1.1.6. Agriculture et développement rurale
Avant la modernisation de l'agriculture de
l'après-guerre, rural et agricole étaient quasiment synonymes :
le rural était perçu et vécu à travers
l'agriculture. Le développement rural n'était pas alternatif au
développement agricole, il lui était consubstantiel et faisait
référence à différentes activités dans un
même village23. Le terme développement rural s'est
d'ailleurs progressivement substitué à celui de vulgarisation
agricole jusqu'aux années soixante, le développement rural passe
donc par la modernisation de l'agriculture et se confond avec le
développement agricole, et bien il puise du sens dans le processus
d'industrialisation et son parallèle de modernisation de l'agriculture.
Ce processus conduit à l'exode rural et donne lieu à un
développement inégal entre urbain et le rural.
Ainsi, plus une région est rurale, plus elle est
sous-développée. Une politique de développement rural
vient se substituer à la politique structurelle, avec l'ambition de
réduire les déséquilibres et l'intention de faire des
zones rurales des lieux attractifs pour les urbains, de manière à
freiner le dépeuplement des zones fragiles et vulnérables. Il
s'agit entre autres de retenir à la campagne une population qui ne peut
plus être embauché en ville dans le secteur industriel.
23 PERRIN, L'agriculture dans le
développement des régions, pour n°83, 1984, p.13
Dans cet arrangement entre agriculture et développement
rural, les termes d'agriculture de services et d'exploitation rurale, introduit
par Pierre Muller, nous semble un bon référant. Le premier est
défini comme l'ensemble des pratiques économiques où
l'exploitant agricole utilise le patrimoine de l'exploitation pour
développer une activité de vente de services, soit liés
à l'agriculture, soit intégrés dans la logique
économique locale24. Dans cette définition, l'auteur
passe à celle d'exploitation rurale, considérée comme un
système où les différentes activités que
l'exploitant exerce ne sont pas juxtaposées mais imbriquées les
unes aux autres, se valorisant mutuellement.
1.1.7. Agriculture et environnement
L'environnement apparait dans le discours politique comme un
leitmotiv qui réfère autant à la préservation du
milieu, à la préservation d'un patrimoine commun, qu'à la
relance de la productivité. Le terme est en effet ambigu et chaque
discipline se le réapproprie, sans pour autant parvenir à
l'ériger en concept. Au niveau du discours agricole, il apparait comme
un levier dans la gestion du territoire et un passe-partout venant
légitimer de nouvelles stratégies économiques.
L'environnement envisage une reconnaissance, une
légitimité des formes locales d'agricultures jouant sur des
systèmes de production sousjacents à une région ; il met
en lumière les potentialités de ces systèmes non prises en
compte par le modèle global dominant. Concrètement, l'imbrication
agriculture-environnement ouvre sur une nouvelle conception de l'agriculture et
sur une conception du développement en harmonie avec les conditions
régionales. L'environnement et la gestion de l'espace pourraient ainsi
déboucher sur la légitimation de nouveaux modes d'appropriation
des ressources, voir de nouvelles manières d'utiliser les moyens de
production. Pour l'instant, comme le soulignent certains auteurs25,
l'agri-environnement
24 MULLER (Pierre), Vers une agriculture de services
in les problèmes économiques, n°2244, les
éditions Ouvrières, Paris, p.8
25 ALPHANDERY et BILLAUD, « L'agriculture
à l'article de l'environnement », Etudes rurales n°141-142,
p.9-19
constitue un observatoire sur les transformations des
fonctions de l'agriculture, sur l'usage des espaces et leurs conflits, sur les
rapports de partenariat, etc., un observatoire sur la possible mise en place
d'une nouvelle forme de développement.
|