I-1-3 Les pachydermes
Le Cameroun est un pays qui regorge de nombreuses
potentialités sur le plan touristique, dû à un milieu
naturel qui contribue aussi au maintien de son équilibre
écologique. Parmi ces potentialités, il y a les parcs nationaux
(Waza, Bénoué, Bouba Njida, Kalamaloué et MozogoGokoro) et
les réserves forestières (Kalfou, Faro, Pangar et Djérem,
Kimbi, Dja, Douala-Edéa,
45 Augustin Herman
WAMBO-YAMDJEU, Michel HARVARD, Aboubakar NJOYA, Développer
l'agriculture irriguée pour consolider la sécurité
alimentaire au Nord-Cameroun ? Actes du colloque sur : (( Savanes
africaines : des espaces en mutations, des acteurs face à de nouveaux
défis », Garoua, 2002.
46 Bulletin sur le
criquet pélerin, N° 378, Mars 2010.
Campo et Lac Ossa). Les parcs entretiennent une faune
riche et variée qui assure au pays un attrait touristique certain et lui
permet de maintenir les espèces fauniques rares ou en voie de
disparition. Mais les activités économiques et l'installation des
hommes dans les zones avoisinantes sont régulièrement
perturbées par les incursions sporadiques des animaux qui y vivent,
entretenant ainsi des risques permanents de catastrophes. C'est le cas avec les
éléphants.
L'éléphant est un grand mamifère
herbivore pourvu d'une trompe et de défenses en ivoire. On distingue
l'éléphant d'Asie, celui d'Afrique de savane et celui d'Afrique
de forêt encore appelé « éléphant nain
». L'espèce de savane, la plus grande, peut mesurer
jusqu'à 4 m au garrot. Malgré leur poids
énorme47, les éléphants sont capables de se
déplacer silencieusement. Ils avancent à grandes enjambées
régulières et rythmées. L'épais coussin de tissu
élastique qui couvre le talon permet d'amortir les chocs à leurs
pas. Les éléphants marchent à la vitesse de 6 km/h, mais
peuvent charger à quelques 40 km/h. Lorsqu'on sait comment sont fragiles
et précaires les habitations dans les zones rurales des régions
de la savane, (cf photo cidessous) on peut dès lors se faire une
idée sur les conséquences possibles de leur déplacement
spectaculaire, suite logique de la massivité et de
l'énormité de cette espèce animale.
Des cases au village HOUMBAL Photo Alain Christian
ESSIMI BILOA
47 1,5 tonne chez
l'éléphant de forêt, 5 tonnes chez l'éléphant
d'Asie et 7 tonnes chez l'éléphant de savane
Plus intéressant encore, les
éléphants sont grégaires et très sensibles aux
appels et aux mouvements de leurs congénères. Ils forment
généralement des groupes familiaux de 15 à 30 animaux ou
plus, composés de femelles et de jeunes menés par une femelle
dominante plus ou moins âgée. Seuls les mâles, notamment
chez les éléphants d'Afrique, ayant atteint leur maturité
sexuelle, vivent en solitaires ou constituent des groupes temporaires. Les
éléphants circulent généralement sur des couloirs,
sorte d'itinéraires qui semblent être préalablement
établis.
Ils ne peuvent pas galoper ou sauter des
fossés, mais ils nagent aisément dans les fleuves ou les lacs.
C'est ce qui explique la possibilité pour les éléphants de
se mouvoir sur un territoire vaste, voire d'un pays à un autre,
même en franchissant les obstacles naturels tels les cours
d'eau.
Les éléphants ont un régime
exclusivement herbivore : ils se nourrissent d'herbes, mais aussi de bulbes, de
bourgeons, de bambous, de fruits, etc. Ils peuvent consommer, pour les gros,
jusqu'à 225 kg de végétaux et boire jusqu'à 190
litres par jour ! C'est dire combien peut être dévastateur leur
passage dans un champ. Les plus petits ingèrent tout de même
quotidiennement quelques 100 kg de produits végétaux. En raison
de leurs besoins importants, les éléphants consacrent environ 20
h par jour à la recherche de nourriture. Leur trompe est en outre une
véritable machine qui joue plusieurs rôles. Elle leur permet, en
effet, entre autres, de « foudroyer » des arbres et de
porter des objets lourds.
Impact de leur passage
Le passage des éléphants sème la
désolation et la famine le long de leur parcours, car ils
détruisent non seulement les cultures, mais aussi les greniers et
quelquefois les habitations. En 2009, aus mois d'octobre et de novembre, ce
sont les villages de l'arrondissement de BOGO (Ardjani, Do Yoldé, Hir A
Guewo, Liringo, Wouro, Mango, Dassingaré, Botchao ...) et du district de
Dargala (Tchabeyel, Maguirawo, Ouro-Souley ...) ainsi que d'autres villages le
long du couloir qui mène à Kaélé qui ont le plus
subi le contre-coup de la sortie des éléphants du parc ayant
entrepris de migrer vers le sud. On sait par ailleurs que les populations de la
zone de la savane du nord vivent de la céréaliculture qui
constitue la principale activité des paysans. Au mois d'octobre, les
graines de maïs, de mil ou de sorgho sont à leur phase de
mûrissement. On comprend dès lors l'impact du passage des
pachydermes dans les zones mises en valeur ou le déficit alimentaire
auquel les populations victimes auront à faire face. Selon les
autorités de Dargala, les dégâts causés se chiffrent
à 17,5 hectares de champs dévastés.
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