CHAPITRE 6 :
PERFORMANCE DES MARCHES DE NOIX DE CAJOU
La performance du marché intervient comme le moyen
d'appréciation de l'efficacité économique de la structure
et du comportement du marché (Issaka et al., 2003). Elle exprime les
résultats économiques liés au fonctionnement du
marché. Diverses approches sont généralement
utilisées pour analyser la performance d'un marché:
ü L'étude du degré de stabilité des
marchés.
ü L'étude de l'intégration
des marchés.
ü L'étude des marges commerciales des
acteurs.
Les deux premières approches ne seront pas
utilisées dans la présente étude pour plusieurs raisons.
Ø La durée très courte de l'étude
n'a pas permis de collecter les prix quotidiens afin d'étudier la
stabilité du marché des noix de cajou.
Ø De plus, une étude d'intégration des
marchés par la méthode de corrélation (Lutz, 1994 ;
sodjinou et al. 2003) ou par le modèle de l'indice de connexion
dynamique de Timmer et de Ravallion (Ahohounkpanzon, 1992 ;
Houédjoklounon, 2001 ; Issaka et al. 2003), aurait
été possible si les marchés des noix de cajou, même
informels, avaient été périodiques avec un marché
central. Donc l'analyse de l'intégration des marchés n'est pas
abordée dans la présente étude.
L'analyse de la performance du marché des noix de cajou
est faite à travers l'étude des marges brutes et commerciales.
Selon les économistes libéraux, un système de
commercialisation est parfaitement performant lorsque les différences de
prix dans l'espace et dans le temps sont égales aux coûts de
transaction. Cela implique que la marge de commercialisation dans un
système commercial efficace entre deux marchés M1 et M2, doit
être égale aux frais de transaction (le transport, le stockage, la
manutention etc....) auxquelles s'ajoute la rémunération de
l'intermédiaire qui doit correspondre à un taux par rapport au
prix d'achat. Mais il est difficile d'apprécier cette
rémunération dans la mesure où il n'y a pas une norme
fixée ou préétablie (Issaka et al. 2003).
6.1. Evaluation de
l'efficacité du système de commercialisation des noix de
cajou
Cette partie concerne l'analyse des coûts et des marges
commerciales des différents acteurs impliqués dans la
commercialisation des noix de cajou. L'objectif de cette analyse est
d'apprécier d'une part les différents coûts et marges entre
les acteurs tant au niveau départemental que communal, et de fournir
d'autre part, une indication sur les niveaux de rentabilité de la
commercialisation des noix de cajou à travers le ratio marge sur
coût.
6.1.1 Analyse des
coûts de commercialisation
On définit par coûts de commercialisation,
l'ensemble constitué par les coûts de préparation, les
coûts de conditionnement, les coûts de manutention, les
coûts de transport, les coûts d'investissements, les pertes, les
commissions, les redevances, les paiements officieux, etc. (Agaï,
2004).
L'analyse des coûts liés à la
commercialisation des noix de cajou a été faite entre les
catégories d'acteurs de la même commune et entre acteurs des deux
départements, grâce à ANOVA à un faceur. Cette
analyse de variance est fondée sur deux grands principes (Astous, 2000)
:
· Plus les différences entre les moyennes des
groupes observés dans l'échantillon sont grandes, plus il y a de
chances que la relation existe dans la population ;
· Plus la dispersion (la variance) dans les groupes est
petite plus les différences entre les moyennes sont réelles dans
la population.
Les tableaux 6.1. à 6.6. présentent les
différents résultats.
Tableau 6.1. : Comparaison de moyennes des coûts
entre acteurs des deux départements
Sources de variation
|
Somme des carrés
|
ddl
|
Moyenne des carrés
|
Valeur de F
|
Signification
|
Inter-groupes
|
4347.026
|
3
|
1449.009
|
3.173
|
0.026**
|
Intra-groupes
|
71249.73
|
156
|
456.729
|
Total
|
75596.75
|
159
|
|
** =significatif à 5%
Source: Enquête, 2007
L'analyse du tableau 6.1. montre qu'il y a une
différence significative au seuil de 5% entre les coûts
supportés par les différents acteurs des deux
départements. L'analyse de la plus petite différence
significative est résumée dans le tableau 6.2.
Tableau 6.2. : Analyse de la plus petite
différence significative des coûts de commercialisation entre
acteurs des deux départements
Catégorie1
|
Catégorie2
|
Différence de moyenne (1- 2)
|
Erreur standard
|
Signification
|
Producteur
|
Collecteur
|
11.62
|
5.85
|
0.194
|
Producteur
|
Courtiers
|
10.62
|
3.85
|
0.03**
|
Producteur
|
Grossiste
|
2.56
|
6.19
|
0.976
|
Courtiers
|
Collecteur
|
1
|
6.14
|
0.998
|
Grossiste
|
Collecteur
|
9.06
|
7.82
|
0.653
|
Grossiste
|
Courtiers
|
8.06
|
6.46
|
0.597
|
** =significatif à 5%
Source : Enquête, 2007
L'analyse du tableau 6.2. montre que la différence
entre les coûts supportés par les producteurs et ceux
supportés par les courtiers est significative au seuil de 5%. Par
contre, lorsqu'on considère les coûts moyens supportés par
les producteurs et ceux supportés par les collecteurs et grossistes
respectivement, la différence n'est pas statistiquement significative
même au seuil de 5%. De plus, la différence de moyenne entre
producteurs et courtiers, d'une part, et entre producteurs et collecteurs
d'autre part, est plus élevée que celle entre producteurs et
grossistes. On pourrait donc dire que les producteurs et les grossistes
supportent les coûts les plus élevés dans les deux
départements.
Tableau 6.3. : Comparaison des coûts de
commercialisation des acteurs de Kouandé.
Sources de variation
|
Somme des carrés
|
ddl
|
Moyenne des carrés
|
Valeur de F
|
Signification
|
Inter-groupes
|
7341.571
|
3
|
2447.19
|
4.48
|
0.006***
|
Intra-groupes
|
41510.32
|
76
|
546.188
|
Total
|
48851.89
|
79
|
|
***= significatif à 1%
Source : Enquête, 2006
L'analyse du tableau 6.3. montre qu'il existe une
différence hautement significative au seuil de 1% entre les coûts
supportés par les différents acteurs du marché des noix
de cajou à Kouandé. On pourrait dire que les coûts
engagés par les différents acteurs dans les activités de
production ou de commercialisation varient d'une catégorie à
l'autre. L'analyse de la plus petite différence significative est
résumée dans le tableau 6.4.
Tableau 6.4. : Analyse de la plus petite
différence significative des coûts de commercialisation des
acteurs de Kouandé.
Catégorie1
|
Catégorie2
|
Différence de moyenne (1-2)
|
Erreur standard
|
Signification
|
Producteur
|
Collecteur
|
20.695
|
10.2316
|
0.189
|
Producteur
|
Courtiers
|
20.0207
|
5.821
|
0.005***
|
Producteur
|
Grossiste
|
9.7214
|
9.5751
|
0.741
|
Courtiers
|
Collecteur
|
0.6743
|
10.548
|
1
|
Grossiste
|
Collecteur
|
10.9736
|
13.0022
|
0.833
|
Grossiste
|
Courtiers
|
10.2993
|
9.9124
|
0.727
|
*** = significatif à 1%
Source: Enquête, 2007
L'analyse du tableau 6.4. montre que la différence
entre les coûts supportés par les producteurs et ceux
supportés par les courtiers est hautement significative au seuil de 1%.
Par contre, lorsqu'on considère les coûts moyens supportés
par les producteurs et ceux supportés par les collecteurs et grossistes
respectivement, la différence n'est pas statistiquement significative
même au seuil de 5%. De plus, la différence de moyenne entre
producteurs et courtiers, d'une part, et entre producteurs et collecteurs
d'autre part, est plus élevée que celle entre producteurs et
grossistes. On pourrait aussi dire que les producteurs et les grossistes
supportent les coûts les plus élevés dans la commune de
Kouandé.
Tableau 6.5. : Comparaison des coûts de
commercialisation des acteurs de Djougou
Sources de variation
|
Somme des carrés
|
ddl
|
Moyenne des carrés
|
Valeur de F
|
Signification
|
Inter-groupes
|
2115.45
|
3
|
705.15
|
4.13
|
0.009***
|
Intra-groupes
|
12974.96
|
76
|
170.723
|
Total
|
15090.41
|
79
|
|
*** =significatif à 1%
Source : Enquête, 2007
L'analyse du tableau 6.5. montre qu'il y a une
différence hautement significative entre les coûts
supportés par les différents acteurs de la commune de Djougou au
seuil de 1%. L'analyse de la plus petite différence significative est
résumée dans le tableau 6.6.
Tableau 6.6. : Analyse de la plus petite
différence significative des coûts de commercialisation des
acteurs de Djougou
Catégorie1
|
Catégorie2
|
Différence de moyenne (1-2)
|
Erreur standard
|
Signification
|
Producteur
|
Collecteur
|
2.927
|
4.6196
|
0.921
|
Producteur
|
Courtiers
|
0.9861
|
3.4192
|
0.992
|
Producteur
|
Grossiste
|
-17.1786
|
5.3532
|
0.01**
|
Courtiers
|
Collecteur
|
1.9409
|
4.9492
|
0.979
|
Grossiste
|
Collecteur
|
20.1056
|
6.439
|
0.013**
|
Grossiste
|
Courtiers
|
18.1647
|
5.6402
|
0.01***
|
** =significatif à 5%
Source: Enquête, 2007
L'analyse du tableau 6.6. montre que dans la commune de
Djougou, la différence entre les coûts supportés par les
grossistes et ceux supportés par les producteurs, collecteurs et
courtiers respectivement, est significative au seuil de 5%. Par contre,
lorsqu'on considère les coûts moyens supportés par les
producteurs et ceux supportés par les collecteurs et courtiers, la
différence n'est pas statistiquement significative au seuil de 5%. En
outre, la différence de moyenne entre les grossistes et les autres
acteurs, est plus élevée que toutes les autres différences
de moyenne. On pourrait donc tirer la conclusion selon laquelle les grossistes
de la commune de Djougou supportent les coûts les plus
élevés.
Il ressort de ces différentes analyses que les
coûts engagés par les différents acteurs dans les
activités de production ou de commercialisation varient d'une
catégorie à l'autre tant au niveau départemental que
communal. Dans les deux départements, les grossistes supportent les
coûts les plus élevés avec une moyenne de
48.7F/kg par grossiste alors que les collecteurs et les courtiers
supportent les coûts les plus bas avec respectivement des moyennes de
29.64F/kg et 30.64F/kg. Ces coûts élevés des grossistes
sont dus au fait que les grossistes assurent toutes les fonctions de la
commercialisation (stockage, transport, rémunération des
collecteurs, taxe, achats d'instruments de mesure, de sacs de jute etc...). Les
coûts bas observés au niveau des collecteurs et les courtiers
s'expliquent par le fait que les dépenses qu'ils engagent dans leurs
activités sont essentiellement constituées des frais de
transport. Or, les collecteurs sont en général des habitants des
zones de production et leur activité ne dépasse pas le cadre de
leur arrondissement ou village. Quant aux courtiers, ils rassemblent les noix
au niveau des centres de concentration où passent les
« patrons » avec les camions pour le ramassage. Tout ceci
limite certains coûts liés au transport au niveau de ces deux
catégories d'acteurs. S'agissant des producteurs, bien qu'ils
bénéficient de la vente à domicile, les coûts qu'ils
supportent sont relativement plus élevés que ceux
supportés par les collecteurs et les courtiers. La moyenne est de
41.26F/kg par producteur. Cela est dû à la prise en compte des
coûts de production dans les calculs effectués.
Une comparaison des moyennes des coûts entre les acteurs
des deux communes révèle que les producteurs de Djougou
supportent des coûts plus bas avec une moyenne de 33.15 F/kg par
producteur alors que les collecteurs, courtiers et grossistes de cette commune
supportent les coûts les plus élevés que ceux de la commune
de Kouandé.
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