Evangélisation et Promotion Humaine( Télécharger le fichier original )par Bienvenu KONE GRAND SEMINAIRE SAINT AUGUSTIN DE BAMAKO - Licence Canonique 2009 |
III-3 LA VALEUR INESTIMABLE DE TOUT HOMME AUX YEUX DE DIEU« Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t'aime » (Is 43,4) Comme pour les autres créatures, la création de l'homme commence par une Parole de Dieu, mais celle-ci est différente des précédentes. Il ne s'agit pas en effet d'un ordre suivi immédiatement de sa réalisation, « Que la lumière soit', et la lumière fut » (Gn 1,3), mais d'une Parole exprimant un désir. Dieu semble nous révéler ainsi son rêve, son intention la plus profonde : l'homme. De plus, le verbe « faire » n'intervient pas ici lors de sa création, mais seulement le verbe « créer, bara' », un verbe qui dans toute la Bible n'a que Dieu pour sujet. Et il apparaît trois fois. Or le chiffre « trois » est souvent un chiffre symbolique qui renvoie à Dieu en tant qu'il agit. Dieu a donc agi pour l'homme avec une intensité toute particulière, comme il ne l'avait encore jamais fait jusqu'à présent. On pourrait dire dans un langage beaucoup moins théologique, qu'Il a déployé pour l'être humain, tous ses talents de Créateur, et l'homme est apparu dans l'existence. Le texte nous fait attester que son origine de l'homme demeure un Mystère que Dieu seul connaît. Enfin, le même terme arrive pour la septième fois dans le texte en signe de plénitude, Dieu déclare une fois l'homme créé : « Et voici : cela était très bon ». Or, « tob », « bon » en hébreu, peut aussi se traduire par « bien », « beau ». Nous le retrouverons plus tard dans « l'arbre de la connaissance du bien et du mal » (Gn 2,9). Comme le souligne André Boulet, « littéralement, il faudrait traduire par « Quel bien ! »... Le terme employé pour signifier cette bonté ne se réfère pas d'abord à une catégorie esthétique, mais à une catégorie éthique : « la Création est fondamentalement bonne, et, parce que bonne, elle est belle »54(*). Et Dieu regarde l'homme au coeur de la création comme un bien profond. Puis, juste après l'avoir créé, Dieu va le bénir, comme il l'avait fait auparavant pour les premiers êtres vivants qui étaient apparus dans la mer et dans le ciel ; c'est là une révélation indirecte de son amour pour la vie. Cette bénédiction est la grâce que Dieu donne à tout homme pour pouvoir pleinement s'accomplir. Elle l'accompagne tout au long de sa vie et ne demande qu'à être accueillie par des coeurs de bonne volonté. Nous percevons déjà ici l'importance de la relation « Créateur-créature », nous y reviendrons. Cette grâce devrait nous inciter à avoir confiance dans la vie, dans l'avenir, car elle sous-entend que Dieu accompagne l'histoire de chacun, l'histoire de l'humanité, pour lui permettre de déboucher sur cet « à venir » qui nous attend tous, par-delà notre mort sur cette terre. Pour les animaux, nous avions : Dieu les bénit en disant : « Soyez féconds, multipliez... », tandis que pour l'homme nous avons : Dieu les bénit et Dieu leur dit : «Soyez féconds, multipliez ». La différence est minime mais elle est capitale : l'homme est la seule créature à laquelle Dieu adresse la Parole. L'être humain a donc été créé pour vivre en relation avec Dieu, le Créateur, pour l'écouter, le comprendre et lui répondre. Tel est l'un des fondements ultimes de l'existence humaine. Enfin, l'homme est la seule créature à « être à l'image et ressemblance de Dieu ». Il existe donc un lien unique entre l'homme et Dieu, à tel point qu'en regardant l'homme, il est possible de découvrir quelque chose du Mystère de Dieu, et ce n'est qu'en regardant Dieu que l'on comprendra toujours davantage « qui » est l'homme. Le second récit de la création permet de préciser ce que signifie : « être à l'image et ressemblance de Dieu ». En effet, dans ce second récit, l'homme est la seule créature vivante que Dieu suscite dans l'existence en soufflant en lui : « Le Seigneur Dieu modela l'homme avec la glaise du sol, il insuffla dans ses narines un souffle de vie et l'homme devint un être vivant » (Gn 2,7). Or, le souffle dans la Bible renvoie à l'Esprit de Dieu, à l'Esprit Saint. Et, St Jean nous dit que « Dieu est Esprit » (Jn 4,24). Le mystère de la vie de chaque être humain s'enracine donc dans la Présence de Dieu, au plus profond de son être d'une réalité qui est de l'ordre de « l'Esprit Saint », c'est-à-dire de l'ordre de ce que Dieu est en Lui-même. Comme l'écrit le P. Ceslas SPCQ, « être l'image » c'est « participer l'être » et la vie du « Dieu vivant »55(*). L'idée de « souffle » est en effet inséparable de celle de « vie », le souffle manifestant la présence de la vie. Recevoir le souffle de Dieu, c'est donc recevoir la vie de Dieu. L'Esprit de Dieu est ainsi avant tout une réalité de l'ordre de la vie : « c'est l'Esprit qui vivifie » nous dit Jésus (Jn 6,63 ; cf. Ga 5,25). Ainsi, le Mystère de la vie de tout homme s'enracine dans le Mystère de sa participation à l'Esprit de Dieu, c'est-à-dire à la Vie de Dieu. Et c'est dans cette perspective que la notion « d'image et de ressemblance » prend toute son intensité. Tout être humain est invité à reconnaître en Dieu la source originaire de sa propre existence comme de celle d'autrui. C'est en remontant à ce Principe suprême que peut être perçue la valeur inconditionnelle de l'être humain et de tout être humain. * 54 1 BOULET A., Création et rédemption (Chambray 1995) p. 39. Sr JEANNE D'ARC, Chemins à travers la Bible p. 75: " Toute chose est faite par Dieu belle et bonne. Il faut souligner l'optimisme foncier de cette perspective". * 55 2 SPICQ C., "eijkwvn ", Lexique théologique du Nouveau Testament (Paris 1991) p. 429-431. |
|