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Les comportements sexuels et reproductifs des femmes vivant sous antirétroviraux au Cameroun

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par Moustapha Mohammed Nsangou Mbouemboue
Université Yaoundé I - Master en sociologie 2010
  

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I.1.2.Cas de restriction de grossesse chez les femmes

Lorsqu'une femme a un taux de CD4 inférieur à 500, ou lorsqu'elle présente des IO ou IST quelque soit son taux de CD4, il lui est proscrit pour l'heure de concevoir. A ce moment, elle se situe dans un stade d'immunodépression, stade délicat pour elle car, cet état peut entrainer sa mort soit avant, pendant ou après l'accouchement.

Pendant la grossesse,

Le taux des lymphocytes CD4 est partagé par moitié entre la femme et son foetus, c'est pour cette raison qu'il est proscrit à une femme n'ayant pas atteint au moins 500 de CD4 de procréer. Ainsi, la grossesse pourrait augmenter le risque de mortalité des femmes infectées par le VIH et inversement, l'infection pourrait accroitre le risque de décès maternel car, avec un faible taux de CD4, qui sera plus tard divisé par deux, une nouvelle grossesse contractée par une pvvih est une menace pour elle, et préjudiciable à sa santé.221(*) Nous a affirmé Madame EBALLE.

Une femme qui s'expose à une quelconque grossesse, court des risques de décès lors de l'accouchement laissant son bébé ou ses enfants pour celles qui en ont. Or, le Cameroun ne dispose pas assez de moyens pour s'occuper des OEV. Leur intégration sociale nécessite d'énormes moyens pour leur scolarité, leur nutrition, et leur santé. Ce refus de conception se justifie à deux niveaux, au niveau de l'enfant qui pourrait souffrir après la mort de sa mère, et au niveau de l'Etat qui pourrait être confronté aux difficultés d'insertion des OEV.

Ainsi,

Le problème est en partie financier. La pandémie est à la fois une cause et une conséquence de l'aggravation de la pauvreté dans le pays causée aussi par la dette extérieure qui(...) empêche les pouvoirs publics de remédier à la crise des orphelins 222(*)

C'est pour la sécurité de la mère et de son enfant que les professionnels de santé demandent à celle-ci d'attendre l'amélioration de son état de santé avant de concevoir. Une fois qu'elle a atteint le taux de lymphocytes requis, il lui sera présenté différentes possibilités des techniques de procréation sous TAR. Dans ce contexte, le désir d'enfant ne peut être résolu qu'avec l'adoption d'un enfant.

I.1.3. Différentes possibilités de procréation avec assistance médicale de la PTME pour les femmes à taux de CD4 élevé.

La procréation chez les femmes séropositives est conditionnée par une assistance médicale, en ce sens qu'elle dépend du statut sérologique des deux partenaires, du taux de CD4 de la femme et avant de concevoir, il leur est demandé de passer un certain nombre d'examens pré partum.

I.1.3.1. Procréation dans les couples concordants

Ici, il s'agit des couples dans lesquels les deux partenaires sont séropositifs. La procédure de procréation est particulière.

Dans la plupart des cas, lorsque les deux partenaires sont séropositifs, la grossesse est souvent déconseillée par les professionnels de santé à cause du risque que court l'enfant à venir en ce sens que, les femmes VIH sont susceptibles de développer des maladies mortelles liées au VIH223(*) pendant ou après la grossesse ; et même, la grossesse pourrait augmenter la mortalité des femmes infectées par le VIH et inversement, l'infection pourrait accroitre le risque de décès maternel. Généralement, dans ce cas, c'est l'adoption d'un ou des enfants qui est souvent recommandée.

Mais pour les partenaires qui désirent absolument faire un enfant, ils doivent impérativement passer par des examens de taux de CD4, de charge virale, le PU (pour le partenaire masculin) ou le PCV (pour la femme), puis les examens des IST.

Ensuite chez le partenaire masculin, un recueillement de sperme est accompagné d'un traitement ou d'un lavage dans un laboratoire dans le but d'obtenir la séparation des leucocytes infectés des spermatozoïdes, de les stériliser, et de détruire au maximum le nombre de virus contenu dans ce sperme car il contient les anticorps du VIH.

Quant à la femme, en dehors des examens qui lui sont recommandés à savoir, le contrôle CD4, de la charge virale, des IST, du PCV, la prise de température pour déterminer la période féconde. Puis, une insémination artificielle du sperme lavé est faite à l'aide d'une seringue (c'est-à-dire introduire ce sperme lavé dans le vagin de la femme pendant sa période féconde afin qu'il puisse avoir ovulation). Après l'insémination, la femme est placée immédiatement sous traitement pour celle qui ne l'était pas encore, mais pour celle qui suivait déjà son traitement, elle ne l'interrompt pas.

Cette méthode de procréation ne garantit pas toujours la protection de la transmission de l'enfant car elle ne détruit pas totalement les anticorps de VIH dans le sperme mais vise plutôt sa diminution à un pourcentage très bas224(*). C'est pour cette raison qu'avant d'y arriver les professionnels de santé veillent que les concernés aient une charge virale très faible voire même indétectable.

En 2000, sur 217 grossesses obtenues par insémination en Italie, seulement 172 enfants ont été découverts non infectés225(*). Ce qui revient à dire que lorsque les deux partenaires sont séropositifs les chances pour obtenir un enfant séronégatif sont réduites quelle que soit la méthode utilisée. C'est pour cette raison que dans certaines unités de prise en charge, il est souvent déconseillé à ces catégories de personnes de procréer.

Cependant dans les couples sérodiscordants, la méthode de procréation présente des éléments de différence.

I.1.3.2. Procréation dans les couples discordants

Les couples sérodiscordants sont des partenaires qui présentent des statuts sérologiques différents. Il peut s'agir d'un homme positif et d'une femme négative ou d'une femme positive et d'un homme négatif. A ce moment, les méthodes utilisées pour la procréation présentent des légères disparités.

Lorsqu'il s'agit d'un homme positif et d'une femme négative, les professionnels de santé procèdent également par insémination du sperme traité avec au préalable présentation des résultats des examens de la charge virale, du contrôle CD4, des tests d'IST, du PU. Ils peuvent également recourir à la fécondation in vitro (FIV) puis opérer au transfert d'embryon au lieu de procréer par insémination. Pour effectuer cette FIV, l'on effectue un prélèvement de sperme chez le sujet masculin, puis procède au traitement des ovules chez la femme afin de reproduire les conditions de fécondation en milieu stérile. L'embryon est par la suite transplanté dans l'utérus de la femme.

Une autre possibilité de fécondation chez les discordants (homme positif, femme négative) c'est permettre à l'homme, après avoir présenté les résultats de ses examens, d'entretenir des rapports sexuels non protégés le jour de l'ovulation. Mais cette méthode comporte trop de risques car quelle que soit la charge virale, le risque de contamination de la femme est réel étant donné que la morphologie sexuelle de la femme se présente comme un réservoir. Le sperme infecté va rester dans son « réservoir » et si elle a des lésions, elle sera infectée.

Lorsqu'il s'agit d'une femme séropositive et d'un homme séronégatif, la procédure de procréation est différente. Les examens de numération CD4, de charge virale, des IST, et le PCV sont recommandés chez la femme.

Lorsqu'elle présente un résultat de numération CD4 supérieur ou égal à 500 et une charge virale indétectable, le gynécologue leur demande d'entretenir des rapports sexuels non protégés uniquement pendant la période féconde et de continuer à se protéger après cette période. Le médecin autorise ces relations sexuelles non protégées à cette période parce que lorsqu'un séropositif présente une numération CD4 élevée, sa charge virale est indétectable, et le risque de contagion est réduit. Puis, il est recommandé à la femme de prendre un traitement ARV pré, per et post partum.

Dans le cas où une femme ne présente pas ces résultats ou a une numération CD4 inférieure à 500 alors elle présente des risques accrus pour la transmission du virus. A ce niveau, il y'a deux options :

soit le couple recourt à l'adoption des enfants ou s'ils insistent eux mêmes faire leurs enfants, le médecin met la femme sous traitement AZT si elle ne l'est pas encore avant qu'elle ne tombe enceinte puis, demande au couple d'entretenir des rapports sexuels protégés tout en utilisant un préservatif spécial qui ne contient pas des antiseptiques ensuite, on procède par insémination c'est-à-dire au recueillement du sperme du partenaire dans une seringue qui est introduite dans le vagin de la femme après le rapport sexuel. Ce rapport sexuel doit se déroulé au pic ovulatoire, affirme le DR YMELE FOUELIFACK226(*).

I.1.3.3. Pour les femmes séropositives déjà enceintes

Dans le cas où la femme découvre sa séropositivité déjà enceinte, la gestion de sa grossesse est toute particulière par le personnel médical. Selon le Dr YMELE FOUELIFACK,

Chez ces femmes déjà enceintes avant la découverte de leur séropositivité, la politique du Cameroun voudrait qu'elles soient placées à partir de la 28e semaine sous bithérapie pour baisser leur charge virale. Mais si elles présentent les signes cliniques, elles sont plutôt placées sous trithérapie. Lorsqu'elles entrent en travail, on évite que cette période ne soit longue parce que les contractions favorisent la transmission227(*) 

En général, chez toutes les femmes séropositives enceintes, un ensemble de précautions est pris de la grossesse jusqu'à la période post partum. Ainsi, les manoeuvres traumatiques qui peuvent favoriser le saignement sont évitées. Pendant le travail, le touché se fait chez ces femmes deux fois au lieu de quatre fois comme chez les femmes séronégatives.

Lors de l'accouchement, pendant la sortie vers la filière génitale, le personnel accoucheur nettoie l'enfant avec des antiseptiques comme le « Cytréal ou le Chlorexidine228(*) » pour diminuer le risque d'infection qui est de 10-20% pendant le travail et l'expulsion.

Après l'accouchement, l'enfant est mis sous traitement au plus tard dans les 72 heures qui suivent la naissance, ce qui dure 7jours pour l'AZT ou 1 mois pour la névirapine.

De manière générale, il est recommandé à ces femmes d'espacer les naissances pour permettre à leurs organismes de se régénérer. Ce qui les entraine dans une sorte de planification de naissance même sans le vouloir. Parmi les technologies de reproduction, les techniciens de soins recourent à la césarienne pour limiter la contamination. Une méthode qui présente assez de risques.

Ainsi, avec l'arrivée de l'AZT, des progrès de la PTME, les femmes séropositives parviennent à surmonter leur désir d'enfant car, c'était l'une de leurs préoccupations majeures. Mais seulement, les méthodes auxquelles elles sont confrontées ne leur permettent pas d'évacuer un certain nombre de contraintes qui sont d'ordre économique, affectif, familial, et culturel. Egalement, en temps de VIH, les grossesses ne se font plus de manière anarchique, il y a une planification des grossesses ou un espacement considérable pour permettre à la femme de remonter ses CD4 perdus lors de la précédente grossesse et l'allaitement. Cette avancée de la PTME se présente aussi au niveau de l'allaitement.

I.1.3.4. Traitement post partum des nouveaux- nés des femmes séropositives

Après la naissance du nouveau -né chez la femme séropositive, l'enfant est soumis à des consultations permanentes229(*) dans un centre de santé suivi d'un dépistage du VIH après 18 mois. Il lui est également administré un traitement prophylactique des IO à partir de 6 semaines de sa naissance, un traitement préventif du paludisme et un supplément en vitamine A et en fer.

Ce désir d'enfant au Cameroun est orienté par l'imaginaire social qui lui donne un certains poids social. Ce qui fait que toute femme qui veut exister socialement veut s'exprimer à travers sa maternité.

* 221 Entretien, août 2009.

* 222 G. NGEUKENG,  « Cameroun : les orphelins du sida ; la crise silencieuse », KNB-BIA supplément 459, coll. forum associatif tous ensemble, 2003, p.2.

* 223 Tuberculose ou pneumonie à pneumocystis carinii (pcp)

* 224 0,01%. Selon le Dr M. BOMIA, « Femme VIH et procréation. Formation des pairs conseillers ».

* 225 Ibid.

* 226 Entretien, septembre 2009.

* 227 Entretien, septembre 2009.

* 228 Désinfectants utilisés pour le nettoyage des nouveaux -né pour éviter toute infection au cours de l'accouchement qui peut être transmise par la mère. Dans la PTME ces produits sont très prisés car, ils permettent de réduire le taux de transmission lié à l'accouchement.

* 229 Dans le cadre de la PTME, pour réduire les risques de contamination du bébé, il est régulièrement suivi dans un centre de santé. Suivi au cours duquel, il a un calendrier spécial de vaccination :

-à la naissance, s'il est asymptomatique, il bénéficie d'un vaccin BCG, d'un polio oral. Apres 6, 10, 14 semaines, il prend un DTC coq+polio oral, un vaccin Hépatite B et Haemophiluis B. A 6 mois, il bénéficie d'un vaccin de Rougeole+vit. A puis à 9 mois, de l'Antiamarile, Rougeole, Hépatite B.

Mais lorsqu'il est à un stade symptomatique, à la naissance, il prend un polio oral, à 6, 10, 14 semaines, il bénéficie d'un DTC coq+polio oral, un vaccin Hépatite B et Haemophiluis B, à 6 mois d'un vaccin de Rougeole si son cas de déficit immunitaire est sévère +vit. A et à 9 mois Rougeole, Hépatite B.

A 18 mois, il passe à un diagnostic sérologique. S'il est positif ,on se réfère au TAR qui convient.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle