Conclusion du chapitre
Malgré les différences entres les langues, la
linguistique, en temps que science, essaie de mettre en relief tout ce qui
différencie les langues.
88
En effet, les propriétés différentielles
sont l'ensemble des traits phonologique, morphologique, syntaxique et
sémantique qui distinguent une langue d'une autre. La traduction du
français vers l'arabe pose différents problèmes
liés aux divergences syntaxiques. La traduction de l'interrogation fait
ressortir avec clarté la différence entre ces deux langues aussi
bien sur le plan syntaxique que sur les plans sémantique et
pragmatique.
Pour remédier aux différents problèmes
qui sous-tendent la traduction entre les deux langues, le traducteur fait appel
aux deux procédés essentiels de la traduction à savoir la
transformation et la modulation. Ainsi, le traducteur traduit en pronominaux
interrogatifs arabes la majorité des éléments
interrogatifs de la langue française. Ce choix dépend des
structures syntaxiques de la langue arabe qui ne permettent pas par exemple une
inversion de sujet pour exprimer une interrogation. De ce qui vient
d'être dit, nous pouvons conclure que la langue arabe tend à
utiliser les pronominaux interrogatifs plus que d'autres éléments
ou manières interrogatives.
En effet, la traduction de l'interrogation de la langue
française vers la langue arabe n'est pas soumise à la condition
de fidélité syntaxique, puisque le changement de type
d'interrogation n'influe ni sur le contenu de l'interrogation, ni sur sa charge
sémantique, ni sur le but pour lequel elle a été
posée. Peu importe le type de l'interrogation, l'essentiel est de
produire une interrogation qui transmet le même message que celle
d'origine.
Alors, la traduction de la structure syntaxique interrogative
est un procédé qui demande au traducteur d'être très
attentif quant aux divergences entre les langues. Et ceci, pour que le texte
cible revêtisse un aspect d'originalité et surtout pour
éviter les interférences et le solécisme
89
auxquels peut mener une traduction qui ne respecte pas les
propriétés syntaxiques de la langue cible.
III.3. Traduction, sémantique et pragmatique
Introduction
L'interprétation sémantique est la
première phase du travail du traducteur, parce que la traduction
consiste d'abord à comprendre le message. En effet, le traducteur doit
saisir le sens de la façon la plus exacte et la plus complète
avant de le transférer vers la langue cible. Cependant, cette
tâche n'est pas d'une telle simplicité, vu les divergences d'ordre
linguistique et culturel entre les langues : la langue est un
polysystème très complexe fait de différents niveaux
stylistique, grammatical, sémantique, etc. ces éléments
font l'objet des divergences entre les langues et font de la traduction une
tâche complexe qui demande au traducteur des connaissances linguistique
et culturelle étendues afin de produire un travail qui tend plutôt
vers l'originalité.
Mounin relève l'importance du fait de comprendre les
mots dans leurs sphères culturelles en invoquant l'idée de Nida
qui pense que « les mots ne peuvent pas être compris
correctement séparés des phénomènes culturels
localisés dont ils sont les symboles 77».
L'appartenance des deux langues objet du travail, notamment le
français et l'arabe, à des sphères historico-culturelles
différentes, oblige à traduire par équivalents car les
mots sont mieux compris dans leur univers culturels.
L'histoire de Samarcande se déroule dans un
espace appartenant à la sphère perso-musulmane, à la
lecture de la version traduite, le lecteur a l'impression de lire une version
originale. De ce fait, l'interprétation
77 Mounin, G., 1963, Les problèmes
théoriques de la traduction, Paris, Gallimard. (Nida. E.A., 1945,
« Linguistics and technilogy in translation problem ». Word,
N° 2. P 207).
90
sémantique n'a pas fait un grand obstacle au traducteur
puisque la religion musulmane lie les deux cultures perse et arabe. Le
traducteur ne s'est pas contenté uniquement d'être fidèle
au sens propre du texte, mais il a enrichie le texte par l'emploi d'un lexique
plus expressif et plus spécifique à la langue et à la
culture arabe.
Sur le plan lexical et sémantique, nous allons
étudier, des phénomènes linguistiques qui sont liés
à la traduction mais ils ne sont pas liés étroitement
à l'interrogation, ils peuvent figurer dans d'autres structures outre
l'interrogation. Et ceci va être étalé sur un volet
lexical, sémantique et pragmatique.
III. 3. 1 Sur le plan lexical et
sémantique
Il est très difficile, sinon impossible, d'établir
des équivalences
lexicales sans avoir recours à l'analyse
sémantique. Etant donné que le contenu sémantique des mots
est analysable en traits sémantiques ou sèmes78, il
faut d'abord identifier les sèmes dont le contenu sémantique se
compose79. Ce n'est que de cette façon qu'on peut
déterminer le sens d'une expression et qu'on peut vérifier si
l'expression choisie comme équivalent a le même sens dans l'autre
langue et présente les mêmes propriétés
sémantiques requises. C'est donc dans l'analyse sémantique qu'il
faut chercher la solution des problèmes relatifs à
l'équivalence.
Lors du processus de la traduction, l'interprétation
sémantique ne peut être faite en dépendance du choix
lexical. Ce n'est qu'à travers le
78 Le sème est un "trait distinctif de la
substance du signifié d'un signe (au niveau du morphème), et
relativement à un ensemble donné de signes".
Pottier, B., 1974, Linguistique générale.
Théorie et description, Paris, Klincksieck, p. 330
79 Ostrá, R., 1975, Structure
onomasiologique du travail en français, Université
Brunensis, Opéra. P. 191.
91
lexique que se tisse le sens de l'énoncé, ainsi
l'analyse sémantique se fait grâce à l'analyse lexicale. En
effet, l'analyse sémantique minutieuse permet de cerner le sens de
l'expression à traduire et de s'assurer d'avoir bien choisi les termes
équivalents.
Sur le plan lexical, un léger décalage peut
être remarqué entre les deux versions : cela se manifeste par des
rajouts dans la version arabe. Ces mots introduits contribuent en effet
à interpréter et à cerner le sens global du texte. Ces
rajouts détectés ne peuvent pas être justifiés par
les contraintes linguistiques, mais ils pourraient être expliqués
par la simple volonté du traducteur qui s'est simplement permis quelques
libres interprétations et par l'ajout de quelques adjectifs
qualificatifs en pensant qu'il enrichirait le texte arabe.
Le texte arabe est caractérisé par l'ajout entre
autres de locution interjective, de locution interrogative ou de mots, et ce
dans le but de préciser le sens du message original, comme l'illustrent
les exemples (1), (2) et (3), respectivement. En outre, le nombre de ces ajouts
reste limité, par souci de fidélité au texte.
1) Comment ai-je pu ne pas reconnaître Omar, fils
d'Ibrahim Khayyâm de Nichapour?
ÑæÈÇÓíä
äã ãÇíÎáÇ
ãíåÇÑÈÅ äÈ
ÑãÚ ÑÚ áÇ
äßã íß !ááå
Çí
2) Combien de nuits le destin leur a-t-il accordées
?
ìÑÊ Çí
3) Fuir trahir déjà attendre encore, prier
?
|
ÑÏÞáÇ
Çãåá ÍÇÊ
Éáíá ãß
|
äæÚÏíæ
äæáÕí
ÑÇÙäáÇ
äæáíØí
ÉäÇíÎáÇ
äæáÌÚÊÓí
äæÑí
Les ajouts dans le texte cible pourraient être
détectés lorsqu'il s'agit de la traduction de quelques
expressions métaphoriques par des expressions métaphoriques aussi
mais avec des charges sémantiques différentes, comme le montre
l'exemple (4) : dans le texte source, le sujet du verbe
92
?être comblé? a le trait sémique
[+concret], alors qu'en texte cible le sujet du verbe
?ÑãÛÊ : tagmura? a la trait
sémique [+liquide].
4) Khayyam devrait être
comblé- un amant peut-il espérer plus tendre agression
?
ãæÌåáÇ
ÇÐå äã ÞÑÇ
æÌÑí ä ÞÔÇÚ
ÚÓæ í ?? -ÑãÚ
ÉÍÑáÇ ÑãÛÊ
ä íÛÈäí äÇß
Il convient également de faire part de quelques pertes
qui surviennent immanquablement, surtout au niveau lexical, mais ce ne serait
pas sans répercussions sur la charge sémantique de
l'énoncé (cf. (5)). En effet, les rajouts ou les abandons
dépendent des fois de la volonté du traducteur. Ainsi, la
traduction de l'exemple (5) montre la négligence du mot qui
réfère dans le texte source à Dieu : dans le contexte de
l'histoire, le cadi Abou Taher accuse Omar Elkhayyam de
toucher à la divinité sacrée de dieu en produisant des
quatrains profanes et d'une telle impiété. Le traducteur a
négligé le mot ?seigneur? dans la version traduite, ceci
reste un peu ambigu : est-ce par un respect religieux relatif au lecteur ou
c'est un choix stylistique ?
5) Serais-tu ivre, Seigneur ?
ÇäÇæÔä
Êäß ??
Sur le plan sémantique, le traducteur tend surtout
à donner une autonomie au texte arabe par le biais d'usage
d'équivalents en langue cible. Il tend, à plusieurs reprises, de
traduire le texte en lui donnant une valeur ajoutée au moyen de
procédés d'enrichissement linguistique qu'offre la langue arabe,
comme le montrent les exemples suivants :
6) As-tu encore ton voile ?
ßÈÇÞäÈ
äíÙÊÍÊ ÊáÒ
Çã
93
7) N'est-il pas vrai que tu as lu sept fois à Ispahan
un volumineux ouvrage d'Ibn-Sina , et que, de retour à
Nichapour, tu l'as reproduit mot à mot, de mémoire ?
åÊáÞä ßäÇ
æ ÇäíÓ äÈáÇ
ÇãÎÖ ÇÏáÌã
ÊÇÑã ÚÈÓ
äÇåÕ í ÊÑÞ ßä
ÇÍíÍÕ Óíá
ÉÑßÇÐáÇ
äã Éãáß Éãáß
ÑæÈÇÓíä ìáÅ
ßÊÏæÚ ìÏá
Le traducteur a utilisé par exemple
[niqâb] qui a des traits sémiques supplémentaires
plus spécifiques que le terme français ?voile? (cf.
(6)). Le voile étant un terme plus vague quant à sa
référence en langue française, du fait qu'il
désigne ce qui couvre aussi bien le visage que le corps, et il est
souvent utilisé pour référer au [hijab] dans la
religion musulmane. Dans la communauté arabe, le terme arabe
[niqab] désigne un tissu qui couvre le visage en ne laissant
paraître que les yeux. De même, le terme ?ouvrage? traduit vers
l'arabe par ?muúallad? illustre cet aspect plus
spécifique du terme arabe (cf. (7)), ce mot indique un livre dont la
couverture est faite de cuire, c'est-à-dire un sème
différentiel qui spécifie plus le sémème
?ouvrage?. Ce qui veut dire que les termes voile et ouvrage
n'équivalent que partiellement aux termes [niqab et
muúallad].
Autrement-dit, l'aspect religieux, quelques fois absent dans
le texte français, est omniprésent dans le texte arabe. Le
traducteur a tendance à donner, en cherchant les traits sémiques
les plus spécifiques, l'équivalent adéquat et
convenable.
Dans le même sens, le lexème ?destin?,
qui a été traduit par [qadar], signifie en langue
française un ensemble d'événements soumis au hasard ou
à la fatalité..., et qui compose la vie d'un être
humain80, alors que le mot [qadar] a une aura religieuse
dans la culture musulmane, du fait qu'il est lié à la
volonté divine et qu'il constitue un des cinq piliers fondamentaux
auxquels doit croire tout musulman(cf. (9)), on peut dire de
80 Rey. A., 1988, Le Micro Robert,
Dictionnaire, Paris : (entrée : destin), P. 360. .
94
même pour les mots ?låid? et ?la
fête? dans l'exemple (8). Cette charge sémantique est absente dans
le texte source. Ceci évoque encore une fois le problème
d'équivalence lorsqu'il s'agit de deux langues culturellement
différentes.
8) Ne souhaite-t-on pas d'habitude que le jeune
s'achève, que vienne le jour de la fête ?
ÏíÚáÇ
ãæí ãæÏÞæ
ãÇíÕáÇ
ÁÇÖÞäÇ
ÉÏÇÚáÇ í
ÓÇäáÇ íäãÊí
áÇ
9) Combien de nuits le destin leur a-t-il
accordées ?
ìÑÊ Çí
ÑÏÞáÇ Çãåá
ÍÇÊ Éáíá ãß Les
choix lexicaux pertinents du traducteur émanent d'une volonté
à produire un texte qui revêt un caractère original et qui
respecte le génie de la langue cible.
III. 3. 2 Sur le plan pragmatique
Comme nous l'avons signalé précédemment,
la question n'est pas toujours liée à la demande d'information.
Elle peut acquérir des fins pragmatiques par interprétation
inférentielle, et être investie pour d'autres valeurs illocutoires
outre la demande de l'information81.
Les interrogations modalisées par les verbes
?pouvoir et devoir? sont dites des questions mandes82. Ils
sont souvent utilisés dans des structures interrogatives de type :
?vouloir /pouvoir+ P ?? et qui sont susceptibles de recevoir une lecture
par inférence. Ce type de question exprime une
désirabilité déguisée de la part de
l'énonciateur envers son interlocuteur pour qu'il se comporte d'une
telle manière.
81 Taifi. M., 2000, sémantique
linguistique, référence, prédication et
modalité, SFR, sciences du langage, publication de la
faculté des lettres et des sciences humaines, Fes. PP. 211-215.
82 Ibid, PP. 211-212.
95
L'interrogation n'est pas forcément liée
à la demande d'information. Ainsi le locuteur (Omar Elkhayyam),
dans l'exemple (10), fait une requête à sa bien-aimée. Il
lui demande implicitement de rester auprès de lui et non si elle a la
possibilité de rester chez sa cousine à Samarcande.
Cette requête doit être appréciée par l'interlocuteur
(la belle poétesse) par un raisonnement inférentiel, sinon, la
réponse de la femme ne peut être comprise comme refus lorsqu'elle
répond : ? j'ai ma place à la cour.?, ceci explique
l'intension du locuteur de ce que sa bien aimée agisse d'une telle sorte
et non pas de répondre à sa question. En outre, l'interrogation
dans l'énoncé (11) est une question modalisée par le verbe
vouloir. Le locuteur y exprime ce qu'il a voulu insinuer dans l'interrogation
précédente où il invite sa bien- aimée à
partager sa vie. La réponse de la femme illustre son refus permanent :
?Partager ta vie ? Il n'y a rien à partager?.
10) Ne pourrais-tu rester chez ta cousine à
Samarcande ?
ÏäÞÑãÓ í
ßÊÈíÑÞ ÏäÚ
ÁÇÞÈáÇ
ßÑæÏÞã í
Óíá
11) Ne voudrais-tu pas partager ma vie ?
íÔíÚ
íÊÑØÇÔã í
äíÈÑÛÊ áÇ
En outre, la traduction arabe satisfait le vouloir dire de
l'auteur, mais il y a une tendance au niveau syntaxique à substituer,
pour raisons stylistiques les verbes modaux par des substantifs comme le cas du
verbe pouvoir, ainsi que pour d'autres verbes comme le montre le tableau
suivant :
Verbe
|
Substantif
|
pourrais
|
ÑæÏÞã
|
rester
|
ÁÇÞÈáÇ
|
partager
|
É ÑØÇÔã
|
96
La question rhétorique est une figure de style
très fréquente dans les textes littéraires. Elle est
très répandue dans les deux textes objet de notre étude,
i.e. source et cible, étant donné que le texte de Samarcande
appartient à ce courant littéraire.
Une question rhétorique est une question dont la
réponse est évidente et qui «prétend forcer le
destinataire à reconnaître explicitement ou non, ce que le
locuteur tient pour vrai»83. En effet, la question
rhétorique est utilisée non seulement pour des mesures
stylistiques, mais aussi pour des fins pragmatiques. L'exemple (12) en est la
parfaite illustration. Il s'agit en fait d'une ironie où le locuteur, le
Cadi Abou Taher, reproche à Omar Elkhayyam d'avoir
produit des quatrains plein de piété et de dévotion.
L'adverbe interrogatif ?comment? n'est utilisé ni pour se
demander de la cause ni pour la manière. La modalisation de
l'énoncé est exprimée par le verbe pouvoir en langue
française et par son équivalent en arabe le verbe ?amkana?,
la traduction n'a pas infecté le sens pragmatique de
l'énoncé vu que la langue arabe comme la langue française
permet ce type d'interprétation.
12) Comment ai-je pu ne pas connaître celui qui a
composé ce robaï si plein de piété et de
dévotion :
°ÚÑæáÇ æ
ìæÞÊáÇÈ
ÉÌÖÇäáÇ
ÉíÚÇÈÑáÇ
åÐå ãÖä äã ÑÚ
áÇ äßã íß
L'interrogatoire est parmi les discours où
l'interrogation est très utilisée, le locuteur demande souvent
à l'accusé la confirmation ou l'infirmation de ce qu'on lui
reproche. Le corpus, objet de notre étude, illustre ce type
d'interrogations quant à l'usage d'interrogations indirectes. Des
interrogations qui ne sont en réalité que des reproches
auxquelles
83 Anscombre, et all., 1977, L'argumentation dans la langue,
Bruxelles, Pierre Mardaga, P. 28.
l'accusé (Omar Elkhayyam) doit répondre
pour confirmer ou infirmer ces accusations. En fait, les énoncés
(13), (14) et (15) en sont l'exemple : il s'agit des accusations sous forme
d'interrogations envers l'accusé Omar Elkhayyam auxquelles il
devait se défendre devant le juge.
13) On t'a entendu dire : « je me rends parfois dans
les mosquées où l'ombre est propice au sommeil. »
"
|
ãæäáá
ÊÇæã áÙáÇ
ËíÍ ÏÌÇÓãáÇ
ìáÅ ÇäÇíÍ
ÈåÐ
|
" :
|
áæÞÊ ÊÚãÓ
ÏÞá -
|
14)
97
Ce ne sont pas seulement tes exploits qui se transmettent
de bouche en bouche, de bien curieux quatrains te sont
attribués.
ÉÈíÑÛáÇ
ÊÇíÚÇÈÑáÇ
äã ÇÑíËß
ßíáÅ äæÈÓäí
ÓÇäáÇ ÑÎÂ
ìáÅ ã äã
ÉáÞÇäÊãáÇ ??
ÇåÏÍæ ßÑËÂã
ÊÓíá
15) On m'a rapporté des paroles d'une telle
impiété que de les citer, je me sentirais aussi coupable que
celui qui les a proférés.
ÇåáÆÇÞ
ÈäÐ áËÇãí
íÈäÐ äÈ
ÊÑÚÔá
ÇåÊÑßÐ æá
ÑßáÇ äã áÇæÞ
íáÅ Êíãä ÏÞ
Ce sont des interrogations-reproches qui, pour
être interprétés comme des interrogations totales,
nécessitent un raisonnement par inférence. Cependant, ces
interrogations ne satisfont pas les conditions syntaxiques de l'interrogation
directe ou indirecte: elles ne sont ni marquées par un point
d'interrogation à l'instar des interrogations directes, ni introduites,
à l'instar des interrogations indirectes, par des propositions
principales interrogatives contenant des verbes introducteurs à sens
interrogatifs (demander, s'interroger, savoir, etc.). Alors où
pourrions-nous classer ce genre d'interrogations ? Elles peuvent être
classées dans la catégorie des interrogations indirectes totales
exigeant un raisonnement par inférence, puisqu'elles ne se terminent pas
par un point d'interrogation. Le questionné est sensé
répondre même si cette question lui est adressée
implicitement.
98
En effet, vu l'absence des conditions syntaxiques relatives
aux interrogations directes et indirectes, nous sommes invités à
les reformuler de la manière qui satisfait ces conditions.
L'interrogation (13) pourrait être reformulée de la manière
suivante (cf. (16)).
16) Je te demande si tu as dis : « je me rends
parfois dans les mosquées où l'ombre est propice au sommeil.
».
Ou bien par l'introduction d'un introducteur interrogatif
pour que celle-ci devient une interrogation directe (cf. (17)).
17) Est-ce que tu as dit: « je me rends parfois dans
les mosquées où l'ombre est propice au sommeil » ?
Les deux autres interrogations (14) et (15) peuvent
être reformulées de la manière suivante pour devenir des
interrogations indirectes totales répondant à toutes les
conditions de celles-ci en y introduisant une proposition principale
interrogative, ainsi l'interrogation (14) devient (17) et l'interrogation (15)
devient (18):
17 ) Ce ne sont pas seulement tes exploits qui se
transmettent de bouche en bouche, je te demande si de bien curieux quatrains
t'appartiennent.
.ÑΠìáÅ ã
äã
ÉáÞÇäÊãáÇ ??
ÇåÏÍæ ßÑËÂã
ÊÓíá
.ÉÈíÑÛáÇ
ÊÇíÚÇÈÑáÇ
äã ßíáÇ
ÓÇäáÇ
åÈÓäíÇã
ÇÍíÍÕ äÇß äÇ
ßáÇÓÇ
18) Je veux savoir si les paroles qu'on m'a rapporté,
qui sont d'une telle impiété et que de les citer, je me sentirais
aussi coupable que celui qui les a proférés, sont vrais.
íá íãä Çã
ÇÍíÍÕ äÇß äÇ
ÑÚÇ äÇ ÏíÑÇ
. ÇåáÆÇÞ
ÈäÐ áËÇãí
íÈäÐ äÈ
ÊÑÚÔá
ÇåÊÑßÐ æá
íÊáÇ ÑßáÇ
áÇæÞ äã
99
La visée et l'intension pragmatique de l'interrogation
n'ont été altérées ni lors du passage du
côté lexical ni du côté sémantique du
français vers l'arabe. Ceci est dû d'une part, aux
propriétés linguistiques communes aux deux langues permettant ce
genre d'interrogations, et d'autre part à l'interlocuteur qui
perçoit l'interrogation comme une demande nécessitant une
réponse et non comme une simple assertion décrivant un
état de chose.
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