CHAPITRE PREMIER :
LES POLITIQUES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ET SOCIAL DE
LA COTE D'IVOIRE : UNE REPRODUCTION D ES INEGALITES SECTORIELLES
L'époque coloniale et la période de
l'indépendance nous renseignent sur les évolutions des politiques
économiques en Côte d'Ivoire. La période coloniale est
celles de la « mise en valeur » des colonies. Dans cette
optique, chaque colonie est transformée en centre de production par
l'Administration coloniale. La spécialisation au niveau agricole de
chaque territoire est fonction des conditions naturelles et des
potentialités agricoles qu'il offre. Devenue colonie d'exploitation en
1893, la place et le rôle de la Côte d'Ivoire dans l'Empire
colonial français sont définis selon ses potentialités
naturelles. Sa « mise en valeur » commence
véritablement entre les années 1920 et 1945. Les programmes de
« mise en valeur » de la colonie de Côte d'Ivoire
mettront l'accent sur le développement de l'agriculture de rente et
l'exploitation des ressources naturelles et minières (bois, or,
manganèse, diamant). Une place secondaire est accordée aux
cultures vivrières. Elles sont réduites à la fonction
principale d'aliments de subsistance pour les populations
« indigènes ». Alimenter le marché de la
métropole par des matières premières, est la principale
finalité de cette vaste politique d'exploitation, entretenue grâce
à une migration à grande échelle des ressortissants des
pays de l'hinterland (Burkina Faso, Mali, Niger) vers la Côte d'Ivoire et
des populations du Nord du pays (dioula, senoufo) vers le sud.
A l'indépendance, les gouvernants ivoiriens
héritent de la politique d'aménagement du territoire de
l'Administration coloniale. Cet héritage sera plus ou moins entretenu.
La Côte d'Ivoire opte pour une politique économique attractive
basée sur l'ouverture à la main d'oeuvre et à
l'investissement étranger. L'économie de plantation conservera sa
place dominante et bénéficiera d'importants investissements. Des
structures étatiques sont créées pour la modernisation de
l'agriculture : CFDT, MOTORAGRI, SATMACI. Des mesures incitatives
(« Coupe nationale du progrès »,
développement de coopératives) sont aussi mises en places pour
favoriser l'adhésion des masses rurales à la politique
d'extension des productions d'exportation. Très vite grâce aux
performances des matières premières agricoles, la Côte
d'Ivoire devient un pôle économique attractif. Elle se positionne
en Afrique et même dans le monde. Jusqu'en 1980, elle a un taux de
croissance moyen annuel de l'ordre de 8%. Mais les performances
économiques se réalisent dans un contexte de parcellisation de
fait des activités de production et de commercialisation. Le secteur des
produits d'exportation est masculinisé. Celui des produits vivriers est
féminisé et est très peu valorisé par les pouvoirs
publics. Néanmoins la crise économique a créé un
contexte qui, aujourd'hui, favorise le repositionnement du secteur vivrier. La
valeur de cette position stratégique réside dans les solutions
alternatives que ce secteur offre à l'Etat dans l'absorption des
problèmes sociaux engendrés par la crise de l'économie
ivoirienne et, plus récemment, le conflit politico-militaire de
septembre 2002. En réalité, le peu d'intérêt
accordé par les pouvoirs publics au secteur vivrier tient à la
faiblesse des devises tirées de ce secteur. Le rapport de l'Etat aux
différents secteurs de l'économie est, en effet, tributaire des
retombées et des enjeux économiques. Il en est de même dans
le développement des organisations coopératives en Côte
d'Ivoire. L'évolution du système coopératif montre que les
coopératives féminines sont d'apparition récente. Elles
sont faiblement représentées et n'ont pas suscité un
véritable engouement de la part de l'Etat.
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