DEUXIEME PARTIE : DE LA FRAGILISATION ADMINISTRATIVE
DE LA GESTION DU PETROLE À L'HARMONISATION PROGRESSIVE DES
RATIONALITÉS DE LA POLITIQUE PUBLIQUE DES HYDROCARBURES AU CAMEROUN
Dans la deuxième partie, il sera question après
avoir examiné la structure de jeu autour de la variable pétrole
au Cameroun, d'examiner la logique de la rationalité du jeu autour du
pétrole. Le néo-institutionnalisme retenu dans le cadre de cette
étude trouve ici toute sa pertinence dans ce sens que cette approche
proclame le retour des institutions (Hall et Taylor, cité par
Massardier, 2003) en prime dans la gestion d'un tel patrimoine ; et
notamment de l'Etat dans l'explication des comportements sociaux des individus,
celle de la vie politique et dans l'explication de la fabrication des
politiques publiques (Massardier, 2003 : 152). Il y aura donc dans ce
domaine pétrolier, les effets du contre pouvoir dû à la
dynamique des autres acteurs en présence, ce qui nous permettra donc de
faire une analyse non plus seulement stratégique au sens de Crozier, qui
reconnaît la limite de la rationalité de l'acteur, encore moins
uniquement interactionniste c'est-à-dire qui centre l'analyse sur
l'interaction à travers les actions réciproques entre les acteurs
en présence, mais beaucoup plus une analyse par "l'interactionnisme -
stratégique" c'est-à-dire une analyse qui regroupe en même
temps l'interaction par les acteurs mais également le jeu et les
stratégies mis en place par ceux-ci pour construire une politique des
hydrocarbures au Cameroun. Il sera donc question de voir de manière
concrète comment l'Etat du Cameroun organise la politique de
distribution et de redistribution des produits pétroliers et de la rente
pétrolière. Cette partie s'articulera autour de deux chapitres
à savoir la fragilisation (I) et l'harmonisation (II).
Dans le premier chapitre consacré à la
fragilisation, bien évidemment de la logique administrative dans la
maîtrise du pétrole au Cameroun, il sera donc question de voir les
raisons et les incidences de cette fragilisation. Alors que le second chapitre
quant à lui sera consacré à la perspective d'harmonisation
pour rendre compte de la volonté de l'Etat de rationaliser la gestion
dans le secteur pétrolier au Cameroun.
CHAPITRE III : LA FRAGILISATION DE LA LOGIQUE
ADMINISTRATIVE DE GESTION DU PETROLE DANS LA MAÎTRISE DU SENS DES
POLITIQUES PUBLIQUES AU CAMEROUN
La maîtrise du sens de la gestion du pétrole au
Cameroun passe par certains pré requis. A cause de l'héritage du
système et la logique qu'on a toujours eu de cette ressource, il sera
difficile de détacher la réalité en terme de ce qui est
dans la pratique, et l'élaboration et la mise en oeuvre de l'appareil
politico administratif, et de ce qui devrait être en terme de la
rationalité de la mise en oeuvre d'une politique consacré
uniquement à cette ressource. Il est évident de part l'analyse
que nous avons mené au chapitre précédent que
l'élaboration d'une politique publique dépasse les
considérations du secteur privé (société, le plus
important ici étant bien évidemment de trouver une politique qui
va non seulement coïncider avec son environnement, mais satisfaire un
public. Ainsi pourrait-on affirmer sans risque de nous tromper que pour qu'une
politique devienne publique au sens complet du terme, il faudrait qu'elle
intègre ou plutôt tente d'intégrer les
« publics ». Elle doit avoir pour cible de départ un
public/une population bien précise. Toutes les stratégies mise en
oeuvre pour l'intégration de ce public pourraient à un
degré ou à un autre contribuer à la mise en oeuvre
efficace et efficiente d'une politique dans le secteur pétrolier, et
même participer du contrôle et de la maîtrise de la ressource
pétrolière ; mais cela n'est pas toujours le cas.
Dans ce chapitre il sera question d'analyser en toute
froideur, toute proportion gardée les éléments de la
fragilisation de la logique administrative dans la maîtrise du
pétrole au Cameroun en établissant le constat que, l'exclusion et
l'opacité dans le cadre de l'action publique dans le secteur des
hydrocarbures fragilisent le travail de l'administration camerounaise d'une
part (Section 1) et d'autre part on note une insatisfaction des personnes
vers qui la mise sur pied de la politique est destinée (section 2).
SECTION 1 : EXCLUSION ET OPACITÉ DANS LE PROCESSUS
D'ÉLABORATION ET DE MISE EN OEUVRE DE L'ACTION PUBLIQUE DANS LE SECTEUR
DES HYDROCARBURES
L'exclusion et l'opacité sont deux
phénomènes qui a notre sens fragilisent de manière
relative l'action publique dans le secteur des hydrocarbures au Cameroun, ce
qui pourrait traduire ici et dans une large mesure une mono
rationalité des systèmes d'action et de la logique
administrative. La décision nous renseigne dans le cadre de l'action
publique sur le modèle de fonctionnement d'un système. Elle est
un processus dont le résultat n'est pas inévitable et n'est pas
toujours intentionnel (Muller, Surel, 1998 : 103) ; c'est donc le
fruit des actions concrètes de marchandage et de partage d'idées.
Ce qui n'est pas toujours le cas, tout au moins de manière visible dans
le secteur pétrolier au Cameroun. Notre analyse dans cette section sera
le lieu de démonstration de l'importance de l'utilisation de l'approche
décisionnelle comme technique et même comme outil pour
l'administration publique et les décideurs. Mais le plus important sera
de mettre en lumière le sens de l'exclusion des autorités
publiques, aux publics cibles du processus d'élaboration et de mise en
oeuvre de la politique (Paragraphe I), puis par la suite voir comment cette
exclusion crée une opacité dans la gestion du secteur
pétrolier (Paragraphe II).
Paragraphe I : Des raisons de la fragilisation de la
capacité de l'Etat à maîtriser le sens de l'action
publique.
L'exclusion est un phénomène visible et opaque,
c'est pourquoi il faudrait s'appesantir sur elle ; en outre, elle suscite
des prises de décision et des attitudes individuelles et collectives qui
peut mettre à mal la prise d'une décision rationnel dans un
secteur ; c'est le cas dans le secteur pétrolier ou de
manière naturel ou exclu dans le processus d'élaboration, ce qui
nous amène à penser, l'exclusion est un phénomène
qui se situe au coeur de l'organisation structurelle des sociétés
contemporaines et de leur fonctionnement économique ; même si
cette notion est d'origine sociale, elle possède une dimension politique
et économique dont nous prendrions le soin d'examiner en notant une
marginalisation des acteurs concernés dans la phase d'élaboration
(A) et par la suite à travers une précarité technologique
dont fait état non seulement de nos populations mais également
les sociétés nationales pétrolières(B).
A- La marginalisation de
certains acteurs dans la phase de l'élaboration
Il faudrait considérer la décision comme un
processus, nous l'avons dit, mais qui ne devrait pas être établie
comme un acte isolé mais au contraire comme un flux d'arrangements
ponctuels pris à différents niveaux et dans tous les
sous-secteurs. Dans le secteur pétrolier au Cameroun, les entrepreneurs
du secteur privé expriment chacun des sentiments d'exclusion par rapport
à la gestion associé, mais également dans la gestion des
grands projets structurants liés au domaine pétrolier, l'exemple
ici est pris sur la plainte faite par plusieurs entrepreneurs et ONG sur la
gestion du projet d'oléoduc du Pipe line Tchad Cameroun lancée en
2001, et en particulier leur absence dans le comité de pilotage et de
suivie du pipeline (CPSP) sous la direction de la Société
Nationale des Hydrocarbures. Le secteur privé local se sent donc
ignoré par le projet soit en l'absence d'une communication viable et de
confiance, soit parceque les exigences de marché dépassent les
capacités des opérateurs ou encore parce que il n'existe pas de
structure susceptible de leur fournir l'appui institutionnel et financier
nécessaire pour les rendre aptes à les concurrencer.
La marginalisation de certains secteurs comme les
associations patronales est manifeste dans ce sens où ceux-ci ne sont
presque jamais consulté à la base ou au départ des grands
projets soit dans le secteur amont qu'aval ; le constat est que le
Président de la République en tant qu'institution, donne la
logique et le grand axe non seulement des réflexions mais aussi de
décision, ce qui ne permet pas une gestion rationnelle de la ressource
et même du secteur pétrolier. C'est d'ailleurs l'un des constats
que le groupe International Consultatif fait dans son rapport de mission au
Cameroun et au Tchad du 19 juillet au 3 août 2001 sur projet
d'exploitation pétrolier et d'oléoduc Tchad Cameroun ; de ce
constat, il en ressort qu'il y a manque de concertation entre le gouvernement
du Cameroun et le patronat, et que concernant toujours le projet il existait
une insuffisante concertation entre la COTCO, le gouvernement et le
patronat.
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