2. Le
CCC en grammaire structurale
La grammaire structurale naît à la suite de la
linguistique structurale qui remonte au début du XXe siècle,
et dont l'ambition est de rendre compte de la structure des langues avec plus
d'efficacité. Elle a de ce fait donné une nouvelle impulsion
à l'activité grammaticale par l'introduction des méthodes
capables de décrire le fonctionnement réel des langues. Les
écoles linguistiques qui en découlent ont donné naissance
à diverses tendances grammaticales. La grammaire structurale se
préoccupe donc tout particulièrement de l'organisation des mots
et des constituants de phrase. Elle subordonne, sans le négliger, le
sens à la syntaxe. C'est dans ce sens que Onguéné Essono
Ch. (2001 :132) mentionne que le structuralisme explique
la cohésion sémantique entre les
unités puisque la fonction grammaticale est consécutive à
une formulation particulière de ce rapport sémantique grâce
à un mode de combinaison précis des unités.
A ce propos, il apparaît opportun de présenter
successivement les démarches de la grammaire générative et
transformationnelle, de la grammaire dépendancielle et de la grammaire
prédicative.
2.1.
La Grammaire Générative et Transformationnelle (GGT)
Pour Noam Chomky (1969), la syntaxe est l'étude des
principes et des processus selon lesquels les phrases sont construites dans les
langues particulières. La GGT tente de construire une théorie
générale formalisée de la structure linguistique et d'en
explorer les fondements. Son ambition est donc d'exposer un modèle
syntaxique applicable à toutes les langues naturelles. Aussi
l'étude syntaxique d'une langue donnée a-t-elle pour objet la
construction d'une grammaire pouvant être considérée comme
une sorte de mécanisme qui produit les phrases de la langue soumise
à l'analyse. Chomsky fonde donc sa théorie sur trois
modèles : le modèle simple basé sur la théorie
de communication, le modèle de l'analyse en constituants
immédiats et le modèle transformationnel. Les deux derniers
modèles nous intéressent tout particulièrement.
Le modèle syntagmatique consiste en la
décomposition de la phrase en constituants immédiats. Il permet
de présenter les constituants et l'ordre dans lequel ils apparaissent
dans une phrase. De manière graphique, le modèle syntagmatique
est représenté sous la forme d'arbres syntaxiques dont Roberge
(2002 :3) présente ci-dessous une forme simplifiée :
W : représente la phrase
X, Y, Z : représentent les noeuds
T, U : représentent les branches,
c'est-à-dire les syntagmes qui sont une projection de la
catégorie. Ce modèle est cependant adéquat aux objectifs
de la description linguistique comme le constate Chomsky (1969 :15). En
effet, l'auteur reconnaît que ce modèle s'applique avec
lourdeur, c'est-à-dire que toute grammaire construite sur
cette théorie fort complexe, [...], est non révélatrice
[...], surtout qu'en décrivant la structure de la phrase en
constituants immédiats, le modèle syntagmatique peut aboutir
à la formation des énoncés agrammaticaux.
Parlant du modèle transformationnel, il s'agit des
opérations qui convertissent un couple en une phrase unique et pour
Ruwet (1972 :173), les transformations
généralisées appartiennent à deux grandes
catégories qui correspondent en gros à la distinction classique
entre coordination et subordination. Ruwet distingue ainsi deux types de
transformation : la coordination et la subordination.
Au sujet des compléments circonstanciels, Ruwet dit
qu'ils sont dus à l'enchâssement, ils insèrent une
phrase à l'intérieur d'une phrase. Il s'agit de
l'enchâssement de (TQU-) où T représente
l'antécédent et QU le relatif pour l'enchâssement. Cette
opération convertit QU + SN en qui s'il s'agit d'un SN sujet,
et en que, s'il est question d'un SN objet. Pour ce qui est des
transformations circonstancielles, Le Galliot (1975 :67) affirme que la
GGT introduit dans la complexité des subordinations circonstancielles,
un ordre simplificateur :
la proposition subordonnée circonstancielle
correspond à l'enchâssement d'une suite E2 à la place d'un
constituant SP de la suite E1, quelles que soient évidemment les nuances
logiques et sémantiques qui intéressent le contenu de la
proposition.
De manière concrète cela se démontre dans
les exemples ci-après :
10a. Toutes les femmes bientôt les connurent, [...]
sans que personne
pût citer une source exacte (Na, p
426) ;
10b. Sans doute, dans la réparation des pistons et des
tiroirs, elle (la
machine) avait perdu de son âme, ce
mystérieux équilibre de vie,
dû au hasard du montage. Il (Jacques) en
souffrait. Cette
déchéance tournait à une amertume
chagrine, au point qu'il
poursuivait ses supérieurs de plaintes
déraisonnables. (Lbh, p 279) ;
10c. [...] l'oeil aux aguets, ils inscrivaient des
paris, sur un geste, sur un
clignement de paupières,
si rapidement, que des
curieux, béants,
les regardaient sans comprendre. (Na,
p.345) ;
10d. Les jours où, de colère, elle oubliait ses
intérêts, elle jurait de lui
faire une telle saleté,
qu'il ne pourrait remettre les pieds chez
elle.
(Na, p.403).
La phrase [10a] renvoie aux deux phrases sous-jacentes
a) toutes les femmes bientôt les connurent sans SN
b) personne put citer une source exacte
La phrase principale (a) présente la structure SN +
V+SP. Nous n'allons pas entrer en détail dans les démonstrations
de la GGT. Nous soulignons tout simplement que cette grammaire n'accorde aucune
place au sujet parlant ; elle ne permet pas non plus de distinguer une
subordonnée causale d'une subordonnée consécutive, deux
concepts qui relèvent de la sémantique. En fait, la GGT est une
grammaire de phrase et non de texte, ses concepts ne peuvent par
conséquent pas être opératoires pour une analyse du
discours. Que dire de la théorie de Lucien Tesnière ?
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