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Apport d'une thérapie cognitive dans la prise en charge d'un patient présentant un trouble de personnalité état-limite (borderline)

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par Michel Naudet
Paris V Descartes - Diplôme Universitaire de Méthodologie en Psychothérapie - Sociothérapie 2003
  

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7 Cas clinique

Comme je l'ai indiqué dans l'introduction, le portrait que je présente a été synthétisé en fonction d'observations effectuées sur plusieurs années. Il s'efforce de restituer les faits principaux et les traits de personnalité de madame F, tels que rapportés par les témoignages. Il comporte également des réflexions que madame F. a formulées au cours de nos entretiens (conversations).

7.1 Anamnèse et extraits de propos

Mme F. a 50 ans. Elle voudrait consulter un psychiatre psychothérapeute pour un épisode dépressif qui, contrairement à l'habitude ne semble pas vouloir se résoudre spontanément et s'installe dans la durée, induisant une idéation suicidaire élaborée. Cet état est apparu après sa séparation d'avec son dernier compagnon et le déménagement qui s'est ensuivi. Elle est demandeuse d'un traitement anxiolytique pour combattre une insomnie de plus en plus sévère et des crises d'anxiété concernant son avenir.

Issue d'une famille bourgeoise, Mme F. a été élevée dans une banlieue huppée de la région parisienne. Très bonne élève et enfant obéissante, elle grandit sans problème entre une mère soumise à son mari et un père juste mais très exigeant, qui a construit sa vie et sa réussite sociale comme une bataille contre le hasard, la paresse et les communistes. Elle est assez solitaire, mais les quelques amis qu'elle rencontre au cours de sa scolarité comptent beaucoup pour elle. Il semble qu'elle n'ait jamais eu de petit copain au cours de l'adolescence, et ses parents n'ont même jamais remarqué un quelconque changement de comportement chez leur fille au cours de cette période. Mme F. ne parle jamais de son enfance ni de son adolescence à quiconque et ne possède aucune photo de cette époque.

C'est pour suivre sa meilleure copine qu'elle intègre une grande école de gestion où elle va rencontrer son futur mari. Elle a alors 22 ans. C. est un homme ambitieux, très extraverti et intelligent qui a une grande influence sur elle. C'est son premier flirt et son premier amant. Malgré l'opposition de son père qui voit en ce garçon un être violent et perturbé, Mme F. l'épouse.

Cette union va durer 7 ans ; très vite les disputes éclatent, la jeune femme se plaint régulièrement à ses parents. Suite à des violences physiques, Mme F. appelle son père qui lui fait quitter le domicile conjugal, lui loue un appartement et l'aide à trouver un emploi. Le divorce est rapidement prononcé et elle n'aura plus jamais aucun contact avec son ancien mari.

D'après son père, son caractère a complètement changé. « Il l'a rendue folle » dira-t-il plus tard à son second gendre. « Elle était gentille et gaie, la voici tendue, anxieuse, méfiante, agressive en permanence ».

Très vite Mme F. a quelques liaisons socialement flatteuses mais éphémères, puis rencontre son second mari, un collègue de travail. A priori, ils n'ont aucun point commun, si ce n'est le plaisir de la bonne table. Il est le contraire du premier, également très perturbé affectivement par une mère abusive, mais d'une très d'une grande gentillesse. Dès leur première soirée en amoureux, elle ne le laissera plus rentrer chez lui, organisera l'installation commune dans un appartement plus grand et le poussera sans ménagement au mariage en quelques mois.

Cette union durera sept ans et verra la naissance d'une petite fille à laquelle Mme F. s'intéressera finalement bien peu 5(*) et qui nouera une relation très forte avec son père. Le couple est irréel, incapable de se structurer financièrement et de faire vraiment connaissance. Mme F. dépense beaucoup et a des goûts de luxe sans rapport avec leurs salaires. Très vite, elle a ses propres amis qu'elle voit seule, tout en empêchant cependant son mari de sortir de son côté ; s'il tente d'aller au cinéma ou de voir ses anciens copains, elle lui interdit, et si ses arguments sont insuffisants, elle tombe malade avant son départ (en général violents vomissements ou malaises), le contraignant à renoncer à son projet. Elle bâtit des mensonges abracadabrants et dénués de toute vraisemblance pour masquer de mystérieuses absences qui se prolongent parfois plusieurs jours.

Pratiquement toujours de mauvaise humeur et extrêmement pessimiste envers l'avenir sauf lorsqu'elle a un peu bu au moment des repas, elle rumine sans arrêt les mêmes reproches à l'encontre de son mari : ne pas savoir s'occuper d'elle, être un minable, avoir un caractère faible et lui gâcher la vie. Elle peut changer d'humeur en quelques secondes, passer de la séduction presque enfantine à la colère noire, au gré d'une réflexion qu'elle juge blessante ou de chaussures qui lui font mal en marchant. Elle peut également avoir de grandes colères, même contre les objets : très maladroite, n'arrivant pas un jour à initialiser un rouleau de papier aluminium, elle a griffé le métal si profondément que le produit entier fut inutilisable.

Sa grande priorité est le ménage, ou plutôt la propreté et surtout la peur des microbes. Si elle est contrainte de recevoir chez elle quelqu'un qui garde ses chaussures, elle passe immédiatement l'aspirateur dans toute la maison dès son départ. Après une dispute ou une contrariété, Mme F. se saisit d'une éponge et lave abondamment la table de cuisine et les portes de placards pendant de longues minutes. La vue des meubles trempés et brillants semble lui apporter un certain apaisement. Elle trouve ce comportement parfaitement normal et l'avoue même en souriant.

Sept années après leur rencontre, son mari finit par quitter le domicile conjugal avec sa fille, las des disputes et vexations continuelles, des plaintes excessives de sa femme et de sa mauvaise foi.

Mme F. ne s'oppose pas à leur départ ; bien au contraire, elle facilite même le déménagement, car depuis quelques semaines elle a fait la connaissance d'un nouvel amant qui semble lui apporter tout ce qu'elle cherche. Mais cette liaison ne durera pas, le nouvel élu s'avérant également très décevant, sans culture et sans humour, et surtout incapable de quitter sa femme sur le champ pour venir vivre avec elle.

Elle multiplie alors les liaisons sans lendemain, réclamant à ses compagnons des comportements qu'ils ne sont pas prêts à adopter. Par exemple, si elle passe un week-end chez un amant, elle exige que ce dernier soit complètement à son écoute. Pas question, sous peine de conflit violent, qu'il aille faire ses courses au super marché, qu'il lave sa voiture ou qu'il accepte une invitation à prendre l'apéritif chez le voisin.

C'est dans ce contexte qu'elle va rencontrer son troisième compagnon et vivre avec lui pour une nouvelle période de sept ans.

Elle a alors 44 ans. Une fois encore, D. est le contraire du mari précédent. De 10 ans son aîné, extraverti et tonitruant, il la séduit par sa situation brillante, son comportement social décontracté et incisif, sa prise en charge autoritaire. Le rêve de D., lui-même divorcé deux fois dans la fureur et le bruit, est d'avoir une épouse brillante mais soumise, qui accepte ses 2 enfants en bas âge à bras ouverts lorsqu'il en a la garde, organise de grands déjeuners de famille et reçoive ses nombreux amis à l'improviste et sans mot dire.

Avant même qu'ils ne vivent ensemble, la relation est tumultueuse. Sans lui dire ouvertement, elle voudrait qu'il cesse de voir ses enfants dont il a la garde un week-end sur deux et pendant les vacances. Au début, elle essaye de faire des efforts, reçoit les enfants en faisant semblant de sourire, mais très vite la situation devient intenable ; à l'approche des week-ends « avec les enfants », l'ambiance est très tendue et les disputes violentes se multiplient. Ayant conservé son propre appartement, elle s'en va donc juste avant leur arrivée, « leur abandonnant la place ». En état de fureur, elle saisira depuis chez elle les moindres prétextes pour essayer de leur gâcher la vie à distance par des coups de fil intempestifs, des menaces insidieuses, des réflexions à visée anxiogène, etc.

Malgré ce climat, ils s'installent ensemble au bout de quelques mois dans un confortable appartement. La plainte de Mme F. à l'égard de son compagnon est immédiate, constante et violente. Elle voudrait qu'il parte, qu'il lui fiche la paix ! Mais quand il s'absente 2 jours en Allemagne pour son travail, elle dit qu'il aurait quand même pu l'emmener, que ça cache sûrement quelque chose, une autre femme sans doute ; et elle passe ces deux jours à se morfondre dans la solitude et la rage anticipatrice des reproches qu'elle lui fera à son retour.

Elle affirme que lorsque les enfants viennent à la maison, ils se moquent d'elle sans arrêt, font exprès de salir et la détestent. Le plus jeune, qui a 8 ans, est déjà accusé d'utiliser des stratégies d'adulte pour la pousser à bout. Très vite, elle refusera définitivement de les voir et s'enfuira chez son ancien mari compréhensif tous les week-ends où son compagnon recevra ses enfants.

Bien sûr, il n'est pas question de partir en vacances avec eux dans la maison que D. loue chaque année au bord de la mer (« ce ne serait pas des vacances, je serais juste bonne à faire le ménage et la cuisine sans recevoir aucun remerciement »), mais elle se plaint vivement d'être abandonnée.

Lorsque son compagnon annonce à l'avance à Mme F. qu'il va passer une soirée chez des vieux amis (qu'elle ne veut plus voir ni recevoir), elle tombe malade quelques heures avant son départ (violente migraine, vomissements, malaises), l'obligeant alors à annuler l'invitation malgré la grande colère qu'il éprouve en se sentant manipulé. D. a vite compris et ne la tient plus au courant de ses intentions qu'au dernier moment. « Il me met toujours devant le fait accompli, je n'en peux plus, vivement qu'il débarrasse le plancher ! ».

Tout en exigeant de D. un comportement de plus en plus protecteur et attentif, sa conduite envers lui devient celle d'une ennemie : suite à un redressement fiscal, il a des soucis d'argent, elle lui refuse toute aide et l'oblige à vendre ses meubles. Elle lui annonce qu'elle va le quitter, qu'elle sera plus heureuse toute seule, lui donne même la date de son départ. Il la croit sur parole et s'organise de son côté, trouve une location. Mme F. est abasourdie, il va l'abandonner après l'avoir rendue malheureuse pendant sept ans ! A sa manière, c'est-à-dire en prenant beaucoup de précautions pour ne pas sembler en fait le supplier de rester, elle lui demande, arguments matériels et financiers à l'appui, de renoncer à son projet et de maintenir la vie commune. Il s'exécute sans joie ni illusion, mais finira tout de même par partir quelques mois plus tard.

Mme F. se rapproche alors de son second mari (le père de sa fille), avec qui elle a renoué de très bonnes relations une fois leur divorce prononcé. Elle l'incite à venir habiter près de chez elle et l'aide même financièrement à réaliser ce projet. « Comme ça nous serons seuls ni l'un ni l'autre tout en conservant notre liberté ». Mais si M. fait allusion dans la conversation à une femme qu'il côtoie, le visage de Mme F. s'assombrit et elle fait des efforts pour ne pas émettre de réflexion désobligeante dans le registre de la jalousie.

Mme F. ne se remet pas du départ de son dernier compagnon, elle estime qu'il lui a volé sept ans de sa vie pour finalement l'abandonner. Elle ne s'attribue aucune responsabilité dans cette rupture et l'accable de reproches dès qu'elle en a l'occasion. Elle est également déçue des relations actuelles avec son ancien mari, car elles ne répondent pas à son attente. Ils ne forment pas un vrai couple au sens biblique du terme, et il a changé, il ne se laisse plus manipuler aussi facilement qu'avant. De plus, très timide, il ne lui offre pas du tout le même étayage que son compagnon dans les relations sociales. Elle essaye de rencontrer de nouveaux amants, mais n'a plus confiance en elle : elle se sent amaigrie, vieillie, sans charme et sans avenir. Les rares amis qu'elle conservent font des efforts pour la supporter, mais ne prennent jamais l'initiative de la voir ou de l'inviter, de qui contribue encore plus à sa désinsertion sociale.

Parallèlement à ces 20 ans de relations tumultueuses et très décevantes avec les hommes (« je n'ai pas eu de chance, je n'ai pas rencontré les bonnes personnes, je rêvais de luxe et de volupté et je n'ai croisé que des minables »), Mme F. a vécu une carrière professionnelle également très décevante.

Après des études supérieures brillantes, elle a travaillé dans une dizaine de sociétés à des postes de cadre. Au début, elle suscitait toujours l'enthousiasme de ses responsables : elle paraissait vive, intelligente, femme d'action, mais très vite elle décevait car elle n'arrivait pas à atteindre les buts ambitieux qu'elle avait annoncé à la Direction lors de son embauche et qui avaient emporté leur adhésion enthousiaste.

Pourtant, au départ, elle était sincère, elle avait réellement l'illusion d'y parvenir facilement. Mais dès les premières difficultés et les premiers conflits, inévitables lorsqu'on dirige un projet de changement dans une entreprise, elle pratiquait des stratégies d'évitement et de contournement, voire de mauvaise foi agressive, qui déconcertaient ses interlocuteurs et les rendaient hostiles. Pour cette raison, elle a été licenciée de nombreuses fois, mais toujours avec de confortables indemnités car il était difficile de lui faire de vrais reproches officiels et consensuels tant son attitude était différente d'un interlocuteur à l'autre.

L'illusion concernant ses capacités professionnelles constitue un facteur stable de son caractère. En voici un exemple: un jour, son compagnon lui demande de l'aide pour traduire en Français un contrat de deux pages rédigé en Américain. Elle accepte spontanément et avec un certain enthousiasme : « je n'en ai pas pour longtemps, une heure tout au plus ; je te préviens, je traduis à la volée, comme j'en ai l'habitude, en conservant l'esprit du texte, mais sans coller aux mots, car les américains sont lourds ».

Elle revient quatre heures plus tard, le visage maussade et fatigué : « J'ai perdu mon après-midi. Quand je pense que j'aurais pu me reposer au lieu de m'enquiquiner à rendre service... Je suis vraiment une poire ! je n'y arrive pas, ce texte est difficile à traduire et complètement débile ; j'ai juste fait le début et un peu la fin, je ne suis plus bilingue, ce qui est normal, car avant de te connaître je voyageais beaucoup, mais maintenant on ne va jamais plus nulle part ».

Voici quelques extraits synthétiques de nos conversations :

« Vous me demandez comment s'exprime mon état dépressif... Je n'ai plus de goût à rien, le meilleur moment de la journée, c'est quand je vais me coucher, je ne suis bien qu'au lit. Avec un somnifère. Je me demande pourquoi je me lève d'ailleurs, je n'ai plus de travail. Mais j'assure quand même mes tâches quotidiennes, je suis très scrupuleuse avec le ménage, la poussière vient vite ici avec l'avenue. J'ai du mal à dormir aussi, car les voisins font beaucoup de bruit la nuit. Celle du dessus marche avec ses talons le soir sur le carrelage, ça fait `tictictictic', à croire qu'elle veut me rendre folle. A côté, c'est un américain, il parle très fort au téléphone, on entend tout, il ne se gêne pas, si j'étais un homme il n'oserait pas faire ça, j'irais le faire taire. A gauche, c'est une vieille dame, elle reçoit sans arrêt, ses invités partent à deux heures du matin en claquant les portes et en rigolant, ce n'est visiblement pas leur problème si les gens essayent de dormir. Et au fond du couloir, c'est une famille avec deux enfants ; ils laissent exprès leur porte ouverte pour que les gosses s'amusent à faire du bruit dans le couloir.

Non, je ne me sens pas vraiment fatiguée bien qu'on ne m'ait pas emmenée en vacances depuis très longtemps. Je ne vois plus personne en fait, les gens passent leur temps à me raconter leurs problèmes et se fichent bien des miens. Si je n'avais pas ma fille, je sais bien que j'en terminerais là, c'est beaucoup trop long la vie.

En fait, ça dépend des jours, mais globalement je souffre tout le temps, ça ne va jamais bien, même dans les bons moments, c'est une menace permanente, je pense que je finirai Alzheimer comme ma mère. En fait, ce qui m'angoisse, c'est que je change sans arrêt d'état d'esprit envers ma situation. A certains moments, je me dis que ce n'est pas si grave, que j'ai de l'argent devant moi et que je retrouverai bien un job, j'en ai toujours trouvé quand ça devenait urgent. Mais l'heure d'après, c'est la vraie panique, je me vois toute seule dans une chambre sordide, abandonnée de tous et surtout de ma fille qui me manque.

Et depuis quelques années, même quand je suis de bonne humeur et que ça va bien, au lieu d'en profiter je me dis que dans une heure ça n'ira plus et ça m'enlève tout espoir. Si je bois un verre ça va mieux, mais après j'ai la migraine ».

« Je ne me suis pas assez occupée de ma fille, je le regrette, je l'ai trop laissée à son père et maintenant je suis angoissée pour elle, j'ai l'impression qu'elle n'est pas prête pour affronter la vie malgré ses 19 ans. Quand je lui téléphone, on dirait que je la dérange, elle répond par "oui" ou par "non", je ne l'appelle plus, j'attends qu'elle le fasse, mais en fait elle ne m'appelle que si elle a besoin de quelque chose. J'imagine que je l'enquiquine car je lui demande si elle travaille ses examens, si elle compte réussir cette année, si elle fait bien son ménage... J'estime que j'ai quand même le droit de poser ces questions, vu que c'est moi qui paye son loyer.

Son père lui, il s'en fiche qu'elle réussisse, il l'a élevée sans trop se soucier de sa réussite sociale, jamais une expo ni un musée, le sport toujours le sport ! Alors forcément, il ne lui pose aucune question sur les études, ça fâche mademoiselle, mais en attendant c'est moi qui fais les chèques ! Non, elle n'a jamais redoublé, elle a des résultats corrects, mais elle pourrait faire beaucoup mieux, elle n'a pas eu le bon exemple. Je pense qu'elle a tout faux et je lui dis, elle continue à fréquenter ses amis d'enfance, des minables qui n'ont ni argent ni ambitions, au lieu d'essayer de se faire des relations qui l'aideraient à réussir. Ca vous paraît cynique mais c'est comme ça la vie. Je ne comprend vraiment pas ce qu'elle a dans la tête, elle ne me parle jamais de projets d'avenir, ça doit être le vide, j'imagine qu'elle se dit simplement que tant que Maman paiera, ce sera la belle vie ».

« Je ne sais pas trop pourquoi je vous raconte tout cela, ce sont mes problèmes et je ne demande rien à personne, je le dis toujours, on ne peut compter que sur soi-même et en fait c'est surtout une question de chance».

« Je m'aperçois depuis quelques années que j'ai tout raté : ma vie professionnelle, ma vie privée et surtout ma fille qui ne m'aime pas. En fait, je n'ai pas eu la chance de rencontrer les gens qui auraient pu me procurer une vie agréable. Tous les gens avec qui j'ai vécu, sans exception, ne savaient que rabâcher la même chose : « tu es fâchée contre la terre entière, tu es une menteuse, tu ne sais pas ce que tu veux, tu n'es jamais contente, essaye un peu d'être franche, pose des questions directes au lieu de faire des allusions incompréhensibles... ». J'ai tout fait pour eux et ils n'ont jamais rien fait pour moi. Dans ma carrière professionnelle, la même chose : j'aurais pu, comme certaines de mes amies, rencontrer des pointures avec qui créer des alliances, je n'ai croisé que des minus qui me jalousaient et prenaient un malin plaisir à me faire échouer ».

« Si mon dernier compagnon est resté avec moi sept ans, c'était surtout pour mon argent et avoir une bobonne à la maison qui lui lave son linge et accueille ses amis. C'était un peu mal me connaître, car je n'ai jamais rien fait de tout cela. Et pour me remercier il m'a abandonnée».

* 5 un fait significatif : quand Mme F. dresse occasionnellement le couvert, sa fille se voit machinalement et systématiquement attribuer jusqu'à l'âge de 8 ou 9 ans une petite fourchette à huîtres qu'elle utilisait étant bébé et que son père remplace discrètement par des couverts normaux.

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"Il ne faut pas de tout pour faire un monde. Il faut du bonheur et rien d'autre"   Paul Eluard