La répression de la torture en droit pénal international( Télécharger le fichier original )par Christelle SAKI Université catholique de l'Afrique de l'ouest - Maitrise 2008 |
B/Contrôle de la compatibilité des réservesDepuis l'arrêt Belilos du 29 Avril 198850(*) on peut affirmer que les réserves émises à propos des traités relatifs aux droits de l'homme obéissent à un régime spécifique puisque c'est l'organe chargé de supervision de l'instrument qui est admis à contrôler la compatibilité avec le but et l'objet poursuivi par l'instrument 51(*). Car le droit international des droits de l'homme diffère du droit international classique ; c'est un droit objectif qui au rang de droit international52(*). Et comme le reconnaît encore Mazyambo M. KISALA, les droits humains se réfèrent à l'identité universelle de la personne humaine53(*). Ils sont donc attachés par principe à la seule qualité de la personne humaine54(*). Les traités qui proclament les droits de l'homme ont ainsi pour finalité de créer pour les Etats des obligations absolues qui impliquent l'uniformité de conduite envers tous les individus se trouvant sous la juridiction des Etats parties55(*). Ainsi, ni l'entrée en vigueur d'une convention relative aux droits de l'homme à l'égard de l'égard de l'Etat auteur d'une réserve, ni l'appréciation de celle-ci et sa validité ne dépendent pas du consentement exprès ou tacite des autres Etats, mais plutôt de l'organe de supervision de ladite convention56(*). L'objection à une réserve d'un traité relatif aux droits de l'homme ne devrait produire aucun effet. C'est dans cette optique que s'inscrit la pratique du CDH. Dans son observation générale n°24(52) relatives aux réserves au pacte et à ses protocoles facultatifs, adoptée le 2 Novembre 1994 au cours de sa 52ème période de session57(*) le comité des droits de l'homme définit ce qui constitue les objets et les buts du pacte et de ses protocoles. En fonction de cela, il donne les caractéristiques que doit présenter toute réserve au pacte ou à ses protocoles, ce qui constitue des instructions précises tant aux Etats qui ont l'intention de formuler des réserves qu'à ceux qui l'ont déjà fait58(*). Cette position a été consacrée le 2 Novembre 1999 dans la jurisprudence Kennedy où le comité des droits de l'homme a invalidé la réserve de Trinité et Tobago relative à l'article 1er du premier protocole facultatif59(*). On espère que le comité contre la torture s'approprie ce procédé pour contrôler et juger de la compatibilité des différentes réserves faites par certains Etats parties. Il faut reconnaitre que le travail du comité contre la torture dans ce domaine, sera difficile, voire utopique en ce qu'il n'atteindra jamais le but. En effet, le principal obstacle à la mission du comité, celle de garantir la jouissance par les individus des droits énoncés dans la convention n'est pas à proprement parler une réserve qu'on peut contrôler facilement. En effet, la déclaration prévue à l'article 22 pour reconnaitre la compétence du comité à examiner des plaintes émanant des particuliers, est facultative. Un Etat peut adhérer à la convention sans faire cette déclaration. Elle apparaît comme un autre instrument qui n'est pas contenu dans la convention. Ce sont donc deux choses différentes : le texte de la convention et une déclaration facultative donnant la possibilité aux citoyens sous juridiction d'un Etat partie de se faire entendre par le comité en cas de violation des droits à eux reconnus par la convention, à l'instar du premier protocole facultatif par rapport au pacte international relatif aux droits civils et politiques. Profitant de cette possibilité de formuler des réserves, nombreux sont les Etats partie à la convention contre la torture, peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants qui ont soit formulé directement des réserves ou des déclarations soit se sont abstenus se faire la déclaration facultative de l'article 22, refusant ainsi des communications émanant des particuliers, vidant du coup l'essentiel des garanties contenues dans la convention. * 50 CEDH : arrêt Belilos du 24 avril 1988, série A, n°132, www.echcr.coe.int: c'est depuis cet arrêt que la cour a décidé de sanctionner elle-même les réserves considérées comme contraires à l'objet et au but de la convention ou trop générales. * 51 COHEN-JONATHAN, Gérard : op. cit P.209 * 52 Mazyambo, Makengo, KISALA, Loc. cit. * 53 Mazyambo, Makengo, KISALA, Ibid * 54 F. SUDRE, cité par M. M. KISALA, Ibid * 55 COHEN JONATHAN, Gérard, op. cit. p.209 * 56GOLSONG, H. Cité par Mazyambo, Makengo, KISALA, op. cit. p.10. il existe cependant des instruments relatifs aux droits de l'homme qui ont adopté des règles semblables à celles établies par la convention de Vienne. Tel est e cas des conventions relatives aux droits de la femme et à l'élimination raciale. * 57 Texte publié en anglaisdans la revue Human Rights Law journal, 1994, vol 15 n°11-12 pp.464-467 * 58 Mazyambo, Makengo, KISALA, op. cit. p.11 * 59 Pour un commentaire de cette jp, voy COHEN-JONATHAN, GERARD : la décision du comité des droits de l'homme des Nations Unies du 2 novembre 1999 dans l'affaire Kennedy c. Trinité-et-Tobago. Des réserves au premier protocole facultatif, pp. 209-217. |
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