2.1.3.
Le connecteur quand/lorsque
Quand et lorsque sont deux connecteurs qui
occupent une place de choix dans le système des connecteurs temporels.
Pekba-Anderson et Pekba (2007 :50) souligne :
Etant particulièrement fréquents aussi bien
à l'écrit qu'à l'oral, quand et
lorsque se caractérisent par une grande richesse
sémantique intrinsèque qui fait d'eux les connecteurs les plus
polyfonctionnels parmi les connecteurs de la simultanéité.
De fait, leur sens général de
base : au moment où, dans le temps que, à
l'époque où, permet à ces connecteurs d'exprimer
toutes une palette de relations temporelles, allant de la relation de
simultanéité à la relation d'antériorité.
Nous n'avons pas d'occurrence avec le marqueur lorsque
extraphrastique. Toutefois, pour illustrer le fonctionnement de ces deux
connecteurs, nous allons nous servir des exemples ci-après :
8a. Quand elle le vit bouleversé,
elle tâcha de se retenir. (Na, p.389) ;
8b. Quand on a une gueule comme la tienne,
on paie les femmes qui veulent bien vous tolérer... (Na,
p.402) ;
8c. Quand ni sa femme ni son neveu ne
l'animaient du bruit de leur existence, la maison semblait vide.
[...]. (Ge, p325).
La relation qui existe entre la subordonnée
détachée et la principale est, selon Pekba-Anderson et Pekba (op
cit. : 62), une relation de coïncidence-antériorité,
qui consiste à construire pour le discours [8a], une première
représentation mentale, le voir bouleversé, puis un
deuxième, tâcher de se retenir. Le deuxième
évènement n'étant validé qu'à la suite de la
validation de l'évènement subordonnée. Dans cette
relation, ce n'est pas l'évènement décrit dans la
principale qui conditionne la réalisation de l'évènement
décrit dans la subordonnée, mais l'inverse.
L'élément décrit dans la subordonnée est
nécessaire pour que soit validée l'élément
décrit dans la principale. C'est ce que dit Saussure (2003 :209)
que cite Pekba-Anderson et Pekba (op cit. : 66), si ß ne peut
être le cas sans que á soit la cause de ß, alors la relation
causale est nécessaire. Pour le locuteur, il ne s'agit pas de
mettre l'accent sur la nuance de cause qui se dégage du discours ;
en spécifiant que l'évènement P1 (quand + elle le vit
bouleversé), est la raison de l'existence de P2 (elle
tâcha de se retenir), l'énonciateur privilégie
l'aspect temporel : c'est à un moment précis décrit
par quand ou lorsque que s'est produit
l'événement x qui a occasionné un autre
évènement y. La coïncidence en [8a] est telle que
le lecteur ou le co-locuteur, n'est pas certain qu'après ou avant ce
moment, il y aurait eu le même effet. Cependant, il faut relever que les
rapports associatifs que les évènements entretiennent entre eux
sont plus déterminants dans la relation de causalité entre P1 et
P2. C'est pourquoi, notent les auteurs, son rôle (du connecteur
temporel quand ou lorsque) consiste à fournir la direction temporelle
nécessaire permettant de générer les
représentations mentales des évènements. On peut
discuter ce point de vue en arguant que les temps verbaux jouent le même
rôle, mais nous avons vu que le connecteur donne la force à
l'argumentation. Ce qu'expliquent Pekba-Anderson et Pekba (op. cit. 52) en ces
termes l'ordre des énoncés, les temps verbaux et les
informations conceptuelles déclenchent des traits faibles. En revanche,
les connecteurs et les informations contextuelles portent des traits
forts. Ceci nous autorise à nous éloigner un peu de Havu
pour qui les structures détachées sont classées parmi les
implicites.
En effet, si la remarque de Havu est pertinente pour ce qui
est de l'adjectif apposé, nous pensons par contre que le connecteur,
qu'il soit temporel ou logique ne donne plus de voir la conséquence
comme un fait implicite parce que ce connecteur donne à
l'énonciation de la cause une force assertive qui rend évidente
la conséquence.
Malgré ces quelques points d'appui et les analyses
effectuées au cours de ce travail, nous constatons que
l'interprétation des constructions détachées n'est pas
évidente, parce qu'elle demande non seulement des compétences
linguistiques, mais aussi des compétences extralinguistiques. Cette
évidence est notée par Havu (op. cit.) en ces termes :
Ces constructions ressemblent un peu aux oeuvres
d'art : on peut soit les appréhender sans comprendre exactement ce
que l'artiste a voulu dire, soit les paraphraser sans savoir vraiment si
l'artiste aurait été du même avis.
Comme nous l'avons déjà souligné avec
les structures implicites, les constructions détachées sans
connecteur sont également des formes équivoques d'expression de
la conséquence ; les formes avec connecteurs sont quant à
elles proches de l'inférence avec des connecteurs inférentiels.
On déduit donc que l'auteur utilise les constructions
détachées pour exprimer une situation discutable, donc
l'objectivité n'est pas établie. Les formes morphosyntaxique
d'expression de la conséquence étant tout aussi variées,
il est nécessaire de voir ce que réservent les autres structures
linguistiques que nous avons recensées.
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