II.8. Problèmes causés par la
présence des résidus d'antibiotiques
L'antibiotique destiné à l'animal est un
médicament au même titre que celui destiné à
l'homme; les deux sont soumis à une AMM, Autorisation de Mise sur
Marché, mais le médicament vétérinaire a une
exigence supplémentaire ; la fixation d'un temps d'attente. En effet,
l'utilisation d'antibiotique pourrait amener à une présence
anormale de résidus dans les denrées d'origine animale (FOLLET,
2007 ; BOULTIF, 2009). Il faut toutefois distinguer la notion d'inhibiteurs qui
correspond à un problème technologique et la notion de
résidus qui correspond à un problème de santé
publique (FABRE et coll., 2000). Les résidus d'antibiotiques dans le
lait peuvent causer des problèmes à deux niveaux :
- Hygiénique : toxicité des résidus pour le
consommateur
- Technologique : entrave la transformation industrielle du
lait
II.8.1. Problèmes sanitaires
Les services de santé publique se sont
inquiétés de la présence d'antibiotiques dans le lait et
les produits laitiers. Aujourd'hui, il est généralement reconnu
qu'il ne faut tolérer aucune trace d'antibiotique, aussi
légère soit-elle, dans le lait et les aliments destinés
à la consommation humaine (JEPSEN, 1962). Si les problèmes
potentiels liés à la présence de résidus
d'antibiotique ne doivent pas être exagérés, ils ne doivent
pas, non plus, être minorés.
1) Problèmes d'allergie :
En médecine humaine, l'allergie est un effet
secondaire reconnu des antibiotiques et en particuliers des
bêta-lactames, car ces dernières sont à la fois très
immunogènes et souvent utilisées. Cependant, compte tenu de
très faibles taux de résidus présents dans l'organisme,
comparés aux concentrations d'antibiotiques administrées lors de
traitement ou de prophylaxie, il est très improbable qu'ils soient
à l'origine d'une sensibilisation primaire de l'individu. D'autant plus,
lorsque les antibiotiques sont administrés par voie orale, ils subissent
des modifications qui tendent à diminuer leur pouvoir allergène
(BOULTIF, 2009). Les résidus de pénicilline en particulier
forment des complexes avec certaines protéines (albumines) par liaisons
covalentes, ils sont alors masqués par la structure tertiaire de
l'albumine et deviennent inaccessibles aux anticorps. Il est donc peu probable
que des dérivés significativement immunogènes puissent
être formés (CHATAIGNER et STEVENS, 2005).
Ainsi que, l'absolument que l'absorption de lait contenant de
la pénicilline peut provoquer des éruptions eczémateuses
rémittentes chez les personnes sensibilisées. Le malade
cité réagissait fortement à une dose de 15 unités
par jour, soit 500 ml de lait contenant 0.03 unité de pénicilline
par millilitre. Les réactions allergiques ont été
observées chez des personnes déjà sensibilisées,
avec la pénicilline par exemple, chez des sujets déjà
sensibilisées des doses de 0.03 UI/ml dans le lait peuvent être
suffisantes pour entraîner des réactions allergiques : urticaires,
dermatoses, prurit, choc, etc. (BOULTIF, 2009).
2) Risques toxiques :
La toxicité directe des antibiotiques est dans
l'ensemble extrêmement limitée, le cas de toxicité
potentielle fréquemment cité est celui du chloramphénicol
qui a été responsable d'anémies aplasiques chez l'homme
(liées à son utilisation en médecine humaine)
l'utilisation vétérinaire de cette molécule est
désormais interdite un peu partout dans le monde (BOULTIF, 2009).
3) Modifications de la flore digestive du consommateur
:
Dans le tube digestif vivent des milliards de
bactéries saprophytes et commensales, surtout des bactéries
anaérobies : bactéroïdes, fusobactérium (BOULTIF,
2009). La consommation de produits contenant des résidus d'antibiotiques
(cycline, sulfamides) perturbe cette flore intestinale en modifiant sa
composition par inhibition sélective : ils dévastent la flore
normale et laissent place à d'autres espèces telles que
Eschirichia coli, levures...etc (BOULTIF, 2009; ABIDI, 2004).
Cette inhibition sélective diminue l'immunité naturelle
préétablie, ce qui peut entraîner une atteinte du
système nerveux, des os, des dents (coloration des dents en jaune), du
foie, du sang (BROUTIN, 2005), ainsi que l'apparition de bactéries
mutantes résistantes aux antibiotiques, engendrant des échecs
thérapeutiques (BOULTIF, 2009).
4) Risques d'antibiorésistance :
Au cours des deux dernières décennies, les
agents pathogènes résistants aux antibiotiques sont devenus un
sérieux problème de santé publique. Une des raisons de
l'augmentation de cette résistance pourrait résider dans
l'utilisation préventive et thérapeutique d'antibiotiques en
production animale car les médicaments vétérinaires
contiennent en partie les mêmes matières actives qu'en
médecine humaine (BOULTIF, 2009). Les bactéries
résistantes sont potentiellement transmissibles à l'homme via les
denrées alimentaires (CHATAIGNER et STEVENS, 2005). L'apparition de
cette résistance peut être liée à des mauvaises
pratiques thérapeutiques (posologie inadaptée, fréquence
d'administration, non respect de la prescription...) (FABRE et coll., 2006 ;
CHATAIGNER et STEVENS, 2005) ou à l'utilisation des antibiotiques comme
facteurs de croissance, favorisant ainsi le développement rapide du
phénomène de la résistance bactérienne aux
antibiotiques (BOULTIF, 2009).
Il est important de préciser que la
problématique de l'antibiorésistance doit être
différenciée de celle des résidus d'antibiotiques. Ceux-ci
peuvent avoir des répercussions sur la santé des consommateurs
(allergies,...etc.) mais ne sont pas en cause dans le
développement de l'antibiorésistance. Par ailleurs, il faut
souligner que ce ne sont pas les animaux où les humains qui deviennent
résistants aux antibiotiques mais bien les bactéries qui les
affectent (FOLLET, 2007; BOULTIF, 2009). La Figure N° 1 illustre
clairement le réseau de transfert de la résistance aux
antibiotiques.
Figure 1 RESEAU DE TRANSFERT DE LA
RESISTANCE AUX ANTIBIOTIQUES (BOULTIF, 2009).
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