WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

La responsabilité du banquier dispensateur de crédit

( Télécharger le fichier original )
par Aristide CHACGOM FOKAM
Université de Dschang - Master 2 en droit des affaires et de l'entreprise 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section2 : Les sanctions extrapatrimoniales : la déchéance des
sûretés

Les sanctions prescrites par l'article 118 de l'Acte Uniforme portant Organisation des Procédures Collectives et d'Apurement du Passif sont à juste titre impressionnantes. Il peut s'agir d'une condamnation au paiement des dommages intérêts, et d'une déchéance des sûretés. Cet article, bien qu'il donne la latitude au juge de choisir la sanction la plus appropriée, il peut aussi les cumulées. La mesure de ces sanctions doit attirer l'attention du pourvoyeur de fonds et l'amener davantage à plus de précaution.

La déchéance d'un droit peut être définie comme le fait de ne plus pouvoir en obtenir la reconnaissance en justice. Ainsi, on est déchu d'un droit lorsqu'on ne peut plus jouir de ce droit. Elle peut être le fait du temps, c'est-à-dire la non mise en oeuvre d'un droit pendant une période précise. Elle peut aussi être le fait d'une faute commise

155 Cf. LIENHARD (A.), Sauvegarde des entreprises en difficulté, 2°éd. Delmas 2007, p 470, n°2305.

156 Cass. Com. 16 octobre 2007, n°06-15.386 (arrêt n°990, F-D), Gaz. Pal. 23-24 janvier 2008, p 59, obs. ROUTIER (R).

postérieurement à la conclusion du contrat157 et c'est celle qui a été retenue par le législateur OHADA. Compte tenu de l'ampleur de cette sanction il est reconnu en la matière le principe « pas de déchéance sans texte. » Aucune déchéance ne peut être prononcée que si un texte le prévoit expressément.

La déchéance est donc une sanction prévue par le droit civil, qu'a reprise l'Acte uniforme sur les procédures collectives, l'alinéa 2 de l'article 118 de cet acte uniforme prévoit que « la juridiction compétente choisit pour la réparation du préjudice [...] soit la déchéance des sûretés pour les créanciers titulaires de telles sûretés ». Ainsi, le créancier banquier qui, ayant, consenti du crédit à son débiteur en contre partie d'une sûreté ou d'une garantie158, n'est plus fondé à se prévaloir de celle-ci du fait que le crédit ait été fautif. Cette déchéance provient du fait que, le banquier n'a pas pris toutes les mesures nécessaires avant d'octroyer le crédit.

La formulation du texte laisse croire qu'il s'agit d'une déchéance de plein droit qui, bien entendu, reste à la discrétion du juge. Il reste que le régime de cette sanction n'est pas prévu par la loi. Qu'adviendra-t-il si la sûreté a fait l'objet d'un commencement d'exécution ? Autrement dit cette déchéance a-t-elle des effets rétroactifs ?

C'est sans doute pour éviter de telles interrogations que l'article L650-1 du code de commerce français parle plutôt de nullité. Ainsi, si même la sûreté a reçu un début de commencement d'exécution, la nullité, par son effet rétro actif remettra les parties en l'état, c'est-à-dire on considèrera qu'aucune sûreté n'a été conclue entre le banquier et débiteur.

On aurait alors souhaité que l'acte uniforme fasse autant ou soit un peut plus explicite sur le régime de cette sanction somme toute importante.

157 Ainsi lorsque dans un contrat de prêt prévoit un remboursement par fractionnement de la dette et qu'une clause édicte qu'en cas de non-paiement d'une seule échéance l'emprunteur sera déchu du terme après une mise en demeure restée sans effet, cela signifie que, du fait de sa négligence, le débiteur a perdu le droit de se libérer par acomptes aux échéances prévues par le contrat et que, donc, la totalité des sommes restant dues au jour de la défaillance devient immédiatement exigible et en sa totalité. Le contrat n'est pas le seul domaine de la déchéance ; le Code civil a prévu les cas de déchéance de la nationalité camerounaise ou encore de la déchéance de l'autorité parentale sur leurs enfants mineurs et bien d'autres cas de déchéance.

158 Il peut s'agir du cautionnement, du gage ou encore de l'hypothèque.

CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE

Comme en droit commun, celui qui se plaint du mauvais concours du banquier doit pouvoir établir l'existence d'un préjudice et d'un lien de causalité. Il peut s'agir, d'un préjudice collectif inhérent à la masse dans les procédures collectives, ou d'un préjudice individuel qui est celui que se plaint un des créanciers mais extérieur aux procédures collectives. En jurisprudence, on assiste à une tendance visant à recevoir davantage l'action introduite par les tiers et beaucoup moins pour les personnes présentes à la convention de crédit, notamment l'emprunteur ou encore la caution interne. Cette tendance se justifie par le fait que l'emprunteur qui contracte connaît mieux que quiconque sa situation financière. Aussi est-il inadmissible qu'il vienne mettre en cause par la suite le banquier.

Toujours est-il que lorsque la responsabilité du banquier est reconnue, celui-ci peut être condamné au paiement des dommages intérêts ou à la déchéance des sûretés qu'il a consenties envers le débiteur. La mesure de ses sanctions parle d'elle-même et s'inscrit dans la mouvance consistant à considérer le banquier comme toujours solvable. L'innovation de l'article 118 de l'Acte uniforme réside toutefois dans la latitude laissée au juge de prononcer la sanction la plus appropriée et c'est à lui que revient au final la charge de trouver la juste mesure entre le banquier et ceux qui se plaigne de ces mauvais concours.

CONCLUSION GENERALE

Au terme de notre étude, il convient de constater que le contexte de difficulté des entreprises est parfois propice à la commission d'actes répréhensibles par le banquier dispensateur de crédit.

A l'analyse, cette responsabilité du banquier relève des règles classiques de droit commun, néanmoins elles conservent une certaine spécificité en raison du caractère professionnel de l'activité bancaire.

En effet, la responsabilité professionnel est à la fois plus stricte et plus souple que la responsabilité civile de droit commun. Elle est plus stricte dans la mesure où, on exige du banquier une diligence beaucoup plus étendue que celle d'un bon père de famille. On estime que s'agissant d'un professionnel, celui-ci dispose de plusieurs moyens, tant matériels qu'intellectuels, qui lui permettent d'éviter un grand nombre d'erreurs. Elle plus souple que la responsabilité du droit commun dans la mesure où il faut prendre en considération certains impératifs techniques et certains rapports privilégiés entre le banquier et ses clients. Pour concilier ses deux situations contradictoires les juges étendent le contenu des obligations qui pèsent sur le banquier.

Le banquier doit non seulement mettre à la charge du client les fonds promis, mais aussi s'assurer de la proportionnalité desdits fonds avec les ressources personnelles du client et lui donner au besoin les conseils nécessaires au bon déroulement des opérations. Il doit désormais, au regard de l'obligation de mise en garde attirer l'attention du client profane ou non averti sur les aspects négatifs de l'investissement projeté par le client. Il doit ensuite procéder à la surveillance des fonds sans toutefois s'ingérer dans les affaires de son client, au risque de se retrouver dirigeant de fait. Par ailleurs, il doit s'abstenir de fournir du crédit à une entreprise vouée à l'échec et dont la situation est irrémédiablement compromise.

Inévitablement, la responsabilité d'un établissement de crédit rend compte du paradoxe que rencontrent les banquiers dans leur profession. Ils peuvent, en effet, se voir reprocher un soutien sans discernement au profit d'un client dont la santé financière justifie une rupture précoce, alors même qu'ils sont soumis à une obligation de non-ingérence dans les affaires de leurs clients.

Malgré cette rigueur de la faute, on décèle des cas de limitation de la responsabilité du banquier. C'est notamment le cas lorsque le client est un emprunteur

averti. En pareille situation, la responsabilité du banquier est exceptionnellement ouverte, précisément lorsque le professionnel rapporte la preuve que le banquier avait sur l'investissement des informations que lui-même ignorait. Aussi, la responsabilité du banquier ne peut être retenue s'il démontre que son concours financier accompagne une perspective sérieuse de redressement. Dès lors, l'opportunité économique du crédit octroyé devient peu-à-peu, mais inexorablement, le critère d'irresponsabilité du banquier, et son inopportunité, un critère de responsabilité159.

D'un point de vue économique, cet état de chose peut justifier la frilosité des banques à traiter les difficultés des entreprises ayant recours au financement bancaire, surtout les jeunes entreprises. Ainsi, les petites entreprises, à la différence des grandes, se heurtent à un traitement financier plus défavorable de la part des banques. Pour PILLASKI160, celui-ci se traduit par « un coût de la dette plus élevé mais aussi par un risque de rationnement plus fort de la nouvelle entreprise ». Par ailleurs, les difficultés pour la banque d'identifier le risque ou la qualité de l'emprunteur sont plus importantes pour les jeunes entreprises, puisqu'elle dispose peu d'information sur les capacités managériales ou sur les opportunités d'investissements de celles-ci. On en déduit que le système actuel de responsabilité du banquier dispensateur de crédit n'est pas favorable au financement des entreprises. La France, consciente de cet enjeu a reprécisé les contours de la responsabilité du banquier dispensateur de crédit à travers la réforme intervenue le 18 décembre 2008161. La responsabilité de la banque y est désormais cantonnée à trois cas bien précis : l'immixtion, la fraude, et la garantie disproportionnée.

159Cf. MESTRE (J.), PUTMAN (E.), VIDAL (D.), Grands arrêts du droit des affaires, D 1995, n6, p. 437.

160 Cf. PILLASKI, « Le rationnement du crédit et PME : une tentative de mise en relation », Revue internationales P.M.E vol. N°3-4, pp. 67-68.

161 L'Ordonnance française n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 reformant le droit des entreprises en difficulté qui a procédé à un allègement de la responsabilité bancaire, a conduit certains auteurs à parler d'un « principe d'irresponsabilité du banquier ». La responsabilité bancaire est désormais cantonnée en France dans trois cas bien définis : à savoir les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur et de la disproportion dans la garantie des concours. L'article L. 650-1 du Code de commerce précise que «Lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contreparties de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci. Pour le cas où la responsabilité d'un créancier est reconnue, les garanties prises en contrepartie de ses concours peuvent être annulées ou réduites par le juge»

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault