§2. De la
nécessité de l'harmonisation des législations nationales
de répression de la circulation illicite des ALPC des Etats de l'Afrique
centrale
L'une des causes majeures qui font échouer la lutte
contre la circulation illicite des ALPC est la différence des
législations nationales. Il serait donc souhaitable que les pays de la
sous-région procèdent à une harmonisation des
législations. Une harmonisation à deux ou à trois, comme
semble être la tendance aujourd'hui, est faible et laisse des failles que
pourraient exploiter les trafiquants. Par contre, une harmonisation qui
regroupe, autour d'une même table, tous les Etats de la
sous-région, est efficace. Il revient par conséquent à la
CEEAC d'organiser une conférence sous-régionale sur
l'harmonisation des législations nationales.
§3. De la
nécessité d'un traité portant sur l'extradition entre
Etats de l'Afrique Centrale
L'extradition reste la procédure d'entraide
répressive internationale par laquelle un Etat appelé
requis accepte de livrer un délinquant
qui se trouve sur son territoire à un autre Etat ; l'Etat
requerrant , pour que ce dernier puisse juger cet
individu ou s'il a déjà été condamné, pour
lui faire subir sa peine.
A. Les conditions
générales d'extradition
L'extradition est généralement soumise au
respect de plusieurs règles.
C'est ainsi qu'il faut:
1. l'existence d'un accord d'extradition avec respect du
principe de spécialité
2. l'existence de la clause de réciprocité
3. la qualité d'étranger car ; pour le
national ; son juge naturel est le juge de l'Etat dont il est le
citoyen
4. la présence de l'inculpé sur le territoire de
l'Etat requis
Aussi l'extradition ne pourra pas être accordée
si l'auteur de l'infraction a déjà été poursuivi
pour les mêmes faits. C'est l'application sur le plan international du
principe ne bis in idem (ou non bis in idem.
La doctrine accepte que soit de même en cas
d'amnistie,
d'infraction politique (celles commises lorsqu'on mène une
lutte pour changer l'ordre politique dans son
pays), militaire ou punie de la peine
capitale.
B. Nécessité
d'adaptation des conditions d'extradition
Considérant la situation actuelle en Afrique Centrale
et la circulation illicite des ALPC qui y règne, deux d'entre les
conditions d'extradition sont inadaptées à l'évolution
contemporaine de la lutte contre la criminalité dans cette sous
région. Il s'agit de la condition de la double incrimination.
La
double incrimination
L'exigence de la double incrimination est l'une des
règles générales appliquées à l'extradition.
Si l'on apprécie de manière extensive cette notion, on peut en
déduire qu'elle a une double portée : elle signifie tout
d'abord que l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée doit
exister aussi bien dans l'ordre législatif de l'Etat requis que dans
celui de l'Etat requérant. Elle signifie ensuite que cette infraction
doit avoir un certain degré de gravité pour pouvoir justifier
l'extradition.
Des difficultés peuvent surgir dans la mise en oeuvre
de ce principe de la double incrimination, compte tenu des divergences qui
existent entre les législations des Etats membres. Il peut arriver que
l'infraction pour laquelle l'extradition est demandée n'existe pas dans
l'ordre juridique de l'Etat requis, du moins sous la même qualification.
Certaines autorités face à cette situation rejettent la demande
d'extradition. Pour elles, « double
incrimination » signifierait « incrimination
identique ». Mais, cette attitude est fustigée par la
doctrine dominante. Pour elle, la double incrimination doit être
appréciée de manière abstraite. Le fait pour lequel
l'extradition est poursuivie doit être transposé au niveau de
l'Etat requis pour voir s'il n'y a pas d'infraction correspondante. Ce n'est
que dans les cas où ce comportement reproché ne tombe sous le
coup d'aucune incrimination dans l'Etat requis qu'on pourra conclure que la
condition de la double incrimination n'est pas remplie. Cette position est
corroborée par la jurisprudence suisse qui affirme que, pour le constat
de la double incrimination en matière de corruption d'un fonctionnaire
« les faits reprochés à la personne poursuivie
à l'étranger doivent être transposés, dans la mesure
nécessaire et selon leur sens, pour juger de leur punissabilité
selon le droit interne de l'Etat requis, en se fondant sur l'hypothèse
que les actes auraient été commis sur le territoire de cet Etat
ou mieux encore, qu'il seraient soumis à la juridiction de cet
Etat.
Cette approche ainsi décrite permet d'avoir une
appréciation extensive de la règle de la double incrimination.
Mais, d'autres difficultés peuvent être soulevées :
qu'arriverait-il si les faits reprochés violent sévèrement
l'ordre public interne de l'Etat requérant alors qu'ils ne correspondent
à aucune infraction dans le droit interne de l'Etat requis ? Cette
violation doit-elle rester impunie au nom du principe de la double
incrimination ? C'est sur la base de ces interrogations que nous militons
en faveur de l'abolition de la règle de la double incrimination. En
fait, nous pensons que pour accorder l'extradition, on doit plus tenir compte
de l'ordre public qui a été violé que de celui dans lequel
se trouve le délinquant. Ce dernier ayant agi en connaissance de cause,
assurer son impunité par le passage d'une frontière à une
autre s'apparente à une injustice puisqu'il savait à quoi il
s'exposait en commettant les faits réprimés.
Au total, nous observons que la règle de la double
incrimination peut affaiblir de manière considérable la lutte
contre la criminalité sous toutes ses formes en Afrique Centrale en
particulier. Elle peut transformer certains Etats en lieu de
préparation et de refuge pour les délinquants ayant commis une
infraction sur le territoire d'un autre Etat.
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