4/particularités de certaines
Intoxications
4-A/LES PSYCOTROPES
- Les benzodiazépines
Depuis la mise sur le marché du chlordiazépoxide
en 1960, les benzodiazépines ont supplanté de nombreux
médicamentsdans leurs indications de médicaments hypnotique,
anxiolytique, myorelaxant et anticonvulsivant. Elles sont devenues etrestent
les médicaments les plus fréquemment mis en cause dans les
Intoxications médicamenteuses, parfois seules, souvent associées.
Elles ont été rejointes par les molécules
apparentées zolpidem et zopiclone , qui n'ont pas montré une
toxicité différente et répondent à l'antidote des
benzodiazépines, le flumazénil.
Effets selon l'âge
Chez l'adulte
Les intoxications aiguës par benzodiazépines
seules sont à l'origine d'un coma calme hypotonique, rarement
très profond mais qui peut s'accompagner de complications respiratoires.
Toutes les benzodiazépines potentialisent très fortement les
effets dépresseurs du système nerveux central des autres
Psychotropes sans oublier l'alcool, avec le risque respiratoire que Cela
représente. Une bradycardie sinusale a parfois été
observée au cours d'intoxications par le flunitrazépam et le
loflazépate. Une agitation, des hallucinations sont fréquentes
avec le lorazépam au réveil du coma ou à la phase
initiale.
Chez les sujets âgés
L'intoxication aiguë par les benzodiazépines est
parfois responsable d'un coma peu profond, mais prolongé. La
pérennisation de cet état s'accompagne de complications
respiratoires tel un encombrement bronchique, une broncho-pneumopathie
surinfection et nécessite une ventilation assistée souvent
prolongée. Il existe chez ces patients une grande hypotonie Musculaire
pouvant être à l'origine de difficultés de sevrage du
respirateur.
Chez l'enfant
L'intoxication accidentelle n'est pas exceptionnelle en
raisonde la grande disponibilité des benzodiazépines dans les
foyers.Celle-ci est très souvent monomédicamenteuse. Le tableau
clinique est par conséquent celui d'un coma calme, hypotonique,
hyporéflexique.L'intérêt clinique de la détection
sanguine ou urinaire desbenzodiazépines reste à définir.Le
flumazénil (Anexate®) est l'antagoniste spécifique
desbenzodiazépines. Il est efficace et bien toléré dans
les intoxications pures . Il ne raccourcit pas la durée de
l'intoxication mais En modifie l'expression clinique. L'utilisation de
flumazénil expose principalement à trois risques :
· réendormissement : la durée d'action
des benzodiazépines est supérieure à celle du
flumazénil qui n'est que de l'ordre de30 minutes.
· apparition d'un syndrome de sevrage aigu, chez
l'intoxiqué dépendant, lorsque la posologie de flumazénil
est trop élevée ;
· apparition de convulsions traduisant soit un
syndrome de sevrage, soit la levée de l'effet protecteur
anticonvulsivant chez un épileptique, ou bien, plus fréquemment,
en présence de toxiques convulsivants associés aux
benzodiazépines, en particulier les antidépresseurs tricycliques.
Les limites de l'utilisation du flumazénil proviennent des risques de
convulsions ou de troubles du rythme graves lors d'intoxications
polymédicamenteuses associant des produits convulsivants dont les plus
fréquents sont les antidépresseurs.
C'est pourquoi l'interrogatoire de l'entourage, mais surtout
l'examen clinique minutieux et l'analyse de l'électrocardiogramme sont
des préalables à son utilisation. Lorsque le coma est compatible
avec une intoxication aux benzodiazépines (coma calme, hypotonique,
hyporéfléxique) et l'ECG normal ou Non évocateur d'une
intoxication par antidépresseurs tricycliques, l'efficacité du
flumazénil est probable, mais, surtout, le risque de convulsions devient
très faible. En revanche, lorsque le coma est non compatible avec une
intoxication aux benzodiazépines (agité, hypertonique avec signes
pyramidaux, pupilles
En mydriase), et l'ECG très évocateur d'une
intoxication par antidépresseurs (tachycardie =?90/min, allongement du
QT, élargissement du QRS), l'efficacité est faible, voire nulle
et le risque de convulsions élevé. Le flumazénil est
Particulièrement utile comme test diagnostique lors d'un trouble de
conscience, et pour éviter l'intubation lorsque celle-ci n'est pas
souhaitable (insuffisant respiratoire chronique, personne âgée).
Bien que le flumazénil ne possède Pas l'autorisation de mise sur
le marché (AMM) chez l'enfant, son utilisation devant une intoxication
pure par benzodiazépines mérite d'être discutée.
Modalités du traitement
Chez l'enfant
La dose de charge est de 0,01 mg/kg en intraveineuse (i.v.)
lente toutes les 2 minutes jusqu'au réveil complet. L'entretien du
réveil nécessite une perfusion continue, la dose horaire initiale
est égale à la dose de charge totale efficace. Une Surveillance
en milieu de soins intensifs est impérative.
Chez l'adulte ou la personne
âgée
La dose de charge se fait par injections successives de 0,1 mg
en intraveineuse lente, répétées toutes les 2 minutes sans
dépasser 1 mg. L'amélioration des troubles de la conscience doit
être évaluée par les réponses aux ordres simples. Il
ne faut pas chercher un réveil total et rapide ou utiliser des
stimulations Nociceptives qui sont susceptibles d'amplifier le réveil et
d'inciter des réactions de refus. L'absence de réponse avec des
doses de charge supérieures ou égales à 1 mg doit faire
arrêter le flumazénil et rechercher une autre cause du coma. Le
Traitement d'entretien se fait en perfusion continue. La dose
horaire en perfusion continue est égale à la dose de charge. Par
exemple, si un patient a été réveillé par 0,3 mg,
la dose d'entretien à la phase initiale est de 0,3 mg h-1.
Il faut insister sur le fait que la perfusion continue de
Flumazénil n'autorise pas un allégement de la surveillance. UN
patient traité par flumazénil doit être hospitalisé
dans une unité offrant une surveillance clinique constante et
rapproché
Soumission chimique
Les benzodiazépines de courte durée d'action ont
été utilisées dans un but délictueux en raison de
l'intense amnésie des faits récents qu'elles procurent
(soumission médicamenteuse). Des patients peuvent consulter pour cette
raison. Le problème médical est de réunir les
éléments étayant la prise médicamenteuse.
Analyse toxicologique précoce pour montrer la
présence de benzodiazépines dans l'organisme,
électroencéphalogramme(EEG) à la recherche de rythmes
rapides de type médicamenteux, et de noter soigneusement les
éléments cliniques pouvant traduire des sévices (remise de
documents, d'argent, confidences, Actes sexuels).
Syndromes de sevrage
Les syndromes de sevrage aux benzodiazépines
apparaissent d'autant plus fréquents qu'ils sont recherchés avec
attention. Certains auteurs font état de la survenue d'un syndrome de
sevrage chez 15 à 44 % des utilisateurs à long terme de
benzodiazépines. Selon la demi-vie de la benzodiazépine, le
syndrome De sevrage s'exprime 3 à 4 jours (jusqu'à 1 semaine)
après l'interruption d'un traitement dont la durée minimale est
de 4à 6 semaines. Les circonstances de survenue du syndrome de sevrage
peuvent être : soit un arrêt brutal, soit une diminution rapide de
doses, soit le remplacement d'une benzodiazépine à Demi-vie
longue par une autre à demi-vie courte. Les symptômes ne sont pas
spécifiques et associent, à une phase précoce,
l'apparition de céphalées, d'une insomnie, une inversion du
rythme du sommeil qui doit éveiller l'attention
Notamment lors de l'hospitalisation d'un patient pour un
problème intercurrent. Il existe fréquemment une hyper
sensorialité avec hyperacousie, photophobies, paresthésie,
hyperosmie, hypersensibilité au toucher et à la douleur. Le
patient se plaint de vertiges et de spasmes musculaires. Ensuite, on observe
l'apparition d'un syndrome confusionnel et au maximum la survenue de
convulsions.
Le traitement repose sur la ré administration de la
benzodiazépine, au mieux la benzodiazépine en question, si non
d'une molécule présentant une demi-vie d'élimination
comparable. L'arrêt des benzodiazépines doit toujours être
progressif : il doit être étalé sur 4 semaines au moins,
avec diminution par Paliers.
-Les neuroleptiques
Ces antipsychotiques comprennent plusieurs classes : les
phénothiazines (comme la chlorpromazine) et les dérivés du
thioxanthène, les butyrophénones (comme l'halopéridol) et
les dérivés de la diphénylpipéridine, les
benzamides (comme le sulpiride et le Métoclopramide). Certains
dérivés sont proches des antidépresseurs Tricycliques, y
compris par leur toxicité. Les neuroleptiques « classiques »
ont plusieurs formes de manifestations toxiques.
Effets secondaires
Récepteurs muscariniques
Ils sont impliqués dans les effets atropiniques ou
anticholinergiques (mydriase, troubles de l'accommodation visuelle,
augmentation de la pression intra-oculaire, bouche sèche, constipation,
iléus, rétention urinaire, tachycardie, confusion) qui sont
surtout très marqués avec les phénothiazines.
Récepteurs cholinergiques centraux
Ils peuvent mener à des états confusionnels et
d'agitation paradoxale, surtout chez les sujets âgés ou en mauvais
état général.
Récepteurs
alpha-adrénergiques
Ils sont impliqués dans les effets hypotenseurs,
souvent associés à une tachycardie sinusale réflexe. Parmi
les autres complications cardiovasculaires, des allongements de l'espace QT,
avec risque de torsades de pointe et de mort subite, ont été
décrits avec de nombreux neuroleptiques, particulièrement dans le
groupe des neuroleptiques sédatifs, mais aussi l'halopéridol, le
dropéridol et plusieurs antipsychotiques atypiques. Cet effet semble
lié à la dose.
Récepteurs H1 de l'histamine
Ils sont impliqués dans les effets sédatifs et
la dépression du SNC (apathie, adynamie, indifférence affective,
passivité), plus importants pour les phénothiazines.
Récepteurs D2 dopaminergiques
Ils seraient responsables des effets extrapyramidaux :
- dyskinésies ou dystonies aiguës (mouvements
involontaires, généralement sous forme de pro traction de la
langue, de crises Oculogyres, de contractures orales et péri-orales, de
trismus, de difficultés de déglutition, de torticolis
spasmodique, d'emprosthotonos ou opisthotonos) ; ces symptômes sont
très désagréables et perturbants pour le patient. Leur
prévention ou leur correction immédiate peut Être obtenue
par la procyclidine 10 mg IM (Kémadrin®) ou le dexétimide
0,25 mg IM. L'orphénadrine 60 mg IV lent est une
alternative .
- un syndrome parkinsonien (tremblements, hypertonie,
akinésie) ;
- un syndrome hyperkinétique.
Autres effets
La plupart des neuroleptiques ont un effet proconvulsant,
même si le développement de crise d'épilepsie est rare en
dehors d'autres facteurs de prédisposition. Ils ont aussi des
propriétés antiémétisantes.
Syndrome « malin » aux neuroleptiques
(SMN)
Cette complication sérieuse est rare (0,2 % des
patients traités par neuroleptiques) mais l'emploi répandu des
neuroleptiques en fait une source de morbidité et de mortalité
non négligeable.
Le SMN peut se développer de façon spectaculaire
en quelques heures ou de façon plus insidieuse en 3 à 9 jours
après l'instauration du traitement. Les manifestations peuvent persister
jusqu'à deux semaines.
Il s'agit d'une réaction idiosyncrasique, plus
fréquente avec les neuroleptiques puissants sans relation avec la dose
administrée, à moins qu'il n'y ait indéterminisme
génétique. Une récidive lors d'une reprise du traitement a
été rapportée dans 30 à 50 % des cas.
Le SMN serait principalement dû à un blocage de
la transmission
Dopaminergique, en particulier au niveau des récepteurs
D2 des ganglions de la base de l'hypothalamus, ce qui expliquerait les
tremblements, la rigidité et l'hyperthermie.
Au niveau périphérique, des neuroleptiques
augmentent l'entrée de calcium dans la cellule, générant
une contracture des fibres musculaires.
Une température ambiante élevée, la
déshydratation, l'agitation ou un état catatonique, un syndrome
de sevrage, les lésions cérébrales sous-jacentes ou un
état démentiel semblent être des facteurs de
prédisposition.. Il existe de nombreuses formes incomplètes
(frustes).
Le diagnostic doit être évoqué devant le
développement d'une rigidité
Musculaire sévère et d'une
élévation progressive de la température corporelle (>38
°C), dans un délai de 1 à 4 semaines après
l'utilisation d'un neuroleptique. Au moins 5 critères parmi les dix
suivants sont en plus nécessaires : transpiration profuse, tremblements,
altération de l'état mental, tachycardie, hyperleucocytose,
dysphagie, incontinence, mutisme, pression artérielle
élevée ou labile, manifestations biologiques de la souffrance
musculaire (par exemple une élévation des CPK, myoglobinurie)
Modifications de l'état mental
Obnubilation, coma Confusion, délire Catatonie
Instabilité du système nerveux Autonome
Instabilité de la pression artérielle
Tachycardie, choc
Arythmies, mort subite
Hyperthermie habituellement > 38 °C,
Parfois > 41 °C
Détresse respiratoire
Transpiration profuse
Pâleur
Anomalies motrices
Rigidité musculaire (« tuyau de plomb »)
Akinésie
Dyskinésies
Dystonies
Troubles extrapyramidaux
Tremblements
Roue dentée
Dysarthrie
Dysphagie
Droolingmyoglobinurie.
Ces symptômes ne doivent bien entendu pas être
attribuables à une autre cause (intoxication par amphétamines ou
phencyclidine, encéphalite virale, troubles de l'humeur avec
manifestations catatoniques, par exemple).Sur le plan biologique, le SMN
s'accompagne souvent d'une élévation importante Des CPK et de la
myoglobinémie, et d'une myoglobinurie. D'autres manifestations
fréquentes sont une hyperkaliémie, une hypocalcémie, une
hyper- ou une hyponatrémie, une insuffisance aiguë, une acidose
métabolique, et une leucocytose importante (10000-40000/mm3).Une
thrombocytose peut être observée, ainsi qu'une CIVD.
L'interruption du traitement neuroleptique en cause est
évidemment prioritaire. Les autres mesures sont avant tout
conservatrices : admission aux soins intensifs, hydratation
généreuse, alcalinisation, intubation et assistance respiratoire,
aspiration nasogastrique, contrôle de l'hyperthermie par les moyens
externes, prévention de la Maladie thromboembolique, hémodialyse
en cas d'insuffisance rénale aiguë, etc. Les mesures plus
spécifiques ont un rôle incertain :
- le dantrolène (2-3 mg/kg/j IV/IM, au départ
(la forme parentérale est chère), suivi par 4-8 mg/kg/j -
jusqu'à 10 mg/kg/j - PO ou par sonde nasogastrique dès que
possible) bloque la libération de calcium par le réticulum
sarcoplasmique des Fibres musculaires ; son usage prolongé peut
être la source d'une hépatotoxicité ;
-les agonistes dopaminergiques réactivent les
récepteurs Dopaminergiques bloqués:
Bromocriptine (Parlodel® 4 _ 2,5-10 mg/j [PO ou par sonde
nasogastrique]),
amantadine 2 à 3 _100 mg/j,
carbidopa/lévodopa, L-dopa par voie IV ;
- les agonistes GABAergiques :
le diazépam (Valium®), par exemple.
Un traitement sédatif, voire paralysant peut être
nécessaire.
Les diagnostics différentiels principaux sont le coup
de chaleur (mais dans ce cas le tonus est réduit, la peau sèche
et la température souvent plus élevée), également
favorisé par la prise de neuroleptiques, et le syndrome
sérotoninergique
Intoxication aiguë
Le tableau est variable en fonction des
propriétés anticholinergiques et antihistaminiquesH1
associées.
Les phénothiazines dépriment le plus fortement
le SNC. Dans les cas sévères, on peut observer des convulsions,
une hypotension avec tachycardie (vasoplégie), une hypothermie profonde
et une dépression respiratoire. On note souvent un myosis. Une
prolongation du QT est possible ; plus rarement (thioridazine), l'ECG peut
Montrer des troubles de conduction. Avec les butyrophénones, la
dépression centrale est moins marquée, mais le tableau est
dominé par l'hypotension et le syndrome extrapyramidal.
Traitement
Il est symptomatique. L'hypotension répond
généralement au
Remplissage vasculaire. Les anticholinergiques sont utiles
pour corriger les signes extrapyramidaux importants. Le diazépam est
utile pour réduire l'hypertonie musculaire.
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