I.4- La consommation médicale en cas d'accès
palustre
La consommation médicale est définie comme
l'utilisation de biens et services médicaux, marchands ou non par
l'ensemble ou une partie de la population [Picheral, 1984]. Pour mesurer la
consommation médicale des ménages lors du dernier épisode
morbide palustre, nous nous sommes basés sur l'enquête
socio-sanitaire effectuée auprès des ménages. Cependant,
cette enquête ne nous a pas permis d'avoir des chiffres exacts sur les
sommes dépensées. Devant l'incapacité des populations
à donner les montants justes, nous nous sommes contentés le plus
souvent de réponses approximatives. Les dépenses de santé
concernent particulièrement les achats de médicament, les frais
de consultation, les frais de transport et les frais d'hospitalisation (tableau
25).
Tableau 23 : La nature des dépenses de
santé lors du dernier épisode morbide palustre
Nature des dépenses
|
Dépenses (FCFA)
|
Fréquence
|
Dépense moyenne par ménage
|
Achat de médicament
|
971.015
|
86%
|
4.012
|
Consultation
|
43.150
|
4%
|
178
|
Frais de transport
|
59.725
|
5%
|
246
|
Frais d'hospitalisation
|
75.000
|
7%
|
309
|
Total
|
1.148.890
|
100%
|
4.747
|
Source : Enquête dans les
ménages, 2008
La lecture du tableau ci-dessus révèle que sur
les 277 ménages de notre échantillon, 242 ont effectué des
dépenses lors du dernier épisode palustre. Le montant total des
sommes s'élève à 1.148.890 FCFA, soit une dépense
moyenne de 4.747 FCFA par ménage.
En outre, on note une différence dans les
dépenses selon leur nature. En effet, 86% des dépenses de
santé concernent l'achat de médicament. Ces résultats
montrent une forte consommation médicale puisque les ménages
déboursent en moyenne 4.012 FCFA pour les
88
frais de médicament. Il faut signaler, par ailleurs,
que nos enquêtes se sont déroulées en hivernages où
les cas de paludisme sont nombreux.
Les frais de transport ne représentent que 5% des
dépenses totales. Cette situation signifie que l'accès aux
services de santé pose problème. Seuls les ménages proches
de la route nationale et des pistes peuvent utiliser les moyens de transport
tels que la voiture. Les populations utilisent en général le
vélo comme moyen de transport. D'après nos enquêtes, 42 %
de notre échantillon se déplacent à vélo pour
joindre le poste de santé en cas de paludisme. Comme l'illustre la photo
n° 4, montrant une femme qui vient de se faire consulter au poste de
santé, le vélo demeure le moyen de locomotion la plus
prisée dans la Communauté Rurale de Mampatim.
Photo n°3
Le moyen de transport le plus utilisé en cas
d'accès palustre
Il ressort de notre analyse que les dépenses de
santé effectuées par les ménages lors du dernier
épisode morbide palustre sont élevées quelque soit leur
nature. Cependant, les dépenses de santé se différencient
selon les villages (cf. tableau 26).
89
A travers ce tableau, nous discernons que c'est au niveau des
villages de Mampatim et d'Anambé où les dépenses de
santé sont les plus élevées. Ces villages, à eux
deux, regroupent plus de 350.000 FCFA pour l'achat de médicament sur un
total de 971.015 FCFA. C'est dans ces villages également que les
dépenses en frais de consultation sont les plus importantes. Ces fortes
dépenses montrent tout simplement que les ménages sont proches
des postes de santé et ont la possibilité d'acheter sur place
leur médicament
Les dépenses de santé des villages de
Médina Samba Baldé et d'Awataba se chiffrent à 181.100
FCFA. Cette situation s'explique par le fait que les populations de ces
villages préfèrent se faire consulter au poste de santé
Diaobé. Cette préférence de se faire soigner au poste de
santé de Diaobé est conditionnée par la qualité de
soins qui est meilleure selon les ménages. Ce déplacement
contraint les populations à acheter les médicaments au niveau de
la pharmacie où les prix ne sont pas subventionnés Les
dépenses de santé occasionnées par les frais de transport
sont surtout l'oeuvre des habitants des villages de Missirah Demba Sadio et
d'Aine Mady Yoro. Grace à leur position géographique (ces
villages sont traversés par la route bitumée de la Nationale 6 et
sont distants du poste de santé de Mampatim de 7 et de 8 km), les
populations de ces villages bénéficient des transports en commun
qui font la navette entre Kolda et Vélingara.
Pour ce qui est des frais d'hospitalisation, c'est dans le
village de Mampatim que l'on a rencontré un cas de paludisme grave qui
nécessitait un transfert du malade à l'hôpital
régional de Kolda.
90
Tableau 24 : Répartition des
dépenses de santé selon leur nature de
l'échantillon
Villages
|
Achat de médicament
|
Consultation
|
Frais de transport
|
Frais
d'hospitalisation
|
Total
|
Anambé
|
115475
|
6850
|
600
|
|
122925
|
Aine Mady Yoro
|
47900
|
2500
|
10100
|
|
60500
|
Awataba
|
59950
|
1950
|
1500
|
|
63400
|
Dembayel
|
92300
|
3200
|
5900
|
|
101400
|
Diank. Oguel
|
107475
|
2900
|
5725
|
|
116100
|
Kossanké
|
50725
|
3200
|
6700
|
|
60625
|
Mampatim
|
254050
|
13350
|
2400
|
75000
|
344800
|
Medina S.Baldé
|
110800
|
2900
|
4000
|
|
117700
|
Missirah D.Sadio
|
102490
|
3800
|
14900
|
|
121190
|
Thiéoulé
|
29850
|
2500
|
7900
|
|
40250
|
Total
|
971015
|
43150
|
59725
|
75000
|
1148890
|
Source : Enquête dans les
ménages, 2008
.
Selon les ICP des deux postes de santé : « ces
dépenses faramineuses pouvaient être évitées si les
populations se rendaient à temps au niveau des structures de
santé modernes pour soigner le paludisme. Au lieu de cela, elles
préfèrent venir au dernier moment après avoir usées
tous les recours aux soins inimaginables. Bien entendu, à partir de
là, le coût du traitement, qui ne devait pas dépasser au
maximum 500 FCFA (le prix de l'ACT est fixé à 300 FCFA), triple
voire quadruple compte tenu des complications ».
Somme toute, qu'importe le lieu de résidence et le
niveau de vie des ménages, les dépenses de santé
effectuées lors d'un épisode morbide palustre sont
élevées et les populations jugent les prix des médicaments
assez chers en milieu rural. La récurrence du paludisme dans la
Communauté Rurale de Mampatim fait subir aux ménages de lourdes
pertes économiques allant de la réduction du revenu à la
baisse de la consommation. Selon le PNLP, le paludisme est responsable au
Sénégal d'une perte considérable de journées de
productivité et constitue un frein à la productivité chez
les adultes.
Afin de réduire les cas de paludisme et les
conséquences qui en découlent, différentes
stratégies de lutte ont été développées dans
l'espace communautaire de Mampatim. Ces stratégies sont
étudiées dans le second chapitre de cette troisième
partie.
91
Chapitre II : Les stratégies de lutte
contre le paludisme développées dans la Communauté
Rurale de Mampatim
Dans ce chapitre, compte tenu de la
vulnérabilité économique des populations à faire
face à la maladie, nous étudierons les différentes
stratégies de lutte contre le paludisme développées dans
l'espace communautaire de Mampatim. Ces stratégies sont mises en oeuvre
par le PNLP, les partenaires au développement et les mouvements
associatifs tels que les groupements féminins. A travers les guides
d'entretien administrés aux responsables des intervenants dans la lutte
contre le paludisme, nous avons pu évaluer leurs actions.
|