La procédure d'immatriculation des terrains en droit camerounais selon le decret n?°2005/481 du 16 decembre( Télécharger le fichier original )par Simplice GOUAMBE Université de yaoundé II-SOA - DEA droit privé 2006 |
2. L'insuffisance quantitative207. S'agissant de la quantité, c'est-à-dire du nombre du personnel, il est regrettable de constater qu'avant la réforme de 2005, la dernière grande vague de recrutement du personnel de ce ministère remontait en 1987 ; soit deux décennies. Le personnel est vieillissant et ceux qui vont en retraite ne sont pas remplacés. Ce n'est qu'après la réforme de 2005 que le Ministre a organisé des concours pour certains postes tels celui du conservateur foncier112(*) et du cadastre. 208. En dehors de ce manquement quantitatif et qualificatif du personnel, on assiste à des vastes mouvements du personnel, ce qui entraîne des conséquences au niveau de la procédure d'obtention du titre foncier sur la première dépendance du domaine national. Le personnel nouvellement affecté doit passer quelques jours pour s'imprégner des différents dossiers qui se trouvent sur sa table. Paragraphe II : Les irrégularités commises au cours de la procédure d'immatriculation directe.209. En dehors des insuffisances rencontrées dans la mise en application de la procédure d'immatriculation, des irrégularités viennent également entachées celle-ci. Ces irrégularités peuvent être commises soit par les services intervenants à la procédure (A); soit par le bénéficiaire de ces services (B). A. La détermination des irrégularités210. Loin de dresser une liste exhaustive des irrégularités qui sont commises au cours de la procédure d'immatriculation, nous nous tablerons sur celles qui sont récurrentes lors de la procédure. Il serait important de séparer les irrégularités commises par l'administration (1) de celles commises par le bénéficiaire (2). 1- Les irrégularités commises par l'administration211. Les irrégularités commises par l'administration sont généralement assimilées à la faute de l'administration. Le législateur de 2005 n'a pas précisé ce qu'il faut considérer comme faute de l'administration. Il a seulement posé un principe général à l'article 2 alinéa 3. Cet article dispose : « Le Ministre chargé des affaires foncières, en cas de faute de l'administration, résultant d'une irrégularité commise au cours de la procédure d'obtention du titre foncier, et au vu des actes authentiques produits, procéder au retrait du titre foncier irrégulièrement délivré ». 212. Il nous revient la lourde tâche de rechercher les différentes irrégularités commises par l'administration. L'examen de la jurisprudence nous sera d'un grand apport dans cette immense besogne. Il s'agit des irrégularités commises par les différents services intervenant dans la procédure d'immatriculation directe. Ainsi, peut être considérée comme irrégularité, la faute du service du cadastre dans l'opération de bornage des terrains. Dans l'affaire SILAPA Jean, la chambre administrative de la haute juridiction avait jugé que le géomètre avait procédé à un bornage fantaisiste. Elle a décidé que « le plan de construction des bornes dressé le 14 Août 1990 à partir du procès-verbal irrégulier de construction des bornes du 24 Janvier 1990 reste sans valeur juridique, puisque n'ayant pas été dressé comme l'exige la loi, c'est-à-dire en présence des riverains...il suffit pour s'en convaincre qu'aucun riverain n'a signé sur la place à eux réservée »113(*). 213. Il se dégage de cette décision que, peut être considéré comme une irrégularité, le fait pour l'administration d'immatriculer au profit d'un requérant une superficie supérieure à celle qui avait été sollicitée dans la réquisition d'immatriculation114(*) ; le fait que la commission consultative n'est entendue qu'une seule partie lors de règlement des incidents et dans ce cas en violation du principe du contradictoire115(*). Plus encore, la chambre administrative de la Cour Suprême a reproché à la commission consultative d'avoir commis une faute parce qu'elle n'avait pas tenu compte des oppositions soulevées au cours de la procédure d'immatriculation directe116(*). 214. Est également constitutive d'irrégularité, l'avis émis par la commission consultative illégalement constituée. Dans l'affaire BEYISSA Adolphe Mazarin, la commission consultative était constituée des membres ordinaires et en plus du chef supérieur membre non prévu par les textes117(*) ; le fait d'accorder le titre foncier alors que le requérant n'avait pas personnellement mis le terrain en valeur118(*). 215. La chambre administrative de la Cour Suprême sanctionne les décisions ordonnant l'établissement des titres fonciers alors que les procès-verbaux qui ont servi de base à de telles décisions sont complaisants. Dans une espèce, elle a décidé que « attendu que non seulement dans le procès-verbal de la commission consultative qui a servi de base à la décision attaquée, ni les personnes entendues, ni les conclusions de la commission ne se préoccupent de rechercher ceux qui occupent ou exploitent le domaine litigieux, conformément aux exigences de la loi ; mais encore la décision du Ministre de l'urbanisme et de l'habitat allègue de la « simple mise en valeur » sans qu'il soit démontré que cette expression équivaille à l'occupation ou à l'exploitation. Autrement dit, l'administration n'a pas donné aux faits, la qualification juridique acquise par la loi »119(*). 216. En effet, la mise en valeur doit être l'oeuvre du requérant ou bien qu'il a bénéficié d'un transfert des droits coutumiers. Il ne peut en aucun cas solliciter l'immatriculation d'un terrain mis en valeur par un tiers. La mise en valeur doit être effective. Autrement dit, la terre objet de l'immatriculation, doit porter des constructions, des cultures et des plantations. L'avis de la commission consultative ou la décision du Ministre doit être motivé, car l'absence de motivation constitue une faute. Le juge administratif a admis que les actes administratifs à portée individuelle doivent être motivés en fait et en droit.120(*) 217. En somme, une irrégularité provient chaque fois que l'administration ne respecte pas les dispositions régissant la procédure d'immatriculation . Ainsi, l'inobservation des délais fixés pour l'exécution d'une tâche constitue une irrégularité. L'examen de la jurisprudence révèle que de plus en plus, les irrégularités sont notoires au cours de la procédure d'immatriculation. Le constat est fait dans la quasi-totalité des services qui interviennent dans celle-ci. S'il est récurrent que les différentes irrégularités sont commises par l'administration, le requérant peut également contribuer à celles-ci. * 112 Ce qu'il faut retenir de ce concours, c'est qu'il était organisé uniquement à l'attention des responsables des affaires foncières ayant une certaine expérience. Aucune candidature externe n'était recevable. * 113 Jgt N°26 du 20 janvier 2000 affaire SILAPA Jean contre Dame WANCHI née TCHAKODEU Marie. * 114 CS/CA jgt N°30 du 26 mars 1992 affaire MVENG NDI née MENDOUGA Marguerite contre Etat du Cameroun (MINUH). * 115 CS/CA jgt N°25 du 30 décembre 1999 affaire NJOH PHILIBERT et EKOKE KOUM contre Etat du Cameroun (MINUH). * 116 CS/CA jgt N°78 du 31 juillet affaire DJINOU TCHALE André contre Etat du Cameroun (MINUH). * 117 CS/CA jgt N°29 du 25 mars 1982 affaire BEYISSA Adolphe Mazarin contre Etat du Cameroun. * 118 CS/CA jgt N°06 du 27 août 1992 affaire EYANGO Martin contre Etat du Cameroun. * 119 CS/CA jgt N°60/99-2000(recours N°738/99-2000 du 09 mars affaire POHOKAM Suzanne contre Etat du Cameroun . * 120 CS/CA jgt du 27 avril 1995 affaire ITAMBE HAKO Prosper contre Etat du Cameroun. |
|