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Décentralisation et gestion durable des ressources forestières au Cameroun

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par Fernande Abanda Ngono
Université de Yaoundé2-Soa/Cameroun - Diplome d'études approfondies 2009
  

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Paragraphe II : LES RESPONSABILITES LIEES A LA GESTION DES REVENUS ISSUS DE L'EXPLOITATION FORESTIERE.

Les revenus tirés de l'exploitation forestière sont des fond publics, par conséquent en transférant leur gestion aux acteurs locaux, l'Etat se partage la responsabilité de la gestion transparente. En fait, la fiscalité forestière a pour principale objectif la compensation de l'utilisation commerciale de la forêt, elle doit donc nécessairement permettre aux populations de percevoir la matérialité de cette exploitation à travers le développement local. La loi prévoit à cet effet des modalités d'utilisation des revenus provenant de l'exploitation forestière et destinée aux communautés villageoises riveraines, ces modalités restaient assez floues en ce qui concerne le contrôle de l'utilisation de la Redevance Forestière par les communes, la loi du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées156(*) est venue clarifier certaines zones d'ombres concernant les communes en générales . S'agissant particulièrement des revenus forestiers une proposition de révision de l'arrêté conjoint N°00122/MINEFI/MINAT du 29 avril 1998 du Premier Ministre157(*), semble en faire une des préoccupations essentielles. Il s'agit de mettre en place des mécanismes158(*)de contrôle de l'utilisation des revenus forestiers par les communes. Toutefois n'ayant pas encore revêtu les modalités formelles et matérielles de promulgation nous ne l'évoqueront pas. En outre, les responsabilités concernent l'obligation de transparence (A) et des mécanismes de contrôle sont mis en place (B) pour l'apprécier.

A) L'obligation de transparence

L' « accountability » est un facteur essentiel d'efficacité dans la toute politique publique. Par conséquent, le transfert de compétence s'accompagnant de transfert de ressources, il faut nécessairement que les collectivités locales et l'Etat s'assurent de la matérialisation des objectifs de développement local. Ceci est encore plus vrai dans la gestion décentralisée des forêts où la responsabilité de gérer la rente forestière incombe à tous les acteurs. Un ensemble de mécanismes organisationnels sont mis sur pied pour favoriser une gestion transparente. Ces mécanismes imposés par la loi concernent la création de comités de gestion de la redevance forestière (1) et la sécurisation par l'Etat (2).

1- La sécurisation des recettes forestières par l'Etat.

La sécurisation des recettes forestières est une responsabilité de l'Etat ; c'est avec le décret N°99/370/PM du 19 mars 1999 qu'à été crée un Programme de Sécurisation des Recettes Forestières dit PRSF. Il s'agit d'un cadre de collaboration entre l'administration fiscale et l'administration forestière, chargé de contribuer à la mise en oeuvre de la stratégie gouvernementale dans le secteur forestier. Sa mission consiste à s'assurer que la politique forestière est bien mise en place et que les droits dus sont bien collectés. A ce titre, le programme est chargé de « maitriser l'évaluation des droits, redevances et taxes relatifs à l'exploitation forestière et en suivre les paiements, aider l'administration à lutter contre les fraudes fiscale et l'exploitation illégale des forêts, collecter les données fiscales et les rendre publics à la disposition des utilisateurs »159(*). Les procédures de payements ont évolués, passant du chèque au virement bancaire. Depuis l'année 2007, année de l'application des virements, les communes entrent plus rapidement en possession des revenus fiscaux.

Après la collecte et la sécurisation, les revenus forestiers doivent également être gérés dans la transparence. Plus précisément, ils doivent avoir une affectation particulière dans l'impulsion du développement, c'est là toute la responsabilité des populations, et du maire qui les représente.

2- L'exigence organisationnelle de gestion de la redevance forestière

Les comités de gestion des redevances forestière sont des assemblées paritaires instituées par l'arrêté conjoint MINEFI/MINAT du 29 avril 1998. Cet arrêté dispose que, « la gestion des revenus destinés aux communautés villageoises est assurée par un comité de gestion, ci-après désigné le Comité, institué auprès de chaque communautés bénéficiaires 160(*) ».

L'hétérogénéité des acteurs qui composent les comités affiche un certain souci de gouvernance. En effet, ils regroupent à la fois les autorités étatiques, les maires, la société civile, les représentants des sociétés d'exploitation, et les communautés villageoises. Leur création est constatée par acte d'une autorité administrative déconcentrée, en l'occurrence l'autorité administrative territorialement compétent. Les membres de la commission sont chargés de l'adoption des programmes d'action de leurs budgets respectifs. Ils sont également chargés de la répartition des ressources allouées aux projets, en fonction des priorités et des revenus destinés aux communautés villageoises. Ils se réunissent au moins trois fois tous les trois mois, sur convocation de leurs présidents. Les travaux sont ouverts aux personnes ressources et aux représentants des administrations techniques invités en raison de leurs compétences. Ils ne peuvent valablement délibérer qu'en présence de plus de la moitié de ses membres et les décisions sont prises à la majorité de ses membres.

Le maire est le président du comité, en tant qu'ordonnateur, il a la responsabilité de la gestion transparente de la rente forestière et donc de l'impulsion du développement local. L'affaire commune de YOKADOUMA161(*), montre que le maire est pénalement responsable de la mauvaise gestion de la rente forestière destinée à sa localité. Il est clairement précisé dans la loi que les revenus destinés aux communautés villageoises sont affectés exclusivement à la réalisation des oeuvres sociales en vue du développement des communautés bénéficiaires. Les oeuvres sociales concernent l'adduction d'eau, l'électrification, la construction d'infrastructures sociales au profit de la communauté. Par ailleurs, la responsabilité du maire incombe également aux populations, puisqu'elles l'ont désignée par le biais de l'élection. Le maire à donc la responsabilité morale et juridique d'impulser le développement à travers ces ressources. L'administration centrale a semblé peu préoccupée du contrôle de la gestion de la redevance forestière décentralisée162(*), ce qui a justifié l'insuffisance de mécanismes de rééditions de compte. On espère qu'avec la loi du 10 juillet 2009, qui prévoit le contrôle du budget et de la gestion des collectivités territoriales, ces modalités seront véritablement opérantes.

La responsabilisation dans la gestion des revenus s'apprécie véritablement à travers l'existence de mécanismes de contrôle.

B) Les mécanismes de contrôles de l'utilisation sociale des revenus issus de la forêt.

Les différents acteurs intervenants dans la gestion décentralisée des revenus forestiers sont tenus de rendre compte non seulement à la hiérarchie, mais aussi à ceux qu'ils représentent de la manière dont sont gérés ces revenus. Pour ce faire, le maire est tenu « de produire annuellement un compte administratif retraçant toutes les opérations de recettes et de dépenses effectuées. Ce compte est présenté au Comité pour adoption »163(*). Un commissaire au compte désigné par la communauté villageoise concernée est chargé du contrôle des opérations administratives, financières et comptables. Il est également chargé de la surveillance générale des livres et correspondances. Son rapport est adressé au Ministère chargé des finances, au Ministre chargé des forêts, au Ministre chargé de l'administration territoriale ainsi qu'à l'organe de l'Etat compétent en matière d'apurement des comptes. La loi portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées164(*) prévoit une diversité de contrôle. Il s'agit : du contrôle administratif effectué par les services spécialisés de l'Etat, et d'un contrôle juridictionnel effectué par la juridiction des comptes qui peut même effectuer des audits indépendants.

La question de la responsabilité pourrait même traverser les frontières, on peut en fait se demander si les collectivités locales seraient responsables de l'application locale du droit international à l'instar de l'Etat165(*). La réponse à cette question reste problématique. La législation forestière ne précise pas les modalités d'utilisation des revenus de la fiscalité décentralisées octroyés aux communes. Ce silence ne représente qu'un obstacle mineur face aux incomplétudes du cadre juridique de la gestion décentralisée des forêts.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Le souci de la durabilité et la prise en compte de l'aspect social sont des tendances majeures qui émergent de la législation forestière camerounaise. On voit bien que le souci du législateur dans la construction de la décentralisation de la gestion des forêts est d'abord la durabilité. Cet objectif transparait à travers l'octroie de compétence dans l'utilisation de l'espace et de la rente forestière conjugué à la consécration de la participation et de la responsabilisation. Toutefois au-delà de la nécessité d'adopter de nouvelles lois forestières, il faut avoir le souci de leur application effective. En effet, on se rend compte d'une distanciation normative et opérationnelle entre la politique forestière mis en place depuis 1994 et les lois de décentralisation de 2004.

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* 156 Loi N°2009/011 du 10 juillet 2009 portant régime financier des collectivités territoriales décentralisées

* 157 Correspondance N°B70/b/CAB/PM du 17 juillet 2009 portant feuille de route du MINFOF pour le second semestre 2009.

* 158 Voir RIBOT (J), op.cit P 13

* 159 Décret du 19 mars 1999 portant création d'un Programme de Sécurisation des Recettes forestières.

* 160 Article 4 de l'arrêté MINEFI/MINAT du 29 avril 1998

* 161 Dans cette affaire, ledit maire ABONO PAULIN a été interpellé et inculpé, et l'instruction de cette affaire suit encore son cours.

* 162 Au vue de la faiblesse du contentieux y relatif.

* 163 Article 8 al2 de l'arrêté conjoint.

* 164 Article 104 à 108

* 165 ROMI (R), «  Le problème d'effectivité du droit international de l'environnement : le rôle des entités locales » LES PETITES AFFICHES N°82 Juillet 1993.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld