Il y'a plusieurs syndromes familiaux du cancer colorectal
pour les quels l'avènement de le génétique
moléculaire a été d'une grande importance dans la
compréhension de leur pathogenèse. Il s'agit de maladies
relativement rares ; responsables de moins de 10% des cas de cancer colorectal.
Les syndromes les plus connus sont la polypose familiale et le syndrome de
lynch (Atkin et a!, 1992)
o Polypose adénomateuse familiale
La polypose adénomateuse familiale du colon (PAF) est
caractérisée par la présence de polypes
néoplasiques multiples dans le colon et le rectum mais aussi dans
d'autres segments du tractus gastro intestinal. Ces polypes représentent
le stade
préliminaire d'une transformation maligne. Le diagnostic
généalogique clinique est posé :
· Lorsqu'il existe une polypose floride (plus de 50
florides) ;
· En présence de polypes multiples avec une
anamnèse familiale correspondante positive ou ;
· En présence chez la même personne, de
polypes multiples avec manifestation extra colique typiques telles
qu'ostéomes, tumeurs desmoïdes, lipomes, polypes dans l'estomac ou
l'intestin grêle, CHRPE « congénital hypetrophy of retinal
pigment epithelium »
Pour environ un tiers des patients PAF, il s'agit du cas
d'atteinte inaugurale dans la famille. Pour leurs descendants, le risque
d'hériter de la prédisposition nouvellement acquise est de 50%.
Le diagnostic précoce de la PAF revêt une importance
particulière en raison du risque de transformation maligne. On
recommande une colonoscopie annuelle ou semestrielle dés la
deuxième décade de la vie à tous les porteurs du
gène APC muté (fig10), (Boutron et a!,
1995).
Figure 10:intérêt de la colonoscopie dans
la Polypose familiale
(Boutron et al, 1995)
La plupart des sujets atteints de PAF sont porteurs d'une
mutation au niveau du segment codant du gène APC. Il existe une
corrélation entre le siége de la mutation et l'extension de la
maladie. Une polypose familiale atténuée avec transformation
cancéreuse tardive est observée chez les patients
présentant une mutation à la partie initiale du gène
après le codon 1596(Carstensen et al, 1994) et (Fuchs
et al, 1994).
Dans cette forme atténuée, on ne trouve
qu'entre 20et 100 adénomes colorectaux, une remarquable variation du
phénotype de la maladie parmi les membres atteints d'une même
famille, ainsi que d'autres lésions, les plus diverses au niveau du
tractus gastro intestinal supérieur (Ekbom et al,
1990).
Des variantes du gène APC peuvent être
responsables d'adénomes colorectaux multiples sans que le tableau d'une
polypose généralisée ne soit réalisé au
complet.
Une mutation au niveau du codon 1307 de gène APC
où la base thymine est remplacée par l'adénine
(Gyde et al,1998) ; la fonction de la protéine
APC n'est pas influencée par cette mutation, expliquant l'absence de
polypose généralisée. Pourtant les modifications de l'ADN
entraînent une instabilité augmentée favorisant la
carcinogenèse locale. On postule au niveau du gène APC d'autres
mutations qui n'entraînent pas un tableau complet de PAF mais favorisant
l'apparition d'adénomes multiples.
o Carcinomes colorectaux héréditaires
sans
polypose HNPCC
Le syndrome de « hereditary no polyposis colorectal
cancer » a été défini généalogiquement
cliniquement selon les fondements appelés critères d'Amsterdam
(Jass et al, 2004)
Il s'agissait d'établir une base commune pour les
études internationales à la recherche des gènes
responsables de ce syndrome. Entre temps, on a découvert cinq
gènes du système de réparation « mis mach »
(RMM) qui, en cas de mutation de la lignée germinative, favorisent
l'apparition d'HNPCC (Lievre et al, 2004) Ils ont
pour désignation, hMSH2, hMLH1, hMSH6 ainsi que hPMS1 et hPMS2.
En général, les néoplasies
n'apparaissent qu'après la vingtième année chez les
personnes atteintes d'HNPCC. Cependant certaines mutations des gènes RMM
entraînent une manifestation clinique plus précoce (Tkamya
et al, 1985) indiquant alors le début immédiat
de la surveillance médicale.
Les adénomes et carcinomes colorectaux qui se
développent sur le terrain d'une déficience RMM se signalent par
la mise en évidence de ce qu'on appelle l'instabilité
microsatellites ADN (IMS) (Morson et Konishi, 1980) On entend
par microsatellite ADN divers motifs nucléotidiques séquentiels
très courts (séquence de mono, di, tri, nucléotide) qui,
bien que répartis à travers tout le génome, apparaissent
cependant en nombre défini en un lieu circonscrit d'un chromosome
donné. En cas de déficience RMM dans une tumeur, les erreurs de
réplication des microsatellites ADN ne sont plus corrigées,
provoquant ainsi l'IMS.
On observe cette IMS dans plus de 90% des carcinomes
colorectaux et dans environ 60% des adénomes chez les patients atteints
d'HNPCC, alors que la proportion n'est que d'environ 6% dans les tumeurs
d'apparition sporadique. Les
critères dits de Bethesda ont pou but la standardisation
de l'analyse du phénomène IMS dans les carcinomes colorectaux.
(Sutherland et Richards, 1994)
Aujourd'hui il est encore difficile d'estimer la proportion
de polypes colorectaux cancéreux dus à de nouvelles mutations de
la lignée germinale. On doit suspecter une telle origine en cas de
tumeurs d'apparition précoce, ou synchrones ou métachrones au
niveau du colon ou du rectum, mais également lors de tumeurs sises dans
les autres organes concernés en cas d'HNPCC. (Aaltonen et
al, 1993)