une série de mesures
spéciales visant à assurer la conservation des espèces de
faune et de flore et ces mesures comprennent entre autre la protection des
oiseaux, des mammifères, amphibiens, reptiles, poissons et
invertébrés, la protection des espèces
végétales contre tout acte de nature à leur porter
atteinte et surtout la protection contre les espèces
exotiques28.
Pour atteindre les objectifs de conservation, cette loi
instaure une innovation par rapport à la loi
révisée29 en adoptant l'approche participative. En
effet, cette loi complète le décret n°100/007 du 25 janvier
2000 portant délimitation d'un parc et de quatre réserves
naturelles par la reconnaissance aux populations riveraines de l'exercice de
certains droits d'usage sur les ressources du PNK. Elle reconnaît par
ailleurs, le rôle combien important que peuvent jouer les populations
environnantes dans la gestion des aires protégées. Au terme de
cette loi, les populations environnantes doivent être associées
dans la gestion des aires protégées par la reconnaissance de
certains droits traditionnels (ramassage du bois mort, extraction de plantes
médicinales, etc..) et de leur implication dans les activités
autour des aires protégées, génératrices
27 Article 5 du décret n°100/007 du 25
janvier 2000 portant délimitation d'un parc et de quatre réserves
naturelles.
28 Articles 5 à 8 de la Loi n° 1/10 du 30 mai
2011 portant création et gestion des aires protégées au
Burundi.
29 Décret-loi n°1/6 du 03 Mars 1980
portant création des Parc Nationaux et Réserves Naturelles au
Burundi.
de revenus, ceci constitue évidemment des mesures
incitatives pour la conservation de la biodiversité des aires
protégées.
Toujours dans l'intention d'impliquer les autres partenaires
dans la gestion des aires protégées, la loi institue
différents types de gouvernance des aires protégées
à savoir les aires gérées par l'Etat (articles 10 à
11), les aires cogérées par l'Etat et les populations riveraines
(articles 12 à 18), les aires gérées par le privé
(articles 19 à 21) et les aires gérées par les
communautés (articles 22 à 25), ceci en vue de renforcer la
conservation de la biodiversité des aires protégées.
En ce qui nous concerne, nous allons focaliser notre attention
sur la seconde catégorie de gouvernance qui correspond aux aires
cogérées par l'Etat et les populations riveraines du fait
qu'elles correspondent à notre objet d'étude. En effet, selon la
nouvelle approche de gouvernance dans la protection des aires
protégées du Burundi, le PNK est une « aire
cogérée ».
En effet, ce type de gouvernance répond à la
variété de droits reconnus par les sociétés
démocratiques30. Les processus complexes et les
mécanismes institutionnels sont généralement
utilisés pour partager l'autorité et la responsabilité de
gestion entre une pluralité d'acteurs du niveau national au niveau
infranational, y compris les autorités gouvernementales, les
représentants des populations autochtones, les communautés
locales utilisant les associations, les entrepreneurs privés et les
propriétaires fonciers.
Ainsi, les acteurs reconnaissent la légitimité
de leurs droits respectifs de contrôler l'aire protégée et
de convenir pour la soumettre à un objectif spécifique de
conservation (comme ceux qui distinguent les catégories
d'UICN)31.
Dans cette nouvelle vision, la cogestion est assurée
par l'Etat et les communautés. Ainsi, dans le but de promouvoir cette
participation des communautés, trois éléments sont retenus
pour le Burundi :
- Organisation des communautés en comités ;
- Systèmes de participation dans les activités de
gestion ;
- Mise en place de cadre de collaboration entre l'Etat et les
communautés32.
Cette approche de cogestion rentre dans la droite ligne du
statut légal du PNK qui préconise déjà la
participation des communautés et autres partenaires riverains dans la
sauvegarde du parc, mais également la sauvegarde de leurs
intérêts.
Ainsi, un plan de gestion et d'aménagement du PNK doit
donc embrasser les considérations de protection d'un « parc
national » et l'esprit de ce type de gouvernance de «
cogestion ».
30 INECN, Plan d'Aménagement et de Gestion,
Parc National de la Kibira, 2009, Gitega, Burundi, p.53.
31 Dudley, N. (Éditeur), op. cit.,
2008, p.13.
32 Les articles 12 à 18 de la Loi n° 1/10 du 30
mai 2011 portant création et gestion des aires protégées
au Burundi
B. Du plan de gestion et d'aménagement comme
outil de conservation du Parc National de la Kibira
Ce texte de loi aborde le plan de gestion et
d'aménagement qui est un outil important d'implication des parties
prenantes dans la conservation des aires protégées. Cette loi
consacre les droits d'usage sur certaines ressources exercés d'une
façon contrôlée, de la promotion des alternatives aux
ressources biologiques vulnérables, l'éducation et la
sensibilisation en faveur des communautés riveraines des aires
protégées, la promotion du développement
socio-économique en faveur des communautés riveraines des aires
protégées comme mesures incitatives au profit des
communautés riveraines des aires
protégées33.
C'est dans ce contexte d'associer toutes les parties prenantes
à la conservation du PNK que l'organisme gestionnaire (INECN) de cette
aire protégée en collaboration avec Wildlife Conservation Society
(WCS)34, ont élaboré un plan d'aménagement et
de gestion du PNK en vue de servir de base commune pour l'ensemble des parties
prenantes et des acteurs impliqués ou intéressés par la
gestion du PNK.
Ce plan d'aménagement et de gestion du PNK a comme
objectif global la préservation des fonctions écologiques,
socio-économiques et culturelles et la valorisation des ressources
naturelles de cet écosystème forestier de montagne unique pour le
Burundi35.
Les objectifs spécifiques sont les suivants :
- le maintien des fonctions écologiques et
socio-économiques dans un système évolutif de la
biodiversité du PNK ;
- la préservation des ressources
génétiques et des espèces menacées d'extinction
pour assurer la stabilité et la diversité écologiques de
l'écosystème forestier de la Kibira ;
- la conservation et valorisation des ressources biologiques
de la forêt de montagne de la Kibira pour le bien-être de la
population ;
- l'amélioration des conditions touristiques du PNK
autour d'un système de partage des avantages qui en découlent
;
- l'instauration d'un cadre participatif de préservation
du PNK.
Bref, cette loi portant modification du décret-loi
n°1/6 du 3 mars 1980 portant création des parcs nationaux et des
réserves naturelles corrige la méconnaissance du rôle que
peuvent jouer les populations environnantes dans la gestion des aires
protégées tout en complétant le décret
n°100/007 du 25 janvier 2000 portant délimitation d'un parc et de
quatre réserves naturelles en privilégiant l'approche
participative. La nouvelle loi est également armée de
dispositions
33 Articles 26 à 33 de la Loi n° 1/10 du 30 mai
2011 portant création et gestion des aires protégées au
Burundi.
34 ONG internationale dont l'objectif est la
préservation de la nature et la préservation des zones de la
flore et de faune dans le monde et particulièrement en Afrique.
35 INECN, Plan d'Aménagement et de Gestion du
Parc National de la Kibira, Gitega, Burundi, juillet 2009, p.52.
répressives nouvelles pour faire convenablement face
à une destruction galopante, de jour en jour plus organisée et de
plus en plus audacieuse du PNK (articles 34 à 44).
Enfin, dans ses dispositions finales, la loi interdit la
cession ou la concession à un titre quelconque des
périmètres réservés aux aires
protégées gérées par l'Etat ou
cogérées avec les communautés locales (article 46), ceci
pour garantir le maintien du patrimoine naturel de ces aires
protégées.
Cependant, des lacunes ne maquent pas dans cette loi :
- les aspects de planification et de suivi de la
biodiversité n'apparaissent pas dans cette loi ; - la protection des
écosystèmes menacés n'apparaît pas ;
- les organismes génétiquement modifiés
ne sont pas réglementés alors qu'ils constituent des menaces
sérieuses pour la biodiversité ;
- les questions de bioprospection, d'accès et de
partage des bénéfices ne sont pas réglementés alors
que ce sont des questions d'actualité avec le nouveau Protocole de
Nagoya sur l'accès et le partage des avantages découlant de
l'utilisation des ressources génétiques ;
- la notion de payement des services rendus par les
écosystèmes ne figure pas alors que les aires
protégées rendent des services écosystémiques.
Nous venons de présenter brièvement le droit
interne de conservation de la biodiversité du PNK. Néanmoins,
nous remarquons que les questions liées à la protection de son
environnement dépassent trop souvent les frontières nationales
pour revêtir une dimension mondiale. Par ailleurs, nous reconnaissons que
la diversité biologique du PNK fait partie de notre patrimoine mondial
commun et que la communauté internationale doit, de toute urgence,
renforcer la collaboration le plus efficacement possible pour la
protéger avant qu'un grand nombre d'espèces de la faune et de la
flore ne disparaissent et qu'un écosystème naturel unique ne
s'effondre irréversiblement.
C'est dans ce cadre que le Burundi a ratifié et/ou
adhéré à un certain nombre d'instruments juridiques
internationaux et régionaux de protection de l'environnement ayant des
rapports avec la conservation du PNK.
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