3.3.2. Pollution par les différentes formes
d'azote
L'élément azote existe principalement sous forme
ionique (ammonium NH4+, nitrite NOj et nitrate NO3-)
ainsi que sous forme gazeuse (N2). L'origine de ces polluants est par
ordre décroissant : l'utilisation massive des engrais, le
développement industriel et le rejet des eaux résiduaires
urbaines. Nos eaux usées contiennent de l'azote organique et de l'azote
ammoniacal. L'azote organique est un élément constituant des
cellules vivantes : végétales ou animales. L'azote ammoniacal NH4
+ provient de la décomposition de l'azote organique par les
bactéries et des rejets directs des êtres vivants (urines,
excréments).
Les nitrites NO2 - proviennent de la dégradation de la
matière organique et de l'oxydation de l'azote ammoniacal :
Les nitrates NO3 - sont le résultat final de l'oxydation
de l'azote ammoniacal :
L'azote gazeux N2 est très présent dans l'air
(70%), et peut être soluble dans l'eau ; ce sont les bactéries
dénitrifiantes qui permettent la transformation finale de l'azote
organique en azote gazeux.
Les ions NH4 + et NO2 - sont très toxiques pour la
faune aquatique et posent des problèmes pour la santé publique.
Ils induisent une prolifération bactérienne dans les eaux. Par
contre, les nitrates NO3 - sont la principale source d'inquiétude. Ces
ions se transforment en milieu acide faible en ions nitrites qui sont toxiques
pour l'organisme humain. Les nitrates constituent aussi un agent fertilisant
susceptible de favoriser le développement excessif des algues dans le
milieu aquatique (Sandrine Cabrit, 2008).
3.4. Pollution urbaine
Ce sont les eaux usées des habitations et des commerces
entraînent la pollution urbaine de l'eau. Les polluants urbains sont
représentés par les rejets domestiques, les eaux de lavage
collectif et de tous les produits dont se débarrassent les habitants
d'une agglomération notamment des rejets industriels rejetés par
de petites entreprises. Le flot déversé est très variable
en fonction de l'importance de l'agglomération et de son
activité.
Le «tout à l'égout» est une expression
significative, elle exprime cette diversité. On trouve les
excréments, les restes d'aliments, les déversements d'abattoirs,
les déversements hospitaliers, les lessives, les détergents, les
insecticides, les hydrocarbures, les déchets de la petite industrie et
divers produits toxiques.
3.5. Pollution agricole
L'agriculture, l'élevage, l'aquaculture et l'aviculture
sont responsables du rejet de nombreux polluants organiques et inorganiques
dans les eaux de surface et souterraines.
Ces contaminants comprennent à la fois des
sédiments provenant de l'érosion des terres agricoles, des
composés phosphorés ou azotés issus des déchets
animaux et des engrais commerciaux, notamment des nitrates.
3.5.1. Utilisation des engrais en agriculture
La modernisation de l'agriculture et son intensification ont
été généralement accompagnées d'une
utilisation abusive et non rationnelle des engrais azotés. Par exemple,
les zones irriguées marocaines qui ne représentent que 10
à 12% de la superficie agricole totale reçoivent plus de 50%
d'engrais utilisés au Maroc. Il est admis qu'une fertilisation
minérale se solde par un accroissement des rendements mais les doses
élevées appliquées.
Généralement supérieures aux besoins
réels des cultures, génèrent des excès d'azote qui
peuvent entraver la production agricole par plusieurs mécanismes et
polluer l'environnement.
3.5.2. Utilisation des pesticides en agriculture
Les pesticides sont utilisés en agriculture pour
protéger les cultures et les récoltes contre leurs ennemis afin
d'augmenter les rendements. Les pesticides importés, prêts
à l'emploi, représentent 87% du marché phytosanitaire au
Maroc, alors que ceux produits localement ne représentent que 13% du
volume global annuel. Le lessivage de ces produits phytosanitaires
utilisés en agriculture entraîne la contamination des eaux par des
substances toxiques (pesticides). On estime que 0.5 à 1 % des produits
phytosanitaires rejoignent les cours d'eau (Ministère de
l'Environnement, 2001).
3.6. Pollution industrielle
Les rejets liquides industriels véhiculent une importante
pollution organique et toxique.
Il s'agit de différents déchets provenant des
industries diverses qui sont principalement installées au niveau du
rivage à la fois pour se débarrasser des déchets
directement et pour faire refroidir leurs machines (Industrie alimentaire,
Industrie agricole, Tannerie et textile, Papeterie, Industrie physique,
Industrie chimique, Industrie pétrochimie).
Au Maroc par exemple, si aucune mesure de réduction des
flux polluants n'est prise, on estime qu'en 2020, la pollution
véhiculée par les rejets liquides industriels sera de l'ordre de
220000 tonnes de phosphore et 1200 tonnes de chrome (Rapport sur
l'état de l'environnement du Maroc (2001).
Ce type de pollution peut avoir un effet toxique sur les
organismes vivants et nuire au pouvoir d'autoépuration de l'eau, ou
causer l'accumulation de certains éléments dans la chaîne
alimentaire (métaux, radioactivité, etc.).
L'impact des rejets industriels sur la qualité de l'eau
est fonction de leur affinité avec l'oxygène, de la
quantité de solides en suspension, et de leurs teneurs en substances
organiques et inorganiques. Dans le meilleur des cas, une première
étape d'épuration se fait sur le site même de production,
le reste des eaux usées étant ensuite dirigé vers les
systèmes de traitement municipaux. Malheureusement, pour de nombreuses
unités de production, les eaux usées retournent dans un cours
d'eau sans traitement préalable, ou insuffisamment assainies.
Généralement, les différents types de
pollution sont mélangés et agissent les uns sur les autres. En
effet, un rejet n'est jamais une source unique et un égout rejette des
déchets de différentes natures.
En définitif, la pollution des eaux par les
matières organiques est un problème mondial dont les aspects et
la portée sont évidemment différents selon le niveau de
développement des pays. Il importe que les concentrations des produits
polluants soient les plus faibles possibles. La prévention est donc
essentielle et repose sur les 3 aspects suivants :
- L'aspect réglementaire qui consiste à
fixer des normes
- L'aspect sanitaire comporte en particulier le
contrôle technique des installations
- L'aspect scientifique et technologique enfin
correspond à l'amélioration des procédés de
dépollution.
Malgré tout il reste encore beaucoup de travail
à faire notamment en ce qui concerne les effluents des industries
textiles. Ces rejets font partis des eaux usées les plus mal
traitées et sont caractérisés par de fortes colorations,
de fortes variations de pH, de fortes demandes chimiques en oxygène
(DCO) et bio toxicité accrue à l'égard des
bactéries (Arslan, 2001 ; Walker et Weatherley, 2001).
4. Les principaux polluants :
Les phénomènes de pollution des eaux se
traduisent par des effets particuliers liés aux
spécificités écologiques propres aux milieux aquatiques.
En effet, l'eau peut dissoudre, souvent avec facilité, de nombreuses
substances chimiques et biologiques. Par conséquent, tout polluant peut
être véhiculé fort loin de la source de contamination. La
problématique des déchets présents dans l'eau peut
être abordée de plusieurs façons, qui donnent chacune lieu
à une classification différente. Ainsi, les impuretés
peuvent être identifiées suivant qu'elles soient vivantes ou
inertes, minérales ou organiques, solides ou dissoutes. D'autres
techniques de classification sont basées sur leur dimension, leurs
degrés de toxicité,...
Parmi les principaux polluants on peut distinguer les suivants
:
· Les matières organiques : constituent,
de loin, la première cause de pollution des ressources en eaux. Ces
matières organiques (déjections animales et humaines,
graisses,...) sont notamment issues des effluents domestiques, mais
également des rejets industriels (industries agro-alimentaire, en
particulier). La pollution organique peut être absorbée par
le milieu récepteur tant que la limite d'auto-épuration n'est pas
atteinte.
· Les éléments minéraux :
regroupent essentiellement les produits azotés ainsi que les
produits phosphorés. Ces matières proviennent principalement des
activités agricoles. La pollution minérale des eaux peut
provoquer le dérèglement de la croissance végétale
ou des troubles physiologiques chez les animaux.
· Les métaux lourds : les plus
fréquemment rencontrés mais qui sont aussi les plus dangereux
sont le mercure, le cuivre, le cadmium, le chrome, le plomb et le zinc. Ils ont
la particularité de s'accumuler dans les organismes vivants ainsi que
dans la chaîne trophique. La pollution radioactive peut avoir des effets
cancérigènes et mutagènes sur les peuplements
aquatiques.
· Les matières pathogènes : sont
constituées de virus et bactéries entrainant souvent une
inhibition des mécanismes biologiques. La pollution micro-biologique se
développe conjointement à la pollution organique, par une
prolifération des germes d'origine humaine ou animale dont certains sont
éminemment pathogènes.
· Les substances toxiques : sont des
composés chimiques de synthèse, issus des activités
industrielles et agricoles. Les conséquences souvent dramatiques de la
pollution chimique sur les écosystèmes, varient suivant la
concentration de composés dans les rejets.
20 Introduction aux procédés biologiques de
traitement des eaux
· Les hydrocarbures : provenant des industries
pétrolières et des transports, ces composés chimiques sont
des substances peu solubles dans l'eau est difficilement biodégradables.
Leur densité inferieur à l'eau les fait surnager et leur vitesse
de propagation dans le sol est 5 à 7 fois supérieure à
celle de l'eau. Ils constituent un redoutable danger pour les nappes
phréatiques.
Une autre classification très importante est
fondée sur le pouvoir de dégradation des déchets
polluants. On distingue ainsi deux classes principales :
· Les matières biodégradables :
affectées par les activités biologiques des microorganismes,
ces substances sont soumises aux divers processus biochimiques de conversion.
Cette fraction biodégradable peut être structurée en deux
groupes :
- Les matières aisément
dégradables, composées des substances solubles, ces
matières ont la caractéristique de pouvoir être directement
absorbées par les bactéries.
- Les matières lentement dégradables,
composées des substrats particulaires formés par un
mélange de substances organiques solides, colloïdales et solubles.
Ces matières sont soumises à certains processus
intermédiaires avant d'être absorbées par les populations
bactériennes.
· Les matières non-biodégradables :
ces substances inertes ne subissent aucun phénomène
biologique de transformation. Ces matières sont soit présentes
dans les eaux résiduaires, comme les métaux lourds, soit issues
des phénomènes de mortalité des micro-organismes au cours
des processus biologique d'épuration. Les composants
non-biodégradables solubles peuvent traverser la station
d'épuration sans être modifiés mais les matières
inertes en suspension peuvent être éliminées par des
mécanismes de décantation.
La structure chimique des polluants permet de distinguer deux
types de composés :
· Les matières organiques : elles sont
constituées d'un grand nombre de composés qui ont la
particularité commune de posséder au moins un atome de carbone,
d'où leur nom de substance carbonées. Ces atomes de carbone sont
oxydés biologiquement par les microorganismes pour fournir
l'énergie nécessaire à leur croissance.
· Les matières inorganiques : sont des
substances ne contenant pas de carbone. La fraction minérale des aux
résiduaires représente principalement les produits azotés
et phosphorés.
5. Conséquences de la pollution :
Les conséquences d'une pollution peuvent être
classées en cinq catégories principales.
5.1. Conséquences sanitaires :
Les conséquences sanitaires sont donc celles à
prendre en compte en priorité.
Elles peuvent être liées a l'ingestion d'eau, de
poissons, mais aussi au simple contact avec le milieu aquatique (cas de
nombreux parasites).
A noter qu'il ne s'agit pas toujours de problèmes de
toxicité immédiats, les conséquences sanitaires pouvant
intervenir au travers de phénomènes complexes.
La conséquence sanitaire dune pollution est variable
dans le temps en fonction de l'usage de l'eau : par exemple, la pollution d'une
nappe non exploitée n'a aucune conséquence sanitaire
immédiate, mais peut en avoir longtemps après si on utilise cette
eau pour l'alimentation en eau potable.
5.2. Conséquences écologiques :
C'est-à-dire qui ont trait a la dégradation du
milieu biologique. Les conséquences écologiques se mesurent en
comparant l'état de milieu pollué par rapport à ce qu'il
aurait été sans pollution.
Ceci n'a rien d'évident, la pollution se traduisant
parfois uniquement par l'accentuation d'un phénomène naturel.
D'une manière générale, les
conséquences écologiques sont à considérer au
travers de la réduction des potentialités d'exploitation du
milieu à courts et longs termes. Dans certains cas, la conservation du
milieu à l'état naturel peut être aussi choisie comme un
objectif en soi.
5.3. Conséquences esthétiques :
On peut inclure, dans cette catégorie, les
problèmes de gout de l'eau. Les conséquences esthétiques
sont, par définition, les plus perceptibles, et c'est donc celles dont
les riverains et le grand public auront, en premier, conscience.
On peut également distinguer deux autres
conséquences liées à l'utilisation de l'eau comme
produit.
5.4. Conséquences industrielles :
L'industrie est un gros consommateur d'eau : il faut par exemple
1 m3 d'eau pour produire 1 kg d'aluminium.
La qualité requise pour les utilisations industrielles
est souvent très élevée, tant sur le plan chimique
(minéralisation, corrosion, entartrage), que biologique
(problèmes de biofouling, c'est- à - dire d'encrassement des
canalisations par des organismes).
Le développement industriel peut donc être
stoppé par la pollution.
5.5. Conséquences agricoles :
L'eau est, dans certaines régions, largement
utilisée pour l'arrosage ou l'irrigation, souvent sous forme brute
(non traitée).
La texture du sol, sa flore bactérienne, les cultures
et le bétail, sont sensibles à la qualité de l'eau. De
même, les boues issues du traitement des eaux usées pourront, si
elles contiennent des toxiques (métaux lourds) être
à l'origine de la pollution des sols.
Conclusion
Dans ce qui précède, nous interrogeons le cycle
urbain de l'eau, avec un point d'entrée particulier.
L'enjeu que nous mettons en avant est en effet le
renouvellement et la mise à niveau des équipements requis par le
« cycle urbain de l'eau classique ». Plus que la question de la
ressource, c'est cette question du coût des équipements qui impose
de nouvelles approches. Il sera donc de plus en plus nécessaire, y
compris en France et à l'image de ce qui se fait aujourd'hui dans de
nombreux pays, de coupler les différents types d'eaux et d'usages, avec
toute la maîtrise technique et l'organisation que cela implique. Le cas
du plateau de Saclay est emblématique puisqu'il fait partie des secteurs
de développement de la métropole parisienne ; or, même si
la ressource elle-même n'y fait pas défaut, son urbanisation
semble impossible sans une approche alternative de l'ensemble du cycle de
l'eau.
Des simulations sur une année montrent que
l'utilisation d'eaux pluviales et d'eaux grises traitées peuvent
diminuer de 50% les volumes d'eau à gérer en aval des villes. De
plus, ce volume restant peut être en partie géré in situ en
arrosage - irrigation. Un autre domaine est concerné de facto
par cette approche : celui du cycle de la matière organique et des
nutriments. Ce cycle peut en effet être lui aussi « raccourci »
(voir notamment Vinneras, 2001).
Les boues d'épuration de grandes agglomérations
parcourent des dizaines de kilomètres dans les réseaux et y sont
contaminées par des métaux lourds issus du ruissellement ; des
cycles plus courts évitent ces contaminations, rendent possibles une
valorisation des nutriments (compost) et réduisent le bilan
carbone. Séparées à la source et utilisées en
irrigation, les urines, stériles, échappent aussi aux
kilomètres de réseaux et sont valorisées pour leurs
nutriments. Le domaine de l'eau se trouve ainsi couplé à celui
des matières solides... et de l'énergie, comme on l'a vu avec
l'exemple du saule en bois-plaquette. L'ensemble « cycle de l'eau -
cycle des matières - énergie » peut être un
tremplin pour diminuer les coûts et réduire l'empreinte
écologique globale de nouveaux quartiers.
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CHAPITRE
N°02
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