2.6 Le rôle et la place de la fratrie
Au sein d'une famille, les parents peuvent avoir un ou
plusieurs enfants, nous parlons alors de fratrie. Selon le Dictionnaire
Larousse, la fratrie correspond à l'ensemble des frères et soeurs
d'une famille.
M. Ruffo énonce que le terme fratrie n'est pas facile
à définir. Cependant, il évoque un fait incontournable :
«les membres d'une fratrie issus des mêmes parents ont un
patrimoine génétique commun, mais avec des variantes puisqu'il
existe des gènes s'ex-primant chez certains enfants et non chez
d'autres». 26 La fratrie regroupe les
enfants ayant certains gènes identiques. Elle permet de créer une
certaine relation. Cette relation est conduite par les parents. En effet, comme
M. Ruffo peut l'énoncer : «les relations qui unissent les
frères et soeurs sont de résultat d'une grande intimitéqui
n'est pas choisie mais imposée par les
parents»27. Elle peut aussi bien se
traduire par de la jalousie entre eux ou également par de la
complicité. La fratrie peut être comparée à une
sociétéminiature. En effet, au sein d'une fratrie, il y a des
règles à respecter comme au sein d'une société. De
plus, dans une fratrie, les enfants apprennent, comme l'énonce M. Ruffo,
«le partage, les compromis» 28.
La fratrie permet également d'ap-prendre et de comprendre le sens du
terme différence.
En présence du handicap, les relations fraternelles
peuvent changer. En effet, selon le handicap, la fratrie doit accepter des
difficultés financières. L'enfant «normal»
devra également grandir plus vite, devenir autonome plus rapidement
car ses parents doivent s'occuper plus de l'enfant en difficulté. Avec
un handicap ou non, il est nécessaire de trouver sa place au sein de la
fratrie. Mais en présence du handicap, C. Gardou énonce que
«les frères et soeurs sont simultanément contraints de
s'adapter à ces brutales métamorphoses et d'accepter la tyrannie
involontaire de leur pair handicapéqui gouverne le quotidien, pliant
tous ses proches à sa loi.» 29
Face à cette situation, ils peuvent avoir un sentiment de
délaissement. Ces sentiments peuvent lors engendrer de la jalousie. Mais
au sein du handicap, la fratrie permet de soutenir l'enfant handicapé,
ainsi ils
26. Ruffo M., Frères et soeurs, une maladie
d'amour, Ed. Armand Colin, Coll. livre de poche, 2002, p. 251.
27. ibid., p. 249.
28. ibid., p. 266.
29. Gardou C. (1997), Frères et soeurs de
personnes handicapées : le handicap en visage, Ed. Erès,
2012, p. 19.
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peuvent le stimuler, aider aux soins. Comme C. Gardou peut
l'évoquer, ils ont un rôle de «substitut parental ou
encore de thérapeute» 30.
Ils devront comprendre pourquoi leurs parents s'occupent plus
de l'enfant en difficulté. La fratrie aura une responsabilisation. Ils
devront grandir plus vite et ne pas être
envieux du temps que passe les parents avec celui qui a un
handicap. Pour la majoritédes familles rencontrées, la
mère a cessésa profession afin de pouvoir s'occuper de leur
enfant en situation de handicap. Le handicap peut demander une
plus grande présence de la part d'un des parents. La fratrie peut alors
se questionner : pourquoi sa mère ou son père passe plus de temps
avec lui et pas avec eux. D'ailleurs, les parents réduisent moins leur
activitélorsqu'il n'y a pas de handicap chez l'enfant. La fratrie peut
alors avoir un sentiment de subir le handicap. Mme L. m'exprime qu'elle ne
souhaite pas que le frère de Mattéo endure son handicap. À
12 ans un enfant peut rester seul en l'absence de ses parents pour une courte
durée. Mme L. énonce alors Mattéo peut être sous la
surveillance de son frère contre une certaine rétribution en
contre partie.
Selon l'âge des enfants la relation sera plus ou moins
facile à créer. Mme B. l'ex-plique «Inès a plus
de relations avec l'aînéqu'avec le petit. Ils ont seulement 2 ans
d'écart ce qui a permis de créer une certaine relation. Mais avec
le petit cela va de mieux en mieux. Ils sont très protecteurs et elle va
également les chercher. Ils ont une relation de câlin/jeux mais
autrement qu'une fratrie normale.»
Mme C. indique «au quotidien, ce n'est pas toujours
facile, mais en grandissant les relations deviennent de plus en plus
faciles.» Pour certains et quand il n'y a pas de moyen de
communication, il n'y aura pas de relation entre eux («Il n'y a pas de
relation frère/soeur car elle reste tout de même non verbale ce
qui ne lui permet pas d'échanger avec eux.») Les enfants
peuvent garder leur part de secret face à leurs amis. La fille de Mme C.
aime son frère, cependant peu de ses amis connaissent le handicap
(«j'ai ma vie école, et j'ai ma vie à la
maison»).
Pour conclure ce deuxième chapitre, nous pouvons dire
que le concept famille regroupe différentes notions. La famille peut
avoir différentes significations selon que nous considérons le
lien du sang ou non. De plus, au sein d'une famille, la notion de
paren-talitéest importante. Il permet de donner le rôle des
parents face à leur enfant auquel s'ajoute des droits mais
également des devoirs.
Les concepts de handicap et de famille peuvent donner lieu
à des représentations. Mais que mettons-nous derrière le
terme représentation? La représentation fait-elle partie de la
norme?
30. Gardou C., Frères et soeurs de personnes
handicapées: le handicap en visage, op. cit., p. 29.
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