3. Le marché
D'une manière générale, le marché
est le lieu où un ensemble de transactions ou d'opérations de
négoce est conclu entre acheteurs et vendeurs. On y identifie des
acteurs, des flux de marchandises et la formation des prix. Dans les grandes
zones de production, de véritables centres de groupage3 sont
nés. Cela s'illustre à travers deux exemples. Dans le Nord-Est,
la localité de Flakièdougou est devenue un point de collecte
important des produits vivriers, particulièrement de l'igname
précoce dont la zone est grande productrice (Chaléard 1996, p
535). Les commerçants parcourent la campagne environnante à la
recherche de tubercules, rassemblés dans le gros bourg. Dans cette
optique, le marché hebdomadaire est un centre de renseignements et le
lieu où le marchand peut, éventuellement, compléter son
chargement. De même la localité de Méagui, au sud de
Soubré, est un centre de transaction où est concentrée la
production de banane plantain par des collectrices qui l'expédient
ensuite sur San-Pedro et Soubré (O.C.P.V. 2008) ou Abidjan. Ce
marché rural représente le deuxième maillon dans
l'organisation marchande après les marchés bord champ. Ils
assurent la collecte des produits et ouvrent les campagnes sur
l'extérieur.
Au sens de Paulais & Wilhem (2000, p 52), le marché
est un centre de << dispatching >> : en ville, c'est le point
d'arrivée et le point de départ des marchandises avant la vente
au consommateur. Si les marchés ruraux servent en partie de lieux
officiels de négoces et de concentration d'une production paysanne
très dispersée, les marchés urbains sont le point
d'éclatement des denrées pour la vente au consommateur. Le
renforcement de ce point de vue conduit Chaléard (2001) à les
qualifier de << pôles de diffusion vivriers >>. En
caractérisant les grands marchés des villes d'Afrique, Paulais et
Wilhem (2000, p 57) soutiennent que c'est la diversité des fonctions
qu'ils assurent : micro détail, détail, demi gros, gros, zone de
stockage et de réexpédition qui est fondamentale. Le
marché est pour eux, le point de convergence des réseaux
d'approvisionnement et de distribution des produits vivriers comme des produits
manufacturés. Dans les zones de production, un vaste projet, né
à la fin des années 1980 prévoyait de mettre en place une
vingtaine de centres de collecte. Trois furent construits dont celui de
Méagui qui fut un échec. Les agriculteurs ne se
déplacèrent pas, préférant attendre les marchandes
chez eux. Les grossistes choisirent de rester sur la place qu'elles occupaient
dans le centre ville, le long de la route bitumée. On note une
méfiances vis-à -vis de toute tentative de contrôle de la
part de l'administration par le payement des droits sur les transactions et un
loyer pour l'utilisation d'entrepôts dont elles jugeaient pouvoir se
passer. En somme, ces mar-
3 Les zones de groupages peuvent être
considérées comme un avant-marché pour le consommateur
chés sont nés inopérants. Comme raisons,
Tollens (1997, p 31) constate qu'ils sont trop éloignés du centre
et les consommateurs ou détaillants préfèrent
s'approvisionner auprès des commerçants restés près
du marché central. Coquery (1997, p 52) explique ces échecs par
la place secondaire et insignifiante du commerce de détail dans la
planification et l'intervention des urbanistes. Il présente le
marché dans les villes africaines comme des espaces ouverts où
producteurs ruraux et marchands viennent vendre << à même le
sol ». Ces marchés donnent l'impression d'un développement
qui n'est possible et viable que dans l'informel. En d'autres terme moins ils
sont structurés plus il y a de l'affluence et les transactions son
intenses. Dans le même sens, Franqueville (1997) complète cette
conception par l'analyse suivante : << on peut donc se trouver en
présence, notamment pour les grandes villes, d'un espace
d'approvisionnement qui laisse une impression d'incohérence et de
démesure, (...) ce qui ne va pas sans faire peser un risque certain
d'insécurité sur l'alimentation urbaine quotidienne».
(Franqueville 1997, p 12).
Aux discours pessimistes qui ne voient la croissance urbaine
dans les pays en développement qu'en termes d'exode rural, de
dépendance alimentaire, de pauvreté et
d'insécurité, Bricas (1997, p 67) oppose une vision plus
optimiste qui voit dans la ville une occasion pour le développement
agricole dans la mesure où le marché qu'elle représente
offre des débouchés, prenant le relais d'un marché
international très instable.
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