Les droits de l'homme dans l'ombre de la diplomatie internationale( Télécharger le fichier original )par Anna-maria Lukacs Institut des Droits de l'Homme Lyon - Master 2 Théorie et pratiques des Droits de l'Homme 2008 |
3.3 La réaction chinoise au soulèvement tibétain.Depuis que la Chine a été chargée de l'organisation des Jeux Olympiques son seul souci est de montrer l'image la plus avantageuse possible sous les feux des projecteurs internationaux. A coté des travaux pharaoniques et des efforts désespérés pour réduire la pollution, elle a également essayé de tout mettre en oeuvre pour garder l'ordre jusqu'aux Jeux Olympiques. La manière dont elle a géré les événements de 10 Mars a été d'abord marquée par un certain laxisme pour devenir très vite sanglante et radicale. La réaction des autorités chinoises dans les premiers jours a été étonnamment mesurée surtout lorsqu'on se souvient du massacre de 1989 qui a suivi le soulèvement tibétain ou de Tien An Men. 10000 policiers étaient présents lorsque les manifestants tibétains se sont mis à bruler des voitures et à saccager des magasins dans le centre de Lhassa, mais ils ne se sont pas interposés. Ce laxisme curieux pousse à se demander si les autorités chinoises n'ont pas attendu une certaine dégénération de la situation pour mieux pouvoir justifier ensuite une intervention sanglante, qui n'a pas tardé d'ailleurs. Très vite le Tibet a été complètement coupé du reste du monde. Les étrangers ont été expulsés dès les premiers jours et leur accès est encore interdit aujourd'hui (27 Aout 2008). Malgré tous les appels internationaux qui ont été lancés, la Chine a systématiquement refusé l'accès des médias ou des observateurs internationaux comme par exemple celui du Louise Arbour, Haut commissaire des Nations unies pour les droits de l'homme jusqu'au 1 Juillet 2008. La Chine n'a autorisé que trois "visites guidées"49(*) dans la région du Tibet au cours des ces derniers mois pour quelques journalistes dans des conditions strictement surveillées et contrôlés. Les lignes téléphoniques ont été étroitement surveillées et les conversations interceptées, tous les sites internet chinois susceptibles de véhiculer des informations gênantes ont été censurés et comme je l'ai déjà mentionné les sites occidentaux et tibétains ont fait l'objet d'attaques répétés. Par exemple l'accès à You Tube a été bloqué le 16 Mars après la diffusion des vidéos et des photos relatives aux manifestations et le gouvernement a refusé toute explication sur ce blocage. Se sont dans ces conditions que nous sont parvenus les peu d'information sur ce qui se passait réellement au Tibet. Ce sont des courageux tibétains qui ont tenté par tous les moyens possibles de continuer à informer leurs proches et la communauté en exil, la plupart du temps à travers les téléphones portables qui ont échappés aux confiscations massives qu'à effectué la police chinoise. Mais les confiscations ne concernaient pas que les portables et les connections Internet. Des pillages, recherches et arrestations ont été menés monastère par monastère, rue par rue, maison par maison pour trouver les instigateurs de manifestations, pour obliger de dénoncer et pour répandre la peur et la terreur au sein de la population tibétaine. Dès le 15 Mars plusieurs appels à se rendre ont été émis par les autorités chinoises à l'attention des "criminels" impliqués dans les démonstrations, en promettant un traitement de faveur pour ceux qui se rendraient, mais chaque fois les raids d'arrestation ont commencé plusieurs jours avant le délai. Même si la Loi Martiale n'as pas été officiellement déclarée la situation de fait en a tout l'air. Il y a une présence généralisée des militaires, les magasins sont fermés et le déplacement des citoyens sévèrement contrôlés. Le stress auquel la population est soumise est immense et de nombreux cas de suicides ont été reportés, faits d'autant plus significatifs que le suicide est un des péchés les plus graves dans la religion bouddhiste. Les premières condamnations dont ont fait l'objet les manifestants tibétains ne sont pas plus rassurants. C'est le 29 Avril 2008 que les premiers jugements de 30 tibétains sont tombés: trois d'entres eux ont été condamnés à l'emprisonnement à vie, sept à prison ferme de plus de 15 ans et le reste à prison ferme entre 3 et 14 ans. Leurs seul crime a été d'exercer le droit à la liberté d'opinion et d'expression. De plus nombreux cas de torture ont aussi été signalés et plusieurs de prisonnier libérés sont morts suite aux blessures qui leur ont été infligées pendant leur détention. Malgré le fait que plus de 6500 personnes ont été arrêtées depuis le mois de mars et plus de 200 personnes sont mortes selon l'ACT, les manifestations ont continué encore pendant le mois d'Aout (voir Carte des protestations depuis le 10 Mars 2008 en Annexes). * 49 Le 27 Mars, le 9 April et le 3 Juin. |
|