Les comportements sexuels et reproductifs des femmes vivant sous antirétroviraux au Cameroun( Télécharger le fichier original )par Moustapha Mohammed Nsangou Mbouemboue Université Yaoundé I - Master en sociologie 2010 |
I.1.3.2.Suivi mensuelUne fois que le patient a fait ses examens qui lui ont été prescrits et que les personnels de santé ont pu repérer les protocoles de médicaments qui cadrent avec son organisme, il obtient des rendez-vous mensuels dans son CTA ou son UPEC. Dans l'optique de s'assurer de la progression de leur état sanitaire et de leurs protocoles de médicaments, il leur est donné des rendez-vous mensuels. Ces rendez-vous sont programmés dans le but de vérifier l'aspect physique du malade (poids, mine, corpulence...). Aspect apparent qui donne des renseignements sur l'état interne du patient ; car si le patient a une mauvaise mine, perd le poids, le traitant peut changer le protocole de médicaments pour proposer celui qui est jugé plus adapté à l'organisme et au sous type de virus du patient. Cependant, dans le souci d'éviter toute rupture dans cette prise de médicament, les personnels de santé donnent des rendez-vous 3 ou 5 jours à l'avance, car une quelconque rupture ou interruption même momentanée, entraînerait la résistance du virus et par conséquent rendra le TAR nul. Au cours de notre enquête, nous avons assisté à quelques rendez-vous mensuels, nous avons observé que lorsqu'un patient est face à son traitant il commence par se faire peser pour que l'on sache si le traitement évolue, son poids est évalué par rapport à celui du mois précédent. Après cette prise de poids, on assiste de nouveau à une prise en charge psychosociale, car le malade dans sa carrière de maladie rencontre d'énormes difficultés d'ordre psychologique et social. Pour entrer en contact avec ces problèmes, le traitant, établit une conversation avec le malade au cours de laquelle, il écoute puis prodigue des conseils à ce dernier, et le rassure d'avantage en lui donnant toujours espoir. Le traitant s'illustre ainsi comme le meilleur confident du patient. C'est dans cette optique que madame EBALLE, affirme que : Nous sommes des confidents des malades, et pour cela nous devons nous montrer disponibles et utile. Parfois, je reçois des coups de fil à des heures très tardives lorsque certains malades m'appellent pour me parler de leurs problèmes. Ils me considèrent comme leur sauveur et pour cela, je suis obligée de les écouter, de les comprendre et d'essayer de proposer des solutions à leurs problèmes. Bref, ces PVVIH sont désormais ma famille.146(*) Toujours dans ce volet de suivi médical, pour se rassurer que le TAR correspond avec l'organisme du patient, un bilan semestriel lui est prescrit. I.1.3.3.Bilan semestrielC'est un contrôle général qui se fait tous les six mois. Contrôle au cours duquel tous les examens sont refaits au patient. Ce bilan permet d'avoir un renseignement sur le taux de lymphocytes CD4 et CD8, la charge virale, et l'état sanitaire général du patient. Il permet également de vérifier s'il y a eu échec thérapeutique. Echec qui peut se vérifier à trois niveaux147(*) : -au niveau des CD4 et CD8 si ceux-ci sont toujours bas et ne remontent pas. On parle à ce niveau d'échec immunologique. -au niveau de la charge virale si elle est encore élevée dans l'organisme à ce moment on parlera d'échec virologique. -au niveau de l'état général du patient s'il présente des maladies ou des infections .opportunistes, ici on dira qu'il y a échec clinique. Certains patients au cours de leur bilan général se découvrent porteurs des IO. Pour avoir toutes ces informations, un paquet d'examens est prescrit tous les six mois aux PVVIH ou lorsque celles-ci manifestent le désir d'enfant. Parmi le paquet des examens prescrits on peut citer les examens de charge virale, de contrôle CD4 et CD8 par la numérotation lymphocytaire CD4/CD8, des tests des IST, la numérotation formule sanguine (NFS), les transaminases hépatiques (ASAT, ALAT). Avec les progrès de la biologie et de la médecine qui ont mis sur pied des médicaments pouvant prolonger la vie des séropositifs, avec également la gratuité de certains de ces médicaments, le nombre de PVVIH devient de plus en plus croissant dans les points de traitement agréés avec plus de 53238 PVVIH placées sous TAR en juin 2008 contre 600 seulement en 2001148(*). Cette situation crée des stagnations des personnes séropositives dans leurs structures de prise en charge en raison de l'insuffisance du personnel de santé et du matériel pour la prise en charge. Ce qui participe à augmenter le stress chez ces personnes déjà vulnérables. En ce qui concerne la sous-dotation de certains services en ressources humaines149(*), cela se vérifie dans plusieurs CTA ou UPEC. Par exemple, à l'UPEC du CMPY, une seule infirmière major s'occupe de toutes les PVVIH ; elle est parfois aidée d'une assistante volontaire séropositive qui n'est pas toujours présente en raison du manque des frais de transport. Ce qui donne beaucoup de travail à cette infirmière et peut l'amener à interrompre parfois des suivis suite à une démotivation liée aux conditions de travail difficiles (charge de travail élevée, moyens techniques insuffisants). Aux CTA de l'HDJ et de l'HMY, nous avons plusieurs fois vu des personnes qui attendaient longuement leurs soins. Cette longue durée d'attente s'accompagne généralement des famines. Certaines personnes ne pouvant pas faire face à ces tares en raison de leur manque de moyens sont obligées de rentrer. Ce qui est souvent à l'origine de l'interruption des médicaments et des désertions (perdus de vue). Certains patients qui ont des moyens financiers, nouent des relations avec les personnels de santé au point où lorsqu'ils arrivent, ils sont aussitôt servis et reçoivent même parfois des médicaments pour une durée plus longue. Au CTA, nous avons vu une femme recevoir des médicaments pour une durée de deux mois parce qu'elle avait des rapports personnels avec le Capitaine-médecin pharmacien en charge de distribution de médicaments. Or, dans les principes, les médicaments donnés aux PVVIH sous TAR devraient couvrir une période de 30 jours renouvelables autant que possible. Ce qui permet à la personne suivie de se présenter à son traitant tous les mois afin que celui-ci puisse se rassurer du bon déroulement des soins. Dans le cas où la PVVIH reçoit les médicaments pour une longue période, c'est en sa défaveur en ce sens qu'elle peut avoir des problèmes entre temps et son traitant ne sera pas au courant pour demander l'interruption ou changer le protocole. Certains patients qui n'ont pas de moyens ou des relations particulières avec les personnels de santé sont parfois angoissés lorsque la période de rendez-vous arrive ou lorsqu'ils doivent aller faire des examens de bilan. Rosita du CEAM à ce titre a attesté que : Lorsque je pense que je dois aller faire mes examens, je suis très mal à l'aise. C'est toute une journée que je sacrifie parce qu'on arrive à l'hôpital très tôt le matin pour être reçu au plutôt à partir de 13 heures 30. Quand je dois faire mes examens, je demande une permission deux jours avant à mon patron. Il m'appelle même déjà madame permission. Mais je ne lui donne pas exactement la raison. Il sait simplement que je continue mes études supérieures150(*). Une autre difficulté est celle de l'approvisionnement. En raison du nombre croissant des PVVIH sous TAR, les personnels de santé font généralement face à des ruptures de stock en ARV et des réactifs pour les examens de CD4. Ce qui a un impact négatif sur l'observance au traitement des patients, directement du fait de l'absence des médicaments et indirectement du fait du système lui-même qui n'incite pas les patients à respecter les prescriptions151(*). De manière générale, les facteurs liés à l'offre de soins de qualité retardent le démarrage du TAR et influencent sur l'observance du patient. Dans ce role de prise en charge, les structures sanitaires associent également les associations des PVVIH non seulement pour rendre actives les personnes déjà infectées mais aussi pour les prendre comme des témoins de la maladie. * 146 Entretien, septembre 2009. * 147 SIDA : un glossaire, mise à jour, juillet 2005, Act up, Paris, p.36. * 148 ARNS, op. cit. p.2. * 149 Manque de médecins, infirmiers qualifiés, et assistants sociaux. * 150 Entretien, février 2009. * 151ARNS, op. cit., p.12. |
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