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De l'image du président dans les trois derniers romans de Mongo Beti

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par Jean Baptiste NTUENDEM
Université de Dschang - Master II 2013
  

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2-4 : Un Président vacancier

Le Chef de l'Etat trône à la tête d'un pays morbide et d'une instabilité sociopolitique qui mérite réflexions. Cependant, ce dernier semble trouver dans des

séjours prolongés et répétés à l'étranger une thérapeutique personnelle : « D'abord, ici, rien ne rime jamais à rien. Est-ce que l'imagine un pays, constamment en proie aux convulsions sociales, ethniques et politiques, sous-développé de surcroît, où le Chef de l'Etat peut s'octroyer six grandes semaines de villégiature à l'étranger ?» (Mongo Beti 1999 :11)

A cette interrogation du narrateur de Trop de soleil tue l'amour fait écho cette autre du commissaire dans Branle-bas : « -Laissons ça Norbert. Prends même six mois pour enterrer chacune de tes mamans, je m'en fous. Quand le rand chef disparaît de chez nous là tu vas même lui dire que quoi ? Je te demande Norbert, qui va même lui dire quoi ? » (Mongo Beti 2000 :119-110)

Dans les analyses de Fandio, le critique trouve en ces séjours répétés et prolongés à l'étranger la recherche d'un remède à l'impéritie du dictateur migrateur : « Il n'est sans doute pas exagéré de penser que les séjours répétés à l'étranger du personnage

constituent une sorte de quête du dictateur pour une solution à cette véritable impotence dont-il souffre. » ( Fandio 2001 :4)

Le Chef de l'Etat n'est pas seulement insensible aux convulsions sociopolitiques que vit son pays en permanence. Faute d'y trouver des remèdes, il en ajoute plutôt, à

cause de la paralysie que provoquent ses sorties et ses entrées dans la capitale :

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Eddie lui exposa alors gentiment que la ville était divisée en deux, comme une pastèque, par un axe qui, parti du Sud et filant au Nord, reliait l'aéroport au palais du Président, et que, quand le Président se rendait à l'aéroport ou en revenait, comme il arrivait souvent, car c'était un grand voyageur, une espèce d'oiseau migrateur, le passage de l'une à l'autre de ces zones était interdit aux véhicules automobiles durant des heures entières sinon pour la journée. (Mongo Beti 2000 :12)

En effet, Eddie et Georges s'apprêtent à traverser la ville pour se rendre au siège du Journal Aujourd'hui la démocratie où la rédaction fête la prise du pouvoir par Kabila à

Kinshasa. Ce qui est davantage intéressant dans cette séquence, ce sont des figures de style très expressives que le personnage d'Eddie emploie. Il compare la ville à une «pastèque». Plus loin, il utilise la périphrase «palais du Président», en lieu et place de

«palais présidentiel». Par ailleurs, nous avons cette autre périphrase : «un grand voyageur» et la métaphore animale «une espèce d'oiseau migrateur». Que dire de toutes

ces images fortes ? Elles ont une connotation péjorative et montrent non seulement que ce Président est possessif et égoïste, mais qu'il est d'une errance déconcertante pour une

autorité qui a le gouvernail de l'Etat en main. La société du texte nuance cette image traditionnellement gravée dans l'imaginaire populaire et qui fait du Président un Dieu vivant comme l'appelle sa concubine éphémère. Ici, le petit peuple, représenté par le

chauffeur de taxi, a du Président, l'image d'un homme sans coeur, très insensible et irresponsable, dont les voyages récurrents bloquent tout, paralysent la vie socio-

économique et fait de nombreuses victimes résignées :

-Patron, c'est vrai ça, fit en se tournant de trois quarts vers le toubab le taximan qui s'était hardiment mêlé au débat, pas le problème du Président, ça, c'est vrai, hein. Même les gens, ils meurent, hein. Tu veux emmener à la maternité la femme qui doit accoucher vite, vite, tout est bloqué, tu fais comment ? Un vieux papa tombe là par terre, il met la main son coeur, il fait ah, ah, ah, il va mourir, mais tout est bloqué, tu fais comment ? Quand le Président sort, c'est comme ça. J'ai vu ça toujours. (Mongo Beti : 13)

Au sujet de ces dysfonctionnements, tandis Mouafou fait cette réflexion :« -Du point de vue politique, c'est également l'identique et le répétitif qui prévalent. Le politique phagocyte l'économique, à preuve, chacune des sorties du Président a pour corollaire la

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paralysie de la capitale, orchestrant ainsi un manque à gagner terrible aux opérateurs économiques. » ( Tandia Mouafou 2009 :7)

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand